Poésie
Texte : Bernard Pokojski

Jacques Roumain, gouverneur de la rosée

« Il était magnanime. Il était incommensurable, les pieds dans la poussière, la tête dans l'infini. C'était un prince de bonté, un messager lumineux dont le glaive fleuri était humide encore de la rosée des champs. » (Anthony Lespès, 1993)

« (…) un physique avantageux, un port élégant, un beau visage allongé au teint café au lait, un front ample et un tempérament nerveux abritant un esprit aux dons variés… » Mais qui était Jacques Roumain, ici brièvement décrit en 1965 par R. Piquion ? Un Haïtien, comme Davertige ou Magloire-Saint-Aude, né à Port-au-Prince en 1907 dans ce qui était à l'époque le meilleur de l'aristocratie de son île et dont l'un des ancêtres combattit en 1779 pour l'indépendance de l'Amérique. Un Haïtien aussi et surtout qui connaîtra une vie fulgurante et qui rêva d'un destin différent pour son île.

A l'école donc, chez les Frères d'un prestigieux collège, il apparaîtra comme un enfant batailleur et téméraire aimant discuter avec ses professeurs, qui se retrouvera ensuite en Suisse, à Berne puis à l'école polytechnique de Zurich où il deviendra champion de boxe et courra le 100m en 11 secondes… Mais la Suisse n'était pas son idéal, coupable de n'être à ses yeux qu'un repère pour « touristes confortables ». « La seule chose que je fasse avec passion est la lecture de Schopenhauer, Nietzsche, Darwin et les vers de Heine et de Lenau ». Mais c'était l'essentiel. Jacques Roumain quittera la Suisse en 1926 et se rendra en Espagne afin d'entreprendre des études d'agronomie qu'il abandonnera très vite pour suivre des cours de tauromachie. Son premier poème en prose Corrida, daté Madrid, mai 1926, sera publié l'année suivante dans la Revue indigène. A vingt ans, Jacques Roumain rentrera à Haïti : « il se reconnaissait enfin, (…) écoutant fondre en lui la glace amassée en Europe, et disparaître de son cœur ce qu'il nommait avec amertume «le grand silence blanc» (…) Maintenant, il était parmi ses frères et son peuple. » Nous étions donc en 1927 et Jacques Roumain publie ses premiers poèmes dans les revues La Trouée et la Revue indigène dont il sera d'ailleurs l'un des fondateurs. Jusqu'en septembre 1929, il écrira vingt-deux poèmes et P. Laraque dira que ce « qui caractérise les poèmes de jeunesse, c'est pour la forme, un certain modernisme et une maîtrise déjà remarquable du vers libre, et pour le fond, l'individualisme et le pessimisme ». Roumain fondera aussi une publication, Le Petit impartial , qui allait s'employer à attaquer le gouvernement accusé de « collaborer » avec l'occupant américain venu s'installer en 1915 et qui ne partira qu'en 1934. Manie fâcheuse dont tout le monde bénéficie encore… Ses prises de position politiques ne seront pas du goût du gouvernement, et en cette année 28 il tâtera pour la première fois de la prison. Son procès s'ouvrit l'année suivante, le 1 er avril, mais la salle fut plongée dans un tumulteg « si formidable qu'on dut renvoyer tout simplement le jugement à une date ultérieure ». Ce fut le 21 avril et à la suspension de l'audience, Roumain croyant qu'un des membres des forces de l'ordre s'était permis de bousculer sa sœur, se précipita vers elle pour la protéger, recevant alors un coup à la tête… Le sang coula et « des cris partirent de toutes parts et se répercutèrent dans la rue (…) Ce fut une scène indescriptible de douleur, de tristesse et d'indignation », pour reprendre les mots du Nouvelliste. Roumain sera condamné à un an de prison, ramené à six mois en appel et aurait dû être libéré, sa peine ayant été exécutée en préventive, il passera cependant deux jours au cachot disciplinaire pour avoir protesté, et ne sera finalement libre qu'au mois d'août. Il écrira des chroniques dans la presse et se verra à nouveau arrêté deux mois après pour avoir lancé « un appel séditieux ». Il retrouvera l'air libre à la fin de l'année suite à l'amnistie de tous les prisonniers politiques… En 1930, le président de la République renversé, Jacques Roumain entrera au Ministère de l'intérieur quelques mois. En août, paraîtra La Prose et l'ombre , description de la misère de la jeunesse haïtienne « meurtrie et retenue dans son évolution par une imbécillité bourgeoise alliée à des préjugés stupides » pour reprendre les mots de P. Laraque. Roumain y exhibera aussi les bassesses et la laideur de son milieu.

1931, parution coup sur coup de deux autres de ses livres Les fantoches , œuvre dans laquelle il « a campé, avec le sourire désabusé du philosophe, tous ces hommes ballons, véritables fantoches, esprits mutinés qui s'acharnent à se concevoir autres qu'ils ne sont dans une société inexistante » comme le disait François Duvalier et La montagne ensorcelée où, en véritable psychologie, il pénètre le ressort caché des actions les plus secrètes…

Membre du Ministère de l'intérieur pour la seconde fois il n'en est pas moins convoqué par le Procureur de la République qui enquêtait sur ses possibles activités subversives et sera écroué au pénitencier national en 1933 « Je suis communiste. Aucune puissance au monde ne peut m'enlever ce droit. » allait-il déclarer.

L'année suivante, marque la fondation du Parti communiste haïtien. Roumain publie son essai politique Analyse schématique déclarant « La couleur n'est rien, la classe est tout », et appelant au soulèvement des masses et à la lutte sous la bannière du Parti communiste. Pour le pouvoir en place, c'en était trop, et Roumain sera de nouveau dans les geôles du gouvernement à partir de décembre 1934 pour n'en sortir, cette fois qu'en juin 1936, fragilisé et miné par le paludisme.

Il quittera Haïti pour Bruxelles le 15 août : « A ma libération, j'ai été placé sous la plus stricte surveillance de la police (…) réduit à l'impuissance (…) C'est ainsi que je me suis vu forcé de m'exiler momentanément d'Haïti. » Lisez qu'il venait de se faire expulser après avoir passé en tout trente-deux mois dans les prisons de son pays. Roumain séjournera un an à Bruxelles avec sa famille « nous y vivons, nous essayons d'y être heureux », pour rejoindre Paris où il participera au Congrès des écrivains pour la défense de la culture. A Paris, Jacques Roumain s'inscrit à l'Institut d'ethnologie et aura pour maîtres Marcel Mauss, l'abbé Breuil et Paul Rivet dont il sera l'assistant au Musée de l'Homme. Roumain donnera aussi des articles dans les revues de gauche et « La tragédie haïtienne », parue dans Regards où il accusait le dictateur dominicain de l'époque de complicité de génocide avec les autorités haïtiennes, l'enverra devant la 12e Chambre correctionnelle qui le condamnera à quinze jours de prison avec sursis et 300 francs d'amende… L'honneur d'un dictateur était en jeu et la France se devait de le laver de tout soupçon…

« Quant au chef d'état outragé, c'est un nommé Leonidas Trujillo, dictateur de Saint-Dominique, ce pays où, en octobre 1937, on massacra des centaines de chômeurs venus d'Haïti » ( Le Canard enchaîné du 21 décembre 1938)…

En 1939, Roumain envoie sa famille en Haïti et prendra à Rouen un petit cargo bananier pour rejoindre la Guadeloupe et la Martinique dans l'attente d'un visa pour les Etats-Unis. On le retrouvera ensuite à New York où il connaîtra une vie difficile, donnant des leçons de français mal payées : « Je préfère cette dure existence au partage d'un ignoble bonheur fait de la souffrance des autres. » Ce n'est qu'en 1941 qu'il retournera enfin en Haïti après un exil de presque six années ayant sans doute fait la promesse de s'abstenir de toute activité politique car en effet, Roumain se consacrera dorénavant aux travaux scientifiques. Il rencontrera Alfred Métraux qui écrira : « je n'ai connu que très peu de collègues capables d'apporter à leurs recherches une passion aussi jeune et aussi forte » et deviendra directeur de l'Institut d'Ethnologie, enseignant l'archéologie précolombienne et l'anthropologie préhistorique.

En 1942, Jacques Roumain se rappellera au bon souvenir des autorités religieuses, publiant son opuscule A propos de la campagne Anti-superstitieuse , qui lancèrent contre lui cette diatribe : « (…) on voulut salir l'Eglise, le Clergé d'Haïti (…) Cette attaque partit d'un ennemi acharné de l'Eglise et du Christ Jésus, d'un homme professant ouvertement un communisme athée (…). »
Jacques Roumain sera quelques mois plus tard nommé Chargé d'affaires d'Haïti à Mexico, exile doré offert par un gouvernement soupçonneux et il commence l'écriture de Gouverneurs de la rosée .

Sa santé à cette époque, commencera à montrer des signes de défaillance. En août 1943, un journal annonce « nous avons eu le grand plaisir de recevoir en nos bureaux la visite de M. Jacques Roumain… complètement remis de la grave maladie qui avait mis ses jours en danger… » L'année suivante, il termine à Mexico Gouverneurs de la rosée … Le samedi 18 août 1944, Jacques Roumain meurt, par empoisonnement selon certains, paludisme selon d'autres ou encore d'une cirrhose du foie selon son médecin.

Gouverneurs de la rosée paraîtra en décembre, « chef d'œuvre par la beauté de sa langue, par l'habileté de son métier, par ce sens merveilleux du tragique simple… » S. Alexis. Louis Aragon enthousiaste lui aussi, fait publier le livre en France dans la collection « Bibliothèque française ».

Dans ce roman, Manuel revient sur son île après un exil de quinze ans à Cuba comme coupeur de canne à sucre et son séjour lui a ouvert les yeux : « ce n'est pas Dieu qui abandonne le nègre, c'est le nègre qui abandonne la terre et il reçoit sa punition : la sécheresse, la misère et la désolation ». Alors Manuel cherchera l'eau, celle dont Haïti a besoin pour que s'en aille avec elle la misère et la sécheresse. L'engagement politique n'avait jamais quitté Roumain, qui rêvait d'un autre destin pour son île, et son ouvrage nous séduit par ses élans poétiques et l'amour de Roumain pour sa patrie.

Dany Laferrière a ces mots très justes : « Chaque pays a son Roumain, c'est-à-dire un écrivain qui résume en quelque sorte les rêves, les élans et les échecs de sa société. Ce n'est pas forcément le meilleur mais c'est celui en qui tout le monde se reconnaît (…). C'est quelqu'un qui n'hésite pas à asséner ses quatre vérités à ses compatriotes. » Roumain en mourut.

Si l'été est pluvieux et morne
Si le ciel voile l'étang d'une paupière de nuage
Si la palme se dénoue en haillons
Si les arbres sont d'orgueil et noirs dans le vent et la brume
Si le vent rabat vers la savane un lambeau de chant funèbre
Si l'ombre s'accroupit autour du foyer éteint
Si une voiture d'ailes sauvages emporte l'île vers les naufrages
Si le crépuscule noie l'envol déchiré d'un dernier mouchoir et si le cri
blesse l'oiseau

tu partiras
abandonnant ton village
sa langue et ses raisiniers amers
la trace de tes pas dans ses sables
le reflet d'un songe au fond d'un puits
et la vieille tour attachée au bout de sa laisse
et qui aboie dans le soir
un appel fêlé dans les herbages…
Nègre colporteur de révolte
tu connais tous les chemins du monde
depuis que tu fus vendu en Guinée
une lumière chavirée t'appelle
une pirogue livide
échouée dans la suie d'un ciel du faubourg
(extrait de Bois d'ébène recueil posthume publié en 1945)



詩詞

雅克.盧曼——露水司令

〝他高尚,他無與倫比,兩腳踩著大地,昂首遠眺無垠。他是一位善心的王子, 光明的使者,劍柄飾花的寶劍在田野的朝露裡仍然濕潤。〞 ( 安東尼.萊斯佩, 1993)

〝……體格健碩、穿戴高雅、俊美的長臉龐呈咖啡牛奶色,天庭開闊飽滿。神經質但卻才思敏捷、博學多才……〞然而, R. 皮基翁 (R. Piquion)1965 年如此簡單勾勒出來的人物:雅克.盧曼究竟是何許人?和達韋蒂熱 (Davertige) 或馬格盧瓦 – 聖 – 奧德 (Magloire-Saint-Aude) 一樣,是一名海地人。他於 1907 年誕生於太子港,這個當時這島上最富貴族氣息的地方。他的先輩中的一人 1779 年曾為美利堅的獨立而戰。一名渡過了光輝奪目的一生,夢寐以求亟欲改變島國命運的海地人。

他在一間頗負名氣的中學裡求學,是一個膽大妄為、愛惹事生非、喜歡和老師頂撞的孩子。後來他來到瑞士伯爾尼。不久又轉到蘇黎世一間綜合科技學校繼續學業。在學校裡,他成了拳擊冠軍,並以 11 秒鐘的成績跑了100 米……但瑞士並非他心中理想的地方,在他眼裡,它只是〝悠閒的遊客〞造訪之地。〝我唯一熱中的是閱讀叔本華、尼采、達爾文的著作及海涅、萊瑙 (Leneau) 的詩歌。〞他這樣說道。但這是根本。他於 1926 年離開瑞士前往西班牙攻讀農學,但很快便放棄轉而學習鬥牛術。他的第一本散文詩集《 Corrida 》 1926 年 5 月於馬德里寫成,並於翌年在《土著雜誌》 (Revue indigène) 上發表。二十歲時,他返回祖國海地。〝他最終認識了自己……聽見歐洲的冰山往他身上坍塌,還有那他苦澀地稱作 ‵ 白色的寂靜 ′ 從他心中消失……現在,他置身於自己的兄弟和人民之中。〞這時是 1929 年,雅克.盧曼在《突破》 (La trouée) 及《土著雜誌》上發表了他最初的詩作,他亦是該雜誌的創辦人之一。直至 1929 年 9 月,他一共寫了二十二首詩歌。 P. 拉臘克 (P. Laraque) 說:〝他年輕時寫的詩歌,從形式上看,有現代主義風格,並對自由詩的技巧掌握純熟;從內容上觀之,則散發出個人主義和悲觀主義。〞盧曼自己亦創辦了一份稱作《小青天》 (Le petit impartial) 的刊物,竭力攻擊政府,指責它〝勾結〞 1915 年來到海地、 1934 年方才離去的美國人。這種做法雖然給他帶來麻煩,但大家仍從中得益…… 他的政治立場不合政府脾胃,於是 1928 年被投入獄,初嚐鐵窗風味。翌年 4 月 1 日,他的案件開審,但法院大廳一片混亂,〝群情如此激憤,以致不得不推遲審訊日期〞。 4 月 21 日,法院暫停審理這天,混亂中盧曼好像見到法庭的一個警衛對其姐推撞動粗,他猛撲過去保護姐姐,頭部遭到沉重一擊……鮮血直流,〝驚叫聲四起,響徹大街……這是一幕無以言狀的痛苦、悲慘、憤怒的場景〞,《小說家》報 (Nouvelliste) 這樣描述道。盧曼被判入獄一年,上訴得直,減刑六個月,由於判決前已被羈留多時,獲當庭釋放。但由於他提出抗議,在教導所裡待了兩天,只是直到 8 月才獲得自由。他在報紙上撰寫專欄文章,號召〝反叛〞,於是兩個月後,再度被投入獄。年終,由於大赦政治犯,才得以重見天日…… 1930 年,共和國總統被推翻,他進入內政部工作了幾個月。 8 月,《散文與影子》一書出版問世,書中描繪了海地青年的悲慘境遇,〝由於資產階級的愚蠢加上偏見,令他們停滯不前,倍受傷害。〞 P. 拉臘克這樣評說道。書中,作者還揭發了週遭人性的卑鄙和醜惡。

1931 年,他接連出版了兩部書。在《傀儡》 (Les fantoches) 這部小說裡,他〝帶著哲學家參透塵世的微笑,生動地刻劃了那些傀儡,那寫反叛者。他們竭力想像自己是另一種人,而不是像他們現在一樣,生活在不存在的社會裡的人。〞弗朗索瓦.迪瓦利耶 (François Duvalier) 如是評述。而在另一部小說《著魔的山》 (La montagne ensorcelée) 裡,他從真正心理學的角度,深入探視最隱秘的行為裡深藏的動機。雖然他再次在內政部任職,卻未能免除檢察官對他可能的反政府行為進行調查,並於 1933 年被投入獄。他宣稱:〝我是一名共產黨,世界上沒有任何力量可以剝奪我的權利。〞

翌年,海地共產黨宣告成立。盧曼發表了他的政論集《簡略分析》 (Analyse schématique) ,宣稱〝膚色不算甚麼,階級才是一切〞,並號召群眾在共產黨的旗幟下進行反抗鬥爭。政府對此忍無可忍,於是 1934 年他再次遭逮捕,鎯鐺入獄,這次直到 1936 年才獲自由,但他的身體已孱弱不堪,並深為瘧疾所折磨。

8 月 15 日,他離開海地前赴布魯塞爾。他說:〝我雖獲釋,但卻在警察的嚴密監視下,完全喪失自由……因此,我不得不暫時離開海地,過流亡生活。〞其實,他是在渡過了整整三十二個月的鐵窗生涯後遭政府驅逐出境的。他和妻子家人在布魯塞爾滯留了一年。〝我們在這裡生活,盡量令自己生活得愉快,〞他這樣說道。後移居巴黎,並參加了為捍衛文化而召開的作家大會。在巴黎,盧曼報讀了人種學學院,師從馬塞爾.莫斯 (Marcel Mausse) 、布勒伊神甫 (L'abbé Breuil) 及保羅.里韋 (Paul Rivet) ,並在人類博物館任後者的助手。他同時亦為左派雜誌撰寫文章。《海地之悲劇》 (La tragédie haïtienne) 發表於《目光》 (Regards) 雜誌上,在這篇文章裡他揭露了當時的多米尼加獨裁者和海地當局互相勾結進行大屠殺。為此他被第十二輕罪法庭傳召,被判入獄十五日,緩期執行,罰款三百法郎……獨裁者的名譽受損,法國政府理當為其洗脫罪名……〝這位受冒犯的國家首腦叫做萊奧尼達斯.特魯希略 (LeonidasTrujillo) 。他是多米尼加的獨裁者, 1937 年,在這個國家屠殺了千百個來自海地的失業者。〞 ( 《鴨鳴報》 (Le canard cuchaîné), 1938 年 12 月 21 日)

1939 年,盧曼將家眷送往海地,自己在盧昂乘搭一艘載香蕉的貨船前往瓜得羅普和馬提尼克,等待前往美國的簽證。後來他寓居紐約,靠教授法文為生,收入菲薄,生活貧困。他說:〝與其同流合污,享受建築在別人痛苦身上的可恥生活,我更喜安貧樂道。〞在渡過了六年的流放生活之後,也許還答應從此不再參加任何政治活動,他終於於 1941 年重返海地。果然從今以後他全情投入科學研究。他結識了阿爾弗雷德. 梅特羅 (Alfred Môtraux) 。梅特羅這樣寫道:〝在同事中,我甚少見到像他這樣以如此強烈的熱情投身科學研究的〞。他成了人種學學院的院長,教授哥倫布發現新大陸前的美洲考古學及史前人類學。

1942 年,雅克.盧曼由於發表了《關於反迷信運動》 (A propos de la campagneAnti-superstitieuse) 的小冊子而引來了宗教當局對他的注意。教會是這樣抨擊他的:〝……有人想玷污教會、玷污海地的神職人員……這個攻擊來自一個宗教和耶穌基督的瘋狂敵人,一個公開宣揚無神論共產主義的人……〞

數月之後,他被任命海地駐墨西哥大使館的代辦, 這是滿腹狐疑的政府對他的變相流放,也就從這時起,他開始著手創作《露水司令》 (Gouverneur de la rosée) 這部小說。

這個時期,他的健康每下愈況。 1943 年 8 月,一份報紙報導:〝我們有幸接待了雅克.盧曼先生對敝報的訪問……在一場危殆的重病之後,他竟然完全康復了。〞翌年,他在墨西哥寫成了《露水司令》一書…… 1944 年 8 月 18 日便與世長辭。有人說這是長期鐵窗生涯的結果;有人說是瘧疾奪走了他的生命;而醫生則說他是因肝硬化而辭世的。《露水司令》於 12 月出版問世,〝這是他的代表著,語言優美,技巧純熟,簡樸的悲情,凄婉動人。〞 S. 阿歷克西 (S. Alexis) 這樣評說道。路易.阿拉貢亦為之興奮不已,將它收入〝法蘭西叢書〞 (Bibliothèque française) 在法國出版。

在這部小說裡,主人公曼努埃爾在流放古巴五十年後回到了自己的海島故鄉。流落他鄉期間,他在甘蔗園裡從事收割甘蔗的工作,生活打開了他的眼睛。 他說:〝上帝並沒有拋棄黑人,是黑人拋棄了土地,因而受到了懲罰:乾旱、貧困、悲傷。〞於是,曼努埃爾動身前去尋找水,這海地極需靠它擺脫貧困及乾旱的水。盧曼沒有一刻離開對政治的關注,他夢寐以求,渴盼海地有另一種命運。他的作品總是以其政治熱情及對祖國的關愛而深深吸引著我們。

達尼.拉菲利埃 (Dany Laferrière) 有以下十分中肯的評述:〝每個國家都有自己的盧曼,就是說一個訴說夢想、激情,揭示社會弊端的作家。他不一定是最好的,然而在他身上人人都可發現自己……這是一個毫不猶豫地向自己的同胞直抒忠言的人。〞盧曼為此獻出了自己的生命。