Exposition
Texte : Eric Sacher

Attention : Dédale Dada à Paris !

Après l'exposition de 1966, DADA revient au centre Pompidou à Paris. Jusqu'au 9 janvier 2006, le visiteur égaré à Paris trouvera son chemin pris par la main par DADA. L'histoire de ce mouvement éphémère mais sublime secoua les arts et les lettres au début du Xxème siècle. Il nous revient, presque cent ans après, avec toute sa vigueur et son actualité.

1916. En pleine guerre mondiale, est fondé à Zurich le mouvement dadaïste du Cabaret Voltaire. Très vite, c'est la contagion. Dada essaime à Berlin, Hanovre, Cologne, New-York, Amsterdam, Bruxelles et bien sûr à Paris, Dada-capitale ! Dada, en réponse à un monde qui s'autodétruit. Dada en réponse à l'incompréhension de la folie humaine.

Dada est révolte. Dada ne connaît ni règles, ni limites. L'art est bousculé, renversé à l'image de La Fontaine de Duchamp, urinoir que l'intervention de l'artiste range au rang d'œuvre d'art. L'écriture devient automatique. La littérature devient cadavre (...exquis bien sûr) ! Par ses « ready-made », créations de la société de consommation naissante que l'artiste décrète « œuvre d'art » juste par exposition, Duchamp révolutionne le concept même de l'art. Renvoyé dans l'espace de la subjectivité, l'art devient accessible à tous : il est là pour apporter de nouvelles questions, pour mettre en doute ce qui semblait acquis ; il n'est plus là pour apporter des réponses ou pour servir le pouvoir établi.

Mais surtout Dada est partout : sur tous les continents et sous toutes les formes de l'art. La poésie et la littérature avec Paul Eluard, André Breton, Louis Aragon, Tristan Tzara. La peinture et la sculpture avec Otto Dix, Man Ray, Marcel Duchamp. Dada est également son et image avec le théâtre et le cinéma. L'exposition nous offre à ce sujet une véritable prouesse de la technologie moderne mise au service de la folie Dada. Les visiteurs pourront écouter l'interprétation contemporaine du poème simultané DADA de 1916 « L'Amiral cherche une maison à louer », proposée avec l'aide de l'IRCAM par le compositeur Gilles Grand : dans une pièce entourée de murs blancs se projette à l'infini ces sons et ces murmures venus d'ailleurs : Dada revit ! Il est là et nous parle encore !

La force de cette nouvelle exposition du Centre Pompidou est la large place faite à l'écriture DADA et à l'histoire du mouvement DADA sous toutes ses formes. Plusieurs textes dadaïstes (en des langues multiples !) sortent de leur oubli et offrent aux visiteurs un véritable plaisir de lecture : à lire avec le sourire aux lèvres !

L'exposition est fidèle à la pensée DADA : à la fois jeu d'échec et damier infini de cases, DADA-expo est systématique, mais son labyrinthe n'enferme pas le visiteur : il le libère. Au sein de ce damier géant de cellules consacrées à des étapes géographiques (Cologne, Belgique, Berlin...), temporels (Avant dada, Galerie Dada, Fins...), thématiques (Paris Expositions, Paris Littérature, Paris Manifestations, Chance-Jeu-Hasard...), techniques (Ready-Made, graphisme, sons Dada, anti-peinture...)  ou humains (Tzara, Arp, Ernst, Duchamp-Picabia...), le spectateur est libre de son chemin, de revenir sur ses pas. La règle de la grille, le sens de l'exposition, c'est le visiteur lui-même qui en a la charge. C'est le visiteur lui-même qui donne son sens à l'œuvre. Dada se choisit et s'interprète. Il ne s'impose pas.

Dada est le point de départ des nouvelles techniques qui donneront naissance à ce que nous appellerons l'art contemporain, l'art du vingtième siècle. Ainsi, le collage est aux arts plastiques ce qu'est le cadavre exquis à la littérature : l'association de différentes parcelles issues d'affiches et d'objets de la vie quotidienne, qui, en s'associant, prend une tout autre signification. Dada en se révoltant, en déchirant, en renversant, en détruisant un monde pré-construit avec son système de pensée pré-établi, reconstruit pour nous un autre monde, pour nous faire voir une autre vérité.

« Dada se charge de la police à pédales et de la morale en sourdine » (Tristan Tzara.)

Dada était un cri nihiliste contre une société de conventions, contre le monde bien ordonné de la morale et l'oppression de la pensée officielle. L'espace de liberté créé par Dada n'a connu aucune frontière. Dada, c'était tout. Tout était Dada. Et pourtant, Dada n'a aucune ambition. Au début des années 20, plusieurs artistes finissent par quitter le mouvement, mais Dada ne s'éteint pas, ne meurt pas (comment le pourrait-il puisqu'il est tout et rien à la fois ?). Il est juste une naissance, une transition vers d'autres mouvements comme le surréalisme qu'André Breton officialise en 1924. Il s'est contenté d'être à la fois éphémère et éternel. Éphémère à travers ses huit ans de bons et loyaux services, éternel car il a construit et continue d'influencer la création artistique contemporaine. Il n'est plus que jamais d'actualité dans un monde où la diversité est menacée par l'unicité d'une pensée mondialisée, globalisée et médiatisée.

« Dada lui ne sent rien, il n'est rien, rien, rien.
Il est comme vos espoirs : rien
Comme vos paradis : rien
Comme vos idoles : rien
Comme vos héros : rien
Comme vos artistes : rien
Comme vos religions : rien »
(Francis Picabia)

Il y a de l'humour dans Dada, de la dérision, de la provocation. Il y a aussi une pointe de mélancolie. C'est que Dada sait que l'homme n'est pas éternel. En 2005, Dada nous fait encore sourire, nous fait encore plaisir, mais surtout nous fait toujours réfléchir au sens de notre propre expérience terrestre.

展覽

注意:巴黎的達達迷宮

在1966年的展覽之後,達達又回到蓬皮杜中心來了。從現在直至2006年1月9日,巴黎迷 途的參觀者將在達達的提攜下找到了出路。這個轉瞬即逝然而高尚的運動震撼了二十世 紀的文學藝術。在將近百年之後,它又生氣勃勃,充滿現實感地回來了。

1916 年,第一次世界大戰的戰火正熊熊燃燒,在蘇黎世伏爾泰酒店達達派運動正式成立了。它很快便蔓延開來。遍佈柏林、漢諾威、科隆、紐約、阿姆斯特丹、布魯塞爾,當然還有巴黎,達達之都!達達回答這個自我毀滅的世界。達達回答不可理解的人類的瘋狂。

達達是反叛的。達達不知道規則,亦不知道界限。隨著杜尚的《泉》(La Fontaine)的問世,藝術被衝擊、被顛覆。杜尚竟將小便池搬上藝術殿堂。寫作變成自動了,文學 變成了屍體(……當然是精緻的!)。利用新生的消費社會的產品,即〝現成物〞(ready-made),藝術家將它們展出,宣佈了一種〝藝術作品〞的誕生。杜尚革了藝術 概念的命。藝術一旦被投向主觀空間,即變得人人都可接受。藝術在那兒提出新的問題,對看來習以為常的事物提出質疑;它在那兒不再是僅僅為了回答,或為現存的權勢服務。

尤其值得注意的是達達無處不在:它以各種藝術形式出現在世界各大洲。詩歌和文學方面,有保羅.艾呂雅、安德烈.布勒東、路易.阿拉貢、特里斯坦.查拉。繪畫與雕塑方面,則有奧托.迪斯(Otto Dix)、曼.雷、馬塞爾.杜尚。尚有戲劇和電影,都有達達的聲音和形象。展覽會為更好地展示瘋狂的達達,大膽地採用了新科技。觀眾可聆聽到 1916 年達達的同步詩歌《海軍師令尋房租》(L'amiral cherche une maison louer)的當代演繹。這是在〝音樂音響協調研究所〞(IRCAM)的協助下,作曲家吉勒.格朗(Gilles Grand)的傑作:在一間四週圍著白色牆壁的房間裡,不停地播放著這來自他方的聲響和叨叨絮語:達達復活了!它在那兒,還在向我們訴說!蓬皮杜中心的這場風格清新的展覽著力以大幅空間展出達達的文學建樹及各種形式的達達運動的歷史。一些達達派的詩文,以各種語言從遺忘中走出,饗以參觀者一次真正的閱讀之樂, 嘴角帶著微笑地閱讀!

展覽忠實於達達的思想:展廳佈置巧妙有序,它是一個有許多大方格組成的棋盤,也是一盤棋局。然而這迷宮絕不將參觀者禁錮,而是將他解放。在這個巨大的棋盤裡,觀眾可隨意走動,或向前行,或往回走。有標出地理位置的大方格:科隆、比利時、柏林等;有表示時期的大方格:達達誕生前、達達畫廊、結局等;有展示主題的大方格:巴黎展覽、巴黎文學、巴黎活動、運氣-遊戲-偶然等;有展現技巧的大方格;現成物、圖畫、達達音樂、反繪畫等。還有介紹人物的大方格:查拉、阿爾普、恩斯特、杜尚、庇卡比亞等。棋局的規則、展覽的意義,則由參觀者自行決定,由觀眾自己解讀達達的藝術作品。達達任由你選擇、任由你解釋。它不強加於人。

達達是新技術的出發點,它催生了被稱為當代藝術的二十世紀藝術。這樣,粘貼之於造型藝術,就好比精緻屍體之於文學。由海報及日常生活用品取來的各種碎片,被重新組合起來,便含有了新意。達達反叛、撕裂、顛覆、摧毀一個現成的世界以及它的既定思想體系,為我們建立另一個世界,讓我們看到另一個真理。

〝達達負起了踩踏板的警察和減弱了的道德的責任。〞— 特里斯坦.查拉

達達高聲作出虛無主義的呼叫,反對習俗社會,秩序井然的道德世界及官方的思想壓迫。達達開創的自由空間沒有國界。達達是一切,一切是達達。然而,達達卻沒有野心。二十世紀初,一些藝術家中途離去。但達達並無熄滅,並沒死去(既然它是一切又一切都不是,又怎會死去呢?)。它是一個新生兒,是通向其他運動的過渡。如1926年由安德烈.布勒東宣告成立的超現實主義。它既滿足於曇花一現,亦滿足於永垂不朽。八年的兢兢業業,誠懇耕耘後,它匆匆離去。它開創了當代藝術並繼往開來,名垂青史。現在,在多樣化被全球化、世界化、功利化這個大一統威脅著的當今這個世界裡,達達比任何時候都顯得更有現實意義。

〝達達毫無聲息,它甚麼都不是,空空如也。
它好比你的希望    :一場空
好比你的天堂    :一場空
好比你的偶像    :一場空
好比你的英雄    :一場空
好比你的藝術家    :一場空
好比你的宗教    :一場空〞
— 弗朗西斯.庇卡比亞

達達是幽默、嘲諷、挑釁。也有一絲憂愁。因為達達知道人類並不永生。2005年,達達還讓我們展顏微笑,讓我們快樂,尤其讓我們永遠思考我們寄身凡塵的意義。