|
Jean-Philippe Toussaint a de multiples passions. Ecrivain, il est aussi cinéaste et photographe et ne dédaigne pas non plus organiser des installations avec d'autres artistes. Il était ainsi présent à la Triennale de Canton en 2008 avec une installation sur « La mélancolie de Zidane » réalisée avec l'artiste chinois Chen Tong (陳侗). Il est de nouveau à Hong Kong en mars 2009 invité par l'Alliance Française et le Consulat belge pour présenter un de ses films, La patinoire, et sa toute dernière œuvre, une vidéo réalisée autour de son dernier roman, Fuir, prix Medicis 2005, dont l'action se déroule principalement en Chine. Deux de ses romans Faire l'amour et Fuir ont été traduits en chinois et publiés en un volume aux éditions Hunan Wenyi Chubanche.
Faire l'amour est l'histoire d'une rupture et de la dernière nuit d'amour d'un couple dans une chambre d'hôtel de luxe, lors d'une nuit de neige à Tokyo. Un livre sur la séparation mais aussi sur Tokyo, ville qu'il saisit admirablement dans ce roman. Fuir est d'une certaine façon le deuxième volet de ce diptyque asiatique, car il se déroule en grande partie en Chine et compte le même personnage de femme, Marie, dont la présence se fait toujours sentir même si celle-ci n'apparaît que dans le dernier volet du roman. Fuir pourrait être un rocambolesque roman d'aventures. Le narrateur se rend à Shanghai investi d'une mission que lui a confiée Marie, la femme qu'il aime. II doit rencontrer un certain Zhang Xiangzhi qui mène des opérations immobilières pour le compte de la société de Marie. Ce personnage opaque et autoritaire, s'exprimant exclusivement en chinois ou dans un anglais plus qu'énigmatique, et qui d'emblée lui donne un téléphone portable (pour l'espionner ?), ne cesse d'impressionner le narrateur : est-il un hôte un peu maladroit, bourru, ou bien un dangereux tueur psychopathe.
Plus que l'histoire elle-même, c'est le rythme et le style d'écriture qui emportent le lecteur. De Shanghai à Pékin, d'aéroport en gare, de chambre d'hôtel en compartiment de train, le lecteur voyage au même rythme que le narrateur et découvre au même moment paysages, personnes et événements, restant comme le narrateur, ignorant du comment et du pourquoi des choses. Toussaint ne décrit jamais l'arrière plan des choses, ses paysages découverts par la vision, l'ouie ou l'odorat sont ceux qui se trouvent dans le champ visuel ou olfactif direct du narrateur, ce qui donne par de nombreux petits détails un paysage cru mais réel de la Chine contemporaine. Il n'y a pas d'harmonie, mais un emboitement de gestes, d'événements, de déplacements dans l'espace, de désirs qui forment une vie où tout semble s'entrechoquer sans dessiner de véritable sens. Les sentiments se succèdent de même : peur, solitude, panique, calme, indifférence récèlent toujours une menace sous jacente qui n'est jamais identifiée, d'òu le sentiment de malaise qui habite lecteur et narrateur. Son narrateur, étranger à la langue et à la culture, voyage à la fois en lui-même, comme dans une bulle qui l'isole de toute compréhension. Le changement, la menace ou la possibilité d'une mort embusquée, surgissant à chaque sonnerie stridente et insistante d'un téléphone portable. Fuir, mais vers où, la fuite devenant elle-même immobilité. Le point extrême du roman, la scène la plus terrifiante est la poursuite vertigineuse par la police de Pékin de ses trois personnages, deux hommes et une femme, les corps agglutinés et arqués sur la même moto et suspendus dans un infini immobile :
« …nos trois corps inclinés qui semblaient n'appartenir qu'à une seule créature tricéphale affolée et fuyante, aplatie sur cette vrombissante structure d'acier qui filait dans la nuit dans le rugissement ininterrompu du moteur mais ne semblait pas vraiment s'éloigner des lieux que nous venions de quitter ni se rapprocher de ceux vers lesquels nous nous dirigions, paraissant rester sur place sous l'immense voûte céleste qui enrobait l'autoroute, le vaste dôme incurvé d'un ciel d'été intemporel, comme si nous n'avancions plus et que c'était seulement les lumières des phares qui bougeaient autour de nous… »
C'est cette scène qui fait l'objet de la vidéo de 15 minutes qu'il présentera à la médiathèque de l'Alliance Française le 25 mars.
« Je suis un écrivain visuel plutôt que cinématographique » Jean phillipe Toussaint
Né en 1957 à Bruxelles, Jean-Philippe Toussaint est un écrivain belge de langue française, auteur de neuf romans. Il étudie à Paris où il obtient, en 1978, un Diplôme de l'Institut des Sciences Politiques et, un an plus tard, un Diplôme d'Etudes Approfondies en Histoire contemporaine. Enseignant dans un lycée en Algérie entre 1982 et 1984, il commence à écrire et, en 1985, publie son premier roman, intitulé « La salle de bain », qui remporte un franc succès. Depuis, grâce à son style épuré, minimaliste, son ton narquois et désinvolte, Toussaint occupe une place de choix parmi les écrivains contemporains. Ses romans sont traduits dans une vingtaine de langues. Il mène également en parallèle une carrière cinématographique, Il répond à quelques-unes de nos questions à l'occasion de sa venue à Hong Kong.
Auriez-vous pu raconter l'histoire de Fuir dans un autre pays que la Chine ?
Non, la présence de la Chine est très importante dans le livre, l'évocation de la Chine est un des thèmes majeurs du livre. Cela me semblait important, pour un écrivain du début du XXIème siècle, de se pencher sur ce pays qui fascine tant, qui représente le monde qui bouge, qui évolue. Pour moi, la Chine, c'est le contemporain, et un écrivain doit s'intéresser au monde contemporain.
Dans Fuir, le téléphone portable joue un grand rôle, mais il semble avoir une connotation très négative ?
Je partage la phobie du narrateur pour le téléphone portable. Comme individu, le téléphone portable m'angoisse (et je n'en ai pas). Comme écrivain, il me fascine. J'ai réfléchi aux nouvelles possibilités romanesques que permet le téléphone portable, au premier rang desquelles ce que j'appelerais la qualité d'ubiquité, qui m'a permis de construire une scène qui se passe à la fois de jour et de nuit, en France, au Musée du Louvre et en Chine, dans un train de nuit qui relie Shanghai à Pékin.
Les critiques jugent votre style très cinématographique ? Qu'en pensez-vous ?
Je suis un écrivain visuel, plutôt que cinématographique. Dans mes livres, je crée des images, mais ces images ne sont pas physiques, elles ne sont pas faites, comme au cinéma, avec des comédiens, avec de la pellicule et de la lumière, ce sont des images mentales, faites de mots, de verbes, d'adjectifs et d'adverbes, ce qui est éminemment littéraire. Si on veut se faire une idée de mon style cinématographique, il vaut mieux voir mes films, par exemple La Patinoire (le dernier film que j'ai tourné en 35 mm), ou l'adaptation que j'ai faite de la scène centrale de Fuir dans le cadre de l'exposition « Travelling », qui a été présenté à l'Espace Louis Vuitton à Paris l'été dernier.
|
|
讓 - 菲利浦.圖森熱愛多元化的藝術。他是作家,電影人和攝影家,同時亦有興趣與其他藝術家搞裝置藝術。他曾出席2008年廣州三年展,展出他與中國藝術家陳侗合力製作的錄像裝置作品《齊達內的懮郁》(La mélancolie de Zidane)。他這次應香港法國文化協會及比利時領事館的邀請來港介紹他導演的其中一部電影《溜冰場》(La patinoire),以及他的最新作品,一部圍繞着他的最新小說《逃跑》(Fuir)而製作的錄像短片,故事情節主要是在中國大陸發生。《逃跑》曾獲頒發於2005年梅迪西文學獎。他的兩本小說《做愛》(Faire l'amour)和《逃跑》被中國大陸湖南文藝出版社翻譯成中文合訂出版。
《做愛》是有關一段感情的終結,寫一對戀人在東京的一間豪華酒店的房間內,在一個雪花紛飛晚上一次又一次藉著做愛去探尋彼此的靈魂,圖森在書中除了描寫分手外,對東京這座城市也有絕妙的描寫。《逃跑》在某程度上可以說是這亞洲二部曲的續曲,因為故事的情節主要是在中國展開,而且牽繫著同一位女性:瑪麗,雖然她只在《逃跑》的最後一章才出現,但整本小說都可以感覺到她的存在。《逃跑》可說是一本荒誕的冒險小說。敘事者隻身前往中國,替他所愛的女人瑪麗執行一項任務。但是才一抵達上海機場,遇見瑪麗的客戶張向之時,似乎就預告了這段旅程的不單純。先是張向之這個只懂得講中文或是一些令人聽得一頭霧水的英文的人,為何一見面就交給他一支手機?莫非是要監視他?莫非這位客戶只是有點兒笨拙粗暴,又或者他是一個精神變態的危險殺手。
這小說吸引讀者的不是故事本身,而是作者的寫作風格和緊張的節奏。由上海到北京,由機場到火車站,由旅館的房間到火車的車廂,讀者的腳步都是緊隨着敘事者,與他在同一時間發現景物、人物和事件,和敘事者一樣不明白所有事情的來龍去脈。圖森從來不會描寫事物的背景,那些由視覺、聽覺或嗅覺發現到的景物都是來自敘事者的視覺領域或直接嗅到的,並由這無數微小的細節描畫出一幅未加修飾但真實的現代中國風貌。故事並沒有協調性,而是將一連串動作、事件、地點轉移、情慾等情節緊扣起來,組成一段一切看似互相衝突又沒有任何真正意義的生活。不同的感覺亦同樣地交替出現:恐懼、孤寂、恐慌、平靜、冷漠等不停地散發着一種無以名狀的威脅感,讓敘事者及讀者處於不安的狀態 中。書中的敘事者不認識中國的語言和文化,又一個人獨自上路,就像被困在一個氣泡內,與一切認識的事物隔絕。每次手機的鈴聲一響,就會出現改變、威脅或可能是喑藏的殺機。逃跑,但逃到哪兒呢?逃亡本身變成停滯不動。小說的高潮和最令人驚嚇的情節就是三名主角被北京的公安追捕,兩男一女坐在一輛摩托車上高速逃亡︰
〝…… 我們三個前傾的軀體彷彿只屬於一個三頭六臂的造物,如驚弓之鳥,漏網之魚,貼在這隆隆作響的鐵傢伙上,馬達不停地咆哮,車輪飛轉在黑夜中,但它似乎並沒有真正遠離我們剛剛離開的地方,也沒有接近我們正一路駛向的地方,它彷彿就停在了原地,在籠罩了高速公路的巨大天穹底下…… 我們好像已經不再前進,只有在我們週圍動彈着的燈光……〞(註)
3月25日在法協多媒圖書館放映片長15分的錄像短片的內容就是上述的情節。
註: 本文節錄自湖南文藝出版社出版的《Fuir》之中文譯本。
〝我寧可是視覺作家而不是電影人〞──讓-菲利浦.圖森
1957年11月29日生於布魯塞爾,比利時作家讓-菲利浦.圖森創作了九本小說。他1978年畢業於巴黎政治科學學院,一年後再考取當代歷史的DEA文憑。1982年至1984年間他到阿爾及利亞的一間中學任教,1985年開始寫作,出版的第一本小說《浴室》轟動了法國文壇。自此,因其特殊的小說語言藝術及簡約主義寫作風格,圖森成為當代炙手可熱的作家。他的小說曾被翻譯成廿多個國家的語文。他寫作之同時亦從事電影拍攝的工作。他上次來港時回答了我們的幾個問題。
你有沒有可能在中國以外的國家講述《逃跑》這個故事呢?
不可能,在這本書中,中國的存在是非常重要的,浮現中國是這本書其中最重要的主題之一。我認為,對一個廿一世紀初的作家來說,關心這個如此令人迷惑,代表世界正在變化和改革的國家是重要的。對我來說,中國,它就是當代,而一個作家必須關心當代的世界。
在《逃跑》中,手機佔一個重要位置,但卻似乎是有着十分負面的含意?
我跟敘事者一樣對手機有恐懼症。以個人來說,手機使我不安(而我也沒有手機)。作為一個作家,它使我感到好奇。我思考了很多可以用手機作小說題材的可能性,而擺在最前的就是它能同時到處出現這質素,我可以構思一場同時發生在日與夜,在法國,在羅浮宮及中國,在一班來回上海與北京的夜班火車的情節。
有評論說你的寫作風格極似電影?你對此作何感想?
我寧願是視覺作家而不是電影人。在我的書中,我創造一些影像,但這些影像並不是實質的,它們不像電影般是用演員,用菲林和燈光製造出來的,它們是由文字、動詞、形容詞及副詞堆砌而成的一些思想上的影像,是極之文學的。人們若想對我的電影手法有個概念,最好還是去看我的電影,例如《溜冰場》(這是我以35厘米拍攝的新片),或是我改編《逃跑》中最主要的情節而拍攝的短片,這短片曾於去年夏季在巴黎Louis Vuitton藝術館舉辦的〝Travelling〞展覽中展出。 |
|