Peinture
Texte : Gérard Henry

Marc Rothko : de la couleur aux profondeurs de la conscience

L'une des figures de proue de l'expressionnisme abstrait qui se développera aux Etats-Unis après la seconde guerre mondiale, Mark Rothko va mener un chemin solitaire qui, au-delà de la forme et de la couleur, crée un « état d'émotion » qui fait entrer directement le spectateur dans le tableau et dans les profondeurs se sa propre conscience.

Le musée d'art de Hong Kong présente 27 tableaux en provenance de la National Gallery of Art de Washington, retraçant le parcours pictural de Rothko, l'un des plus grands peintres de la deuxième partie du XXe siècle et sans doute celui qui a donné à la couleur une présence vivante et palpable. Une œuvre qui montre de nombreux tâtonnements avant qu'il ne trouve un chemin où donner sa pleine mesure.

Né en 1903 dans une famille juive de Dvinsk en Russie, Marcus Rothkowitz émigre à Portland aux Etats Unis en 1913 avec toute sa famille. Entre 1922 et 1924, il suit des cours à Yale où avec ses condisciples, il crée une revue d'avant-garde, The Yale Saturday Evening Pest, et s'intéresse surtout à l'art dramatique, mais ne parvient pas à obtenir de bourse pour le « American Laboraty Theatre ». Il suit alors des cours de design et de dessin, adoptant sur les conseils de son professeur, une manière cézanienne, avant de rencontrer le peintre Milton Avery qui influencera son œuvre de jeunesse jusqu'au milieu des années 30. Il donnera alors des peintures figuratives aux couleurs sourdes, centrées sur des scènes de rue et de métro dont l'ambiance générale est plutôt dépressive. Il vit alors à New York, enseigne à la Center Academy of Brooklyn et est l'un des membres fondateurs du groupe des Dix, peintres de New York d'inspiration expressionniste qui affirment leur dégoût du conservatisme de l'époque et leur désir d'expérimenter. En 1940, il prend le nom de Mark Rothko et entame une nouvelle recherche sur des thèmes mythologiques placés dans une perspective universelle, donnant place dans ses tableaux aux oiseaux, aux plantes et aux formes sculpturales primitives. Il expose beaucoup et fréquente Motherwell, Pollock et Rosenberg. L'influence des peintres européens comme Joan Miro et André Masson et des surréalistes réfugiés aux Etats-unis pendant la guerre se fait alors fortement sentir dans son œuvre.

La fin des années 40 est une véritable époque de rupture et va montrer un grand changement dans son œuvre : les formes figuratives vont disparaître, peu à peu noyées dans la couleur. Ne reste qu'une surface plane monochrome, où se superposent verticalement deux ou trois formes rectangulaires d'où la couleur irradie. Ces rectangles ont des bords indéfinis, ce qui donne l'impression qu'ils flottent sur la toile. Rothko utilise une infinité de tons, de légères variations de couleurs, de différences de texture qui rendent la couleur vivante. Ses couches superposées de pigments et aussi l'utilisation d'anciennes techniques comme la tempéra (la peinture à l'œuf) donne à ses couleurs une profondeur indéfinissable, créant ainsi une lumière intérieure à la peinture. Il parle lui-même de « contraction et d'expansion » de la couleur, de transparence et de densité et expose ses tableaux à hauteur du sol afin qu'ils soient proches du spectateur et que celui-ci puisse y pénétrer, alors entraîné dans une véritable expérience spirituelle. Rothko nous plonge dans un espace de silence où la lumière vibre doucement et appelle à la méditation.

Ces accords de couleur vont ensuite se simplifier dans son œuvre, s‘approfondir et s'assombrir dans une longue série de rouges et bruns où les formes du rectangle disparaissent et le tableau semble s'ouvrir sur un gigantesque portail. Cet assombrissement va aller jusquà des toiles monochromes noires, comme si, après l'extrême sensualité des couleurs des débuts Rothko refusait le piège de la couleur et allait vers une ascèse qui se marque par le dénuement et la simplicité, voire l'austérité. De ses tableaux très sombres émane une lumière intérieure qui gagne le spectateur qui sait s'arrêter.

Son œuvre reste cependant mystérieuse et ne saurait s'expliquer par des mots. Ses derniers tableaux, avant son suicide en 1970, sont des gris et blancs austères, des tons durs parfois d'où toute sensualité est absente. Certains artistes de ses contemporains y lisent une grande tristesse, d'autres y voient une spritualité, une pureté détachée de tout sentimentalisme, « une lumière venant du sombre ».

 

繪畫

馬克.羅斯科:發自內心的色彩


‧Underground Fantasy, c.1940 (Oil on Canvas 87,3 x 118,2 cm)

馬克.羅斯科是自第二次世界大戰後在美國藝壇上興起的抽象表現主義畫派的一位中心人物,後來他獨自進行探索,在形狀和色彩以外創造一種〝感情狀態〞讓觀眾直接進入畫中,接觸他的內心世界。

香港藝術館這次展出的二十七幀作品全部來自華盛頓國立美術館,它們展示了這位二十世紀下半葉其中一位最偉大的畫家的不同創作歷程。從中更可以看到他在創作上所作的無數探索到後來找到屬於自己的成熟風格。

馬克.羅斯科1903年出生於俄國的一個猶太人家庭,1913年與全家人移居美國波特蘭市。1922至1924年他在耶魯大學攻讀其間與同學創辦了前衛雜誌《耶魯星期六晚疫症》(The Yale Saturday Evening Pest),當時他對戲劇藝術特別感興趣,但可惜爭取不到美國實驗劇社的獎學金。因此他選修設計和繪圖的課程,並在教授的建議下採用一種塞尚式的風格創作,直至他結識了畫家米爾頓.艾弗利(Milton Avery),後者的作品深深影響著他年青時代到三十年代中的創作風格。他當時創作的形象派畫色彩陰暗,主要是以街頭或地下鐵路的一些令人消沉沮喪的景色作為主題。那時他在紐約生活,在布魯克林中央學院授課,更是表現主義團體〝十〞的創始成員。這團體是由一班紐約表現主義畫家組成,他們團結一起的目的是要表達他們對當時的保守主義之不滿以及對探求新意的欲望。1940年,他改名馬克.羅斯科,並開始以希臘神話、原始藝術等題材進行創作,因而在畫布上出現了一些形態和形狀原始的植物和雀鳥。他經常展出作品,而他的畫風很明顯是受到米羅和安德烈.馬松等這些在戰時流亡美國的歐洲超現實主義畫家的影響。

四十年代末期對羅斯科來說是一個突變的時期,他的作品出現了重大的轉變:那些形象主義的形狀逐漸消失在色彩中,只留下一些巨大的色塊,配以朦朧柔和的邊緣,簡潔單純地懸浮在畫布上。羅斯科採用無限的色調,透過顏色深淺度的輕微改變和不同的質感讓色彩更活潑生動。他將不同色的顏料重疊,以及採用古老的膠畫顏料,為色彩增添無盡深度的感覺,並讓畫作產生一種發自內在的光芒。他親自講述顏色的〝收縮與擴張〞、透明與密度,並將畫作放在地上展出,使展品更接近觀眾,方便他們進入畫中。參觀者因此被引領進入一種近乎靈性的體驗。羅斯科讓我們墮進一個寧靜明亮,引人沉思冥想空間內。

之後,那些和諧的色調在他的畫作中又再被簡化了,顏色變得較深和較暗,長長一系列紅色和啡色的巨型色塊,這些畫就像通往一扇巨大的門的入口。它們的顏色愈來愈陰沉灰暗,到最後變成單一的黑色,就像是因為早期的作品過度縱情於色彩中,羅斯科拒絕再受顏色的誘惑,刻意如苦行般走向虛無和簡樸無華的境界。從他這些深沉的作品中散發著一種內在的光芒,讓參觀者不自覺地駐足欣賞。

羅斯科的畫作仍然保留一種不能言喻的神秘感。他1970年自殺前所作的最後一批作品全部採用冰冷樸素的灰色和白色,從中再也找不到任何情感。部份藝術家和他的一些同輩認位它們充滿極度的悲哀,但亦有些認為它們散發著赤裸又神聖的宗教體驗與感情,〝一種來自地獄的光芒〞。