Le Festival internationa de Littérature de HK
Texte : Eric Sacher

Quand les écrivains parlent… destins de pions sur un jeu de Go

Depuis 2001, le festival international de littérature de Hong Kong ne cesse de se renforcer et permet désormais au public de Hong Kong de découvrir des écrivains venus d'horizons très différents. Du 7 au 15 mars 2005, plus de vingt auteurs de renommée internationale rencontreront leur public à Hong Kong.

Le thème central de ces rencontres littéraires reste l'Asie mais il s'agit d'une Asie grande, ouverte et variée, allant du Pacifique aux abords de la Méditerranée. Cette année plusieurs auteurs déjà traduits en français seront présents.

Ces auteurs tentent par leurs écrits et leurs expériences propres de faciliter rencontres et échanges entre différentes cultures et civilisations avec comme thème commun celui de la tolérance dans un monde qui en manque de plus en plus. Thomas Kenealy, auteur de Femme en mer intérieure (éditions de L'Aube) et de La Cité des abeilles (Flammarion – Castor poche) sera là pour parler de La Liste de Schindler (J'ai Lu) adapté à l'écran par Steven Spielberg. Dans La Fille de la photo (Pocket), Denise Chong nous fait revivre l'épisode de la guerre du Viet-Nam à travers une photo devenue le symbole de la cruauté des guerres : la fillette nue fuyant atrocement brûlée par le napalm. Fasciné par les soubresauts d'une région à la fois merveilleuse et inquiétante, William Dalrymple nous présente de son côté ses voyages et ses réflexions sur l'Inde. Auteur de Dans l'ombre de Byzance et de L'Age de Kali (Noir sur Blanc), il nous offre une vision sans fard d'un sous-continent indien qui hésite encore entre modernité et résistance au changement, sacrifiant souvent sa propre population à ce débat sans fin.

Cette quête d'identité à laquelle plusieurs pays font face de nos jours, donne également naissance à de merveilleuses fictions pleines d'humour et d'optimisme comme dans L'illusionniste (Plon) de Hari Kunzru où un jeune garçon issu de deux cultures essaie de se construire la sienne propre. Dans la Fille qui marchait sur l'eau, Siddharth Dhanvant Shanghvi, jeune révélation de la littérature contemporaine en Inde, donne de son pays une vision plus sensuelle. Le thème de la tolérance peut en effet se décliner sous différentes formes, y compris dans la littérature de jeunesse représentée cette année au festival par Jeremy Strong que l'on peut retrouver en français chez Milan Poche (Beurk ! Mamie est amoureuse !), chez Pocket Junior (Lucie l''éclair) ou chez Kid Pocket (Gertrude à l'école).

La Chine sera représentée par l'auteur Yu Hua dont les livres s'imprègnent d'une atmosphère aussi terrible que fascinante (Un monde évanoui chez Picquier Poche, Cris dans la brume, Un amour classique, Le Vendeur de sang chez Actes Sud). Le drame afghan est également présent à travers les récits de Deborah Ellis (Parvana une enfance en Afghanistan et Le voyage de Parvana tous deux en livre de poche) qui raconte l'histoire d'une fille afghane prisonnière d'une guerre qu'elle n'a pas choisie et d'un monde qui lui échappe. Ces deux derniers pays, Chine et Afghanistan, sont également présents sous la plume de deux auteurs invités par la France dans le cadre du festival. Plumes françaises d'origines différentes, l'algérien Yasmina Khadra et la chinoise Shan Sa ont choisi le français pour patrie littéraire.

Yasmina Khadra, une vie algérienne
Yasmina Khadra est principalement connu pour ses romans policiers. Son héros, le commissaire Llob travaille dans une Algérie contemporaine où terrorisme et corruption créent un climat qui le désespère : « Lino a carrément le pont-levis coincé dans la gueule. Le pauvre ! Il n'a pas encore pigé que dans son pays chéri tout le monde se démerde pour bâtir un palais pour ses rejetons et personne ne consent à leur élever une patrie » (Morituri).

Ecœuré par la vague intégriste qui a soulevé son pays, ses récits restent marqués par son drame personnel et son propre vécu. L'image de ces enfants déchiquetés par les attentats terroristes le poursuit à chaque page. Sa lutte contre l'intégrisme l'a amené à écrire également sur l'Afghanistan avec Les Hirondelles de Kaboul. « Hormis celui de son épouse, Atiq n'a pas vu un seul visage de femme depuis plusieurs années. Il a même appris à vivre sans. Pour lui, à part Mussarat, il n'y a que des fantômes, sans voix et sans attraits, qui traversent les rues sans effleurer les esprits ; des nuées d'hirondelles en décrépitude, bleues ou jaunâtres, souvent décolorées, en retard de plusieurs saisons, et qui rendent un son morne lorsqu'elles passent à proximité des hommes. » Deux femmes meurtries par leur condition sont poussées par amour et par désespoir l'une à un meurtre, l'autre à un suicide. Leur destin se noie dans la folie des hommes qui a fait d'une ville un cimetière. « Car Kaboul a horreur du souvenir. Elle a fait exécuter son histoire sur la place publique, immolé les noms de ses rues dans de terrifiants autodafés, pulvérisé ses monuments à coups de dynamite et résilié les serments que ses fondateurs ont signés dans le sang ennemi. »

Derrière Yasmina Khadra se cache un militaire de carrière qui a vécu la transformation de l'Algérie de l'intérieur. C'est en partie pour honorer ces femmes que l'intégrisme voile et bâillonne, qu'il a choisi de prendre ce nom de plume pour protection. C'est avec L'Ecrivain, publié en 2001 qu'il révèle enfin au grand public son vrai nom. Ce livre bouleversant et merveilleux représente sa vie, ses choix, son enfance. Fils d'officier, il est dés son plus jeune âge destiné à quitter le cocon familial pour rejoindre l'école des cadets. Séparé de force de sa mère, ne comprenant pas son père, l'enfant se construit lui-même autour d'une seule passion : l'écriture. « Qu'une feuille vierge se déshabillât sous mes yeux, et plus rien ne me dissuadait de la posséder. D'un coup, la majuscule se soulevait dans un ressac fougueux, la virgule s'improvisait en caresse, le point en baiser ; mes phrases s'enlaçaient dans des ébats houleux tandis que l'encre transpirait sur les volutes de ma muse. Haletant, tremblant, ne sachant de qui tenir, de l'ange ou du démon, à chaque page que je tournais, je faisais un enfant. »

Shan Sa, les quatre vies de l'écrivain

Shan Sa est à l'image de ses livres : sa vie est faite de croisements et de rencontres. Croisements entre l'Orient et l'Occident, Rencontres entre deux cultures. Shan Sa est née à Pékin en 1972. Elle part en France quelques mois après les événements de Tienanmen. C'est alors la découverte de la langue française et de son écriture. Son premier roman Porte de la paix céleste, mais également plusieurs passages des livres qui ont suivi restent inspirés de cette atmosphère du 4 juin 1989. Passion de la révolte, multiples espoirs et premiers amours s'entrecroisent au travers d'instants ou de moments échappés de l'Histoire chinoise.

C'est en Mandchourie, pays de ses grands parents que se déroule l'histoire de La Joueuse de Go . En pleine occupation japonaise dans les années 30, une étrange partie se déroule sur fond de résistance et de répression armée : un officier japonais se déguise pour errer à son aise place des mille vents et y découvre une jeune fille de 16 ans qui lui propose une partie de go. Le jeu continue tout au long du roman amenant le lecteur à observer tantôt la stratégie de l'un, tantôt la stratégie de l'autre. A travers ce jeu, c'est une lutte pour la vie, pour le sens de la vie qui se libère : « J'ai besoin de respirer la vie, les arbres, la chaleur de ma ville. Je saurai maîtriser mon destin et me rendre heureuse. Le bonheur est un combat d'encerclement, un jeu de go. Je tuerai la douleur en l'étreignant. » Mais la joueuse de go ne sait pas qu'en étreignant la douleur, elle finira par s'étreindre elle-même dans le jeu dangereux que sont les premières amours.

Les vies se mêlent et se répondent comme dans les Quatre vies du Saule où quatre destins se succèdent et se répondent à travers le temps et l'espace, unis par le souvenir d'un saule, par l'amour et ses trahisons : « Lü Yi avait disparu. A sa place, un saule pleureur agitait ses branches, bruissant comme si la jeune femme parlait encore. Etonné, Chong Yang n'eut pas le temps de prononcer un mot. Les feuilles du saule se mirent à jaunir, se détachèrent de la branche, tourbillonnèrent dans le vent avant de passer par-dessus le mur. En un instant, l'arbre se dessécha, et il ne resta plus qu'un tronc vide de toute sève. »

Son dernier roman, L'Impératrice, suit l'étrange destinée d'une jeune fille, devenue servante puis concubine au sein de la Cité Interdite avant d'accéder au titre d'impératrice. C'est un grand livre d'initiation à la vie et à la mort, un appel à la réflexion sur soi et sa destinée. « Le froid de la Cité Interdite m'envahissait. Les pages de la vie déjà feuilletées ne pouvaient être rouvertes. »

Faute de pouvoir rouvrir votre vie passée, ouvrez ces livres qui vous en diront beaucoup plus sur vous que vous ne le pensez ! Ne sommes-nous pas finalement, nous lecteurs, que des pions sur le jeu de go des auteurs qui se plaisent à nous faire rire, pleurer, sentir, vivre et mourir à leur convenance ?

香港國際文學節

當作家敘述……
棋盤上卒子的命運

自二零零一年以來,香港國際文學節不斷地得到加強,令香港公眾得以開拓視野,認識來自世界各地的作家。二零零五年三月七日至十五日,二十多位國際知名的作家將蒞臨香江與讀者見面。

這個文學聚會的主題仍是亞洲,但是一個從太平洋直至地中海沿岸的遼闊、開放、豐富多彩的亞洲。今年,幾位作品被譯成法文的作家亦將蒞臨盛會。

這些與會的作家試圖以其作品和親身經歷促進不同文化的交流,今屆共同探討的主題為現今世界日漸稀少的寬容。《內海女人》(Femme en Mer intérieure, L'Aube出版社)及《蜂城》(La Cité des abeilles, Flammarion 出版社,Castor袋裝書) 的作者湯瑪斯‧肯尼利 (Thomas Keneally) 將論述他的《舒特拉的名單》,這部小說已由史提芬‧史匹堡改編成同名電影。在《照片中的女孩》一書裡,Denise Chong透過一張象徵戰爭殘酷的照片再現了越戰的悲慘景象,講述一個被凝固汽油彈燒得遍體鱗傷、赤身裸體地逃跑的小女孩的故事。為一個既神奇又令人不安的地區的變化所迷,威廉‧達爾林普 (William Dalrymple) 向我們講述了他的印度之旅以及他對這個國家的反思。他亦是《拜占庭的影子》(L'ombre de Byzance)及《卡利的年齡》(L'âge de Kali) 兩本書的作者。他毫不掩飾地向我們展示料了一個仍在現代化和改革之間舉棋不定的印度次大陸, 無休止的爭論常常犧牲了自己人民的利益。

尋找身份認同這個當今一些國家面臨的問題,同樣也孕育出一些充滿幽默及樂觀精神的精彩小說。如哈里‧昆茲魯(Hari Kunzru)的《魔術師》(L'illusionniste),講述一個生長在兩種文化背景下的小男孩試圖為自己建立一個屬於自己的文化的故事。在《走在水面上的女孩》(La fille qui marchait sur l'eau)一書裡,Siddharth Dhanvant Shanghvi 這個在印度當代文學嶄露頭角的年輕作家,賦予他的國家一個更歡樂的外貌。寬容這主題的確可以任何形式來探討,今年文學節以謝諾美.史莊(Jeremy Strong) 為代表的兒童文學即是一例。其作品譯成法文的有《呸!奶奶談戀愛!》(Beurk ! Mamie est amoureuse!)、《閃電露西》(Lucie l'Eclair) 及《在學校裡的熱特呂德》(Gertrude à l'école)。

中國的代表是余華,她的小說浸透著一種恐怖迷人的氣氛。如《消失的世界》(Un monde évanoui)、《霧中叫聲》(Cris dans la brume)、《傳統的愛》(Un amour classique)及《賣血者》(La vendeur de sang)。阿富汗的悲劇則可在狄波拉‧埃利斯(Deborah Ellis)的故事裡讀到,如《帕娃娜,一個阿富汗的童年》(Parvana une enfance en Afghanistan) 及《帕娃娜的旅行》(Le voyage de Parvana)。作者敘述一個阿富汗女孩的故事,她成了一場不由她選擇的戰爭及她遺失了的世界的囚徒。中國和阿富汗,亦在兩為應法國政府邀請參加盛會的作家的筆下展現。他們是阿爾及利亞作家雅斯米納.卡德拉(Yasmina Khadra)及中國作家山沙(Shan Sa),兩者皆選擇法語為他們文學創作的語言。

雅斯米納.卡德拉 — 阿爾及利亞生活

雅斯米納‧卡德拉主要以偵探小說聞名。他的英雄羅伯(Llob)警長在當代阿爾及利亞工作。恐怖主義和腐敗造成的環境氣氛令他感到失望:〝利諾(Lino)真是一個榆木腦瓜,這可憐人!他還不明白在他親愛的國家裡,大家都忙著為子孫後代建築宮殿,卻沒人想到為他們建立一個祖國。〞(Morituri)

對席捲全國的原教旨主義感到厭惡,他的故事烙著他的悲慘遭遇和親身經歷的印記。被恐怖襲擊炸得粉身碎骨的孩子的恐怖景象出現在他書的每一頁,緊纏著他不放。他對原教旨主義的鬥爭也促使他寫了有關阿富汗的《喀布爾的燕子》(Les hirondelles de Kaboul)。〝除了他妻子的面容,幾年來,阿蒂克(Atiq)沒見過一張女人的臉。他甚至學會了沒有女人而生活。對他來說,除了穆莎拉(Mussarat) ,街上行走的女人只是一些鬼魂,無聲無息,毫無魅力,一點都不撩人;一群衰老的燕子,藍色的、淡黃的、褪了色的、遲來了幾個春天的燕子,當牠們從行人身旁掠過時,發出一聲微弱的哀鳴。〞兩個被生活折磨的女人,受愛情和絕望的驅使,一個殺了人,一個自殺了。她們的命運淹沒在將城市變成了墳場的瘋狂的人群中。〝喀布爾厭惡回憶,她在廣場上將歷史行刑,用熊熊烈火摧毀大街小巷,用炸藥將高樓大廈夷為平地,背棄了她的奠基人在敵人的血泊中立下的誓言。〞

在雅斯米納.卡德拉背後,隱藏著一個經歷了阿爾及利亞內部變革的職業軍人。一方面為了表示對在原教旨主義脅迫下戴上面紗、沉默無語的婦女的尊嚴,一方面也為了掩護自己,他取了這個女性化的筆名。二零零一年發表的《作家》(L'Ecrivain) 一書,終於揭示了他的身份。這本動人心魄、感人肺腑的書敘述了他的童年、他的經歷、他的人生選擇。作為一名軍官的兒子,他年紀輕輕便註定離開溫暖的家,入讀軍事學校。被迫離開母親,和父親又有隔閡,於是孩子便圍繞著他熱愛的寫作自築一個天地。他寫道:〝一頁白璧無瑕的紙在我眼前寬衣解帶,沒有任何力量可阻止我佔有它。突然間,一個大寫字母在激情中豎起,一個豆號在撫摸中成形,一個句號在輕吻中出現。我的句子在歡樂中繾綣纏綿,墨水則在繆斯女神的扭動中滲出。我喘息著,顫抖著,不知像天使抑或像魔鬼,在每一頁稿子上,我分娩出一個寧馨兒。〞

山沙 — 作家的四條生命
山沙正和她的書一樣:兩地穿梭、相聚相會。即往來東西方,東西文化交匯。她於一九七二年生於北京,在天安門事件幾個月後來到法國。她開始學習法文和寫作。她的第一部小說《天安門》以及接著問世的幾部小說都取材於一九八九年六月四日的天安門事件。反叛、希望、初戀交織著出現在中國歷史的長河裡。

《圍棋手》(La joueuse de Go)的故事發生在她祖輩的家鄉滿洲裡。在日本統治極盛期的三十年代,一盤奇特的棋賽在抗敵及軍事鎮壓的背景下展開了。一名日本軍官喬裝打扮四處遊蕩,遇見一個十六歲的小女孩,她邀他下一盤圍棋。棋局由頭到尾在小說裡進行,帶領讀者發現時而這位、時而那位的計謀策略。透過兩人的對弈,這是為生命、為自由的生命的鬥爭。〝我需要呼吸生命、感受自然和城市沸騰的生活。我懂得掌握自己的命運並令自己幸福。幸福是一場包圍戰,是一盤棋。我把痛苦緊緊地抱在懷裡讓它窒息死亡。〞但棋手卻不知到當她緊抱著痛苦當兒,自己已被初戀的危險攫住。

正如《柳樹的四條生命》(Les quatre vies du Saule)裡描寫的一樣,生命互相融合互相呼應。四種命運由一棵垂柳的回憶、愛情和背叛聯繫一起,穿過時空相繼而來,互相呼應:〝Lü Yi已經離開人世。代替她的是一棵垂柳,搖動著枝葉,發出沙沙聲,彷彿年輕女子在低低細語,傾訴衷情。Chong Yang嚇呆了,說不出一句話。柳樹的葉子開始發黃,從樹枝上脫落下來,在風中飄舞,飛過牆頭。不一會,整棵柳樹乾枯了,變成了一段乾癟的樹幹。〞

她的近作《女皇》(L'Impératrice)講述一個少女初為婢女,後進宮作妃子,再當上女皇的奇特命運。這是一本理解生命與死亡的好書,邀人反省、思考自己的命運。〝紫禁城的寒氣浸透了我。生命的書頁已經翻閱過,再難打開了。〞

你無從追回已逝的生命,那麼便打開這些書吧,它們會告訴你許多許多,超出你的預料!我們這些讀者,不正是作家們棋盤上的小卒子?他們樂於讓我們歡笑、哭泣、感動、生生死死。