Danse contemporaine
Texte : Gérard Henry
Helen Lai : De l'écriture féminine à l'écriture chorégraphique
Dans son prochain spectacle, Her story : women of language, the language of women , la chorégraphe hongkongaise Helen Lai s'intéresse à l'écriture féminine, car c'est à travers l'écriture que beaucoup de femmes peuvent exprimer leurs sentiments profonds dans un monde où les hommes traditionnellement dominent. C'est aussi pour Helen Lai un monde familier et très intime - sa mère était écrivain et jusqu'à la fin de ses jours, a persévéré dans l'écriture, y cherchant son indépendance et sa propre expression. Par ce spectacle, elle veut aussi lui rendre particulièrement hommage ainsi qu'à toutes les autres femmes engagées dans un tel mouvement : « Je veux explorer les vies de ces femmes qui luttent et recherchent la liberté et le bonheur, » dit-elle.
Helen Lai pourrait d'ailleurs elle-même figurer en très bonne place sur la liste de ces femmes qui ont su créer leur propre monde non dans le domaine de l'écriture mais dans celui de la danse contemporaine. Après 30 ans de création chorégraphique, elle reste à la pointe de son art et l'une des chorégraphes les plus intéressantes de cette région de l'Asie. Ses spectacles ayant un côté narratif, les puristes de la danse ne l'apprécieront peut-être pas de la même manière, car à la danse pure, elle préfère le théâtre-danse qui se rapproche plus de son inspiration souvent très littéraire…
Ce qui rend Helen Lai unique est son répertoire qui touche souvent à des thèmes universels et dépasse l'anecdotique que l'on voit trop souvent à Hong Kong. En 2002 elle s'inspire de la tragédie grecque de Sophocle, Oedipe , pour créer The tragedy of M. O , une pièce transposée dans un espace restreint, où la relation incestueuse entre Oedipe et sa mère était représentée par un duo sur un lit encombré de meubles. On peut aussi citer à son répertoire Invisible Cities , clin d'œil à Italo Calvino, et en 2004, The comedy of K , une plongée dans le monde de l'absurde de Kafka avec une imagerie surréaliste qui rappelait beaucoup le peintre Magritte. Elle a donné aussi des pastiches des opéras révolutionnaires chinois (Millenium mix) présenté au Festival des Cultures à Munich en 1997, ou des pièces comme Nine Songs , qui célèbre l'intégrité du grand poète chinois Qu Yuan qui, au 2 e Siècle av.J.C. se suicida en exil, désespéré de la corruption des princes du royaume de Chu, spectacle dont la musique traditionnelle chinoise se joua sur des instruments créés spécialement par le compositeur Tan Dun, une pièce qui fut invitée à la biennale de danse de Lyon en 2000. Sans vouloir enfermer Helen Lai dans un genre, on peut dire que ses thèmes de prédilection sont la lutte contre l'enfermement, qu'il soit intérieur, intime, psychologique ou politique, l'autoritarisme, la corruption; l'autre est son grand amour de la musique et du chant. Elle privilégie des musiciens un peu fous comme Stravinsky, Eric Satie ou Chostakovitch dont elle a conté la vie récemment dans un magnifique spectacle, Testimony, avec l'acteur Lee Chun Chow et la troupe de Hong Kong City Contemporary Danse Company dont elle est Chorégraphe résidente.
Sa dernière pièce HerStory qui sera jouée en décembre, a comme point de départ le Nushu, cette écriture créée et utilisée uniquement par les femmes au 19e siècle et transmise de mère en fille dans le sud de la province du Hunan. « Le nushu, explique-t-elle, est particulièrement intéressant parce que, dans cette société où les femmes sont opprimées, où elles ne décident pas de leur mariage, c'est une écriture secrète qui leur permet de communiquer entre elles, d'exprimer leurs souffrances, de se consoler, de raconter leurs vies en toute liberté et à l'insu des hommes. » « Le nushu, précise-t-elle, écrit sur éventail ou pièces de tissu n'est cependant qu'un point de départ à mon travail qui s'adresse à l'écriture féminine contemporaine à Hong Kong. J'ai lu les œuvres de femmes écivains locales et j'aime leurs thèmes, leur formes littéraires et leur façon d'expérimenter avec les mots. J'en ai choisi deux pour ce spectacle, de style très différent.
« La première est Wong Bik Wan, sa façon d'écrire est un peu folle, certaines de ses œuvres sont violentes, obsessives, et ses images sont fortes. Elle aime expérimenter toujours avec les images et les rythmes, elle est d'ailleurs amatrice de danse et de flamenco. J'ai vu deux de ses œuvres théâtrales sur scène et j'avais depuis longtemps l'envie de faire quelque chose sur son écriture.
« L'autre est Xixi que j'admire beaucoup, un femme écrivain renommée de Hong Kong, au style complète-ment différent de la précédente. Elle écrit de façon persistante depuis des années, vit de façon très austère et a un sens de l'observation extraordinaire. »
Mais il ne s'agit pas ici de théâtre et il sera intéressant de voir comment Helen Lai retranscrira ces écritures en danse. Ces deux auteurs donnent en effet des images très différentes de Hong Kong, le monde de Wong Bik Wan est souvent celui de gens menés au désespoir, victimes de la peur, sombrant et se perdant dans la violence alors que celui de Xixi est autrement plus léger, comme si elle peignait la vie à petites touches et laissait rentrer une brise fraîche sur le quotidien. Xixi est un des rares écrivains avec le poète Leung Ping Kwan a être traduits en langue française. Elle mérite un tel hommage.
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現代舞蹈
黎海寧:由女性寫作到舞蹈編寫
在她最新的表演節目《女書:女人寫書.書寫女人》中,香港編舞家黎海寧以女性作家為創作主題,因為在一個傳統由男性主導的世界中,很多女性只可以透過書寫來表達內心的感情。女性寫作對黎海寧來說也是一個熟悉和親密的世界 — 她的母親是一位作家,直至離世前最後的一段日子她仍不斷地寫作,並從中找到獨立和自我表達的途徑。黎海寧是希望透過這舞蹈作品向她的母親及其他投身這類活動的女性致敬。她表示:〝我想探討那些為尋求自由和幸福而搏鬥的女性的生命。〞
黎海寧本人其實也可被列入這類懂得為自己開創新天地的女性之行列,但不是在寫作的領域,而是在現代舞壇上。經過了三十年的舞蹈創作生涯,她仍然處於舞蹈藝術的巔峰,更是亞洲區內其中最具特色的編舞家之一。她的舞蹈作品帶有種述事體的意味,而那些主張純舞蹈主義的人可能不太接受她的表達方式,若論到純舞蹈,她本人反而更喜歡舞蹈劇場,因為它們更接近她那些富文學色彩的創作靈感……
黎海寧的表演節目很多時都會涉及一些世界性的主題,遠勝那些香港常見的陳腔濫調、老套的主題。 2002 年,她自希臘悲劇作家 Sophocle 的作品《 Oedipe 》中獲得靈感,創作了《 O 先生家族死亡事件》,她將場景轉換為一個狹小的空間,並以在一張堆滿傢具的床上表演的雙人舞來代表達 Oedipe 與他母親的亂倫關係。她的《隱形城市》讓人一窺 Italo Calvino 的風格,而 2004 年的《畸人說夢》則以超現實主義的圖像帶觀眾進入一個卡夫卡式的荒謬世界中。她為 1997 年的慕尼黑文化節創作了《革命京劇 — 九七封印》,此外還有歌頌中國偉大詩人屈原的《九歌》,屈原遭奸人所害被逐出國境,在流放期間,因為對楚國諸侯的腐敗深感痛心而投江自盡,這演出以傳統中樂伴奏,演奏的樂器更是作曲家譚盾為此特別製造的,這舞蹈作品曾獲邀請在 2000 年的里昂雙年展中演出。
為了不想將黎海寧困在一種類別的框框內,我們可以說她的作品偏愛以抗拒困鎖(無論是有關內在的、親密的、心理的或政治的)作主題;還有她對音樂和歌曲的熱愛。她特別喜歡一些帶點兒神經質的作曲家,如史特拉汶斯基、艾力.薩提或蕭斯達高維契等,而在不久之前她還在一個由演員李鎮洲與香港城市當代舞蹈團合作演出的精彩作品《證言》中描述蕭斯達高維契的一生。她現時是城市當代舞蹈團的駐團編舞。
她的新作 《女書》 將在十二月份演出,在十九世紀的封建社會,湖南省江永縣目不識丁的姑娘們以一把紙扇、一巾紅布、沾了愁苦的淚水,寫成秀麗飄逸的獨特文字 —— 女書。黎海寧解釋道:〝《女書》是特別有趣味的,因為婦女在這個社會中是被壓迫的一群,她們對婚姻沒有自主權,唯有借助這種書寫的方法秘密地與其他的婦女互討心聲,在男人不知情的情況下自由地表達自己的苦楚,或互相安慰,或述說生活點滴。〞她還指出:〝寫在紙扇或紅布上的女書只不過是這個舞蹈作品的起點,這作品其實是針對香港現代女性作家的作品。我閱讀過本地一些女作家的作品,並且十分喜歡她們的主題,還有她們的文筆以及她們字詞的表達方法。在這個作品中我選擇了兩位風格各異的作家。
〝一位是黃碧雲,她的寫作方法有點兒瘋狂,有部份作品甚至頗為暴力,採用的圖像也很強烈震撼。她向來都喜歡以圖像和節奏感來表達,事實上,她本人也是業餘的舞者。我曾經看過兩個改編自她的作品的舞台劇,在很久前已希望能夠用她的作品創作些甚麼。〝我非常欣賞西西的作品,她是香港一位著名的女作家,她的寫作風格與前者完全不同。多年來她一直努力不懈地寫作,生活非常樸素,並且有驚人的動察力。〞
但這裡所講述的並不是話劇,因此很值得看一看黎海寧是如何以舞蹈重新書寫這些作品。這兩位香港作家提供了截然不同的形象,黃碧雲筆下描寫的是一些被絕望或恐懼拖垮,在暴力的世界中消沉失落的人,相反西西筆下描寫的是一個較輕鬆的世界,她描繪生命中的點滴,為日常生活帶來一陣清涼的風。西西是少數作品被翻譯成法文的香港作家之一,實在很值得黎海寧這樣向她致敬。
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