Le French May - Exposition
Texte : Charlotte le Sourd

Cédric Maridet in midair :
« Penser l'oreille* »

Le son est là, partout, présent, même si le plus souvent inconscient ; il est bruit, il est musique, il est voix ; il est grésillement, vrombissement, claquement. Il ne prend le dessus sur les autres sens que lorsqu'il est perçu comme nuisible, perturbant, angoissant, voire obsessionnel. Dans les années 1960, alors que la ville moderne s'érige, des chercheurs – dont de nombreux Français et Canadiens – s'interrogent sur ce qu'il conviendra désormais d'appeler le « paysage sonore » (soundscape) : « Le terme, selon Barry Truax permet de désigner la façon dont les êtres perçoivent leur environnement. En tant que récepteur, l'individu appartient en fait à un système dynamique d'échange d'informations ». Ce qui est en jeu, c'est bien la relation entre l'homme et son environnement, l'interaction immédiate et nécessaire entre l'individu et son espace, l'harmonie plus ou moins réussie entre « impression » et « expression ».

Les concepts de son, de bruit, de musique, sont profondément culturels ; ce qui est parole chez l'un est perçu comme cri par l'autre, les frontières que l'on croit si imperméables entre son et musique divergent entre les individus. Depuis plusieurs années maintenant, Cédric Maridet (lauréat de la Biennale de Hong Kong en 2005 avec l'installation musique et vidéo Huangpu, cf . Paroles , numéro 201) allie une recherche artistique visuelle à un travail sur le son, avec tous les abîmes que ceci peut comporter. Jubilation de penser ce qui a été si peu pensé, mais aussi angoisse du chemin non balisé et des incertitudes. Pour rappeler en quelques mots la théorie du « père de l'écologie acoustique », le Canadien Murray Schafer, et, d'une manière générale, de celle des chercheurs du World Soundscape Project à la fin des années 1960, la question de l'environnement sonore engendre celle du juste équilibre entre ce que j'entends et les sons que j'émets moi-même. Dès lors, il s'agit de trouver cet équilibre sonore, de le recréer à partir de sons naturels ou non, de savoir aussi s'arrêter à temps, le casque posé sur les oreilles, longuement, tel le peintre face à la toile.

Schafer avait choisi de s'exiler loin de ce qu'il considérait comme les nuisances de la ville, décriant l'aliénation des « égouts sonores » du monde urbain. Cédric Maridet, lui, compose avec les sons de la ville, avec le son lui-même, sans lien avec aucune source naturelle, et qui pourtant se rattache naturellement à l'image. Il faudrait donc réapprendre à écouter, l'idée même de la « promenade sonore » surgit comme une des possibilités de cette rééducation au son. Cédric Maridet a effectué une résidence au Hong Kong Visual Arts Centre de juillet à septembre 2006. Une exposition en novembre dernier présentait un travail acoustique réalisé à partir des sons émis par le machinisme de l'air conditionné du bâtiment du Visual Arts Centre lui-même, et sa confrontation avec l'univers de la ville et du parc de Hong Kong. A suivi une série d'ateliers sur les théories de l'écologie sonore et les techniques de captation du son. L'expérience est au cœur même de ce qui est encore découverte et tâtonnement, à la manière d'un Pierre Schaeffer aux prises avec les enregistrements radios de l'ORTF au milieu des années 1930.

L'exposition « in midair » — Sound Works Hong Kong 2007 aspire à créer « une petite poche d'air » dans la ville de Hong Kong en présentant des œuvres qui « mettent en avant la physicalité du son et sa relation à la nature et au paysage social selon Yeung Yang, le commissaire de cette exposition in midair. Sont ainsi rassemblés aux cotés de Cédric Maridet, des artistes tels que Kawai Shiu, Anthony Yeung Ngor-wah, Anson Mak, Yuen Cheuk Wa (Hong Kong), Sumei Tse (Luxembourg), ou encore Felix Hess (Pays-Bas). Ces artistes interrogent aussi la résonance entre les disciplines, arts visuels, art sonore, musique, qui ont pu êtres moins cloisonnés à certaines époques du passé.

L'exposition « in midair », en recherchant un équilibre des sens, offre la possibilité de repenser le son, de le laisser se faire submerger par les images, mais aussi de mesurer les raisonnements que l'art sonore provoque avec les domaines de la science, de l'urbanisme, de la philosophie, des sciences sociales. En d'autres termes, il s'agit de décontextualiser le son, à la manière du travail de la phonétique sur le langage, pour parvenir à « l'objet sonore » tel qu'il est décrit par l'initiateur de la « musique concrète », Pierre Schaeffer, qui s'était intéressé aux études de la phénoménologie d'Husser. En déconnectant le son de tout référent physique, culturel, social, et psychologique, on concentre son attention sur la seule perception sonore.

Les artistes de l'exposition « in midair » nous apprennent à mieux écouter. C'est en éliminant toute association visuelle, en revenant à la seule perception sonore, en s'obligeant à ce détour, que surgissent alors de nouvelles images, moins évidentes. Poétique de la synesthésie.

*  Titre emprunté à Murray Schafer R., L'oreille pense. Notes pour un cours de musique expérimentale Toronto, Clark & Cruickshank, 1974.

法國五月:展覽

聲音有懾神的能力

 


徘徊於空氣間的共震和餘韻,能動搖個人對自身位置的感應,讓轉化社會的生活形態灦生。這是聲音的政治性。 聲音的詩性,在於能引起疑惑。法籍醫生兼小說家 Rabelais 於《 Pantagruel 》 (1532) 敘述航海員聽見有如凝固於空氣中的〝野蠻〞話語。這些嘶嘶雜聲是幽靈還是記憶的痕跡?

in midair 是城市中的一個小氣泡,徘徊於輝煌狀觀的視域之間,呼吸盛滿記憶的〝聲氣〞。 in midair 展出的聲音作品,探索聲音的物質性與自然和社會場景的關係。有些作品看顧空氣的震動,有些要聲音面對(有沒有)真相的問題。

參展藝術家有 Felix Hess( 荷蘭 )、麥海珊( 香港 )、 Cédric Maridet ( 法國 )、 Kawai Shiu( 香港 )、 Sumei Tse( 盧森堡 )、楊我華( 香港 )、袁卓華 ( 香港 )。其中 , 法籍藝術家 Cédric Maridet 是近期於香港較活躍的聲音藝術家。他的作品經常引發對內外空間分隔的反思。他的音樂錄像裝置《黃浦》是 2005 年香港藝術雙年展的得獎作品。  

 

« in midair » — Sound Works Hong Kong 2007
16 June – 15 July 2007
Tuesday - Sunday, 12-3 pm and 5-7 pm
habitus, 3/F
The Western Market, Sheung Wan