Poésie
Texte : Beranrd Pokojski

Aloysius Bertrand, de la Nuit

« J'ai comme tous les poètes de notre jeune génération, mes amis, un culte profond pour l'œuvre exquise de Louis Bertrand de qui vous avez eu la rare gloire d'être l'ami. Exilé, pour un temps, dans une petite ville de province, je souffre de voir ma bibliothèque, qui renferme les merveilles du Romantisme, privée de ce cher volume qui ne m'abandonnait pas quand je pouvais l'emprunter à un confrère. » (Mallarmé, à son ami Antoine Pavie)

« Gaspard de la nuit , ce livre (…) où j'ai essayé de créer un nouveau genre de prose. »

« Ce manuscrit (…) vous dira combien d'instruments ont essayé mes lèvres avant d'arriver à celui qui rend la note pure et expressive, combien de pinceaux j'ai usé sur la toile avant d'y voir naître la vague aurore du clair-obscur. Là sont consignés divers procédés, nouveaux peut-être, d'harmonie et de couleur seul résultat et seule récompense qu'aient obtenus mes élucubrations. »

Ainsi parlait Aloysius Bertrand, auteur oublié de la majorité, de son unique Gaspard de la Nuit qui ouvrait le genre du poème en prose et dont nous allons essayer de faire ici un portrait. Aloysius Bertrand naquit le 20 avril 1807 à Ceva dans le Piémont où son père était alors lieutenant de gendarmerie. Ce père sera envoyé cinq ans plus tard à Spolète avec le grade de capitaine, puis en 1814, on le verra à Mont-de Marsan, promu commandant. Mis à la retraite en 1815, il s'installera avec sa famille à Dijon, ce qui permettra à Aloysius (de son vrai prénom Louis) d'entrer à son collège royal et de faire de cette ville son réel point d'attache. En 1826, il sera reçu à la Société d'études de Dijon, créée cinq ans plus tôt par de jeunes Dijonnais avec la devise « Etude et Amitié ». C'est là que l'année suivante il donnera lecture d'une prose d'une tonalité tout à fait nouvelle ainsi que d'un second morceau à la couleur orientale dont la forme avait quelque chose de surprenant car elle ne se présentait d'abord pas comme une pseudo-traduction voulant suggérer une poésie au caractère spontané et proche de la « nature » mais procédait par « juxtaposition de scènes minuscules, enfermées chacune dans un verset ayant sa tonalité propre » pour reprendre les mots de Max Milner.

« Les cigales demeurent suspendues sans voix aux feuilles cotonneuses du figuier ; le moucheron, couleur de feu, fait son lit dans le calice d'une rose.

Les paons roucoulent sur les toits du caravansérail ; la famille de la cigogne crie dans les combles de la mosquée ; les tourterelles jouent au bord des murs du jardin de l'Emir. »

Aloysius Bertrand lira à la Société d'études de Dijon jusqu'en 1828 cinquante-cinq de ses pièces comprenant des « bambochades » dont certaines seront reprises dans Gaspard de la nuit . En 1828, il sera l'éphémère directeur du journal Le Provincial , du 1 er mai au 8 juin, y publiant une vingtaine de pièces en prose et en vers car « déjà la poésie le possédait tout entier. Dijon et ses antiquités héroïques et cette fraîche nature peuplée de légendes emplissaient son cœur. Les bords de la Suzon et les prairies de l'Armaçon le captivaient. La nuit, bien souvent, lui et quelques amis allaient effrayer les chauves-souris avec des torches et pratiquer un gai sabbat. », pour reprendre les mots lyriques de Sainte-Beuve. En novembre 1828, Aloysius Bertrand se rendra à Paris et sera très bien accueilli chez Victor Hugo et Nodier, prenant parti pour la nouvelle littérature et conscient de son originalité, il se mettra à la recherche d'un éditeur. Mais malheureusement l'éditeur qu'il trouvera sera tout aussitôt voué à la faillite et les six cahiers composés par Bertrand ne verront pas le jour en volume. Il connaîtra ensuite très vite une extrême misère qui lui fera honte et l'amènera à éviter tout le monde « Je suis presque sans chaussures, mon habit est usé sur le devant (…) c'est aussi en partie ma toilette qui me fait négliger Victor Hugo et ses amis. » (1 er août 1829).

Vie misérable, sous le signe de l'échec, qu'il avait sans doute pressentie car d'entrée dans Gaspard de la nuit , il nous donne ce verset
« La toux d'un promeneur dissipa l'essaim de mes rêves. C'était un pauvre diable dont l'extérieur n'annonçait que misères et souffrances. J'avais déjà remarqué dans le même jardin sa redingote râpée qui se boutonnait jusqu'au menton, son feutre déformé que jamais brosse n'avait brossé, ses cheveux longs comme un saule et peignés comme des broussailles, ses mains décharnées, pareilles à des ossuaires. Sa physionomie narquoise, chafouine et maladive, qu'effilait une barbe nazaréenne. »

Aloysius Bertrand vivra dans sa chair l'exclusion qu'il avait mise en scène dans son recueil que traversent nombre de marginaux (truands, mendiants, gueux, bohémiens) qui envahissent un univers urbain dont le domaine est la nuit. Son Gaspard de la nuit ne porte-t-il pas le sous-titre de Fantaisies à la manière de Rembrandt et de Callot qui s'était plu à dessiner un monde de gueux le plus souvent inquiétants. Chez Aloysius Bertrand naîtra une marginalité grotesque qui oscille entre réalisme et fantastique, véritable « bambochade » pour reprendre un mot qu'il affectionnait : peinture pittoresque et populaire à la manière de Pierre Van Laer qui portera le surnom d'Il Bamboccio.

On le voit donc, à 21 ans, Aloysius Bertrand arrivé à Paris, avait déjà donné le meilleur de lui-même et « créé un nouveau genre de prose » faite d'harmonie et de couleur. Pierre Manoll écrira « (sa) poésie supporte tous les éclairages, elle se déplace selon notre optique et selon notre humeur. Comme un kaléidoscope, elle offre au champ de notre imagination mille combinaisons d'une extraordinaire puissance de séduction ». Gaspard de la nuit brille aussi des mille feux de sa discontinuité et les poèmes qui ne dépassent pas trente lignes se construisent sur ces glissements et ces décrochements où ne persiste que le nécessaire à l'élaboration de l'image recherchée. Ce ton elliptique donne à ses pages leur caractère énigmatique qui débouche sur l'inquiétant. Aloysius Bertrand a su aussi jouer de la blancheur de la page et avait donné ces instructions précises pour la publication de son œuvre : « Règle générale — Blanchir comme si le texte était de la poésie (…) M. le Metteur en pages remarquera que chaque pièce est divisée en quatre, cinq, six et sept alinéas ou couplets. Il jettera de larges blancs entre ces couplets comme si c'étaient des strophes en vers ». Ces blancs représentent la respiration du texte et y introduisent le silence d'un non-écrit que le lecteur se devra d'élaborer ou de rêver. Aloysius Bertrand joue aussi de la simultanéité, de visions oniriques juxtaposées, d'affinités thématiques, chromatiques et même phoniques. Son texte utilise souvent l'étrange technique de la miniaturisation qui enferme le grand dans le petit et le temps lui-même semble ne plus exister vraiment car passé, présent et futur se télescopent donnant à la durée une épaisseur inédite… « Mais bientôt mon oreille n'interrogea plus qu'un silence profond » auquel je ferai répondre cette autre citation : « J'avais résolu, dit Gaspard, de chercher l'art comme au Moyen-Age les Rose-Croix cherchèrent la pierre philosophale ; — l'art, cette pierre philosophale du XIX e siècle ! »

Mais nous avions laissé Aloysius Bertrand à sa vie parisienne misérable, et en avril 1830, il est de retour à Dijon pour s'occuper de la gérance du journal Le Spectateur , auquel à vrai dire, il ne collaborera guère durant les quelques mois qu'il y sera. Aloysius Bertrand prendra ouvertement la cause de la Révolution et ses idées républicaines le forceront à entrer au Patriote de la Côte d'Or , nouvellement créé. Ses inimités le conduiront à des prises de mains et même à un duel, et c'est dans ce climat qu'il s'installera définitivement à Paris en 1833 où il rencontrera tout autant de difficultés à s'intégrer car il était d'un caractère ombrageux, difficile et mélancolique. Son frère Frédéric le décrira en 1886 « D'une sensibilité excessive, il ne pouvait supporter la contradiction ; il s'irritait de rien, avait des emportements sans nom, morose, insociable, effarouché de son ombre, mécontent de lui, injuste envers les autres (…) Nerveux à l'excès, doué d'une imagination ardente, d'un caractère bizarre et inégal, le cerveau sans cesse en ébullition, Louis n'avait pas l'esprit méthodique de la classification, il saisissait au vol l'une des idées dont il était assailli (…) Tout lui était bon pour fixer ses pensées (…) Sa petite table était jonchée de brouillons raturés, déchirés et couvert d'une écriture fine et illisible ». A Paris, ce sera à nouveau la misère matérielle, sa mère et sa sœur le rejoindront, et il vivra on ne sait comment, sans doute de collaboration anonyme à de petits journaux et d'un travail de secrétariat pour un certain baron Roederer. Aloysius Bertrand entrera cependant en contact avec l'éditeur Eugène Renduel qui accepte de publier son manuscrit mais là encore, rien ne sera simple et ce n'est qu'en 1836 qu'il signe un contrat de publication avec ce même éditeur qui hésitera jusqu'en 1838 pour finalement abandonner le projet puisqu'en 1840, il s'était retiré des affaires…

Durant toutes ces tribulations, la santé d'Aloysius Bertrand commencera à se dégrader et le 18 septembre 1838, il devra entrer à l'hôpital Notre-Dame de la Pitié d'où il ne sortira que le 13 mai de l'année suivante pour entrer le surlendemain à l'hôpital Saint-Antoine qui s'occupera de lui jusqu'au 24 novembre. Libre, il se croira définitivement guéri mais le 11 mars 1841, c'est à nouveau l'hôpital Necker « J'ai un pied et demi dans la fosse, mais je suis tranquille et résigné comme un malade en qui va s'éteignant la passion en même temps que la vie. Si je n'ai pas le traité de l'immortalité de l'âme sous mon oreiller, je l'ai là, dans mon cœur » écrira-t-il le 24 mars à son ami le sculpteur David d'Angers. Le 19 avril, dans sa dernière lettre : « Gaspard de la nuit est un ouvrage ébauché dans beaucoup de ses parties, j'ai bien peur de mourir tout entier. » Dix jours plus tard, il s'éteignait, de tuberculose ou de phtisie. Novembre 1842 paraissait enfin Gaspard de la nuit … Non sans une certaine ironie, Baudelaire s'était plu à écrire à Fernand Houssaye : « J'ai une petite confession à vous faire. C'est en feuilletant pour la vingtième fois au moins le fameux Gaspard de la nuit (un livre connu de vous, de moi et de quelques-uns de nos amis, n'a-t-il pas tous les droits à être appelé fameux) que l'idée m'est venue de tenter quelque chose d'analogue ».

Plus près de nous, André Breton annexera Aloysius Bertrand dans son Manifeste du surréalisme en disant que « Bertrand est surréaliste dans le passé ». Gaspard de la nuit demeure un livre étrange et unique sorti du cerveau d'un poète qui avait tout du maudit. Il s'est très longtemps effacé et c'est miracle qu'il existe dans notre littérature, à la manière d'un autre Lautréamont.

Gaspard de la nuit d'Aloysius Bertrand, Poésie-Gallimard, avec une très longue préface passionnante de Max Milner que nous devons tous remercier.



詩詞

夜之阿洛瓦修斯.貝特朗


• Autoportrait d'Aloysius Bertrand

〝我和我們這一代的年輕詩人,我的朋友一樣,對路易.貝特朗這部精美的作品頂禮膜拜,若能成為他的朋友可謂三生有幸。一次流徙他鄉,寓居外省一個小城之際,看到我載滿浪漫主義傑作的書架上竟少了這本書,這本只要我能向朋儕借到,我都不離不棄的書,心裡真難過。〞(馬拉美:致友人安托萬.帕維)

〝我在《夜之加斯帕》 (Gaspard de la nuit) 這本書裡,嘗試創造一種嶄新的散文形式。〞
〝這手稿或可告訴你,在找到可發出一種純淨、富表現力的音色的樂器前,有多少樂器被我的嘴唇試過;在畫出明暗對比的朦朧晨曦之前,有多少畫筆被我畫禿。 這裡蘊藏了創造和諧和色彩的豐富多采、也許是新穎無比的手法 ,是我通霄達旦、苦心經營的唯一果實和酬報。〞

阿洛瓦修斯.貝特朗,這位被大多數人遺忘的作家就是這樣談到自己的作品《夜之加斯帕》的。他開一代風氣,創造了散文詩這種文學形式。下面,我們謹對他的生平和創作做一簡單介紹。他於1807年4月20日誕生於塞瓦 (Ceva) 的皮埃蒙特 (Piémont) 。父親是憲兵中尉,五年後被派往斯波萊特(Spolète) 並晉升上尉。1814年輾轉至蒙德馬桑 (Mont de Marsan),此時他已經是名少校。1815 年退役後,全家定居第戎 (Dijon) 。阿洛瓦修斯(原名路易 Louis)亦得以進入皇家中學求學,而第戎則成了他的居留地。1826 年,他被接受成為第戎研究社 (Société d'études de Dijon) 的一員,這是五年前第戎的一些年輕人秉 着 〝研究與友誼〞這句格言的精神創辦的。翌年,就在這個研究社裡,他朗讀了風格清新的一篇散文以及另一篇具東方色彩、形式奇特的散文。這些文字有別於當時流行的假托譯詩、試圖予人一種自發、接近〝自然〞的詩的印象的手法,而是如馬克斯.米爾納 (Max Milner) 所說的運用〝細小意象的並列,每個意象均蘊含於每節文字中〞的創作手法。

〝知了掛在無花果樹毛茸茸的葉子上,闃然無聲;火紅的小飛蟲在玫瑰花的花萼裡鋪床。

孔雀在沙漠旅店的屋頂上咕咕地叫;幾隻鸛鳥在清真寺的圓頂上啼鳴;斑鳩在穆斯林王公花園的牆邊嬉戲。〞

直到 1828 年,阿洛瓦修斯.貝特朗在第戎研究社朗讀了五十五篇散文詩,其中包括了〝田舍風俗畫〞 (bambochades) ,當中幾篇後來收入《夜之加斯帕》。1878年5月1日至6月8日,他擔任了一個月的《外省人報》 (Le provincial) 的編輯工作,期間在該報發表了二十幾篇散文和散文詩。此時〝詩歌完全佔據了他。第戎及其名勝古蹟、亮麗的充滿傳奇的山川景物裝滿他心頭。絮淙河畔及阿馬松草原深深地吸引了他。夜晚,他和朋友們舉 着 火把恐嚇蝙蝠,盡夜狂歡。〞聖伯夫 (Sainte-Beuve) 這樣娓娓道來。1828 ,阿洛瓦修斯.貝特朗來到巴黎,並受到維克多.雨果及諾蒂埃 (Nodier) 的熱情接待。他參加了新文學活動並深知自己擁有獨特風格。他 着 手尋找一個出版商。但不幸他找到的出版商卻面臨破產,於是他的六本散文詩稿始終未能結集出版。他很快便陷入經濟困境,窮苦潦倒。他感到羞恥,無以對人。他說〝我破鞋爛襪,幾乎赤 着 腳,衣衫襤褸,不能穿 着 體面成了我迴避維克多.雨果和朋友們的部份原因。〞 (1829 年8月1日 )

事業不順利帶來的貧困,他早已預感到。《夜之加斯帕》一開始,就有以下這段描述:
〝一個散步者的咳嗽聲驅散了我一連串的夢。這是一個可憐人,渾身上下散發出貧窮痛苦的氣息。我早前在同一個花園裡,就已經注意到他一直扣到下頜的磨損了的禮服,一頂從未用刷子刷過的變形的氈帽,長長的頭髮仿似垂柳,凌亂蓬鬆又恰如荊棘叢,瘦骨嶙峋的手儼如枯骨。一副嘲弄、狡黠、病態的面容,一把拿撒勒人的鬍子令面孔顯得更加瘦削。〞

阿洛瓦修斯.貝特朗深感被社會遺棄,並將這感受渲泄在作品中。書中出現眾多的邊緣人:流氓、乞丐、無賴、流浪漢遍佈城市各個角落,黑夜是他們活動的舞台。《夜之加斯帕》的副標題不就是《倫勃朗及卡洛式的荒誕 》。卡洛 (Callot) 熱中描繪令人不安的乞丐和畸形人物。阿洛瓦修斯.貝特朗作品裡描繪的是一種介乎現實和幻想的怪誕的邊緣世界。用他喜愛的一句話,即一幅真正的〝田舍風俗畫〞。這是綽號叫〝邦勃丘〞 (Il Bamboccio) 即 〝小胖子〞的荷蘭畫家彼得.梵.萊爾 (Pierre Van Laer) 的一種優美、通俗的繪畫。

阿洛瓦修斯.貝特朗二十一歲來到巴黎,此時他已獻出了他生命中最美好的東西並〝創造了一種新穎的散文形式〞,既和諧又富色彩。彼埃爾.馬諾爾(Pierre Manoll) 寫道:〝(他的)詩經得起各種光照,它隨我們的視覺角度、一時的喜惡而來回移動。就像一個萬花筒,為我們的想象空間提供一種充滿奇特誘惑的萬千組合。〞《夜之加斯帕》同樣亦閃耀 着 萬千斷裂不延續的意象,這些每篇不超過三十行的散文詩由變化莫測的詞語、孤立割裂的句型組合成,只有那為塑造精緻意象所需的字詞才完好無缺。這種簡略的風格令其文字有謎一般的特點,令人不安。阿洛瓦修斯.貝特朗擅於運用書頁空白,作品付梓前,他總是這樣明確指示:〝總的原則是:在書頁中多留空白,令散文有詩的外表…… 拼版工人注意:每一篇散文應分成四、五、六、七行或段。每段文字間多留空白,就好像是一節一節詩一樣。〞這些空白是文字的呼吸,字裡行間注入了空白的寧靜,任由讀者去創造、想象。他還利用同時性、並列的夢幻景象,主題、聲音、色彩的糅合等手段。他的文字經常運用一種奇特的微型化技巧,以小見大,時間本身亦彷彿不復存在,皆因過去、現在、未來已互相滲透,令時間綿綿不絕…… 〝很快我的耳朵只專注探問深沉的寂靜。〞對此我以加斯帕這句話來回應:〝我決定像中世紀的薔薇十字會尋找點金石那樣,出發去尋找藝術 —— 這個十九世紀的點金石!〞

阿洛瓦修斯.貝特朗在巴黎過 着 貧困的生活,1830年4月,他回到第戎負責《目擊者報》(Le spectateur) 的管理工作。說實話,他只是在第戎停留的短短幾個月裡參與其事。他公開參加革命,他的共和思想促使他加入新成立的〝Côte d'Or 愛國者〞組織。他的敵意常令他和人毆鬥甚至同人進行一場決鬥。就在這種氣候下,他於1833年在巴黎定居了下來。但由於生性多疑、性格孤僻、憂鬱,因此很難融入巴黎社會。他的兄弟弗雷德里克 (Frédéric) 1886 年時這樣描述他:〝他過份敏感,容不得反對意見;為一點小事生氣,常發無名之火。陰鬱、孤僻、膽小怕事、自怨自艾,對人不公正…… 他極度神經過敏,想象力豐富,脾氣乖戾,喜怒無常,頭腦經常發熱,不能條分縷柝,腦海裡偶有甚麼念頭便緊抓不放…… 甚麼東西都會讓他思考一番…… 他的書桌上堆滿塗改處處、撕爛、用難以辨認的蠅頭小字書寫的手稿。〞在巴黎,他繼續過 着 物質匱乏的貧困生活,稍後,母親和姐姐來和他會合。不知道他究竟怎樣撐下去的,大概為一些無名小報撰稿或在一個名叫勒德雷爾的男爵 (baron Roederer) 處當秘書維持生計。不過此時他已開始接觸出版商歐仁.朗迪埃爾(Eugène Renduel),該出版商答應為他出版手稿,但事情並不順利,直到1836年才簽訂出版合同。不過出版商總是猶豫不決,這樣一直拖到 1838 年。 1840 年由於出版社結業,計劃也就此化為泡影。

在長期的磨難下,阿洛瓦修斯.貝特朗的健康開始變壞。1838年9月18日,他住進了慈悲聖母醫院 (hôpital Notre-Dame de la pitié) ,直到來年的5月13日才離開,並於第二天住進了聖安托萬醫院 (hôpital Saint-Antoine) ,直至11月24日。他自覺病已痊愈,然而1841年3 月11日,他又住進了內克爾醫院 (hôpital Necker) 。在他3月24日給雕塑家朋友大衛.安熱 (David d'Angers) 的信中他這樣寫道:〝我的一條半腿已跨入墓穴,但我卻像一個激情和生命即將熄滅的臨終病人那樣平靜、順從。如果我的床頭沒有那本談論靈魂不滅的書,但我的心頭裡卻有。〞在他4月19日的最後一封信裡他這樣寫道:〝《夜之加斯帕》在許多部份都還不成熟,只是初稿,我真怕就這樣死去。〞十天之後,他便因肺結核或肺癆離開人世。1842年11月,《夜之加斯帕》終於出版問世…… 說來不無諷刺,波德萊爾愉快地給費爾南.烏賽 (Fernand Houssaye) 這樣寫道:〝我有一點秘密告訴你,在至少翻閱了二十遍著名的《夜之加斯帕》之後(你、我,還有我們的朋友都知道這本書,難道它還不配稱做名著嗎?),我竟然也想做同樣的嘗試。〞

離我們較近些,安德烈.布勒東將他寫入了《超現實主義宣言》,並說〝貝特朗是曩時的超現實主義者〞。


《夜之加斯帕》是出自一個命途多舛的詩人腦海的一部詭異奇特的書。長時以來它已被人遺忘,但卻以洛特雷亞蒙的方式存在於我們的文學中,這不啻是一個奇蹟。