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La Vie moderne : La caméra de Raymond Depardon nous emmène sur une petite route des Cévennes au cœur de la France, pénétrant au petit matin dans de vieilles fermes où l’attendent des paysans assis à la table de leur cuisine. C’est là qu’ils vivent quand ils rentrent des étables ou des champs. La plupart d’entre eux sont âgés, ils ont le visage buriné par une dure vie de travail physique et par le grand air et les intempéries, ils n’ont visiblement pas l’habitude de parler d’eux-mêmes, de leurs difficultés. Ils restent longtemps silencieux devant la caméra, leur silence, leur visage marqué parlent par eux-mêmes. Ils répondent aux questions par quelques mots rapides. Depardon les comprend, il attend avec patience, les questionne sur la terre, les vaches, les moutons, et doucement ils commencent à parler, de leurs problèmes, de la disparition de leurs fermes, de ce qui ne va pas surtout.
La voiture et la caméra reprennent la route vers une autre ferme, puis une troisième, et par ces petites routes entrelacées, nous découvrons au fur et à mesure du film le paysage, sa beauté, mais aussi l’isolement de la région, les saisons, pluie, froid et neige, et au creux de ces fermes des personnages au fort caractère, comme les deux frères Privat, célibataires endurcis, un septuagénaire et un octogénaire qui élèvent, l’un des vaches, l’autre, chèvres et brebis, ils vivent avec leur neveu qui reprendra la ferme et qui faute de trouver femme dans la région, vient de se marier par petite annonce avec une femme venue du nord de la France avec sa fille de 15 ans. En quelques mots, quelques longs silences, quelques événements marquants comme l’agonie d’une vache née sur la ferme, on pénètre dans leur vie, on ressent l’attachement sans sensiblerie aux animaux, le souci de leur bien-être, le conflit des générations...
Depardon est revenu plusieurs fois, à différentes saisons et nous donne à chaque fois des nouvelles, sans jamais mentir, embellir ou dramatiser la réalité. Le vieux frère Privat parle de sa mort que l’on sent prochaine, non par maladie mais par simple diminution de ses forces : « quand on ne peut plus, on ne peut plus! » Rien à ajouter. On sent que c’est pour eux la fin d’une époque, que déjà la végétation envahit les anciennes pâtures, que cette agriculture est condamnée à mourir. De rares jeunes veulent s’accrocher mais échouent. Pessimisme ? Pas vraiment, des jeunes cherchent toujours à s’installer, la jeune adolescente rêve de prendre la relève plus tard. A la fin du film la voiture nous emmène loin de là, la route file maintenant, dans la lunnette arrière, baignée d’une magnifique lumière dorée.
Raymond Depardon vient de ce monde et le comprend : « Le monde agricole a plutôt tendance à montrer ce qui ne va pas. Pour se préserver, comme un talisman. Une bête malade, une récolte foutue, une foudre… C’est fragile tout ça. Ils ont des personnalités ces gens. Ils sont taiseux, ils ne disent rien. On a du mal. Mais à la fois, c’est ça qui fait la tendresse du film. Il y a des douleurs qu’il faut laisser enfouies… Ça en fait des personnages presque littéraires. »
La Vie moderne, un titre ironique ou futuriste ? « La liberté est un peu la rançon positive de leur isolement, dit Depardon dans cette interview à Marion Haudebourg pour Evene.fr, ils ne gaspillent rien. Ils sont complètement écolo sans le savoir. A force d’être tellement en retard dans ces montagnes sans avenir, on peut se demander s’ils ne sont pas déjà en avance. » Ce film a reçu le prix Louis Delluc 2008 décerné au meilleur film français de l’année.
En 1998, le Hong Kong Arts Centre avait présenté une première rétrospective des films de Depardon, principalement ceux sur l’Afrique (voir Paroles nº 158, Jan/Fév 98), Le French cinepanorama 2009 montre aujourd’hui principalement des films documentaires sur la France. Les Années déclic (1984) basé sur ses chroniques et photos est un portrait autobiographique qui racontent 20 ans de la vie d’un artiste extraordinaire. Délits flagrants (1994) révèle la réalité du système judiciaire français suivant l’arrivée des délinquants et leur première entrevue avec leur avocat assigné. 1974, une partie de campagne (2004) suit, à la demande de celui-ci, la campagne électorale du candidat Giscard d’Estaing. Mais Giscard ne permettra pas la sortie du film avant 2002. 10e chambre, instants d’audiences, sélection officielle 2004 du Festival de Cannes, nous emmène dans la 10e chambre du tribunal de Paris, montrant le système judiciaire à l’œuvre, 12 cas, 12 histoires d’hommes et de femmes qui un jour, se retrouvent devant le tribunal.
Depardon photographe ou cinéaste a un œil extraordinaire, il ne voile pas la réalité, il ne viole pas non plus ce qui dans les êtres doit rester caché, mais il exprime une sobre vérité. Il a parcouru toute la planète, rencontré beaucoup de peuples, été le témoin de tragédies et est depuis ses premières photos et premiers films au début des années 70, resté fidèle à ses principes. Pour tout photographe, pour tout documentariste Depardon est un exemple : « je cherche la justesse, c’est même chez moi une obsession, l’image non pas honnête mais juste (…) Je ne suis pas un voyeur mais seulement le témoin de ce que j’ai vu et qui existe. Il faut dire et montrer pour informer et ne pas oublier. » |
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《摩登生活》:雷蒙.德帕東的攝影機帶我們走到法國南部塞文郡山區的一條小徑,在黎明時分進入一些老舊的農場,農民們正坐在廚房的桌子旁等待。當農民們從馬厩或田裡工作完畢後,那兒便是他們日常生活的地方。他們當中大部份都年事已高,面孔深深刻劃着體力勞動和飽歷風霜的艱辛生活之痕跡,而明顯地他們不習慣談論自己和講述他們的困難。面對鏡頭時他們有很長的時間都是默不作聲,然而,他們的靜默,他們的面孔已足以表達,不需多加唇舌。他們以簡短的幾個字回答問題。但德帕東對他們有足夠的了解,他耐心地等候,然後問他們有關土地、牛羊的問題,而慢慢地他們開始打開話匣子,談及他們的困難,更談到他們的農場正在消失,特別是問題的癥結所在。
汽車和攝影機再次上路,駛向另一座農場,之後是第三座,在電影中,我們隨着這些縱橫交錯的小路逐漸看到這地區的風景,它的壯麗,但同時也看到這地區的遺世遍遠,它的季節、雨水、寒冷和冰天雪地,而這些農場當中住着一些性格頑強的人物,如Privat兄弟,他們是兩個頑固的獨身老人,一個七十多歲和一個八十多歲的,一個養牛,另一個養山羊及綿羊,他們與侄兒同住,後者將會接手經營農場,這侄兒因為在區內找不到妻子,剛剛透過徵婚廣告娶了一名來自法國北部,已有一名十五歲女兒的婦人。透過幾個字、幾段冗長靜默的時間、一些令人印象深刻的事件,如一隻在農場出生的老牛正在垂危,德帕東帶我們進入農民們的生活,讓我們感受農民對動物不會太過感情用事的關懷,他們對幸福生活的憂慮,以及輩份不同的人的衝突。
德帕東多次在不同的季節回到那裡,每次都給我們帶回一些新的消息,他從不撒謊,不會將事實加以美化或誇大其詞。年長的 Privat 老爹談到他的死亡,大家都感到他的時日無多了,但並不是因為他生病,而是他的身體逐漸虛弱:〝當不能就是不能了!〞不需多講。我們感覺到Privat老爹的死亡對他們來說是一個時代的終結,因為舊時用作放牧的草場已長滿蔓生的植物,也因為這種農業已注定沒落。少數的年輕人有意堅持下去但都失敗了。悲觀嗎?未必,年輕的人時常希望能安頓下來,有少年人夢想有日可接手經營。
雷蒙.德帕東來自農場生活並熟悉這個世界:〝農業世界的人較傾向於只表達不好的事物,如牲口生病、農作物失收、行雷閃電…… 那是一種像護身符般的自我保護行為,為了要表達這一切都是很脆弱的。這些人都很有個性。他們沉默寡言,甚麼都不說。大家會感到難受。但這同時亦是這部電影親切溫馨之處。有些痛苦是需要讓它繼續掩埋的…… 亦是因為這樣,這些人物差不多變成文學中的角色了。〞
《摩登生活》,這片名是諷刺還是未來主義呢?德帕東在一次接受 Marion Haudebourg 為 Evene.fr 所作的訪問時這樣表示〝自由或者就是他們遺世孤立的生活之正面的代價吧。他們絕對不會浪費任何東西。他們在不知不覺中成為了環保人士。這些山區因為一切太過落後而前途黯淡,那我們不禁要問,或許他們已經領先在前。〞這部電影在2008年康城國際電影節中獲頒發 Louis Delluc獎的最佳法國電影。
1998 年,香港藝術中心曾為德帕東舉辦首次電影回顧,當年主要是展映他在非洲拍攝的影片(請參閱第158 期《東西譚》)。今年法國電影節為他舉辦的電影回顧主要是放映他的五部有關法國的紀錄片。《關鍵年代》(Les Années déclic, 1984)是一部自傳式電影,片中透過一些照片及德帕東自己的私人日誌重溯這位出色藝人二十年的影藝生涯。在《公然犯罪》(Délits flagrants, 1994)中,德帕東讓我們一窺法國司法制度的實況,從少年罪犯被帶進警署到他們與法援署委派的律師會面的所有過程全被他用鏡頭捕捉了下來。《1974年總統選舉》(1974, une partie de campagne, 2004)是德帕東受吉斯卡爾.德斯坦的委托,將他競選總統的整個過程拍攝下來,但吉斯卡爾是到了2002年才允許將影片公開放映。《十號法庭的審訊過程》(10e chambre, instants d'audiences)是2004年康城國際電影節的官方選定觀摩影片,它帶我們進入巴黎第十號法庭,透過十二件案件、十二個某天身處法庭的男女的故事讓大家深入了解法庭每日的運作。
既是攝影家又是電影人的德帕東有着非常出色的目光,他不會掩飾真相,他也不會強行揭露人們想要隱瞞的事,但他表達了簡單的真理。他的足跡踏遍全球,接觸過無數不同的民族,也見證過很多悲慘的事,由70 年代他開始拍攝照片以及後來拍電影,他一直都忠於自己的原則。德帕東對所有攝影師及所有紀錄片攝製者來說是一個典範:〝我追求的是真理,在我個人來說,這甚至可說是一種不能擺脫的頑念,我要求影像不單只要誠實,更要公正的(……),我不是一個偷窺者,我只是為我親眼目睹而又確實存在的事作見證。我認為有需要講述並將這些事情顯示給世人知曉並且緊記它們的教訓。〞
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