Portrait
Propos
recueillis par Gérard Henry
« L’homme,
une petite vibration
dans l’environnement »
Virgile Simon Bertrand a été cette année lauréat du concours photo du Hong Kong Foreign Correspondent’s Club. Son portrait de l’évêque Joseph Zen a été couronné meilleure photo de l’année. Un portrait où l’évêque, homme de caractère et de forte opinion, apparaît dans l’environnement dépouillé d’une cage d’escalier. La photo a un caractère monacal. Les lignes sobres de l’escalier évoquent le cloître et purifient le visage de l’évêque, homme connu pour ne pas mâcher ses mots dans sa défense de la dignité et des libertés humaines. Virgile Simon Bertrand a réalisé là l’un de ses meilleurs portraits.
Ce photographe français, qui pratique couramment la photographie d’architecture et celle du portrait, son domaine d’affection, est arrivé à Hong Kong en 1999 et y fera en juin sa première exposition individuelle. Son parcours est atypique. Élève en Arts Appliqués de l’École Boulle, école réputée pour sa grande ouverture d’esprit et ses savoir-faire inégalés, il découvrit la photographie à 17 ans et les plaisirs du tirage en chambre noire. Il rentre ensuite dans une école supérieure d’arts graphiques mais y trouve la pratique trop réductrice. C’est sans doute un voyage au Cambodge en 1992, alors qu’il traversait le Vietnam et le Cambodge à bicyclette, qui influera sur le cours de sa vie. Se trouvant dans une situation dangereuse et difficile, « une situation de totale vulnérabilité », dit-il, il réalisera combien l’existence est fragile. Une seconde expérience au Kosovo comme assistant d’un photographe de Sygma durant l’hiver 92-93 le fera s’interroger sur l’éthique du photo journalisme, le dilemme de nombreux photographes de presse : la fabrication de fausses images ou du moins d’images peu représentatives de la réalité prédominante afin de satisfaire le public.
Il abandonne son école d’Arts graphiques pour se consacrer davantage à la photo et réussit le concours d’admission en septembre 93 de l’École nationale de photographie d’ Arles. Mais nouvelle déception : « Contrairement à mes espoirs cela s’est mal passé, c’était d’une autre façon, une ambiance sectaire, avec un mépris total de la photo utilitaire, qui est pourtant la meilleure école technique et surtout, le prétexte à rencontrer des gens. On peut effectivement être totalement nombriliste, mais cela entraîne un hermétisme qui fait que l’on se tarit, on s’assèche, on ne s’enrichit pas. On doit ouvrir les portes et non les fermer ». Il quitte donc Arles et revient à Paris ou il travaille à l’opéra et a ses entrées pour réaliser des portraits de danseurs : « J’étais une sorte de parasite de l’opéra, mais j’avais des relations privilégiées avec les danseurs, une expérience enthousiasmante avec des moments très forts ». Cette expérience lui vaut un contrat à New York pour une troupe américaine.
Un stage chez Magnum en été 93 lui donnera un aperçu sur le vif du reportage. Il développera les films du photographe d’origine iranienne Abbas, et sera à même de voir les planches contact de reportages complets comme celui de Koudelka sur le Printemps de Prague en 68. « C’est, dit-il, pas plus de 30 films d’une densité extraordinaire ! On sentait qu’il était dans le vif du sujet ».
Après un service militaire obligatoire passé à Évry au Service photo des armées, il quitte la France en 1997 et s’installe à Taïwan où il avait autrefois voyagé, et où il entreprend une pratique commerciale de la photo, notamment d’architecture. Le marché de Taïwan étant limité, les copyrights non respectés, il vole vers Hong Kong en 99 où il pratique toujours la photo d’architecture mais aussi son domaine de prédilection, le portrait. Il fera dans le Post Magazine chaque semaine un portait d’une personnalité interviewée par Fionnuala McHugh, rubrique malheureusement disparue avec la refonte récente du magazine.
Le portrait reste son champ d’intérêt premier. « C’est le prétexte d’une rencontre, parfois de 5 à 10 minutes, parfois plus, et l’on essaie d’en sortir une image significative par rapport à la personne et à l’image qu’on en a. Je ne crois pas que l’on capture, comme on le dit lorsque l’on parle de Nadar, l’essence de la personne, mais une ambiance que l’on croit la plus juste par rapport à cette personne. D’ailleurs
Nadar en photographiant les gens se photographiait lui-même et ainsi faisait passer quelque chose. C’est souvent dans des compositions extrêmement rudimentaires mais basées sur une espèce de flottement, d’indécision, dans un temps suspendu, non défini que les gens se révèlent et que l’image devient significative.
« Pour le cadre, j’essaie de trouver quelque chose basé sur le peu d’information que j’ai sur la personne et fantasme sur la façon dont il faudrait la photographier. Il faut trouver une sorte de colonne vertébrale et bâtir dessus, un concept simple qui ira dans le sens de la personne sans être caricatural. Ensuite il reste la part de magie, l’espace entre les deux personnes qui se font face. D’une façon générale, les gens les plus intéressants à photographier sont ceux qui ne sont pas habitués. Les chefs d’entreprises par exemple, connaissent leur meilleur profil, et il est difficile de casser cela. Les autres sont inquiets, timides, il faut les mettre à l’aise, mais ne pas les emprisonner. C’est en discutant d’eux, de soi, des autres que les choses se décantent. Souvent le premier film ne veut rien dire, c’est une façon de s’assurer que tout est en place. On sent ensuite que les choses viennent et la photo qui est bonne quand elle est faite.
« Cartier Bresson parle justement d’”éjaculation” à propos de la photo : “tension, désir, explosion et ramollissement”. C’est très excitant. Je me souviens d’une photo à l’Opéra de Paris où tout était tension, adéquation, entre la danseuse et moi, le photographe. La prise de vue avait une grande signification car c’était juste avant qu’elle ne devienne danseuse étoile.
« A chaque portrait c’est le même mécanisme, mais ce n’est point toujours facile d’arriver à la même concentration d’énergie. Il y a cette petite vibration de la personne dans l’environnement, puis la composition de l’espace, un rapport de proportions, de tensions difficile à définir mais qui donne valeur et subtilité au travail. Il est intéressant de jouer avec l’espace, de savoir si l’on met la personne, grosse ou petite, à droite ou à gauche. Le désir de faire une image compte plus que l’image elle-même. »
Virgile se réfère à un ouvrage de Louis Kahn sur la construction des escaliers pour définir la photographie. L’escalier est un espace
de transition, où de façon presque imperceptible, on change d’espace physique et mental. On peut l’imaginer avec au milieu un palier, où un paysage se dévoilerait à la personne qui monte, comme un désir, ou une aspiration à la réflexion, au repos. Ce n’est donc point un hasard si le portrait de l’évêque Joseph Zen est pris ainsi dans un escalier.
« Je pense, précise Virgile, que cette métaphore de l’escalier est significative pour la photographie, on va d’un point à l’autre, mais la destination n’est pas importante, c’est le trajet qui l’est. Sans compter que la photographie, c’est aussi une architecture au sens strict, on définit son cadre en choisissant une composition particulière, et par là on crée un nouvel espace, un peu comme dans la calligraphie chinoise, le point noir sur une page à une intensité variable en fonction de sa position, sa qualité, sa texture. »
L’exposition montrera un travail en cours et en vrac, une quinzaine d’images non encore connues, « Un brouillon », dit-il avec modestie avant d’ajouter : « Mon rêve serait de faire une photographie totalement immatérielle, une photo qui flotterait au milieu de la pièce et qui réagirait de façon incontrôlable aux émotions, la matérialisation de ce que l’on éprouve lorsque l’on est face à quelqu’un et que l’on essaie de le photographier. » |
人物介紹
〝人:環境中一股輕微的震動〞
Virgile Simon Bertrand是今年外國記者會舉辦的攝影比賽之得獎者。他拍攝香港紅衣主教陳日君的一幀照片獲選為本年度的最佳照片。相中,這位性格剛烈的主教置身於一處空洞的梯級間。這照片散發著強烈的禁慾意味。線條簡樸的梯級不但使人聯想到隱修的生活,更淨化了這位向來為爭取民主自由而敢怒敢言的主教之臉容。這照片可說是Virgile Simon Bertrand的最佳作品之一。
這位以拍攝建築物及人像為主的法籍攝影師於一九九九年抵達香港,他將於今年六月舉辦首次的個展。其人生歷程並不尋常。他曾就讀於以開放式教學及優質教育而聞名的布洛應用藝術學校,十七歲開始對攝影及黑房沖曬產生興趣。之後他進入平面設計高等藝術學院攻讀,但發覺平面設計的表現手法過於狹隘。一九九二年,他騎腳踏車橫過越南及柬浦寨,毫無疑問,就是這一趟柬浦寨之旅影響了他的一生。他當時面對了一次驚險的情況,〝一個完全無助的境況〞他這樣憶述道。這一次經歷讓他認識到生命的脆弱。第二次的影響發生於一九九二至九三年的冬天,當時他在Sygma攝影社工作,擔任一位攝影師的助手到科索沃工作,這次的經歷令他反思攝影記者的操守問題,以及無數攝影記者面對的左右為難:為了滿足普羅大眾而製造一些虛假的影像或至少,捕捉一些並不真正能夠反映主要事實的鏡頭。
他放棄了平面設計的學業而專心於攝影,一九九三年九月成功考取了阿爾勒國立攝影學院。但又再一次感到失望:〝與我期待的正好相反,一切都不如意,那兒教導的是另一種攝影方法,氣氛十分偏狹,還完全漠視實用攝影。然而,這所已經是最好的專業學校,特別是能提供不少結識業內人士的機會。事實上,我們可以完全自我主義,自以為是的,但這一來卻會導自閉關自守,結果是會逐漸枯竭、乾涸,再也得不到滋潤。我們必須持開放的態度而不是閉關自守。〞因此,他離開阿爾勒,重回巴黎在歌劇院工作,為了方便拍攝舞蹈員,他能自由出入歌劇院的各處地方:〝我就像歌劇院內的寄生蟲,但我與舞蹈員之間建立了一種特殊的關係,雖然有時會出現很激烈的場面,但那是一種令人興奮的體驗。〞這經驗為他贏得了一紙到紐約為一個美國舞蹈團工作的合約。
一九九三年,他到密林攝影社實習讓他有機會實地體驗採訪工作。他替著名伊朗裔攝影師Abbas沖灑菲林,後來更有機會看到名攝影師Koudelka於一九六八年拍攝布拉格春天的整套相版。他表示:〝那只不過是不足三十張的菲林,但卻極之充實感人!讓人覺得他正正置身於拍攝主題最尖銳的部份。〞
在軍隊的攝影組服兵役後,他於一九九七年離開法國到之前曾經遊歷過的台灣居住,在那兒他從事商業攝影的工作,主要是拍攝建築物。可惜台灣在這方面的市場有限, 加上當地人並不尊重知識產權,他終於在一九九九年飛抵香港,在這裡他繼續從事建築攝影的工作,還有他所偏愛的領域:人像攝影。他每星期為南華早報的星期天副刊中的一個專欄提供一張名人肖像,這個專欄很可惜已因為雜誌的改組而取消了。
人像仍然是他最鍾愛的創作範圍。〝這是與人接觸的機會,有時由五至十分鐘,有時或者需時較長,我嘗試在這段時間來拍攝一張與這人物,以及別人對他的印象有相對性意義的照片。當人們談及十九世紀法國著名攝影家Nadar時說他的照片能捕捉人的神髓,但我可不相信這一點,我們能捕捉的只是一種與該人相比之下更為準確的氣氛而已。此外,Nadar在拍攝其他人的時候也自我拍攝,並藉此來表達出另一種東西。很多時,人在一些極之雛形,但基於某種飄忽、猶豫不決之類別的構圖上更能突顯出來,影像亦變得更有意義。
〝至於背景,我嘗試找一些基於我對該人所知有限的資料有相關關係的東西,然後再幻想一下應用何種手法拍攝這個人。必須先找到某種支柱,然後由那兒開始著手建造,一種簡單,感覺符合這個人但又不會把他醜化的概念。跟著就只剩下最神秘的部份了,兩個人面對面。一般來說,最好的拍攝對像是那些不習慣被人拍攝的人。舉例說,那些企業主管早已知道自己的那個角度最好,是很難改變他們的想法。有些人會擔憂、害羞,需要讓他們感到自在,但又不能令他們有被困的感覺。那就要先與他們聊天,讓他們談談自己,談談我和別人,慢慢就會上軌道。通常第一卷菲林是沒有用的,只是用來確保一切就緒的方法 。之後會感到創意不斷湧現,拍了之後便知到哪一張是想要的照片。
〝Cartier Bresson很貼切地以‵高潮′來形容相片:‵緊張、慾望、爆發和虛脫軟化′。的確是很刺激的。我還記得一張在巴黎歌劇院拍攝的照片,當時,身為攝影師的我與那位舞蹈員之間充滿緊張、一致的氣氛。那一張照片有很重要的意義,原因是剛好在她被委任為首席舞星之前拍攝的。
〝每一張照片都是經過同樣的過程,但並不是每一次都能同樣集中力量。因為人在不同環境中會產生輕微的震動,加上空間的結構,比例、張力之間的關係難以界定,但這一切皆讓創作更有價值,更微妙。能利用空間,不管那人高矮肥瘦都知道應把他安置在左邊或右邊是很有趣的。事實上,製造影像的過程重要過影像本身。〞
Virgile是參考了Louis Khan的一本有關梯級結構的作品來為他這張照片下定義。梯級是一處過渡性的地方,置身那裡的人在幾乎不自覺的情況下轉換空間和改變思想。因此,陳日君主教的這張照片拍攝於梯級間並不是偶然發生的。
Virgile強調說:〝我覺得樓梯這個隱喻很能表達這照片的意義,人由一點到另外一點,但終點並不重要,重要的是所走過的路和中途所發生的事。更何況,嚴格來說攝影也是一種建築形式,我們選擇一種獨特的佈局來明確界定它的全景,從而製造出一個全新的空間,這有點兒像中國書法,紙上的黑點是根據字的位置、性質和組織而有著不同的密度。〞
這次展覽共展出十五幀照片,有正在進行中的計劃,也有一些是未經整理,從未示人的作品。他謙虛地補充道:〝都是一些草圖。我的夢想是拍攝一些完全非物質的照片,一種能懸浮於室內半空,能對情感產生不受控制的反應的照片,是要把人面對一個想要拍攝的人時所感受到的情緒物質化。〞
Exposition de Virgile Simon Bertrand
1/7/03 – 1/8/03, Baasheer Design Books
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