Photographie
Texte : Gérard Henry

Hong Kong dans la mâchoire du temps photos de Almond Chu, Lau Ching-Ping, Hisun Wong, Wong Wo Bik

« Hong Kong Four-Cast » exposition de quatre photographes expérimentés de Hong Kong marque une étape dans la façon dont les artistes locaux appréhendent la cité. Habitués depuis plusieurs années à voir chez ceux-ci des images sur l’envers de la ville, l’étouffement urbain, la lente érosion lépreuse des murs, la disparition de vieux quartiers, on est soudain surpris de voir apparaître Hong Kong auréolé de lumière, baigné d’une certaine austérité et pureté jusque dans ses dépôts d’ordure. Cela reste une vision sur la disparition du patrimoine, le développement de la ville et les monceaux d’ordure qu’il génère, mais une vision épurée, joyeuse pourrait-on dire car la ville y resplendit dans sa beauté.

La ville est-elle en danger de perdre son identité ? Non à voir ces photos qui la présentent à la fois dans son passé et dans un présent reconstruit sur cette disparition. La rétrocession à la Chine avait provoqué un énorme désarroi, qui avait déclenché peut-être pour la première fois dans l’histoire de Hong Kong une introspection sur l’identité et la nature d’une culture urbaine hongkongaise spécifique. Une recherche de racines qui a été une plongée dans le vieux Hong Kong et a, plus que réellement retrouvé un passé enfoui, entraîné la reconstruction d’un passé parfois fictif.

Il ne reste que peu de bâtiments historiques à Hong Kong dont la politique patrimoniale a été longtemps pratiquement inexistante ou réduite à quelques exemples, bâtiments qui se dressent isolés et anachroniques dans une mer de nouvelles tours, coupés de leur environnement d’origine. Un bâtiment, une fois atteint la cinquantaine a peu de chance de survie, pourchassé qu’il est par les promoteurs immobiliers. La rétrocession aura toutefois provoqué chez les Hongkongais qui n’ont point immigré un sentiment d’appartenance à la cité. Des associations pour protéger la baie, conserver le peu de patrimoine historique se sont créées.

Hisun Wong a toujours été soucieux de ce passé et a entrepris de photographier certains de ces monuments construits à la fin du 19e siècle ou plus simplement des façades de fermes des années 60, maintenant tout aussi rares. Mais l’œuvre de Wong est plus qu’une documentation historique : Intéressé par la pureté des formes architecturales et la lumière ambiante, souvent nocturne, il donne à la pierre la tendresse et la fragilité de la peau, notamment dans les photos de la Cathédrale St John qui ont nécessité des expositions de 15 à 30 minutes afin de matérialiser le passage du temps sur l’image. L’absence d’humains donne un caractère paisible et monacal à ces bâtiments qui semblent alors plongés dans un silence intemporel. Hisun Wong s’isole ainsi, hors de la ville, hors de son humanité et rentre dans une sorte de surréel. Nous sommes loin de la photographie réaliste. Si ses photographies de vieilles fermes chinoises des nouveaux territoires sont plus documentaires, ses monuments apparaissent parfois si parfaitement dessinés que l’on pourrait croire à des décors de théâtre.

Wong Wo Bik nous montre un passé moins architectural, elle s’intéresse plus à la culture populaire et montre des images prises en 1997 dans l’un des premiers parcs d’amusement de Hong Kong, Lai Yuen (ouvert en 1949), alors qu’il était déjà abandonné et à la veille de sa destruction. Lai Yuen était encore au début des années 80 le château des illusions et de l’épouvante où des milliers d’enfants et d’adultes se pressaient. Wong Wo Bik a ainsi recueilli ces vestiges et a par juxtaposition ou autres procédés recréé ces images : Des lieux éphémères plein d’imagerie populaire qui ont compté dans la vie des Hongkongais et ont disparu sans laisser aucune trace. C’est un passé recréé pourrait-on arguer, mais tout passé est recréé par la mémoire humaine qui le transforme continuellement en fonction du présent.

Les images de Wong ne sont pas nostalgiques mais ont saisi la magie de ce lieu plein de fantaisies, toujours opérante même s’il était à l’abandon. Il est amusant de voir cWong Wo Bik nous montre un passé moins architectural, elle s’intéresse plus à la culture populaire et montre des images prises en 1997 dans l’un des premiers parcs d’amusement de Hong Kong, Lai Yuen (ouvert en 1949), alors qu’il était déjà abandonné et à la veille de sa destruction. Lai Yuen était encore au début des années 80 le château des illusions et de l’épouvante où des milliers d’enfants et d’adultes se pressaient. Wong Wo Bik a ainsi recueilli ces vestiges et a par juxtaposition ou autres procédés recréé ces images : Des lieux éphémères plein d’imagerie populaire qui ont compté dans la vie des Hongkongais et ont disparu sans laisser aucune trace. C’est un passé recréé pourrait-on arguer, mais tout passé est recréé par la mémoire humaine qui le transforme continuellement en fonction du présent. Les images de Wong ne sont pas nostalgiques mais ont saisi la magie de ce lieu plein de fantaisies, toujours opérante même s’il était à l’abandon. Il est amusant de voir ces images à la veille de l’ouverture du Disney Land de Hong Kong. Il n’existait pas encore à l’époque de ce parc de Lai Yuen, cette uniformisation mondiale de l’imaginaire et du divertissement.es images à la veille de l’ouverture du Disney Land de Hong Kong. Il n’existait pas encore à l’époque de ce parc de Lai Yuen, cette uniformisation mondiale de l’imaginaire et du divertissement.

Lai Yuen a été complètement englouti par le temps et beaucoup ignorent même qu’il a existé. Ses restes sont allés gonfler les énormes dépotoirs de la ville. Destruction, disparition, c’est ce processus que documente Almond Chu, processus qui prouve aussi la vitalité de la cité. Ce photographe plus connu pour ses sobres portraits d’humains ou nature morte en noir et blanc est allé sur les lieux où la ville engloutit ses ordures. Il les a photographiés d’un œil froid et distant avec une grande précision de détails. Une mare d’ordures où vient jouer le soleil, des empilements colorés de bouteilles plastiques, des tas de déchets industriels… Ces déchets vont à leur tour disparaître et créer une nouvelle topographie. Almond Chu en fait du Land Art : Des paysages inattendus, soulignant la géométrie des collines et des fossés artificiels, un jeu de lignes et de formes rigoureuses s’étendant sous un ciel parfaitement bleu. L’on ne peut être que fasciné par ces grands espaces horizontaux et silencieux surtout lorsque l’on sait qu’un jour ce lieu portera sans doute à son tour une nouvelle ville verticale.

La vision la plus lumineuse de Hong Kong est due à Lau Ching Ping. Loin de la pollution, du bruit, de l’encombrement, de la surpopulation, la ville qu’il montre est à nouveau ouverte sur la mer et la verdure. La lumière y pénètre à pleins flots, les bâtiments se dressent paisiblement dans la lumière du soir. Lau Ching Ping se laisse aller au plaisir de la couleur et nous le fait partager pleinement. L’espace semble s’étendre dans ses photos prises avec une distance qui éloigne les activités humaines et supprime tout effet de stress ou de précipitation. Les humains n’y sont présents que sous forme de couples qui du haut d’une colline contemplent la mer ou que de rares passants qui traversent des rues presque vides. Il y a une grande innocence dans ces images.

Dans le catalogue de l’exposition en vente au musée le professeur Matthew Turner écrit que « Ensemble ils illustrent un lent retour du réel après la longue période hongkongaise de “disparition” culturelle (cultural disappearance) ».Son essai intitulé Building on appearance, fait ironiquement référence à l’ouvrage du professeur Ackbar Abbas publié en 1997 Hong Kong Culture and the politics of Disappearance, et réfute les théories post-modernistes de l’auteur sur le devenir de la culture hongkongaise à l’époque de la rétrocession. Un essai intéressant qui relance le débat sur la nature de l’art de Hong Kong.

攝影


香港觀記── 朱德華、劉清平、王希慎、王禾壁攝影作品

由四位香港資深攝影家聯合展出作品的“香港觀記”標誌著本地藝術家以更深一層的手法來留住這座城市的景貌。近年經常看到的攝影作品不是有關這城市隱而不露的一面,便是有關都市的沉悶,或是一些被時光侵蝕而變得班駁剝落的牆壁,以及消失的舊區等等,如今驚然看到一個奪目耀眼的香港,甚至廢料回收站也染上了某種莊嚴樸素的純美感覺。然而,再怎麼說這些仍然是有關 城市文化遺產的消逝、城市的發展和它產生出來的大量廢物的景象,但它們卻是一種淨化了的景象,甚至可以說是令人喜悅的景象,因為當中的這座城市顯得很美麗。

這城市是否正在迷失其身份價值呢?從這些照片中看來並不是,它們同時展現了這城市的過去以及在這消失的地方之上正在重建中的現在。回歸中國曾經引起香港人的極度不安,更引發了可能是歷史上香港人首次反思身份和香港都市文化的特質等問題。當時掀起的尋根熱潮與其說是重新找回已被遺忘的過去,不如說是沉醉於昔日的香港,這導致人們在重塑過去歷史的時候往往帶點兒虛構的感覺。

在香港,有歷史價值的建築物已所剩無幾,而香港對保護文化遺產的政策長久以來幾乎是並不存在,或僅得寥寥幾個例子,這些建築物孤單又不合時宜地立在一遍高樓大廈之間,與原來的環境隔絕。在建築商的覬覦下,一座達至五十年樓齡的建築物很難有機會能留存下來。不過,回歸中國亦讓那些沒有移民離開的人對香港產生一種歸屬感。因而成立了一些保護海港,保存碩果僅存的歷史遺蹟的協會。

王希慎對香港的過去非常關注,專拍攝一些建於十九世紀具歷史價值的建築物或在今時今日同樣罕見,一些建於六十年代的農舍之外貌。但王氏的作品不單只是歷史性的紀錄:他對建築物的優美形狀和微暗的光線特別感興趣。就以聖約翰天主教堂那一輯相片為例,他拍攝每張照片都需時十五至三十分鐘的曝光時間,希望藉此將時間走過的痕跡具體地呈現在照片上。沒有半點人的蹤影讓那些建築物增添了平靜和隱世的感覺,彷彿此後,它們將陷於無盡的寂靜之中。王希慎的作品予人遺世孤獨、遠離鬧市和人煙,並帶有某種超現實的感覺。這裡我們完全看不到寫實攝影的蹤影。在他的作品中,雖然那些新界的農舍較具文獻紀錄的價值,但那些歷史建築物卻往往因為它們的構圖如畫般細膩完美,因而讓人誤以為它們是舞台的佈景。

Wong Wo Bik 王禾壁

王禾壁則對大眾文化比較有興趣,她展出的作品是一些於一九九七年,在當時已空置,拆卸在即的荔園遊樂場內拍攝的照片。荔園開業於一九四九年,是香港最早期的遊樂場之一,八十年代初仍然是無數兒童和成年人尋找刺激和樂趣的好地方。王禾壁留住那些廢置建築物的方法就是透過並置和其他的處理手法來重現這些影像:一些即將消失,充滿大眾化的畫像的地方,這些曾經在香港人生活中佔重要位置的地方現已消失得無影無蹤。或許有人會說她的作品只是重造歷史,但是所有的歷史都是經過人的記憶再重現,並根據現在的情況而不停地轉變。王禾壁的照片並沒有刻意營造懷舊之意,反而是捕捉了這〝夢幻樂園〞的魔力。這〝夢幻樂園〞雖然已被遺棄,但其魔力仍影響著我們。在香港迪士尼開幕的前夕看到這些照片實在是蠻有趣的。荔園的時代還未出現這種世界性統一的形象和娛樂。

Hisun Wong 王希慎

荔園遊樂場已完全被時間掩沒了,有很多人甚至不知曉它的存在。它的剩餘部份也全被送到廢物堆填區。破壞、消失,朱德華所紀錄的就是其間的過程,也是這過程表明了這城市的活力。這位素以黑白人像和靜物攝影聞名的攝影家走遍香港各處收集垃圾廢料的地方,並以冷靜疏離的目光,精準細緻的手法拍攝這些地方。陽光映照著的一池污水、五顏六色的塑膠瓶堆積如山、一堆堆的工業廢料…… 有朝一日也輪到這些廢料消失,然後又出現新的地景。朱德華就是以此來製作他的土地藝術:在睛空萬里的藍天襯托下,那些人工挖掘出來的山丘壕溝的幾何線條被勾勒出來,形成一幅幅形狀線條嚴謹,出乎人意料之外的風景照片。我們會不其然地被這些遼闊寂靜的空間所吸引,尤其是當我們知道終有一天,這些地方會相繼成為另一座新的城市。

Lau Ching Ping 劉清平

這次展覽中,劉清平讓我們看到的香港是最明亮的。他向我們展示一個遠離污染、喧鬧、擠塞和人滿之患,通向大海和綠洲的城市。那裡陽光普照,建築物安靜地豎立在夜色中。劉清平帶我們與他一同盡情地投入強烈色彩的樂趣中。在他那些以遠距離拍攝的照片中,因為遠離人文活動和刪除了所有壓力和匆忙的因素,空間也似乎變得更廣闊。在劉氏的作品中,人的蹤影只是藉兩個在山丘上俯瞰海景或寥寥數過正橫過馬路的人來表達。這些影像中有著濃濃的純真感覺。在專為是次展覽而出版的圖錄中,田邁修教授這樣寫道:“這四輯照片可說是建基於(相對消失的)‘現身'的創作,開啟一扇回歸‘寫實'的大門。”他這篇題為《“現身”說法》的短評也諷刺地提及Ackbar Abbas教授於一九九七出版的著作《香港消失的文化和政治》,並反駁這位作者在香港回歸時所作的分析,說香港的文化將會成為後現代文化。這篇精彩的短評就香港藝術的本質這題目再次引發新一輪的辯論。