Art contemporain chinois
Texte : Gérard Henry

Biennale de Shanghai :
« Techniques du Visible »

Les commissaires de la Biennale de Shanghai n'avaient rien omis pour leur grande ouverture dans le Parc du Peuple le 28 septembre 2004 : ils avaient même convié la plus belle lune de l'année. Elle brillait parfaitement ronde, immobile et stoïque, au-dessus de son avatar terrestre, la vieille horloge illuminée de la tour du Musée qui elle, endiablée, tournait à la vitesse d'une formule 1. Belle métaphore d'un Shanghai qui court après le temps !

Après des débuts difficiles et un peu chaotiques, la Biennale de Shanghai, créée en 1994 et cette année dans sa cinquième édition, semble atteindre une jeune maturité, du moins dans l'organisation et la qualité des œuvres exposées. Si on peut lui reprocher un manque d'audace et une absence de vraies nouveautés, elle reste cependant innovatrice dans un pays où l'art contemporain n'est montré, mis à part quelques galeries et deux ou trois musées d'art moderne, dans des lieux qui restent marginaux.

Elle se tient au Shanghai Art Museum, paradoxalement le seul bâtiment ancien du quartier côtoyant le Musée de Shanghai flambant neuf qui abrite l'art ancien, et l'Opéra de Shanghai imaginé par Charpentier. Le bâtiment érigé dans les années 30 et surmonté d'une tour de l'horloge était autrefois le centre administratif de l'hippodrome de Shanghai avant d'être reconverti après la révolution en bibliothèque publique. C'est son ancienne horloge que l'artiste Xu Zhen a rendue folle (100 tours à la minute) pour suggérer l'énergie de cette cité en plein développement. Il était d'ailleurs appuyé par l'installation d'un autre artiste, Hu Jieming, « Go up, Go up » qui consistait en une tour de 25 moniteurs télé haute de 22 mètres à travers les écrans desquels un personnage montait, chutait, reprenait son ascension toujours plus haut illustrant la montée quelque peu chaotique de l'art contemporain chinois.

Cette biennale, Intitulée « Techniques of the Visible », était l'œuvre conjointe de quatre commissaires : Xu Jiang, Président de la China Art Accademy, Zheng Shengtian, commissaire indépendant (Canada), Sebastien Lopez, directeur de la Gate Fondation (Hollande) et Zhang Qing, Directeur du Bureau de la Biennale. Le titre est intéressant et fort différent en anglais et en chinois. Pour Sebastien Lopez Techniques of the Visible est « un espace où les arts visuels contemporains s'entrecroisent, se rencontrent, et défient la façon dont la technologie est utilisée et expérimentée chaque jour ».

Le titre chinois « Yingxiang Shengcun » est plus riche de sens et donne lieu dans le catalogue de la biennale à deux longs essais étymologiques et philosophiques. Pour Zheng Shengtian , il contient une valeur esthétique unique aux Chinois : « ying fait référence à une variété d'objets et de phénomènes comprenant ombre, reflet, projection etc. ying est le résultat de l'interaction de pôles opposés tels que le visible et l'invisible, le réel et l'illusoire.(…) xiang, souvent traduit comme image, photo ou illusion fait référence aux objets visibles. Yingxiang, de ce fait englobe les images générées par les technologies des media, comme la photographie, le film, la vidéo, la photocopie, le scanner, les produits digitaux. Shengcun est aussi un mot à plusieurs sens, sheng signifiant, faire naître, vie, avoir lieu, produire et croître, cun, exister, être, laisser, préserver, Shengcun, subsister ou vivre. Le thème Yingxiang Shengcun concerne donc la fabrication d'images à l'aide de media variés à travers les âges, la présence contemporaine d'images historiques ainsi que la relation entre image et existence humaine. »

Ce thème regroupait évidemment tous les media, les plus anciens comme la peinture et les plus récents comme l'art digital, et s‘illustrait dans les œuvres des plus de 120 artistes choisis, chinois et étrangers organisées en six sections : Film Studio, Theater, Darkroom, Studio, Site of fiction, Cinema.
Pour affirmer le caractère international de la biennale, avaient été invités des artistes chevronnés comme Cindy Sherman, Yoko Ono, Robert Cahen, Touhami Endranne, Bill Viola, Coco Fusco, Stan Douglas, Gonzalo Diaz qui côtoyaient les célébrités chinoises telles que Zhang Xiaogang, Yue Mingjun, Feng Mengbuo, Jia Zhengke, Rong Rong & Inri…, d'où cette critique souvent entendue de manque de nouveauté. Par contre l'une des qualités de cette biennale était de présenter pour chaque artiste, notamment les peintres et photographes, un nombre assez important de pièces qui donnaient une réelle idée de leur œuvre. La soif de « nouveauté » dans les biennales a d'ailleurs un effet pervers, elle fait disparaître les travaux récents d'artistes qui travaillent dans la durée et construisent une œuvre, au profit de premières œuvres qui demanderaient plus de travail. Les biennales sont sujettes aussi à ce consumérisme enfiévré d'aujourd'hui, beaucoup d'artistes ne faisant qu'une brève apparition avant de disparaître à jamais.

Plusieurs artistes hongkongais figuraient dans la sélection. Leung Meeping présentait une vidéo, One Person, One Day, une promenade dans le monde sursaturé d'images et de sons électroniques de certains quartiers de hong Kong par une personne privée de l'ouie, et une deuxième privée de la vue, narratrice de l'expérience : une enquête sur la nature de l'image et sa perception par les sens, et sur son impact sur les humains. Ellen Pau, fondatrice du collectif Videotage montrait The Great Mouvement : Red stock, créant un lent mouvement d'images entre-tissées de caractères chinois, de larges coulées de couleurs se mélangeant ou se repoussant, expression de l'inconstance du désir humain. Dans le domaine des technologies de pointe, Hung Keung, créait avec Infinite Time and Space, un nouveau concept de temps et d'espace très sophistiqué. Le collectif Videotage et le Hong Kong Art Centre présentaient également une sélection de vidéos d'artistes hongkongais. Et sans doute l'un des artistes les plus appréciés du public de la biennale dans le domaine des installations interactives est le Hongkongais Young Hay, dont les images et les sons se créent selon le mouvement du spectateur qui devient ainsi lui-même créateur de l'œuvre. L'une de ces installations est musicale : le spectateur par ses mouvements devant un écran peut créer sa propre symphonie à la façon d'un chef d'orchestre devant ses musiciens, un rêve de mégalomane.

C'est en fait dans ses installations interactives que la biennale a manqué de professionnalisme. Elles étaient abritées dans le Parc du Peuple sous des cabanes exiguës et surchauffées, certaines ne fonctionnant d'ailleurs pas. Or ce genre d'installations nécessite un large espace, elles sont faites pour envelopper de toutes parts le spectateur, le transporter dans un autre monde. Ainsi présentées, elles font figure de simples jeux vidéo.

La section Cinéma, en prise sur l'actualité sociale de la Chine, représentait l'aspect plus grave et plus engagé de cette biennale. Shanghai est en plein processus de destruction/restauration/reconstruction. Gan Chao et Liangzi, réalisateurs montants de documentaires, présentaient Landlord M. Jiang, un homme vivant depuis 60 ans dans sa maison qui va être détruite, entouré de son passé, qui est à la fois pour lui, refuge et prison. Li Xiao dans The Factory Director Zhang Liming documente la difficulté d'un directeur nommé à la tête d'une entreprise d'état de Shanghai endettée, dont les ouvriers vont être licenciés, un fait social d'actualité pour des milliers d'ouvriers shanghaiens. Liu Bingjian dans Cry Woman raconte la vie dans une petite ville d'une femme obligée d'adopter une fille abandonnée et de gagner sa vie comme pleureuse aux enterrements. Zhao Gang documente sur une durée de 3 ans dans The sun in Winter les problèmes surgissant lors de l'introduction de la démocratie locale dans un village du Sichuan. On peut voir aussi des travaux peu connus des réalisateurs de la Sixième génération : Public Space de Jia Zhangke, Fengjing de He Jianjun, et de plus anciens travaux tels que le film Blind Shaft sur la mine de charbon de Li Yang. L'ensemble montrait une vue réaliste des problèmes sociaux auxquels doit faire face la Chine aujourd'hui.

Certains artistes avaient plus de succès avec le public, c'est le cas de Liu Zheng en plein dans l'actualité avec ses portraits fabriqués de Survivants, visages maculés de terre, de poudre et de sang, comme rescapés de guerres ou d'attentats terroristes mais montrant une farouche détermination à survivre.
Un autre photographe montrait des images troublantes de sa famille : l'Indien Vivan Sundaran réunit sur ses clichés différents membres vivants de sa famille, différents décors, différents lieux où ils ont vécu, créant une série où l'on peut lire toute une époque et ses destins humains : la tradition, la colonisation, la modernité, les migrations, etc. Tous ces éléments s'opposent ou se répondent parfois sur une seule image.

Ce fut également un plaisir que de voir dans cette biennale un grand paysage à l'encre des Monts Nanyan exécuté par Qiu Ting, jeune peintre diplômé du département de peinture chinoise traditionnelle de la China Accademy of Fine Arts à Hangzhou. Le dessin en est, il est vrai peu traditionnel, mais plein de vivacité. Le critique d'art Gao Shiming, dans le catalogue, s'est cru obligé de philosopher sur le Dao (Tao) caché ou révélé dans cette œuvre comme s'il était nécessaire de justifier sa place dans la biennale. On n'a point besoin de cela, le dessin suffit amplement à lui-même.

中國當代藝術

上海雙年展:〝影像生存〞

當二零零四年上海雙年展在人民公園揭幕時,策展單位可說是把每樣事情都兼顧週到,他們甚至有本事把全年最漂亮的月亮也請來了。那晚的月兒渾圓明亮,高高的掛在天空中,堅定不移地照耀著多變的地球,而博物館的鐘樓上那古老大鐘燈火通明,它似乎著了魔般以方程式賽車的速度在急劇轉動。正好寓意一個追趕時代的上海。

上海雙年展創辦於一九九四年,經歷了初期出現的困難和混亂情況後,今年舉辦第五屆,不理其他的方面,但起碼從統籌和展品的質素來看,它似乎已漸趨成熟。雖然有人會指責說這雙年展不夠大膽和沒有真的新意,然而,在一個只能在少數畫廊和兩三間藝術博物館或一些邊緣場所中才有機會看到當代藝術的國家中,它已屬創新了。

上海雙年展假上海美術館舉行,而諷刺地,這座大樓是區內碩果僅存的古老建築物,它鄰近新建成並收藏了無數古老藝術品的上海博物館和法國建築師夏邦杰設計上海歌劇院。上海美術館落成於二十世紀三十年代,頂部有一座鐘樓,從前是賽馬場的行政大樓,後來改建成公共圖書館。而就是這座鐘樓上的古老大鐘被藝術家徐震弄瘋了(每分鐘轉一百個圈) ,他是藉此來比喻這座發展中的城市的活力。而另一位藝術家胡介鳴的作品《向上向上》的創作概念正好與這大鐘互相呼應。那是一座高二十二米,用二十五個電視屏幕砌成定高塔,透過屏幕,我們可以看到一個正在攀高的人,他跌下,又再攀高,愈攀愈高,作者是藉此來比喻中國當代藝術有點兒混亂的發展。

這一屆以〝影像生存〞為題的雙年展的策劃小組由許江(中國藝術學院總監)、鄧勝天(獨立策展人,加拿大)、洛柿田(Gate 基金會總監,荷蘭)及張睛(雙年展祕書組主任)他們四人組成。主題很吸引,而它的中、英文名稱的意義分別很大。洛柿田心目中的 《Techniques of the Visible》是〝構築了一個空間,當代藝術在其中交融,挑戰著我們今天使用和體驗藝術的方式〞*

而它的中文名稱《影像生存》所包涵的的意義更豐富,雙年展特別出版的圖錄更以兩篇有關辭源學和哲學的專題文章來探討這主題。鄭勝天認為它包含了一總獨特美學價值,在中文裡:〝‘影'是非常具有文化內涵的字眼。它來自自然的現象,如影子、倒影、投影等,它隱隱約約、虛虛實實、似真非真、若即若離,充滿了想像的意境(⋯⋯),‘像'則是一切可視之物的外貌:如形像、圖像、幻像等。‘影像'兩字放在一起,就構成了一個現代詞語,用於一切通過技術和機械手段產生的圖像,包括照片、影片、錄像、影印、掃描、數碼產品等。‘生存'的意義涵蓋了許多層面。‘生'是出生、發生、產生、又指生長和生命,‘存'是存在、存留和保存。‘生存'組成一個詞,它的意思可想而知,包含著生命的持續和幸存的兩種境界,‘影像生存'既關注的是過去和今天人們用各種工具創造的影像,以及它們目前的存留狀態,又要關注這些影像與人類生存狀況、生存環境、生存要求之間密切相聯的關係。〞*

很明顯,這主題包含了各種媒體的創作,由最古老的如繪畫到最新的如數碼藝術等應有盡有,參展的一百二十多位中、外藝術家分別在六個不同的組別(影棚、劇場、暗房、畫室、虛構現場、影院)中展出他們的作品。
為了肯定雙年展的國際性,主辦單位特別邀請了一些資深的藝術家如辛迪.謝爾曼、小野洋子、羅伯特.凱恩、陶哈米.恩那里、比爾.維奧拉、可可.福斯柯、斯丹.道格拉斯、貢扎羅.狄亞茲等與一些中國的知名藝術家如張曉剛、岳敏君、馮夢波、賈樟柯、榮榮、映里等一同參與……而這方面就是常常被人批評為沒有新意之處了。相反,這次雙年展有一點十分值得嘉許,那就是每位藝術家——尤其是畫家和攝影家——參展作品的數量蠻多的,這讓人有機會能應真地認識他們的作品。其實,盲目地在雙年展中渴求〝新意〞絕非好主意,這樣做只有利一些仍需多加磨練的新人,但卻犧牲了那些從事藝術創作已多年的藝術家沒有展出新作的機會。可惜的是所有雙年展都受到現時新興的保護消費者主義所影響,因此很多藝術家在曇花一現之後便消失得無影無蹤。

香港有幾位藝術家也獲邀請參展。梁美萍展出的錄像作品《一人一日》是有關知覺與影像的探索,她讓一位在充滿電子影像世界中的聾啞人拍攝她日常生活的一日,另一方面她又記錄了一位盲人在同樣充滿電子影像的日常生活中口述〝影像世界觀〞的一日。她透過聾啞人和盲人感覺世界各有殘缺的現實,揭示真實的主體和解構的現實。而錄像太奇的創辦人鮑譪倫這次展出了一個單軌錄像裝置作品《大運動之紅籌》,她將一個個方塊字串連穿插於一幅圖畫中,再加上血肉模糊的拉扯行動,表達出人類慾望的無常性。在高科技方面,洪強藉著《無限時空》來營造出一種全新的時空概念。錄像太奇與香港藝術中心聯合展出一系列由香港藝術家創作的錄像作品。在雙年展中的互動裝置方面,其中一位最受公眾歡迎的藝術家想必就是香港人楊曦,在他的作品中,影像與聲音是根據參觀者的動作而產生,因此,參觀的人本身也有份參與創作的過程。其中一個是音樂裝置,在一個屏幕前,參觀者可透過各種動作來自行創作交響樂,就像指揮家對著樂隊一樣,這正好是自大的人夢寐以求的。

事實上,上海雙年展欠缺專業水準的正好就是在互動裝置這方面。這些作品設於人民公園中的一些狹小和悶熱的帳棚內,有部份作品甚至不能操作。這類裝置作品其實是需要很多空間,它們的作用是要把觀眾四面包圍,把他帶到另一個世界中。然而上海這樣的安排卻把它們變成了普通的電玩遊戲。

影院組別,因為這與中國的社會現狀有直接的關係,是代表了這一屆雙年展中較嚴肅和投入的一面。上海到處都是拆卸/改建/重建。于超與粱子是上海紀錄片界的新銳導演,他們的《房東蔣先生》講述一名男子,他住了六十年的房子快要被拆毀,這陪伴他渡過了半過多世紀的房子既是他的避護所也是他的牢籠。李曉在他的紀錄片《廠長張黎明》中描寫一名男子被提拔升為某國營工廠廠長後所面對的困難,工廠因欠債正面臨倒閉,而工人亦快要下崗。這故事中所描寫的正是上海成千上萬的工人正在面對的社會實況。劉冰鑒導演的《哭泣的女人》講述一名貴州女子被迫收養一名被人遺棄的女孩,面對生活的壓力選擇哭喪作為謀生手段。 趙剛的紀錄片《冬日》花了三年時間拍攝,紀錄了四川省一個農民經歷了一次獨特的民主自治歷程。我們同時也看到一些〝第六代〞導演的作品,如賈樟柯的《公共空間》,何建軍的《風景》,或是一些較早期的作品如李楊拍攝有關煤礦場的《盲井》。這些影片所揭示的全部是今日中國正面對的社會問題。

某些藝術家較受公眾的歡迎,劉錚正是其中一個例子,他的照片中展現了一張張歷劫後的疲憊面孔,那些面容帶著驚悸、傷痛和痲木,如同被洗劫後硝煙未滅的戰場,但卻顯示出強烈的求生意慾。

另一位來自印度的藝術家威萬.蘇達蘭,他的作品把電影與照片結合,作品中的人物都是他的家人, 他們生活在不同的背景和地點,從這一系列影像 中我們可以看到同一個年代的人之不同命運:傳統、殖民、摩登化、移民等。

很開心可以在這次雙年展中看到年輕畫家丘挺繪畫的一幅大型水墨畫。丘挺畢業於杭州中國美術學院。無可否認,這畫的構圖與傳統水墨畫很不同,但卻生動活潑。 藝評家高士明認為有需要在雙年展的圖錄中詮釋這作品中所隱含或明示之道家思想,以便確認它有資格出現於雙年展中,但這實屬多此一舉,畫本身已是足夠的證明。

* 摘錄自《貳零零肆年上海雙年展-影像生存》