Sculpture
Texte : Gérard Henry

Tong King Sum : désir et sensualité

Tong King Sum est une double rareté à Hong Kong : dans une ville où le verre, l'acier et le béton écrasent la terre et le roc, il sculpte le bois ; dans une société où le travail, la tension et la fatigue gomment toute sexualité, il sculpte la sensualité.

N'ayant plus aujourd'hui la force de  manipuler ces énormes et pesantes pièces de bois qui formaient le corps de ses sculptures, ni de tailler au ciseau dans la chair du bois, Tong King  Sum travaille avec de nouveaux outils : l'appareil photo et l'ordinateur. Et toujours, le corps féminin. Tong n'est point un nouveau venu sur la scène hongkongaise. Il fait partie de ces pionniers qui se sont farouchement battus pour créer une scène artistique en dépit de l'indifférence générale de la société des affaires extrêmement mercantile de Hong Kong. Et comme beaucoup de ces artistes, il s'est créé lui-même grâce à son courage, à sa curiosité, à ses expériences et à sa grande détermina-tion. Il n'existait à Hong Kong aucune école d'art digne de ce nom qui puisse l'aider.


Three jointed wood, Pine 35 x 200 cm

Au début des années 60, Tong fait une rencontre décisive en la personne du sculpteur Cheung Yee dont il va devenir l'élève dans les cours du soir qu'il enseigne à Chinese University  (Extra Murals Studies). Il fréquentera également son atelier en 1971. Il devient aussi dans les années 75-78 le rédacteur en charge de la rubrique art du magazine mensuel Youth Today pour lequel il réalisera de nombreuses interviews et photos. A ce poste, il va s'ouvrir à d'autres formes artistiques, notamment la photographie et les arts de la scène. Il sera également un membre très actif et l'un des fondateurs de la Visual Art Society  avec laquelle il exposera très souvent à Hong Kong ou à l'étranger et sera plusieurs années de suite membre du jury de la fondation Philippe Chariol.

Dans sa sculpture sur bois, Tong s'appuie sur des formes naturelles qu'il transforme, comme s'il créait en synergie avec les forces de la nature. Ses bois ont une force tranquille, ses nus une plénitude sensuelle. Après avoir poli soigneusement les surfaces granuleuses du bois, il fait affleurer toutes les lignes du bois en surface donnant au corps sa  souplesse et à la peau sa fragilité, à tel point que la main du spectateur, attirée, ne peut s'empêcher de venir caresser toutes ces minuscules veinules. Ses sculptures monumentales que l'on peut voir dans différents musées de Hong Kong lui ont toujours demandé une grande dépense d'énergie qu'il ne peut plus fournir aujourd'hui, en raison d'un handicap respiratoire qui fait que chacun de ses souffles lui est devenu précieux. Il a donc changé ses outils de travail. Il faisait autrefois surgir le corps féminin du bois, aujourd'hui, il part du modèle vivant qu'il photographie, et remodèle avec la couleur.

Avec la photographie, sa démarche de travail est très différente. Tong King Sum demande à ses modèles des poses sculpturales qu'il photographie, faisant ressortir les masses du corps et sa féminité, un peu comme il le fait dans ses sculptures. Quelquefois son travail s'arrête à ce stade, car la photo en elle-même crée une forme qui se satisfait à elle-même. Le plus souvent il va au-delà en travaillant la photo à l'ordinateur. Il  rentre alors crûment à l'intérieur des corps, cherchant à en découvrir l'énergie intérieure.

La couleur remplace le ciseau à bois, elle modèle et cisèle les corps avec des teintes parfois presque psychédéliques. Un peu comme le font les infrarouges, elle évoque la chaleur interne, les zones érogènes du corps, le désir exacerbé qu'il exprime par une intense lumière blanche. Tong travaille dans le creux des corps, qui apparaissent comme un négatif de la photo. Il dévoile la forme, la structure des corps, en soulignant les lignes directrices. La couleur vient ensuite donner le mouvement ou la profondeur.

Tong est fasciné par le corps féminin, ses titres même expriment une jouissance de la nature et du corps qui s'exprime librement : Red Night , Red Wine , Blue Chest , Crystal , Jade , Light, Tatoo , Dancing , Blue door …. Ces photographies font l'objet d'une exposition montée par la commissaire d'exposition indépendante Portia Yip à la City University Gallery. Elles sont exposées en regard des sculptures sur bois. Ce qui se justifie, car elles explicitent rétroactivement le travail du sculpteur. Si certaines peuvent être considérées comme œuvres à part entières, beaucoup cependant apparaissent plus comme des études de travail montrant le cheminement du sculpteur. Elles n'ont pas en elles-mêmes la même force que les sculptures qui s'imposent par leur masse  et leur présence paisible. Tong reste à mes yeux avant tout un sculpteur. La photographie me semble dans son travail plus un outil comparable au dessin utilisé dans les études et  travaux de recherche.  

 


雕塑

唐景森:欲與慾

在香港,唐景森可說是加倍的少見:在一座充滿玻璃、水泥鋼筋的石屎城市中他以木材作雕塑;在一個因工作、壓力和疲憊而令人失去所有情慾衝動的社會中,他雕塑性感的作品。

唐景森現時已再無力量搬動或用鑿子雕鑿那些龐大沉重的木材,因此,他採用新的工具創作:攝影機和電腦。而創作主題仍然是女性的裸體。

唐景森的名字在香港的藝壇上並不陌生。他是屬於那一群以強悍姿態在香港爭取建立一個藝術舞台的先驅之一,儘管這裡是一個極之商業化的社會,人們對藝術的反應十分冷漠。而他亦像當時大多數的藝術家一樣,是憑著自己的勇氣,對事物的好奇,不停的探索和毅力才達至今日的成就。況且當年根本沒有合資格的藝術學院能幫助他學藝。六十年代初,唐氏透過中大校外課程的關係,認識了在那兒任教的張義,更成為了後者的入室弟子,這對他日後的創作有決定性的影響。 1971 年間,他經常出入於張義的工作室。 1975 至 78 年,他在《時代青年》雜誌社當美術編輯,替這月刊作了不少專訪和平面設計。在這工作期間,他有機會接觸到其他種類的藝術領域,如攝影及表演藝術。他同時亦是視覺藝術協會十分活躍的創會會員,他經常參與協會在香港或海外舉辦的展覽,更連續數年成為 Philippe Chariol 基金會的評審委員。

在他的木雕作品中,唐氏因應木材的天然造型進行創作,讓作品的造型與自然的力量契合。他的木雕予人一種寧靜的感覺,他的裸體雕像極之豐滿性感。木材的表面經過他的細心打磨後,露出了所有的木紋,讓軀體增添了柔軟和幼滑的感覺,讓觀賞者忍不住伸手撫摸那些微細的紋理。現時,因為呼吸系統出現問題,他已再無法創作那些我們在香港多間博物館中看到的巨型雕塑作品。因此他轉變創作媒介。從前,他利用木材展現女性體態,現今他利用攝影機拍攝活生生的模特兒,然後再將照片經過顏色處理。


Red Light

在攝影方面,他的創作手法十分與別不同。唐景森要求他的模特兒擺一些雕像似的姿態給他拍攝,他的攝影作品有點兒像他的雕塑,是刻意表現人體的肌理和女性的的特徵。有時,因為照片本身的形態已足以自我表達,所以不需再加處理。但很多時候,他的照片都會經過電腦軟件的處理。他直接了當地進入人體的內部,嘗試發掘內在的力量。顏色代替了鑿子,他用一些幾近夢幻的色彩來塑造和雕鑿人體。這些迷幻的色彩有如紅外線的效果,能喚起發自內心的熱情,他利用反白的處理手法來凸顯人體的性感地帶,藉此來表達強烈的慾望。