Salon de livre
Texte : Eric Sacher

Hong Kong - Paris : l'esprit du livre de salon en salon

Après le salon du livre de Paris où trois auteurs hongkongais (Leung Ping-Kwan, Wong Pok et Tao Ran) avaient été invités, la France a participé pour la première fois au salon du livre de Hong Kong en invitant deux auteurs, Pierrette Fleutiaux pour le roman et David B. pour la Bande Dessinée, et l'éditeur Michel Parfenov qui représentait Actes Sud. Cette présence s'inscrit dans l'esprit des années croisées France-Chine et constitue le lancement d'une nouvelle politique du livre à Hong Kong.

« De plus en plus de Chinois s'éloignent de la lecture » telle est la conclusion d'un rapport du Chinese Publishing Science Institute présentée par la presse hongkongaise. La priorité donnée à la vie professionnelle, l'omniprésence d'Internet et des outils multimédia semblent être les causes principales de cette désaffection. Néanmoins, comme le rappelle à juste titre le South China Morning Post, la lecture reste en Chine une activité importante, ancrée dans son histoire et dans sa culture. La littérature attire encore une majorité de Chinois tandis que plus de deux tiers des Américains l'ont déjà désertée. Les salons qui sont consacrés au livre dans le monde sont une petite indication de la santé de l'Ecrit dans nos sociétés contemporaines.

Qu'en est-il pour Hong Kong ? Cette ville que l'on décrit souvent comme futile et ne s'intéressant qu'à la mode et aux centres commerciaux dispose pourtant d'un salon du livre. Et quel salon du livre ! Au cœur de la baie de Hong Kong, au sein du HongKong Convention & Exhibition Centre, là même où ont eu lieu les cérémonies de la rétrocession de Hong Kong en 1997, trois étages entiers sont consacrés au livre (30 000 m2 !) avec des centaines d'exposants de Hong Kong mais également de Chine continentale. Dès l'ouverture du salon, ces grands espaces, loin d'être déserts, sont remplis par une foule de personnes qui acceptent de faire la queue pendant plus d'une demi-heure, voire une heure certains jours, juste pour avoir le droit de découvrir les nouvelles parutions ! En cinq jours, le salon du livre de Hong Kong a attiré plus de 500 000 visiteurs (503 396 pour être précis !). Le plus surprenant pour un Occidental reste la jeunesse de ce lectorat, jeunesse que la démographie propre à Hong Kong ne saurait expliquer entièrement. Oui, le livre attire encore la jeunesse à Hong Kong.

Certes, le salon du livre de Hong Kong est sensiblement différent de ceux d'Europe occidentale. Plus axé vers la distribution commerciale, la littérature de jeunesse et la bande dessinée, on y trouve un peu de tout, jusqu'à une collection impressionnante de stands de gadgets en tout genre ou de représentants de mouvements religieux divers et variés. Mais les organisateurs ont essayé cette année de corriger cet aspect commercial tant décrié par les intellectuels locaux. Dans cette entreprise, la France les a beaucoup aidés en constituant l'événement-phare du village international inauguré cette année.

Disposant d'un stand, le consulat général de France, la Librairie Parenthèses et l'Alliance Française se sont associés à cette occasion pour présenter les nouvelles publications françaises au public hongkongais. La presse chinoise a particulièrement salué cette présence française, ce qui a donné au stand et aux auteurs français une large publicité.

Fait du hasard ou signe des temps, les deux auteurs invités cette année, Pierrette Fleutiaux et David B. avaient un point commun : l'introspection, le retour sur soi et ses rapports avec autrui.

Pierrette Fleutiaux n'était pas inconnue en Chine puisqu'elle avait obtenu le prix du meilleur roman étranger à Pékin pour son livre Des phrases courtes ma Chérie publié chez Actes Sud et qui a été traduit en Chine continentale. Il s'agit d'un livre très personnel, touchant, sur une mère en fin de vie que l'on accompagne, que l'on aime et que l'on craint encore. Cette réflexion sur la vieillesse est également une réflexion sur la complexité des relations mère-fille, complexité qui ne s'estompe pas avec le temps, bien au contraire.

« Toujours elle gagne sur moi, sa vieillesse est plus vieille, domine la mienne, ma vieillesse à moi ne peut exister, je suis le soutien de son déclin, mais elle est le miroir du mien et il me faut porter à la fois mon vieillissement présent et mon vieillissement futur, ainsi, malgré les apparences, quand sa peine est double, la mienne est quadruple. (…) Je voudrais que ma mère se tourne vers moi et qu'elle m'écoute. Je voudrais que son vieillissement lui soit léger, qu'il ne lui serve qu'à compatir au mien et l'adoucir. « Moi, je suis déjà vieille, cela ne fait rien, mais toi, fais attention, ma chérie, oui je vois les changements de ton corps de femme, ne t'en fais pas, regarde, moi qui te précède d'une génération, ça ne va pas si mal… » (…) Je voudrais que ma mère vieillisse sans vieillir. »

Ce n'est certes pas le premier livre de Pierrette Fleutiaux qui avait déjà reçu le Prix Femina en 1990 pour son roman Nous sommes éternels, ce n'est pas non plus le premier livre qu'elle écrit à la première personne du singulier. En fait, ses romans et ses nouvelles sont empreints de sensations et de paysages qu'elle a elle-même connus. Ayant vécu longtemps à New York où elle a enseigné au lycée français, cette ville apparaît en toile de fond de plusieurs de ses livres, comme dans cette Histoire d'un tableau où le « Je » du personnage principal erre dans la ville, piégée par un tableau qui la dévore de l'intérieur, jusqu'à se substituer à sa propre histoire.

Mais son dernier roman se distingue des précédents par une intimité que Pierrette Fleutiaux n'avait jusqu'à présent jamais dévoilée. « Des phrases courtes, ma chérie » est l'histoire de son propre vécu et de sa souffrance, même si, au fur et à mesure, derrière le « je » se profile une expérience dans laquelle certains lecteurs pourront reconnaître l'histoire de leur propre famille.

« Je ne crois pas que la femme dont je parle soit ma mère, ni que le « je » que j'emploie soit moi. Au fur et à mesure que j'écris, une configuration prend corps, plus forte que moi et mes souvenirs, je m'aperçois bientôt que c'est elle qui domine, je ne peux m'empêcher de lui obéir. Inexorablement déjà gommages, surimpressions, traits chargés ou effacés. J'utilise ma mère, comme j'ai utilisé bien d'autres gens de ma vie, les lieux et paysages, et moi-même. »

Dans un style différent, David B., dessinateur et fondateur de la maison d'édition L'Association, n'hésite pas à se mettre en scène, lui et sa famille, dans L'Ascension du haut mal. Dans cette série en six volumes, David B. retrace le combat que les siens ont dû mener contre la maladie de son frère, l'épilepsie. Le genre autobiographique que connaissent bien les romanciers est relativement nouveau dans le milieu de la bande dessinée et David B. a été un des premiers dessinateurs à s'engager dans cette voie. Touchant, son dessin traduit souvent des émotions que les mots seuls ne peuvent exprimer. Sous sa plume, la maladie devient un monstre insaisissable qui prend en otage toute la famille. Leur combat contre l'épilepsie, tout comme leur désarroi en devient saisissant. Pourtant, les albums ne sont ni noirs, ni pessimistes. Tendresse et humour sont également présents. Il s'agit d'une atmosphère d'angoisse où espoirs et désespoirs, combat et répit, maladie et repos se succèdent au travers d'un regard qui reste celui de l'enfance. Le dessin devient refuge.

« Je ne sais plus. Mais il fallait que je dessine et que j'écrive sans cesse. Pour ne pas que la maladie de mon frère m'atteigne il me fallait remplir mon temps. »

Emouvant, ce style nous transporte dans le monde de David B., monde imaginaire de combats fasciné par les légendes asiatiques et leurs héros (Le Tengû Carré), mondes rêvés où les oreillers deviennent des êtres vivants et le ventre un être pensant (Les Quatre Savants), où la mythologie rencontre les peurs de l'enfance et l'aventure humaine (Les Incidents de la Nuit). David B. a également publié dans d'autres maisons d'édition comme chez Dargaud (La Lecture des Ruines) et a pu rencontrer à Hong Kong des dessinateurs locaux comme Chi Hoi, Craig Au-Yeung, Lai Tat Tat Wing ou Yeung Hok Tak.

Un véritable pont littéraire se constitue et de salon en salon, d'année croisée en année croisée, les liens entre la France et Hong Kong se resserrent. Déjà des rendez-vous sont pris pour publier à Hong Kong certains auteurs français en chinois et en France certains auteurs hongkongais en français.Oui, le salon du livre de Hong Kong s'ouvre au monde et atteint une nouvelle maturité. Dans ce voyage littéraire, la France accompagne Hong Kong.

中國當代藝術

香港–巴黎:書香萬里 情牽兩地

巴黎書展邀請了三位香港作家梁秉鈞、王璞及陶然參加。現在,法國又首度參加香港書展,並邀請了法國小說家彼埃蕾特.弗勒蒂奧(Pierrette Fleutiaux)、作家兼漫畫家大衛.B(David B.)及Actes Sud出版社總裁米歇爾.帕夫諾夫(Michel Parfenov)參與盛事。

〝愈來愈多的中國人對閱讀失掉興趣。〞香港報紙引述了中國出版學會報告的結論。工作繁忙、互聯網的無處不在、多媒體的多姿多采也許是疏遠閱讀的主要原因。然而,南華早報說得好,閱讀深深植根於中國的歷史和文化,仍然是中國人的一項重要文化活動。文學仍然吸引為數眾多的中國人。反觀美國,三份之二的美國人已經背棄了文學。書籍展覽在現代社會已成了衡量文化事業的小小晴雨表。

而香港又如何呢?這個城市向來被認為低俗淺薄,只熱中於時尚潮流及商業利益,而今竟舉辦書展。而且是怎樣一個書展!在港灣中心,在香港會議展覽中心的大廳裡。這兒,一九九七年曾舉行回歸盛典。展覽場地共佔整整三層,三萬平方米。香港和中國大陸的數百個出版社參加了展出。書展甫一開幕,寬敞的大廳便人頭湧湧,人們不辭勞苦,排起長長的隊伍,苦候半個鐘頭,有些日子甚至整整一個鐘頭,目的無非想看一看新書,並在其中覓得心頭愛。僅僅五天時間,便吸引了五十萬的觀眾(確切數字為五十萬三千三百九十六人!)最令西方人吃驚的是年輕讀者的數目。這個數目是香港人口統計不能完全說明的。是的,書籍仍然深深地吸引著年輕人。

當然,香港的書展與西方的書展明顯不同。香港書展更著重於書籍的發行、青少年讀物及漫畫。展覽內容五花八門,甚至有擺滿一些精巧有趣的小玩意兒的攤位以及宣揚各類宗教的攤位。不過今年,舉辦者竭力減少為本地知識界所詬病的商業色彩。在這個努力中,法國方面予以不少協助,設立了首個〝國際文化村〞。

法國總領事館、歐陸法文圖書公司及法國文化協會於村內設有一個攤位,將法國新出版的書籍介紹給香港觀眾。香港新聞界對法國的參與表示格外歡迎,這為法國出版界及作家提供了廣大的讀者群。

是機緣巧合亦是時代特徵,今年應邀參加盛會的兩位法國作家彼埃蕾特.弗勒蒂奧及大衛.B有一個共同點,即:反思、內省及與他人的關係。

彼埃蕾特.弗勒蒂奧於中國讀者並不陌生,她由Actes Sud 出版社出版的小說《要短句,親愛的》(Des phrases courtes, ma chérie)在中國榮獲了廿一世紀年度最佳外國小說獎並被譯成中文。這是一本非常個人的、感人至深的、講述一個日夜相伴的、摯愛恩慈的、令人敬畏的臨終前的母親的故事。這個對年老的思考亦是對母女兩代複雜關係的思考。這種複雜性隨著時間的流逝,非但沒有消失,反而更形激烈。

〝她永遠比我強,她的衰老更衰老,壓倒了我的衰老,我的衰老不能存在,我是她暮年的支持,而她是我暮年的鏡子,我必須既負擔我當前的衰老也負擔我將來的衰老,因此,不論外表如何,如果說她的痛苦是雙倍的,那麼我的痛苦就是四倍。(……)我要母親朝我轉過身來,聽我說。我希望她的衰老變得輕鬆,使她同情我的衰老並減輕我的痛苦。‘我已經老了,沒關係,可是你,你要當心,親愛的,是的,我看見你女人的身體在變化,別擔心,我比你早一代,現在也不至於太壞……'我希望母親在衰老中不衰老。〞

當然這不是彼埃蕾特.弗勒蒂奧的第一部小說。她已憑《我們是永恆的》(Nous sommes éternels)一書於一九九零年榮膺費米納婦女文學獎(Prix Femina)。這也不是她以第一人稱寫的第一部小說。她的長、短篇小說都帶有她經歷的感情和事物的印記。她曾長期旅居紐約,於法國中學執教。這個城市成了她幾部小說的背景。例如在《一幅畫的故事》(Histoire d'un tableau)裡,主人公第一人稱〝我〞在城市裡遊蕩,墮入一幅畫的陷阱,為它從內部所吞噬,以致取代了自己的故事。

彼埃蕾特.弗勒蒂奧這部小說與其舊著不同的地方是披露了她至今尚未向人訴說的隱衷。《要短句,親愛的》是她的親身經歷及所受痛苦的故事。儘管隨著故事的發展,在第一人稱〝我〞的敘述裡,一些讀者可能會發現自己家庭的影子。

〝我不認為我講的女人是我母親,不認為我用的‘我'真是我。我寫,一個輪廓也隨之逐步成形 ,它比我的回憶更強大,我很快發現是它在控制,我只能聽從它。已經無法避免了:擦去、重疊、加重或抹掉。我利用我的母親,就像利用我生活中的其他人,地點和風景,還有我自己。〞

大衛.B既是漫畫家亦是L'association出版社創始人。他以迥然不同的風格在《癲癇》(L'association du haut mal)這本漫畫書裡毫不猶豫地敘述了他自己及其家人的故事。在這個洋洋六冊的漫畫系列裡,他敘述了家人怎樣與其兄弟罹患的癲癇作鬥爭的故事。自傳體對小說家而言並不陌生,但在漫畫創作裡卻相當新穎。大衛.B是嘗試這種風格的先行者之一。他的漫畫非常感人,常常描繪出語言無法表達的感情。在他的筆下,疾病變成了一個無形的魔鬼,把全家人當作人質。他們和癲癇的搏鬥,和他們所陷入的慌亂一樣,驚心動魄。然而畫冊毫無悲觀沮喪的情緒,相反,卻處處流露出溫情與幽默。它營造的是這樣一種焦慮不安的氣氛,在這個氣氛裡,透過孩子的一雙眼,看到了希望和失落、戰鬥和暫息、疾病和休憩相繼而來。繪畫成了一種避難所。
〝我再也搞不清楚了。但我必須不停地畫畫和寫作。我要充份地利用我的時間,不讓兄弟的疾病把我擊倒。〞

大衛.B動人的漫畫把我們帶入他的精神世界,有東方傳奇英雄戰鬥的想象,有枕頭變成活人,肚子幻作思想者的夢幻。神話、童年的恐懼和冒險交織一起。其他出版社如Dargaud亦出版了他的著作。這次來港,他和本地的漫畫家智海、黎達達榮、楊學德等都見了面。

一座文學橋樑經已架起,一個書展接著一個書展,一個文化交流年接著一個文化交流年,法國和香港的聯繫加強了。在香港出版法國作家的中譯本,在法國出版香港作家的法譯本,好事在磋商進行中。是的,香港書展已成為面向世界的盛事,且日臻成熟。在文學之旅中,法國香港比翼雙飛,共創奇蹟。