Exposition
Texte : Gérard Henry
Niki de Saint Phalle, rebelle et sacrilège
Chaque escapade à Macao apporte aux amateurs d'art des surprises comme celle d'une expo inattendue au musée. Ce musée d'art (mam) situé dans le centre culturel bâti au bord de l'eau juste avant la rétrocession à la Chine est l'un des plus dynamiques de la région. Il propose des expos de qualité aussi bien dans les arts classiques chinois que dans l'art moderne ou dans la photo. Il n'hésite pas non plus à inviter en résidence des artistes étrangers qui pendant un mois travaillent sur la ville et créent une œuvre montrée au musée. En août figuraient ainsi City Sights, une exposition de photographies noir et blanc sur Macao du Macanais Frank Lei et du Coréen Oan Kim, tous les deux anciens élèves de l'Ecole des Beaux Arts de Paris, et une étonnante et magnifique Histoire de l'acier en Extrême-Orient exposant des centaines d'armes blanches de toutes époques de tous les pays de cette zone. Mais la plus grosse surprise est une belle exposition de Niki de Saint Phalle, l'une des rares femmes sculpteur qui ait pu atteindre la notoriété dans le monde très masculin de l'art moderne…
Niki de saint Phalle est une artiste prolifique qui a utilisé avec bonheur la peinture, la sculpture et l'architecture pour créer une œuvre exubérante, vigoureuse et colorée dont fuse une énergie qui semble inépuisable. Tous les visiteurs du Centre Pompidou ont remarqué à droite du musée la fontaine Stravinsky où ses sculptures animées et colorées, faites avec son mari le sculpteur Jean Tinguely, tournent joyeusement en crachant de l'eau. Son monde imaginaire abrite des créatures végétales, animales et humaines merveilleuses ou terrifiantes, un monde magique inspiré des vieux mythes et anciennes légendes traduites en grandes sculptures qui donnent vie à de nombreux jardins et espaces publics en Europe et aux Etats Unis. Mais ce sont ses « nanas » sa véritable image de marque dans le monde entier : des femmes vivement colorées aux formes gigantesques. Monstrueuses, joyeuses, provocatrices et audacieuses, elles vont devenir le symbole de la force et de l'assurance féminine.
Pour en arriver à cet épanouissement et à cette pleine confiance, Niki de Saint Phalle a parcouru un long chemin, toujours passionné mais aussi souvent extrêmement douloureux. Née en 1930 à Neuilly-sur-Seine, son père, banquier marié à une américaine, perd toute sa fortune et sa banque dans le crash de 1929. Durant la guerre, elle vit avec sa famille à Princeton et à New York et se passionne pour la littérature et le théâtre, écrivant à 12 ans ses premières pièces et poèmes. A 14 ans, rebelle, ses parents l'envoient en pension après qu'elle a peint en rouge vif les feuilles de vigne qui couvrent le bas-ventre des statues grecques de l'école. Elle passe son baccalauréat en 1947 dans le Maryland et travaille accessoirement comme mannequin. A 18 ans, elle s'enfuit avec Harry Mathews qu'elle épousera en 49 et dont elle aura deux enfants. Elle commence alors à peindre gouaches et huiles.
Le couple s'installe en France ou Harry fait des études musicales et Niki s'inscrit dans un cours d'art dramatique, mais en 1953 une grave dépression nerveuse la fait admettre dans un hôpital psychiatrique à Nice. La peinture devient alors une sorte de thérapie et elle décide d'abandonner le théâtre et de devenir artiste. Les quatre années suivantes, elle visite les musées, découvre à Barcelone l'œuvre de Gaudi qui influencera plus tard ses jardins, fait une première exposition, rencontre de nombreux artistes et écrivains américains et en 1956 réalise sa première sculpture avec l'aide de Jean Tinguely qui deviendra plus tard son compagnon et le partenaire de toute son œuvre.
Ses premières œuvres sont agressives et violentes comme si elle voulait se libérer de toutes les blessures de la vie, elle construit des paysages-assemblages faits d'objets blessants, destinés à tailler, percer, couper. Couteaux, clous, rasoirs mais aussi jouets d'enfant, outils rouillés se mélangent sur un lit de plâtre, unissant la fragilité ou la naïveté à la violence. En 1961, elle expose au Musée d'art moderne de la ville de Paris une œuvre qui fera date : « Portrait de mon amant, c'est une pièce voodoo, un exorcisme, dit-elle, j'avais quelqu'un dans ma peau que je savais… n'était pas bon pour moi. Je lui ai volé quelque chemise, je l'ai collée sur un panneau. J'ai mis une cible pour tête et je l'ai tué d'une manière rituelle en lui lançant des fléchettes. Ça m'a guérie très rapidement…. Sur la table des fléchettes étaient à disposition des visiteurs, ils pouvaient les lancer à la tête de mon amoureux ».
Cette expérience va en provoquer une autre : « A coté de mon tableau, était accroché un relief complètement blanc dont l'auteur était Bram Bogard. En le regardant, j'eus une illumination ; j'imaginais la peinture se mettant à saigner. Blessée, de la manière dont les gens peuvent êtres blessés. Pour moi la peinture devenait une personne avec des sentiments, des sensations. »
Niki met alors en place avec Tinguely sa série des tirs qui se succéderont de 1961 à 1963. Sur des panneaux de bois Niki fixe des objets de toutes sortes et en haut du tableau des poches plastiques enrobées de plâtre et remplies de peinture mais aussi d'œufs, de spaghettis, riz, tomates. L'œuvre est peinte d'un blanc immaculé puis mise sur une palissade et l'artiste tire dessus à la carabine ou au pistolet, tuant la peinture. Plusieurs séances auront lieu en Europe et aux Etats Unis en présence de nombreux artistes de ses amis comme Rauschenberg, Jasper John et tous les Nouveaux Réalistes. Ces tirs sur la peinture sont suivis de tirs sur des « autels » blancs ou dorés, sortes de diptyques ou triptyques inspirés des anciens retables et couverts de toute la pacotille religieuse. Niki règle ses comptes : « le tir sur ces objets sacrés était un cri de rage contre toutes les horreurs que nous avons commises au nom de la religion » et peut-être aussi une vengeance contre le couvent où elle fut pensionnaire. Ces tirs où on la voit, carabine à la main, exécuter ses peintures, des cathédrales et des autels, vont attirer les médias du monde entier, car c'est non seulement un sacrilège mais aussi une femme qui empiète sur le monde masculin de la guerre, de la violence et des armes à feu, alors que la femme est toujours portraiturée en victime.
C'est d'ailleurs cette femme victime qui deviendra l'objet d'attention de l'artiste. La femme qu'elle veut libérer de l'obligation du mariage, de servir le mari, d'être une bonne maîtresse de maison, d'une multitude de devoirs qui l'étouffent, l'écrasent et la tuent. Dans toute son œuvre, les « mariées » occupent une grande place, mariées fragiles comme dans La mariée sous l'arbre, allongée dans sa robe blanche sous un arbre chargé de fruits avec des branches qui se tordent au-dessus de sa tête, terminées par des visages menaçants. Ses mariées sont toujours habillées de robes très belles, de tissus anciens et précieux qui rendent encore plus poignantes l'expression triste du visage. Cette période de rébellion et de souffrances peut en partie s'expliquer aussi par son enfance très troublée. En 1994, elle publiera un livre intitulé mon secret où elle révèle qu'à l'âge de 12 ans, elle fut victime d'un inceste paternel.
Mais Niki de Saint Phalle va se délivrer de ce passé et trouver un certain apaisement. Ses femmes plus sereines vont s'affirmer dans leur plénitude. Ce sont la série des célèbres nanas faites de fils et laines sur treillage métallique. Elles sont grosses, dominantes, et débordent d'énergie et de féminité. A coté l'homme est fluet, insignifiant et menacé.
Niki donne alors toute sa mesure et entreprend de très grandes œuvres où elle laisse aller son imagination pour illustrer tout un monde de mythes et de légendes. Aidée de Tinguely, elle crée des sculptures qui sont de véritables architectures ou se mêlent plantes, animaux fantastiques et merveilleux, monstres et bêtes fabuleuses. En 1979 elle s'inspire de Saint Georges et le Dragon pour la construction du Jardin des Tarots en Toscane, un immense parc de sculptures monumentales basé sur les 22 arcanes du jeu de tarots dans lesquels on peut pénétrer et qui demandera 15 ans de travail. Elle crée également un parfum, des bijoux et en 1982, la fontaine Stravinsky avec Tinguely qu'elle a épousé en 1971. Jean Tinguely mourra en 1991, la ville de Bâle en Suisse lui consacrera un grand musée. Niki de Saint Phalle partira alors vivre à San Diego en Californie où elle restera jusqu'à sa mort en 2002, continuant à travailler en particulier pour défendre les minorités, elle crée une série de sculptures intitulée Black Heroes où l'on trouve Joséphine Baker, Louis Armstrong, Mile Davis, dédiée à ses petits-enfants métis. De nombreuses villes en Europe, aux Etats-Unis et au Japon où elle a son propre musée, contiennent de ses sculptures monumentales. En 2001, elle donnera 190 de ses œuvres à la ville de Nice pour le Musée. Ce sont 79 de ces œuvres qui sont magnifiquement exposées en ce moment au Musée de Macao. Niki de Saint Phalle quittera définitivement ses nanas le 22 mai 2002.
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展覽
反叛與大逆不道的妮基.聖法爾
• Diable, 1985 (58 x 50 x 23 cm)
藝術愛好者每次偷閒到澳門一遊都會得到意外的驚喜:澳門藝術博物館經常有令人意想不到的展覽。剛於回歸中國前落成的澳門藝術博物館位於一座建在海旁的文化中心內,是區內最具活力的藝術館之一。館內除了展出傳統的中國藝術作品外,亦不時舉辦當代藝術或攝影的展覽。澳門藝術博物館更會邀請海外藝術家到澳門作駐場藝術家,在逗留的一個月期間在市內進行創作,再將作品在博物館內展出。而六月至八月份展出的〝都市漫遊〞便是這樣誕生的,這展覽展出澳門攝影家李銳奮和韓裔攝影家金奧顏在澳門所拍攝的黑白照片。此外,〝鋼鐵文明─東亞古兵器展〞也是一個精彩的展覽,當中展示了百多件東亞各國不同年代的古兵器。但最大的驚喜還是妮基.聖法爾的雕塑展。在當代藝壇這仍然由男性主導的世界中,妮基.聖法爾是少數能享譽國際的女雕塑家……
妮基.聖法爾是一位多產的藝術家,她成功地利用了繪畫、雕塑和建築學等技巧來創作她那些感情洋溢、精力充沛和色彩繽紛的作品,它們散發著一種似乎無盡的生命力。所有曾到過龐比度中心參觀的人想必會留意到位於藝術館右邊的史特拉汶斯基噴泉中那些由妮基和她的丈夫尚丁格利合力創作,顏色鮮艷和口中吐著泉水並在水中快樂地旋轉的雕塑。妮基的幻想世界之靈感來自古老的神話和傳說,當中充滿稀奇古怪的動、植物或人形生物,而她是透過無數擺設在歐洲和美國的一些公園或公共空間中的大型雕塑來展示她內心這奇妙的世界。但最能代表她的作品卻是人所共知的《娜娜》系列:一些色彩鮮艷,體形肥胖的女性。這些畸形龐大,野性大膽的女性成為了女性力量和自信的象徵。
在達至這豐盛和充滿自信的人生之前,妮基.聖法爾曾經歷過漫長,充滿激情但很多時又極度痛苦的人生路。她1930年在塞納河畔納伊區出生,父親是一名銀行家,娶了一名美國女子為妻,在1929年的經濟大蕭條中他失去了所有財產和銀行。在大戰期間,妮基與家人曾先後住在普林斯頓和紐約,當時她熱愛文學和戲劇,年僅十二歲便開始創作劇本和詩歌。十四歲時的她性格反叛,一次,她因為在學校的操場中用紅油把一個希臘雕像遮蔽下身的無花果葉塗成紅色而被父母送到寄宿學校。她1947年在馬利蘭州中學畢業並在課餘時當模特兒。十八歲那年她與哈利.馬休斯私奔,二人於1949年結婚並育有兩名小孩。那時,她開始以水粉和油彩繪畫。
夫婦二人定居法國,哈利在那兒的音樂學院進修,妮基則報讀一個演藝課程,但在1953年,妮基的精神嚴重崩潰,需在尼斯的一家精神病院接受治療。她發現繪畫對她的病情有幫助,於是決定放棄戲劇,並立志要成為畫家。在往後的四年間,她參觀不同的博物館,在西班牙的巴塞隆拿發現了高迪的作品,後者的創作風格對她日後的雕像花園有深遠的影響;她還舉辦了首個展覽;結識了多位美籍藝術家和作家,並於1956年,在尚.丁格利(她日後的伴侶以及她的所有作品的創作伙伴)的協助下完成了她的第一件雕塑品。
她早期的作品充滿挑釁和暴烈的感覺,好像是她希望從生命中的創傷中自我釋放出來,她利用一些帶傷害性,用作琢磨、穿鑿、切割之用的物件來創作一些風景─組合。刀、釘子、剃刀但也有兒童的玩具、生鏽的工具等物件全混在一層石膏之上,藉此將脆弱的或純真的與暴力的結合起來。1961年,她在巴黎近代藝術館展出了一件劃時代的作品:〝《我情人的肖像》,它是一件巫術之物,是驅魔咒,我知道我熱戀著一個人……這對我並非好事。我偷了一件他的襯衫,並將它貼在木板上。我放一塊飛標板在頭的位置,然後我朝他的頭擲飛標,像獻祭一樣殺死他。這樣我很快便復元了……在檯上放著一些飛標給參觀者使用,他們可以向我愛人的頭擲飛標〞,她曾這樣表示。這經驗引發了另一個構想:〝掛在我的作品旁邊是一幅布拉姆.博格的白色浮雕。當我凝望著它時,突然有一個奇特的想法,我幻想畫正在淌血。受傷,就像人會受傷一樣。對我來說,這畫變成一個有感覺和感情的人。〞
1961年至1963年,妮基與丁格利開始著手創作《射擊》系列。妮基在木板上放置各種各樣的物件,而在木板的上方是一些被熟石膏覆蓋的膠袋,內裡裝著油漆、雞蛋、意大利粉、米、番茄等各式各樣的東西。作品整體塗上潔白無瑕的白色,然後靠木尖板條來作支撐,之後,藝術家拿步槍或手槍射擊作品,將畫作殺死。在歐洲及美國,妮基和丁格利當著很多藝術家、他們的朋友和所有新現實主義藝術家的面前進行了幾次〝射擊繪畫〞。射擊繪畫之後是射擊〝聖壇〞,這些靈感來自古代祭壇後面的裝飾,金色或白色的祭壇以雙聯畫或三聯畫的形式出現,上面蓋滿所有與宗教有關的物品。妮基是藉此來算帳:〝向這些聖物開槍是對我們假借宗教之名所犯下的所有恐怖罪行而作出的憤怒呼聲〞,這亦有可能是妮基向曾寄宿的修院作報復。她射擊這些畫作或大教堂和聖壇的行為吸引了全世界的媒體注意,因為這不單是大逆不道的行為,更代表著一名女性入侵了戰爭、暴力和槍械這些原本只屬於男性的世界,而女性一向以來都只被描繪成受害者的形象。
然而,就是女性受害者這形象吸引了這位藝術家的注意力。她要將女性從婚姻、服侍丈夫、家庭主婦等一連串讓她們透不過氣來,把她們壓得死死的責任中解放出來。在妮基的所有作品中,〝新娘〞佔很重要的位置,而且這些新娘子多數都是穿著用名貴的衣料縫製的漂亮婚沙,在這樣的對比之下,她們臉上的哀傷神情更是令人心痛。妮基的這段反叛和痛苦的時期有部份可說明了她童年時曾受到的傷害是有多麼的嚴重。1994年,她出版了一本名為《我的秘密》的書,當中揭露了在她十二歲的時候成為了亂倫的受害者。但妮基終於擺脫了過去,找到一種屬於自己的安寧。她那些較安詳恬靜的女性顯得更完美。她的《娜娜》系列是在金屬織成的骨架上加上布料和毛線造成。她們肥胖,有主見而且活力充沛和充滿女性魅力。她們身邊的男性顯得瘦弱,微不足道和受威脅。
妮基此後大展身手,盡情發揮她的想象力,開始創作一些非常大型的作品,藉此展現一個充滿神話和傳說的世界。在丁格利的協助下,她完成了一些如建築物般的雕塑作品。1979年,她從聖佐治和龍的形象中發掘創作靈感,在意大利塔斯卡尼建造了《塔羅花園》,一個擺放了二十二個龐然巨大的塔羅牌雕塑的大型公園,人們可以進入這些牌中,整個公園的建造過程歷時十五載。她還創製了一種香薰和手飾,並於1982年與丁格利(二人於1971年正式結婚)合力創作了史特拉汶斯基噴泉。尚.丁格利於1991年逝世,瑞士巴塞爾市特別以他的名字為一間博物館命名。妮基.聖法爾自此離開瑞士到加州的聖地牙哥居住直到2002年她與世長辭。她在世時從不間斷地創作,不遺餘力地捍衛弱勢的社群,她為了表達對幾位美籍非裔人物的敬意,同時也為了她的混血兒曾孫而創作了一系列名為《黑人英雄》的雕塑。在歐洲、美國和日本的多個大城市均有她的個人藝術館,當中展示了她的一些巨型雕塑。2001年,她捐贈了190件作品給尼斯博物館。這次在澳門藝術博物館所展出的其中79件作品就是來自這批珍藏。妮基.聖法爾於2002年5月22日永遠離開了她的娜娜。
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