Peinture
Texte : Frank Vigneron

Corps

Dans les études postcoloniales qui ont occupé nombre d’universitaires depuis plusieurs décennies déjà, certaines notions ont connu un riche destin dans le domaine de la critique d’art sérieuse et en particulier celle qui s’occupe de situer les œuvres d’artistes « voyageurs » ou déplacés. Trois notions en particulier viennent relativement souvent dans les textes traitant des artistes chinois ou d’origine chinoise dans le monde : celles de « culture partielle », d’hybridité et d ’« entre-deux » qui furent toutes pensées par l’un des plus célèbres représentants des études postcoloniales avec Edwar Saïd, le professeur Homi Bhabha (dont le nom est aussi parfois écrit Baba). Ces notions deviennent particulièrement intéressantes quand on considère les artistes chinois car ceux-ci se trouvent disséminés dans des domaines géographiques et idéologiques complètement différents tout en continuant à se reconnaître une sorte d’inhérence ou de nature culturelle qui les différencie du reste du monde. Ce que signifie « être Chinois » à ce niveau très profond n’est évidemment pas très facile à définir sans tomber dans les excès de nationalisme que les gouvernements du continent et parfois de Taiwan se rendent coupables : je ne me chargerai pas de donner cette définition, d’autres le feront mieux que moi, mais c’est plutôt dans l’universalisme et la générosité intellectuelle d’auteurs comme Lu Xun (魯迅), (qui me rappelle si souvent Montaigne) que je reconnais ce que Chinois veut dire. Que l’on songe aux nombreuses façons d’être Chinois dans toutes les régions si variées du vaste continent, sur l’île de Taiwan, à Hong Kong, à Macao, à Singapour et dans toutes les communautés chinoises vivant dans la quasi-totalité du monde et l’on commencera à mesurer à quel point l’étude de l’art provenant de cette multiplicité peut être passionnant et plein de richesse.

Cette richesse provient précisément des contradictions internes de ces mondes et de la conscience d’appartenir à une même sphère culturelle. C’est apparemment une des tendances actuelles : la mondialisation économique semble être accompagnée par un retour vers les traditions culturelles locales (que l’on regarde en France la popularité des écoles bilingues qui réutilisent les langues locales comme le basque ou le breton). En tous les cas, sur le plan purement culturel, c’est-à-dire sur le plan des arts et, en ce qui me concerne ici, des arts plastiques, la mondialisation a pour le
moment de nombreux aspects positifs en dépit du fait qu’il y ait un certain appauvrissement d’une certaine culture populaire (en particulier la musique dite « pop » contrôlée par un nombre restreint de grands groupes commerciaux qui nous forcent à écouter le même genre de musique un peu partout dans le monde avec parfois des résultats déastreux, comme ces musiciennes utilisant des instruments de musique chinois pour jouer des versions funk de musique classique occidentale… immonde hybride).

Cette localisation culturelle me semble très claire en ce qui concerne Hong Kong. La Région Administrative Spéciale, ancienne colonie britannique, a été formée par des forces historiques et économiques qui ont poussé ses habitants à développer une culture locale qui les protégerait d’une hégémonie sentie comme externe. Contre les Anglais d’abord et, il faut bien le dire, contre le continent ensuite, les Hongkongais ont créé une véritable culture basée sur leur langue, le cantonais de Hong Kong, et une tradition résolument populaire prenant principalement la forme du cinéma et de la chanson. Si certains étrangers ont la sensation d’être nulle part quand ils sont à Hong Kong, c’est justement parce que cet endroit a créé une culture, il est vrai hybride, mais unique au monde. Comme je viens de l’expliquer, le terme d’hybride n’est désormais plus négatif d’ailleurs. L’autre notion créée par Homi Bhabha, celle d’« entre-eux » (in-between), peut s’avérer riche d’enseignement : comme par le passé, les Hongkongais sont entre deux cultures (mais attention, cela n’a rien à voir avec l’ancien cliché de « East meets West » qui, à mon avis, ne veut rien dire). Une magnifique illustration de cette inconfortable mais féconde situation a été faite par un artiste de Hong Kong mais qui a longtemps habité en Angleterre, Lukas Tam (譚偉平), dans ce montage de ventilateur poussant en des forces contradictoires le carton central qui oscille sans cesse et sans jamais tomber.

Plus d’échanges et des dialogues de plus en plus riches et de plus en plus enracinés dans des traditions qui, il n’y a pas si longtemps, auraient été complètement fermées les unes aux autres, la mondialisation satisfait déjà à ses promesses pour un nombre énorme d’artistes à travers le monde. Ce qui veut aussi dire, bien sûr, que les traditionnels centres de l’art moderne sont en passe d’être détrônés en faveur d’une véritable décentralisation culturelle sinon économique (l’Europe à 25, par exemple, permet à plus d’artistes de faire entendre leurs voix, même s’ils s’appuient encore presque exclusivement sur les marchés de l’art de l’Europe de l’ouest et de l’Amérique du nord). On l’a déjà vu dans l’article précédent, il n’est pas nécessaire de voir l’intérêt actuel pour le corps dans les œuvres d’artistes chinois dans une occidentalisation qui aurait gommé la nature chinoise de l’art, le corps y était présent depuis fort longtemps, même si sa présence se manifestait dans des formes et des concepts étrangers à l’Occident.

Les thèmes abordés par les artistes utilisant leur propre corps sont infiniment variés, je choisirai donc deux plasticiens plus particulièrement engagés dans des problématiques politiques et culturelles. D’abord Zhu Fadong (朱發東) (1960-), qui se penche sur les dramatiques problèmes du libéralisme sauvage, dans lequel l’individu n’est vu que comme instrument de production, et de la relocalisation des populations en quête de travail sur le continent, relocalisation qui est le plus souvent très mal vécue par les Chinois attachés à leur lieu de naissance. On pourrait d’ailleurs noter que ce problème avait déjà fait partie de toute une tradition de poésie sur le mouvement de réfugiés dans le passé lointain, avec des exemples dans le Classique de la poésie (詩經) (cinquième siècle av. J.-C.), et dans la poésie du Du Fu (杜甫) (712-770). Pas de rupture avec le passé, la forme et les questions sont réactualisées. Dans un autre registre, celui des questionnements sur la division naturel/culturel dans les comportements, Ma Liuming (馬六明) (1969-) utilise ses traits extrêmement féminins pour nous demander en face ce qui fait une femme et ce qui fait un homme. Ce questionnement sur les problèmes de genre et de comportements sexués sont souvent mis en scène dans le contexte de performances avec une active participation du public. Encore une fois, il n’y a pas de rupture avec le passé, puisque les femmes guerrières de la littérature ancienne et du cinéma populaire avaient déjà posé la question d’une autre façon. Encore une fois, la forme et les questions sont réactualisées, et il n’est pas nécessaire de chercher en Occident la source de ces manifestations artistiques en Chine.

L’artiste hongkongais qui fait sans doute intervenir son propre corps le plus souvent dans son oeuvre multiple est Ho Siu Kee (何兆基) (1968-). A ceux qui penseraient encore que l’art à Hong Kong ne revêt qu’une forme assez provinciale, il sera bon de dire que Ho Siu Kee est un artiste à la réputation internationale et qui a exposé dans de nombreuses expositions en Chine, en Europe et en Amérique (comme les biennales de Venise et de Sao Paulo). Comme il l’indique dans un ouvrage publié l’année dernière et qui, si je ne m’abuse, était une partie de son doctorat de beaux-arts, celui-ci fait intervenir dans son œuvre la philosophie de Maurice Merleau-Ponty, un des philosophes qui, je le crois, permettrait aux Occidentaux de mieux comprendre les arts traditionnels de la Chine tels que la calligraphie. Nous avons donc affaire à un artiste très professionnalisé dans le sens où ses recherches formelles s’appuient sur une base théorique très étroitement impliquée dans ses travaux multimédias, ses sculptures et son œuvre graphique. Dans ce montage digital, assez caractéristique de son travail d’il y a quatre ou cinq ans, Ho Siu Kee met son propre corps en scène dans une exploration de l’idée d’évolution.

Nombreux sont les artistes contemporains à travers le monde qui, pour mettre en scène le corps, utilisent la vidéo. Membre essentiel du groupe d’artistes vidéos de Hong Kong appelé Videotage, Ellen Pau (鮑靄倫) (1961-) a utilisé ce médium avec un succès aussi grand que Ho Siu Kee, même si celle-ci se cantonne à la vidéo qui lui semble être ce que les critiques de la Nouvelle Vague en France dans les années cinquante avait voulu appeler la « cinéma-stylo » (et il faut bien dire que ce rêve est devenu réalité avec la technologie digitale). Cette vidéo intitulée Chant de la déesse a été réalisée en 1992, l’année de la mort d’un des sujets de cette œuvre, la fameuse chanteuse d’opéra cantonais Yan Ginfai (任劍輝). Cette étonnante actrice, spécialisée dans les rôles de jeunes lettrés (j’ai mis des années à savoir que c’était une femme), était la compagne de celle qui fut aussi son partenaire à l’écran, Bai Xuexian (白雪仙). Toute deux avaient décidé de se retirer de la scène et de l’écran en 1966, mais avaient continué à enseigner leur art. Les implications de ce travail d’Ellen Pau sont nombreuses et parfois complexes et traitent autant du rapport de la vidéo et de l’art corporel avec le théâtre, que du rapport de l’artiste elle-même avec les aspects purement visuels de son montage, sans oublier les questions de sexualité que ce couple n’a cessé de poser. On doit y trouver aussi une dimension supplémentaire dans le fait qu’Ellen Pau a fait usage pour cette vidéo de scènes du film intitulé le Chant de la déesse et qui parle du célèbre poème de Cao Zhi (曹植), (192-232), sur la déesse de la rivière Luo (Luoshen 洛神). D’une façon certainement plus subtile que Ma Liuming, et aussi d’une façon difficile à saisir à moins d’être familier de la culture cinématographique de Hong Kong, Ellen Pau parle de la fine ligne qui sépare les comportements sexuels des hommes et des femmes puisque le rôle du jeune lettré séduit par la déesse était une femme qui ressemblait à un homme (au contraire de Ma Liuming qui ressemble à une femme) et partageant sa vie avec une actrice jouant le rôle d’une déesse rejetée par le lettré. Vous suivez ?

Au-delà de ces exemples, la vidéo a été très vite utilisée avec une maîtrise époustouflante par les artistes chinois du continent, de Taiwan et de Hong Kong. Il est vrai que les plasticiens utilisant la vidéo sont légion de nos jours, ceci bien sûr grâce au fait que le matériel est de moins en moins cher et de plus en plus performant, et proviennent de tous les horizons et de tous les pays. On pourrait cependant arguer que la dimension temporelle de la vidéo, qui la relie aux arts de la scène et au cinéma avant toutes choses en Occident, a de tout temps aussi existé dans les arts plastiques visuels en Chine (ce qui me fait croire que l’adoption de la vidéo par les artistes chinois a ainsi été d’autant facilitée). Si, en Europe, la peinture a pendant très longtemps été vue comme une unité appréciable sur une perception du temps très différente des arts littéraires (c’est par exemple un des thèmes du Laocoon de Gotthold Ephraim Lessing, 1729-1781), nombreuses étaient les peintures qui exigeaient du temps, et un temps qui s’écoule visiblement, pour êtres appréciées. Beaucoup d’artistes occidentaux ont été fascinés par cette forme picturale complètement étrangère à leur tradition, comme David Hockney (1937-) qu’on voit ici observer un interminable rouleau horizontal. Il est peut-être ainsi possible de voir la vidéo comme une sorte de continuation de la forme du rouleau horizontal qui demandait du temps pour être appréciée (alors que la notion de gestalt du modernisme tardif tentait d’évacuer cette notion de temps dans l’appréciation d’une œuvre). L’idée du rouleau horizontal a déjà été utilisée par les cinéastes de la « cinquième génération », comme Chen Kaige (陳凱歌) et Zhang Yimou (張藝謀) et le titre d’une des vidéos d’Helen Pau était justement Recycling cinema. La vidéo serait-elle la forme la plus poussée d’une hybridation de l’art contemporain ?



繪畫

人體

對於後殖民主義,幾十年來,許多大學學者對此努力不懈,精心研究。一些概念在嚴肅藝術批評領域裡頗受爭議關注。尤其是如何界定“旅遊”藝術家或稱四海為家的藝術家的作品。在論述中國藝術家或世界各地的華裔藝術家的論著裡,比較常見的是“局部文化”、混雜及“之間”這三個概念。與愛德華.賽伊德(Edward Saïd)齊名的後殖民主義研究者霍米.巴巴(Homi Bhabha)教授(有時也簡稱Baba)對這幾種概念都作了思考。中國藝術家散居世界各地,彼此之間思想意識迥然不同,但都一致認同自己有別於世界其他地方的固有的、共同的文化之根。因此在考察他們時,這些概念便顯得格外有意思。所謂“中國人”,欲從深層意義上去定義而不墮入極端民族主義的泥淖實在不易為。這點,大陸中國政府及台灣當局都有責任。我不打算對何謂中國人貿然下定義,其他人會比我做得更好。對何謂中國人,我通常是從魯迅(他常令我想起蒙田)這樣一些作家的世界性及學者的博大胸懷去認識的。在廣袤的中國大地如此不同的地區,還有台灣、香港、澳門 、新加坡以及幾乎遍佈全球的華人社區都有以不同方式生活的中國人。於是,人們開始意識到對這種品目繁多的藝術的研究該多麼引人入勝和豐富多采。

這個豐富性來自華人世界的內部矛盾及對同屬一個文化圈的認同。目前一個明顯的傾向為:全球經濟一體化似乎伴隨著對地方文化傳統的回歸(如法國,許多學校進行雙語教學,重新教授巴斯克語、布列塔尼語等。)總之,在純文化方面,亦即在藝術方面,對我而言則是造型藝術方面,全球化目前還是有許多值得肯定的地方,雖然一些大眾文化還相當淺薄(尤其是一些為少數商業財團操縱的所謂“流行”(Pop)音樂,強迫我們聽那些在世界各地幾乎相同的、不堪入耳的音樂。例如那些用中國樂器將西方古典音樂演奏得如同鄉土爵士樂的女郎們⋯⋯可謂粗劣的大雜燴)。

我覺得香港文化地區的定位非常清晰。這個特別行政區、前英國殖民地由促使其市民發展一個地方文化的歷史和經濟力量構成。這文化保護他們免遭霸權文化的傷害。首先是針對英國人,接著是針對中國大陸。香港人創造了基於自己的語言香港廣東話的真正文化,以及主要以電影與流行曲為形式的民間文化傳統。如果初來乍到的外國人有茫然不知身居何處的感覺,那是因為這地方創造了一種文化,不錯是混雜的,但卻是世界上獨一無二的。我已經說過,混雜這一詞語不再含有貶義。霍米.巴巴創造了另一概念,稱作“之間”(in-between)。這個概念含義豐富:一直以來,香港人都處於兩種文化之間(但請注意,這與“東西交匯”的老生常談毫無共同之處)。這種尷尬的、但內容豐富的地位,曾旅居英倫的香港藝術家譚偉平的一件裝置藝術品有精彩的演繹。這是置於左右兩邊、每邊上下各一台風扇的裝置,兩股方向相反的風吹向置於中間的紙板,紙板不停地左右搖擺,卻永遠跌不下來。

出現了更多的交流,愈來愈豐富、愈來愈植根傳統的對話,而這些傳統曾幾何時是互不溝通的。對於遍佈世界各地為數眾多的藝術家,全球化已履行了它的諾言。當然,這也意味著現代藝術的傳統中心正在轉移,為真正的文化多中心所取代(例如擁有二十五個成員國的歐洲共同體便允許更多藝術家展現才華,雖然他們還十分依賴西歐及北美的藝術市場)。我在其他文章裡已經提過,無需再探視當今中國藝術家的作品裡對人體的興趣,這些作品的西方表現手法抹煞了中國藝術的特點。人體在中國藝術裡存在已經很長時間了,儘管它的表現形式和觀念與西方迥異。

藝術家用自己的身體進行創作所涉及的題材可謂千變萬化。這裡選擇了兩位積極介入文化和政治論爭的兩位造型藝術家。首先是朱發東(生於1960年),他探討了個人在其中淪為生產工具的瘋狂的自由經濟以及外地勞工的嚴峻問題。對於鄉土觀念濃重的中國人,離鄉背井到外地打工謀生,情況堪憐。其實這個描寫百姓流離遷徙的主題早已成為中國古代詩歌的一部份。在詩經(公元前五世紀)及杜甫(712-770)的詩裡都不乏其例。和歷史並無割裂,只是形式和問題現代化了。在另一問題,即行為的自然文化區分上,馬六明(生於1969年)利用其非常女性化的線條向我們直接提出這樣一個問題:究竟甚麼構成女人,甚麼構成男人。這個關於性別和男女行為的問題經常被搬上舞台並深受觀眾歡迎。再次見到和歷史並無脫節。只是中國古典文學與大眾電影的巾幗英雄以不同的方式將問題提出罷了。中國的這些藝術表現,無需到西方去尋找源頭,那是徒勞的。

香港藝術家中最頻繁地利用自己身體進行藝術創作的首推何兆基(生於1968年)。對於那些認為香港藝術只是地區性的人,應該知道何兆基是一名享有國際聲譽的藝術家。他的作品曾在中國、歐洲和美洲多次展出(如威尼斯及聖保羅雙年展)。在他去年發表的一本著作裡,如果我沒有搞錯的話,這是他有關藝術的博士論文的一部份,何兆基引用了莫里斯.梅洛-龐蒂(Maurice Merleau-Ponty 1908-1961)的哲學思想。這位藝術家的著作可令西方人更好地瞭解如書法等中國的傳統藝術。何兆基是一位極專業的藝術家,他的研究依據的是和他的多媒體創作、雕塑、繪畫等藝術實踐緊密聯繫的理論基礎。這張極能代表他四、五年前特徵的數碼照片裡,何兆基利用自己的身體探索了進化的思想。

世界上為數眾多的當代藝術家利用錄像將自己的身體融入創作中。香港一個以錄像為創作手段的藝術家組織稱作“錄像太奇”(Videotage),鮑靄倫(生於1961年)為其基本成員。和何兆基一樣,她成功地利用了這媒體進行創作。儘管她只限於利用錄像,她覺得這正是五十年代法國新浪潮批評家們稱作“微型攝像筆”(caméra-stylo) 的東西(應該說隨著數碼科技的發展,這個夢想終於實現了)。這個錄像片英文名為Song of the Goddess(《似是故人來》),攝於一九九二年,即片中主人公之一的著名粵劇演員任劍輝逝世那年。這位傑出的表演藝術家擅長演文人才子的角色(我是多年之後才知道她是女兒身的)。她是白雪仙的密友。白氏亦是她舞台和銀幕上的好搭擋。一九六六年,她們倆決定退出舞台,但沒有停止工作,而是收徒授課,把自己的藝術傳予後人。鮑靄倫的錄像片包含的內容非常豐富,它探討了錄像、人體藝術和戲劇的關係,以及藝術家本人和她影片純視覺方面的關係。當然,也沒有忘記因這兩位傑出藝人而不斷引出的性別取向的問題。即使鮑靄倫在這個錄像裡利用了電影《李後主》的場景,我們卻不難聯想起這兩位藝人,皆因任劍輝亦曾在電影《洛神》中演出。影片講述著名詩人曹植(192-232)於洛水之濱與女神相遇的故事。她以比馬六明更加細緻、更難以掌握的手法(除非你熟悉香港電影文化),探討那分別男女行為的極細微的界限。被女神的美色所引誘的一介書生是一個貌似男人的女人(恰恰相反,馬六明卻是男身女相)並和一個扮演被書生拋棄的女神的女演員一起生活。大家可抓住要領?

除了這些例子外,攝像機很快被中國大陸、台灣及香港的藝術家驚人純熟地運用。今天,利用攝像機創作的造型藝術家多不勝數,他們來自世界各地,這原因全賴器材的日愈廉宜和功能的日愈完善。我們可以作出這個結論,在西方,首先和舞台藝術及電影聯繫在一起的錄像時間意義,在中國卻一直存在於視覺造型藝術中(因此我想正是由於這點,中國藝術家才能輕而易舉地接受攝像機)。在歐洲,長久以來,繪畫從時間角度審視,被認為是與文學詩歌十分不同的(這也是萊辛(Lessing 1729-1781)在《拉奧孔》論述的主題之一)。許多繪畫需要時間,需要許多時間才能欣賞。許多西方藝術家面對與他們的傳統完全陌生的繪畫形式時被深深吸引住。如這裡見到的大衛.霍克尼(David Hockney,生於1937年)是怎樣驚奇地欣賞一幅長長的橫幅的情景。因此,可以把錄像片視為那長長的、需時欣賞的橫幅的繼續(晚期現代主義“格式塔”(gestalt) 的概念,便是試圖在藝術欣賞裡摒棄時間這個概念)。橫幅的理念已經在“第五代”電影製作人如陳凱歌、張藝謀的影片描寫風景的場景裡運用。而鮑靄倫的其中一部錄像片的片名正是叫《再循環電影》(Recycling cinema)。錄像片是否是當代藝術混合的極端形式?