Art brut
Texte : Gérard Henry
Art brut à Macao
Art brut ? Art naïf ? Art cru ? Art singulier ? Art hors les normes ? Création franche ? Les noms ne manquent pas pour qualifier les créations artistiques de gens qui n'ont apparemment reçu aucune formation artistique et s'expriment ainsi de façon spontanée. L'artiste français Jean Dubuffet qui s'était beaucoup intéressé à cet art l'avait qualifié d'« art brut ». Les termes importent peu et sont plus affaire de critiques et d'historiens d'art. Les œuvres par contre sont souvent étonnantes car elles sont intimement liées aux expériences d'individus isolés qui expriment de façon directe leurs sentiments, leurs angoisses, peines, joies ou souffrances et y trouvent une délivrance. Ce que Dubuffet reconnaissait véritablement comme art brut est en fait rare. C'est l'expression la plupart du temps de personnes souffrant de troubles mentaux, enfermés dans un monde où elles ne peuvent communiquer et qui s'expriment de façon souvent obsessionnelle par la peinture ou le dessin. Le musée d'Art brut de Lausanne qui abrite la collection de Dubuffet rassemble un grand nombre d'œuvres de ce genre. Le visiter est une expérience saisissante, parfois effrayante : on se trouve entouré de dessins délirants qui défient toutes les lois de la logique, de milliers d'yeux grands ouverts qui interrogent le vide. A côté de cela, il y a tous les illuminés ou géniaux bricoleurs tel que le Facteur Cheval qui, à l'aide d'une imagination débordante se construisent leur propre monde.
L'exposition « Natural Expression of Raw Art » présentée en décembre 2003 par la jeune commissaire Anthea Fan (Wan Jen) au Musée d'art de Macao n'avait point cet aspect terrifiant mais montrait le parcours original et parfois mouvementé d'individus pour certains en marge ou à l'extérieur des cercles artistiques.
Ainsi Hung Tung (1920-1996), devenu figure légendaire à Taïwan, fut élevé par sa grand-mère dans la pauvreté et ne reçut aucune éducation. Il mena une vie laborieuse et miséreuse jusqu'à 50 ans où il sembla soudainement possédé des esprits et implora sa femme de lui acheter pinceaux, papier et couleurs. Il se mit alors à peindre frénétiquement. S'il n'avait pas reçu d'éducation, il était cependant plongé depuis l'enfance dans l'atmosphère des fêtes religieuses du village organisées autour du temple taoïste riche de sculptures, d'images et de couleurs. Son œuvre montre une imagination étonnante et infinie. Inspirée de symboles religieux et folkloriques, elle se développe à l'intérieur d'elle-même en multiples détails, sorte de jungle tout en ramifications de fleurs, de feuilles et de têtes. Après une période de gloire, Hung Tung refusa d'ouvrir sa porte à quiconque, sombra dans la dépression à la mort de sa femme et vécut en reclus. Il refusa toute sa vie de vendre la moindre de ses peintures. On le retrouva mort chez lui en 1987.
Autre Taïwanais, celui-ci plus dans le style du Facteur Cheval, Li Yuan (1913-1991), ancien fermier à la retraite dans la soixantaine, s'intéressa un jour à une charrette pleine de galets aux formes sans doute inspirantes et, sourd aux moqueries de ses proches, se mit à sculpter des animaux taillés dans la masse aux formes rudes et parfois grotesques avec des visages à mi-chemin entre l'homme et l'animal. Ses sculptures expressionnistes dégagent une force primitive assez crue. Sa célébrité fut telle qu'un parc-musée de 3 hectares lui fut consacré à Taiwan en 1987. Il mourut en 1991 d'un cancer.
Le troisième Taïwanais, Hou Chun Wui (1960 -) a une vie tourmentée. Après l'armée, il fut interné en hôpital psychiatrique dans les années 80, et peignit abondamment un univers cauchemardesque de personnages hurlants et de paysages tourmentés. Sorti de l'hôpital, il cessa de peindre mais se consacre maintenant à la photographie avec succès.
Macao a aussi un curieux personnage : Lei Chan Fu (1963 -) est venu de Birmanie, a vécu dans un village de Chine du sud entouré de forêts et s'est retrouvé dans les rues de Macao. Sans techniques de quelque sorte, il poursuit sur la toile les images qui le hantent, et par ce biais, selon Anthea Fan qui l'a rencontré « recherche un art pur qui puisse représenter la scène que Dieu lui souffle et atteindre à de nouvelles hauteurs spirituelles »,
Deux artistes hongkongais dans cette expo, Chu Hing Wah et Ha Bik Chuen, sont à mon avis, en dehors de cette catégorie d'art brut. Si Chu Hing Wah (1935 -) est souvent libellé d'artiste naïf, cela est dû à une apparente simplicité de la forme. Le contenu en est pourtant sophistiqué. Chu a passé sa vie à travailler comme infirmier psychiatrique à l'hôpital de Castle Peak et s'est mis à la peinture très tard. Il a observé et vécu pendant des années ce monde de l'isolement, de la solitude, de l'enfermement et, avec une extrême sensibilité, a réussi à pleinement l'exprimer dans ses œuvres, par l'attitude des corps, des mains désœuvrées, des têtes inclinées. Le décor terriblement nu, triste et vide de ses scènes où les corps se diluent donnent ce sentiment de perte d'identité personnelle des personnages.
Ha Bik Chuen (1925 -) ou affectueusement « oncle Ha », est un artiste ien connu de Hong Kong. Autodidacte, il fait montre à 78 ans, d'une énergie exceptionnelle. Toujours sur la brèche, il expérimente sans cesse de nouveaux matériaux. Peintre, graveur, sculpteur, il affectionne particulièrement les matériaux de récupération – bois, ferrailles, vieilles chaussures, casseroles - qu'il utilise avec humour et ingéniosité. Curieux de tout il est au fait des derniers développements de l'art moderne, ce que l'on ne soupçonne pas quand on le rencontre. Il montre dans ses sculptures un petit côté surréaliste et dadaïste.
Les autres artistes ont une expérience différente. Liao Dong Mei (1974-), née dans une famille lettrée de Pékin, a souffert d'une suffocation à la naissance qui a engendré un dommage cérébral. Lee Hoi Chong (1970 -) souffre de paralysie cérébrale. Tous les deux sont incapables de se déplacer et de parler. Avec des efforts patients ils réussissent à s'exprimer par la peinture et ont construit chacun une œuvre personnelle.
Le seul peintre peut-être consciemment naïf de l'exposition est Memie Kwok, un médecin travaillant au centre de santé de l'Université chinoise de Hong Kong dont l'œuvre à la fois décorative et naïve inclut des motifs décoratifs.
Comme toujours le musée de Macao avec son équipe jeune, extrêmement dynamique et accueillante offre dans ces locaux une série d'expositions intéressantes. C'est une halte indispensable quand on fait le voyage à Macao.
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原創藝術
澳門原創藝術展
原生藝術?樸素藝術?原創藝術?獨特藝術?正規外藝術?自由創作?這一切全都是用來形容那些從未受過專業美術訓練的人以自然手法表達的藝術創作。法國藝術家杜布菲對這類藝術特別感興趣,並稱之為〝原生藝術〞。其實甚麼名稱都並不重要,只有藝評家和藝術史學家對它們比較操心。相反,那些作品很多時都能引起注意,理由是它們與創作人的個人經驗有直接關係,這些創作人以直接的手法表達他們的感情、恐懼、痛苦、喜樂或悲傷,並從創作中獲得釋放。被杜布菲認為真正是〝原生藝術〞的其實很少。多數是一些精神受到困擾人的表達方式,他們被困在自己的世界內不懂得與人溝通,很多時都不能自制地藉繪畫或圖案來表達心中的想法。位於瑞士洛桑的原生藝術博物館內收藏的杜布菲珍藏中包括了大量這類的作品。參觀這批珍藏會令人感到目不暇給,但偶然也會大吃一驚:發現自己被一些超乎一切常理和全無邏輯可言的圖畫所包圍,千百隻著張開的眼睛在注視著虛無。而旁邊是各式各樣的幻想者或喜歡做手工的的人,他們借助無窮的想象力來建造一個屬於他們自己的世界。
由香港藝術地圖執行總監樊婉貞策劃,二零零三年十二月在澳門藝術博物館舉辦的〝原創啟示——另類藝術展〞並沒有這嚇人的一面,但卻顯示出每位創作人各自與別不同,但往往是畸嶇不平的創作生涯,他們有部份在藝術圈的邊緣或甚至在藝術圈以外獨自進行創作。
洪通(1920-1996)亦因此成為了台灣一位傳奇的人物,他在清貧的家庭中由祖母撫養成人,從未接受過學校教育。自小勤勞工作生活艱苦,一直到五十歲那年,突然像著了魔一樣,苦苦要求妻子讓他買紙、筆和顏料。他開始日以繼夜地作畫。雖然他從未接受教育,但卻自小受故鄉的道教及廟祠內精美的雕紋和細膩的工筆畫所薰陶。他的作品顯示一種出人意表和無窮的想象力。他那些靈感來自宗教和民間傳統符號的作品畫內有畫,非常精細,充滿分枝,如森林般有花有葉,也有人頭。他曾經歷了一段光輝的日子,但後來因妻子去逝而深受打激,自此閉鎖家中,拒絕與外界接觸。他一生堅持不賣一張畫。一九八七年被發現死在家中。
另一位台灣人林淵(1913-1991)是一位六十多歲已退休的農夫,有日,因一木頭車的溪石引起雕刻興趣,不理會旁人的取笑,開始用石頭雕刻一些形狀粗曠,有時面目介乎半人半獸的動物雕像。他那些帶表現主義的雕像散發出一種非常自然的原始力量。一九八七年,台灣更有一座佔地三公頃,特別為擺放他的作品而興建的藝術公園落成。他一九九一年因胰臟癌逝世。
第三位台灣人侯聰慧(1950-)的人生備受衝擊。八十年代,他在服兵役不久後因精神病而被關進精神病院接受治療,其間繪畫的畫作很多都是描寫一個如惡夢般絕望和備受壓抑的世界。離開精神病院後他放棄繪畫,致力於攝影創作並取得驚人的成就。
澳門也有一位特別的人物:來自緬甸的李振富(1963-)曾在中國南方的農村生活,最後輾轉來到了澳門的街頭上。並未接受任何技巧訓練的他在畫布上再現那些終日困擾他的影象,據曾經與他接觸的樊婉貞所言:他是藉此〝尋找一種足以表達神向他啟示的景物之純藝術,從而提昇靈性的境界。〞
這展覽中的兩位香港藝術家朱興華和夏碧泉在我看來並不屬於原生藝術的類別。雖然朱興華常被稱為樸素藝術家,因為他筆下的形狀看來簡單樸素。其作品的內容其實是深奧複雜的。朱氏一生在青山精神病院任職護士,很後期才開始繪畫。經過多年來的仔細觀察並在當中生活,他透過作品以細膩和極富人情味的手法表達了精神病院這個孤單寂漠和禁閉的世界。那些軀體在極之灰暗空洞的背景襯托下漸漸淡化,讓人感覺這些人物逐漸失去了個人的身份。
夏碧泉(1925-)或人稱〝夏爺〞是香港有名的藝術家。他無師自通,年屆七十六歲仍然活力充沛。永遠活躍於第一線的他不停地探索新的創作材料。繪畫、版畫、雕塑,他特別喜歡利用身邊隨時取得的物料——木材、廢鐵、舊鞋—— 並以巧妙幽默的手法進行創作。更令人感到驚奇的是他精通於現代藝術的最新發展狀況,這一點是任何遇見他的人均想象不到的。他的雕塑作品帶有一點兒超現實和達達派的風格。
其他的參展藝術家各有不同的經歷。廖東梅(1974-)來自北京的一個書香世家,在出生時因缺氧而令腦部受到損害。李漢昌(1970-)自小患有大腦性癱瘓。他們二人同樣行動不便以及無法以言語表達。經過長時間的耐心訓練後成功以繪畫作為表達的媒介,並各自建立了個人的風格。
展覽中唯一一位刻意樸素的畫家可能是郭園,他是香港中文大學保健醫療中心的醫生,其作品在樸素之中也帶有裝飾性的圖案。
一如以往, 在澳門藝術博物館工作的一批充滿活力、熱情的年輕工作人員為藝術博物館策劃了一系列精彩的展覽。到澳門旅遊千萬不要錯過到那裡一遊。
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