|
« Fred nous a quittés, comme il quittait la table, en plein œuf dur mayonnaise.
Prétextant une urgence qu'il aurait oubliée, il saluait la tête de veau somptueusement dressée sur son plat et dont il attendait beaucoup…
Il présentait quelques excuses, bloquant les rires qu'il venait d'allumer. Alors disparaissaient, dans de longues enjambées, sa soutane quand c'était l'hiver, sa peau de cochard en mi-saison. »
(Jean Carmet)
Chaque signe saigne sur le papier, chaque mot est promesse de mort. (André Frédérique)
Un petit texte afin de ressusciter l'espace d'un instant un maudit exemplaire de nos Lettres dont il ne reste plus à vrai dire que quelques traces infimes au milieu de toutes les têtes de veau triomphantes qui nous entourent. André Frédérique donc vit le jour à Nanterre en 1915, fils unique d'un commissaire de police qu'il détestera de tout son cœur. Dans une de ses proses (Le bon fils), il écrit : « J'ai bien du mérite à rester chez mon père, qui fait tout pour me contrarier. Je ne dors même plus dans le coffre à linge, on ne me concède que le cellier rempli de tessons. Encore pendant la nuit mon père m'ajuste-t-il à chaque pied ses deux grandes pinces qui me tiennent éveillé jusqu'au matin. (…) A ses rares bons moments, nous jouons avec les plumes. Mais il ne tarde pas à se fâcher et ce sont des poignées entières que j'avale et qui m'étouffent à en mourir. Si je reste c'est pour ma mère. » Il racontera de même dans de nombreux textes les angoisses et l'ennui de son enfance dont il aura tenté de s'évader par des jeux furtifs ou fantastiques et s'abandonnera avec délectation entre les pages d'illustrés qui lui ouvriront des mondes imaginaires. Cet ennui quotidien sera élevé au rang de mythe et il y sera tout autant héros que victime complaisante de la cruauté, dans un univers chimérique et merveilleux « Parce que je m'étais trompé d'une minute dans mes calculs annonçant le passage de la grande comète, ma mère me prive de vin. Je suis très tenu à la maison. A quarante ans passés on contrôle mes lectures, mes relations. (…) le martinet est en bonne place qui veille, et j'en remercie mes parents. »
André Frédérique passera le bac à Louis le grand en 1935 et se lancera alors avec sa coutumière indifférence dans des études de pharmacie en compagnie de son complice et alter ego Géo L'Hoir.
Par sens du gag, il se mariera en 1939 avec comme il se doit, une jolie étudiante en pharmacie et embrassera dans le même mouvement la noble profession de pharmacien. La guerre le rejoindra et militaire, il sera promu pharmacien auxiliaire à Rouen. A sa démobilisation, faute de combattants, la claustration conjugale chez ses beaux-parents à Asnières le rendra quasi-neurasthénique. Heureusement, l'achat libérateur de sa première officine à la Garenne-Bezons en 1941 le sortira de sa morosité et le mettra immédiatement sur les rails de sa carrière de pharmacien comique et d'une faillite annoncée. Raymond Castans, quant à lui a raison de nous interroger sur l'un de ces nombreux mystères du monde : « Qui découvrira jamais le lien mystérieux qui unit la pratique de l'humour et le commerce au détail des cachets d'aspirine ? » L'énigme, je l'avoue, reste entière. Toujours est-il qu'à partir de cette époque, André Frédérique profitera du couvre-feu des sombres nuits de l'Occupation pour faire de la cave de son ami Géo L'Hoir un lieu de gags, canulars, mystifications où s'élaborera le concept du « second degré » jailli tout droit du cerveau du musicien Pierre Barbaud. Sa définition est d'ailleurs accessible dans le dictionnaire du second degré : « Moyen d'atteindre à la connaissance par l'emploi de syllogismes à deux termes, majeure et conclusion. » Cette cave extraordinaire réunira entre autres aux côtés de nos deux pharmaciens, le futur explorateur Alain Gheerbrandt, Georges Charbonnier futur producteur de France-Culture, Jean Carmet, Jean-Marc Thibault… S'y dérouleront des bals costumés où le délire sera de mise et l'alcool généreux qui fera oublier les restrictions de l'époque.
Fred, comme l'appelaient ses amis, aimera se transformer en horloge comtoise : coiffé d'une boîte en carton, laissant apparaître les yeux, le nez et la bouche il demeurait immobile et silencieux pendant des heures, bras gauche tendu au-dessus de la tête, bras droit se déplaçant pour marquer les quarts d'heure ponctués de « ding dong » ou de « coucou » selon l'humeur… Avec Géo l'Hoir, il jouera également à Conazor : grand chien qui fait le beau, langue pendante attendant indéfiniment de recevoir son sucre. Tout cela cependant ne doit pas masquer le fait que ce beau monde se réunissait surtout pour jouer avec les mots et que Frédérique allait donner son sens nouveau au mot « ringard » qui, à l'origine simple tisonnier pour locomotive à vapeur, deviendrait « l'imbécile fat et prétentieux qui a la tête pleine d'eau chaude ». En 1942, Frédérique commencera sa véritable activité littéraire, toujours pour divertir ses amis, et de sa plume sortiront ses premiers contes burlesques, souvent scatologiques où son entrain s'en prendra à la famille, à l'armée, au clergé, valeurs sûres de la bêtise organisée. 1944 verra la publication de son premier recueil Ana, pressé qu'il était par ses amis et il continuera alors à donner des poèmes à de nombreuses revues. Ceux-ci seront rassemblés l'année suivante dans Histoires blanches, chez Gallimard, grâce à l'insistance de Raymond Queneau, son ami de toujours. Ce recueil déploie son thème favori, celui de la fuite dans les jeux et dans l'imaginaire que l'on devrait avant tout saisir comme une entreprise de recréation verbale du monde dont les accents deviendront de plus en plus amers. Les mots noirs obscurciront les mots blancs et tout s'effondre, se délite, syllabe après syllabe. Ses mots seront triturés, il les choquera les uns contre les autres pour les transformer. « Bicyclette, disait-il, bacyclette, pacyclette, pacyplette, pacyflaète, pasiphaèté, pasiphaé… » et voilà « la fille de Minos et de Pasiphaé… »
Frédérique se présentera aussi comme un naufragé nostalgique, pour reprendre Claude Daubercies, perdu dans des jeux de miroir et dans un ennui infini qui l'avait accompagné toute sa vie. C'est un homme angoissé à la recherche de son unité « Qui est maître des mots est maître du monde, à chacun correspond son univers. Retrancher, ajouter, le décor tombe. Derrière la mère, se cache l'amer ; le père marche à sa perte ; le fils s'empêtre dans ses fils ; l'âme s'arme d'abord d'une courge puis de courage en prenant son air là où elle trouve (…) ». Les limites entre lui et le monde sont d'ailleurs imprécises et plus tard, il se perdra, l'esprit comme égaré. Son recueil évidemment ne trouvera aucun écho, mais qu'à cela ne tienne, après une première faillite et son divorce, en cette année 1945, il tombera amoureux d'une jeune et jolie danseuse de flamenco, espagnole cela va sans dire, et se retrouvera à tenir la redoutable chronique des potins à Paris-Match.
Frédérique rencontrera André Breton mais rien n'en sortira, les deux hommes étant trop différents… Il ira plutôt du côté de Boris Vian et rejoindra avec sa bande la cave du Tabou… Les deux poètes inventeront les thèmes de soirées costumées, s'échangeront poèmes, lettres et proses, tout cela calligraphié sur des nappes de papier éphémères… on rêve ainsi à tous ces textes à jamais disparus. En 1949, Frédérique est présenté par Queneau à Jean Tardieu, autre grand humoriste qui l'engage au Club d'essai de la Radio française en qualité de directeur littéraire. Il écrira avec Pierre Dumayet un opéra bouffe radiophonique Chicago-Opéra interprété, entre autres, par Mouloudji mais après quelques mois sera démis de ses fonctions pour dilapidation délibérée des deniers du service public « Une signature n'a jamais engagé personne » se défendra-t-il innocemment. Il n'en continuera pas moins à écrire pour la radio et fera ses débuts dans le spectacle, écrivant des textes pour Robert Dhéry et ses branquignols, cela en 1951. Mais Frédérique à cette époque multiplie les fugues, s'absente et on le cherche partout. Pour brouiller les pistes, il laisse accrochés aux patères des cafés qu'il fréquente près de ses lieux de travail ses deux grands pardessus marron, « le démodard et la peau de cochard ». Personne n'a jamais su où il se rendait. Au théâtre Gramont, il participe aux émissions publiques de Philippe Soupault et Jean Chouquet où un jour, en l'absence d'un invité qu'il avait refusé d'aller chercher, il sort de sa poche un poireau qu'il interviewe devant une salle hilare de huit cents personnes…
En 1954, il s'offre sa deuxième pharmacie, 23 rue Montorgueil, et son principal client et commanditaire sera le Prince Ibn Séoud d'Arabie Séoudite, ce qui ne l'empêchera pas chaque soir de visiter le tiroir-caisse afin d'aller faire la fête avec ses billets tout frais. Deux ans suffiront pour qu'il accomplisse sa nouvelle faillite… Il s'était aussi mis à fréquenter les maisons closes de luxe et il y fut tellement apprécié qu'il obtint le noble titre toujours enviable d'« essayeur de dames ». Sa mère à laquelle il était très attaché comme un éternel enfant, disparaîtra, puis son père. A la sortie du cimetière Géo L'Hoir lui proposera d'aller voir un film pour le distraire : « D'accord, mais pas de film en couleur, aujourd'shui, je suis en deuil. » Tout cela se passait en 1956, et lui qui avait vécu jusque là à l'hôtel ou chez des amis, s'installe dans un appartement avec une jolie comédienne de 18 ans. Leur liaison fut orageuse, elle le trouvait d'ailleurs sinistre au quotidien, imperméable à son humour noir. André Frédérique commença alors à vivre de plus en plus mal, enrageant aussi de ce que son talent littéraire ne soit reconnu que par quelques initiés et amis alors que Queneau ou Tardieu inscrivaient leur nom dans les Lettres françaises. Bientôt, il sera las de jouer aux jeux de la vie et dévoré par l'ennui et une détresse intérieure inguérissable, il tirera le rideau sur la scène de son rôle de pharmacien comique. Le 17 mai 1957, vers quatre heures du matin, il ouvrira le gaz, avalera quatre tubes de gardénal arrosés de son cognac favori. On ne découvrira le drame que deux jours plus tard. « Les poètes sont rongés à l'intérieur » avait-il écrit quelque part, nous laissant ce dernier poème
Adieu Messieurs
Je ferme mes cieux
Adieu mes Dames
Je ferme mon sac
Adieu mon Dieu
Je pars pour le désert
Adieu Satan
Je ne crains plus l'enfer
J'ai laissé mes vers à Paris
Mes mots à Vincennes, mon cœur à Passy
(…).
André Frédérique est donc d'abord l'histoire d'un naufrage dans un monde en décomposition tel qu'il le décrit dans son Ouverture académique pour un spectacle d'art, courte pièce publiée en 1950, où un orchestre d'infirmes joue sur des instruments cassés pour l'un des personnages portant le nom de « l'Inutile » dont le seul rôle est d'encombrer la scène jusqu'à la fin de la pièce. La poésie aura sans doute été pour lui cet effort désespéré pour s'accrocher en vain à la vie.
André Frédérique aura dispersé ses écrits dans de nombreuses revues mais on peut trouver de lui Histoires blanches et L'Art de la fugue au Cherche midi éditeur.
Bucolique
Le gendarme se mit à penser.
Aussitôt les veines de son cou gonflèrent, sa face s'empourpra, ses mains se portèrent, à son front. Dans sa tête de petites fusées s'allumèrent quelques secondes. Cela fit une lueur dans la nuit, comme un feu de bivouac vu à longue distance. Il remua le crâne pour chasser les fumées. Déjà il se voyait malade, mort. Il eut des larmes dans ses yeux.
Déchirant ses procès-verbaux, il s'assit au bord de la route, et dans le clair de lune cueillit une petite fleur qui dormait.
Il oublia son bicorne en se levant, perdit son sabre dans un pré avec ses épaulettes. Et s'enfonçant dans le bois, il sentit son cœur se soulever, son corps s'alléger. Des ailes lui poussèrent dans le dos. Il devint papillon blanc. Avec une cocarde. |
|
〝弗雷德離我們而去了,就好像他離開那堆滿拌蛋黃醬煮雞蛋的餐桌。他藉口忘了一件重要事情,向端坐在盆子裡的莊嚴牛頭致意,他多麼想嚐嚐它……
他說了幾句道歉的話,剛被他引起的笑聲戛然停止。他跨着大步,於是冬天裡他着長袍、兩個季節間他穿華達呢的身影消失了。〞——讓.卡爾梅(Jean Carmet)
每個符號在紙上淌着血,每個字都預許着死亡。(安德烈.弗雷德里克)
謹撰此短文以再現我們文學界一位運蹇人物,說實話,在圍繞着我們的一群沾沾自喜的蠢材們中間,他的事跡可謂鳳毛麟角。安德烈.弗雷德里克於1915年誕生於楠泰爾(Nanterre),是他痛恨一輩子的一位警員的獨生子。他在一篇散文《好孩子》(Le bon fils)裡這樣寫道︰〝生活在父親身邊,算我夠勇氣的了。為了折騰我,他甚麼事都做得出來。我甚至連在衣箱裡睡覺都不行,只讓我睡在佈滿玻璃碎片的食物儲藏室裡。更不堪的是,夜裡他竟以兩個大鉗子夾住我的每隻腳,讓我痛得眼睜睜到天亮…… 遇到他難得有好心情的時候,我們便互相扔枕頭為樂,但他很快便生起氣來,把枕頭裡的羽毛大把大把塞進我的嘴裡,差點讓我窒息而死。如果我留下來,那全是為了母親。〞他在作品的多處地方都有談及童年的煩惱和痛苦。他常以片刻、奇特的遊戲來逃避,或者沉浸在把他帶到一個奇幻世界的圖畫書裡。這種日常的煩惱甚至令他以為身臨幻境,自己竟變成了英雄或者被殘酷虐待逆來順受的可憐人。他說〝有一次在計算彗星飛過的時間少算了一分鐘,母親便不准我喝酒。我非常依戀家庭,雖然已過不惑之年,我的閱讀和交友仍受監督…… 撣衣鞭仍在我頭上虎視眈眈,我真該感謝我父母的教導。〞
1935年,安德烈.弗雷德里克於路易十四中學通過中學會考,與死黨摯友熱奧.盧瓦爾(Géo L'Hoir)一起,帶着慣常的若無其事的態度,報讀了藥劑學。
1939年,他以逗樂的態度彷彿順理成章地和一位漂亮的藥劑學女生結了婚,並正式投入醫藥事業。接着是戰爭,他成了一名軍人,後晉升為盧昂的後勤藥劑師。復員後,由於戰友星散,在阿尼埃爾(Asnières)岳父母家中的婚姻生活幾乎令他神經衰弱。所幸1941,他於Garenne-Bezons盤進了一家藥店,這才使他從萎靡不振中解脫出來,並立即扮演起諧趣藥劑師的角色,也註定了他的破產。雷蒙.卡斯唐(Raymond Castan)的確有理由對他神秘生活的這一面提出質疑︰〝有誰能揭示詼諧幽默與零售阿司匹林之間的神秘關係?〞應該承認,這完全是個謎。總之,從這個時期起,安德烈.弗雷德里克利用佔領時期的宵禁時間把他朋友熱奧.盧瓦爾的地窖變成了嬉戲、玩神秘遊戲的地方。《隱晦》(Second degré)的觀念就這樣從音樂家皮埃爾.巴爾波(Pierre Barbaud)的腦袋裡冒了出來。其定義可在隱語詞典裡找到︰〝這是運用包括大前提和結論的三段論法達至對事物認識的方法。〞這奇特的地窖除了我們兩位藥劑師外,尚聚集了未來的探險家Alain Gheerbrandt,〝法國 - 文化〞電台節目的策劃人Jean Carmet,Jean-Marc Thibault等人。在這裡舉行了盛裝舞會,氣氛令人陶醉,美酒佳釀令人忘卻那時代物質的匱乏。
弗雷德,朋友們這樣稱呼他,喜歡扮成壁鐘模樣:頭上頂着個紙皮箱,只露出眼睛、鼻子和嘴巴,幾個小時一動不動地站在那裡,左臂伸過頭,右臂慢慢移動代表分針,每過十五分鐘便隨他興之所至發出〝叮噹〞或〝咕咕〞的鳴響。他和熱奧.盧瓦爾一起,還玩〝狗屄〞遊戲:他扮成一隻兩腿直立的狗,伸出舌頭,耐心地等着別人施捨一塊糖。所有這些惡作劇都掩蓋不了真正的旨趣:即他們聚集一起玩文字遊戲。弗雷德里克給〝ringard〞一詞賦以新義,這個詞的原意是指蒸汽機車裡使用的撥火棒,現成了〝自命不凡的蠢蛋和滿腦子發熱的狂妄之徒〞。1942年,他開始認真搞起文學來,但目的還是為了娛悅朋友。從他的筆端汩汩流出許多滑稽故事,有時相當淫褻。內容多是評擊家庭、軍隊、教會等一些愚不可及的傳統價值。1944年,他發表了第一部集子《Ana》。在朋友的催促下,他為許多雜誌投去詩作,並在翌年結集成《白色故事》(Histoires blanches),在他忠誠不渝的朋友雷蒙.格諾(Raymond Queneau)的堅持下,由伽里瑪出版社出版。這本詩集發揮了他心愛的主題,在遊戲和想像中漫遊。這實質是一種詞語的再創造,語調愈來愈辛辣。反面詞掩過正面詞,一個音節一個音節地分解開來,直至整個坍塌。他的字詞被搗碎,互相撞擊,幻變成其他詞:〝Bicyclette變成bacyclette,pacyclette, pacyplette,pacyflaète,pasiphaèté,pasiphaé……〞(註)最後成了〝彌諾斯和帕西維的女兒……〞。
克洛德.多貝爾西(Claude Daubercies)說,弗雷德里克自認是一名懷着鄉愁的海上遇難者,迷失在失語症般的遊戲及陪伴他終生的無盡煩惱中。這是一個焦慮不安,尋找自我的人。他說〝誰主宰文字,誰便主宰世界,每個人都有自己的一個天地。刪削,增添,幕布落下。母親(la mère)的背後,隱藏着辛酸(l'amer);父親(le père)邁向失敗(la perte);兒子(le fils)被繩索(fils)絆住了腳;靈魂用葫蘆(courge)武裝自己,最後深吸了一口氣鼓起了勇氣(courage)〞。(註) 他和外在世界的界限是模糊不清的,最終他精神錯亂,迷失方向。他的作品得不到返響,但這無關緊要,在經歷了第一次破產和婚姻失敗後,他於1945年,愛上了年輕、貌美的弗拉曼戈舞孃,不用說是一名西班牙女郎,並主持了《巴黎競賽報》的令人生畏的閑話專欄。
弗雷德里克與安德烈.布勒東相會了,但並未擦出火花,他們兩人差別實在太大了……他更接近鮑里斯.維昂,並參加了他的 Cave de Tabou…… 兩個詩人為化裝晚會製作節目,交換詩文互相酬和。這些文字都寫在即用即棄的紙餐巾上…… 因此,人們總是惦念、想象着這些一去不復返的紙巾上的文字。1949年,格諾將他介紹給另一位幽默大師尚.塔爾迪約。塔爾迪約聘請他在法國電台試驗俱樂部任文學執導。他和皮埃爾.杜馬耶(Pierre Dumayet)一起編寫了一齣電台喜歌劇《芝加哥歌劇院》,由Mouloudji等人演繹。但幾個月後,由於他盜用公款而被革職。他為自己辯解道:〝一個簽名對任何人都無約束力。〞但他並未因此而停止為電台寫東西,並開始涉足舞台,為Robert Dhéry及其演員們寫劇本,這時是1951年。然而這個時期,弗雷德里克常玩失蹤遊戲,人們在到處找他,為避免追,他佈下疑陣,把兩件棕色大衣掛在他工作地點附近他常光顧的幾家咖啡館的衣鉤上。永遠沒有人知道他究竟去了哪裡。在Gramont劇院,他參加了菲利普.蘇波及讓.舒凱(Jean Chouquet)的廣播節目。一天,一個嘉賓缺席,他也不願找他回來,於是便從口袋裡掏出一根韭蔥,對着它進行訪問,引得八百多名觀眾哄堂大笑。
1954年,他在 Montorgueil街23號重新開了一間藥鋪,他的主要顧客及合夥人是沙特阿拉伯王子伊本.賽烏德(Ibu Séoud)。但這並不能阻止他擅自拿走抽屜裡剛收入的鈔票去尋歡作樂。只消兩年他便又宣告破產。他開始光顧高級妓院,甚受青樓女子的青睞,並贏得了令人歆羨的〝風流試香客〞的美名。他像小孩子一樣依賴的母親逝世了,接着是父親。從墳場走出來,摯友熱奧.盧瓦爾建議去看一場電影,替他散散心。他說︰〝好,但別看彩色電影,今天我有孝在身。〞這一切發生在1956年,直到這時他不是住酒店便是住在朋友家裡,而現在則和一個年僅十八的美麗女藝員同居。他們的關係並不和諧,經常鬧架。她覺得他陰險,他的黑色幽默不可理解。安德烈.弗雷德里克開始生活得愈來愈不如意,對他的文學才華只被幾個知音賞識而憤憤不平,而格諾及塔爾迪約卻名噪法國文學界。沒多久,他厭倦了生活,為煩惱和心中無法消除的痛苦所折磨,於是他拉下了諧趣藥劑師舞台的帷幕。1957年5月17日,凌晨四時許,他打開了煤氣,吞下了四瓶鎮靜劑,喝下他心愛的干邑白蘭地。人們只是在兩天後才發現了這個悲劇。〝詩人的心被噬嚙着〞他在甚麼地方這樣寫道,並為我們留下了以下詩句︰
永別了先生們
我拉下了生命的帷幕
永別了,女士們
我收拾了遠遊的行裝
永別了,上帝
我向荒涼的沙漠走去
永別了,撒旦
我不再懼怕地獄
我把我的詩留給了巴黎
我的文字留給了萬塞納
我的心留給了帕西
安德烈.弗雷德里克的一生猶如這個腐敗的世界裡一個海上遇難者的經歷,就像他於1950年發表的短劇《一場藝術表演的古典序曲》(Ouverture académique pour un spectacle d'art)裡所描述的那樣,一個由殘廢者組成的樂團演奏着同樣殘缺不全的樂器,樂聲陪伴着一名叫〝廢物〞的角色,他自始至終佔據着舞台,直至落幕。詩歌對他而言,彷彿是爭扎求存的一種絕望的力量。
註:此段純為文字遊戲,不可譯,唯諳法語者方能領略箇中趣味。現勉為其難照字面譯出。 |
|