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• Vincent Yu, Ocean Shore, Tseung Kwan O, 2005
Le Hong Kong Heritage Museum présente une grande exposition de photographie hongkongaise des années 50 à aujourd’hui. Regroupant 34 photographes, elle est axée sur la photographie documentaire et sociale. C’est une occasion rare pour les Hongkongais qui n’ont pas de musée de la photo de découvrir un grand nombre d’œuvres qui d’ordinaire ne sont pas accessibles au public. Lesley Lau, commissaire du Musée a invité plusieurs commissaires extérieurs, Joseph Kwok, Blues Wong, Wong Suk-ki ainsi qu’un ensemble de critiques (Damian Cheng, Yeung Yang et d’historiens (Edwin Lai) qui ont contribué au catalogue...
Le titre choisi de « Flâneur » en français évoque la promenade, et c’est à une promenade ou une flânerie dans la ville au passé et au présent que nous convie notamment la première partie de l’exposition, Photographies de rue. Dans les années 50 et 60 lorsque Hong Kong était une ville de forte immigration et que chacun devait lutter pour survivre, Chack Wai-leung et Chan Chik photographient la rue et le port, avec ses petits métiers, serruriers, pâtissiers, bateliers et achemineurs de trains de bois flottant, enfants et leurs cerfs-volants sur les toits de la ville. L’un des plus talentueux photographes de l’époque est Yau Leung qui saisit aussi bien l’extrême vivacité des enfants dans leurs jeux à la façon d’un Robert Doisneau que la sensualité des femmes ondulant des hanches dans leurs robes chinoises très moulantes. Autre témoignage de l’époque, celui de Chung Man-lurk, sur l’une des grandes industries de Hong Kong, le cinéma des années 60 à 80, par des photos très naturelles et souvent touchantes des stars sur les plateaux de tournage ou dans les coulisses se préparant ou se reposant entre deux scènes.
Après ce clin d’œil un peu nostalgique au passé, vient ensuite « la photographie documentaire et sociale », qui devient plus consciente de son sujet et a tendance à isoler et cerner des aspects plus spécifiques, s’intéressant à l‘architecture, à certains quartiers en décomposition, à un paysage social en changement, mouvement qui apparaît d’ailleurs dans la photographie dans d’autres pays comme aux Etats Unis, montrant que Hong Kong n’est pas isolé mais en contact avec ce qui se passe ailleurs dans le monde. Evangelo Costadimas résident de longue date à Hong Kong a réalisé en 2009 une galerie de portraits d’hommes et femmes saisis au hasard de la rue, une envie de donner un visage à Hong Kong. Boby Sham fait des portraits posés de femmes dans le lieu et les habits qu’elles ont choisis, dévoilant ainsi sans en être conscientes une grande part d’elles-mêmes. Simon Go a fait poser dans leurs boutiques les familles et employés d’artisans et boutiquiers traditionnels, images d’une société traditionnelle en voie de disparition. Ce genre de travaux documentaires a un grand ancêtre, le français Eugène Atget qui fit ainsi au début du siècle des séries documentaires de toutes choses. De même que ce nom de « flâneur » et cette attitude d’observer le pouls d’une ville, fut d’abord mis en vogue par le critique et penseur allemand Walter Benjamin dans les années 20 et 30 comme le rappelle d’ailleurs le photographe Ducky Tse.
Mais ces petites allées hongkongaises disparaissent et Leong Ka Tai qui se soucie moins de documentation mais tient à saisir les sentiments que procuraient certains espaces de cette ville en mutation, photographie, non la prestance des façades mais au contraire le derrière de ces bâtiments, leur dos humble et caché, où parfois la ruine a déjà désagrégé les murs, où la nature a repris ses droits, racines et de mousses étant en train d’avaler lentement ces vieux murs au creux de ruelles qu’il faut découvrir car elles livrent encore parfois au marcheur leurs secrets engloutis.
Mais dans l’ensemble, contrairement au titre de cette exposition, on ne voit en fait pas de réelle photographie sociale qui s’intéresserait de façon plus approfondie à une classe ou section de la population dans une époque définie.
L’exposition s’oriente ensuite vers de « Nouvelles topographies », des espaces urbains créés par le développement, l’urbanisation extrême, la surpopulation. Mais il ne s’agit pas d’une photographie réaliste, tout au contraire ces photographes qui travaillent par thème, font ressortir l‘étrangeté du lieu, soit en soulignant son coté surréaliste, en montrant ses excès soit en soulignant la rigueur de ses paysages. Dick Chan dans sa série Megafauna relève le gigantisme de portraits publicitaires qui rivalisent en taille avec les immeubles eux-mêmes. Vincent Yu révèle en vues panoramiques les côtes et les îles hongkongaises en voie de disparition, maintenant bordées de forêts de tours alignées comme des mégalithes, comme dit-il « une musique classique décadente mais splendide ». Michael Wolf, après avoir photographié les gratte-ciel hongkongais retrouve à Chicago ces mêmes façades infinies de fenêtres identiques et s’intéresse à la cité transparente et au voyeurisme qu’elle provoque, exposant à la vue de tous des milliers de fragments de vie. Lau Ching Ping à une sensibilité particulière, ses vues de la ville, ses ciels, et même ses intérieurs ont une sorte de pureté irréelle, troublante parfois comme si l’air s’était raréfié.
• John Fung, 2008-02-08 T17.03.58, 2008 |
La photographie est un medium aussi qui se prête à « la manipulation », « à la conceptualisation » et qui peut ne plus rien à voir avec la simple prise de vue, mais devient un outil artistique qui ouvre d’autres champs de création. L’objet lui-même photographié peut-être manipulé, mis en scène, ou la photo peut-être transformée par des filtres, collages, altérations des négatifs. L’exposition montre plusieurs travaux fort différents les uns des autres. Leung Chi-wo et Sara Wong ont transformé le morceau de ciel que l’on peut voir en levant la tête dans la rue en un Cookie de la même forme, prêt à être dégusté. Anothemountainman a photographié ce que l’on pourrait appeler des cadavres de bâtiments, nouvelles architectures non finies, dressées sur le ciel, sorte de cimetière architectural impressionnant. Dans Parade, Almond Chu, dénonce l’uniformité de l’esprit hongkongais en peuplant ses paysages urbains de dizaines de milliers de personnages identiques. John Fung démultiplie l’extrême densité de Hong Kong en créant des images ou la ville se superpose et semble se multiplier dans toutes les directions. Simon Wan s’intéresse dans ses photos noir et blanc à l’extrême densité de lumières, aux multiples réflexions, transparences des cités commerciales asiatiques tandis que Wong Wo-bik trouve dans la grisaille d’un parking quelques intéressantes réflexions de ciel sujettes à la poésie.
So Hing-keung dont les négatifs sont retravaillés, parfois brûlés ou griffés, marie à la fois bâtiments et végétaux, saisissant autant la densité, l’envahissement végétal, et un vrai sentiment poétique de cette ville ultramoderne, dont on a l’impression qu’elle pourrait disparaître aussi vite qu’elle a poussé, engloutie par la nature.
Située au Heritage Museum de Shatin, musée relativement récent mais à l’architecture intérieure peu attirante et sans chaleur, cette grande exposition de photographie est malheureusement scindée dans le musée en deux lieux, il faut donc veiller à ne pas manquer l’une des parties.
City Flâneur : Social Documentary Photography
20/06/2010 - 03/01/2010
Hong Kong Heritage Museum
Shatin, New Territories
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香港文化博物館現正舉辦一場盛大的攝影展覽,展出五十年代至今的三十四位攝影家的作品,主題為社會紀實。
香港並無一間攝影博物館,故此對香港人而言,這是一個難得的機會,可以一賞平時無法寓目的為數眾多的攝影作品。博物館館長劉鳳霞女士邀請了幾名客席策展人如馮漢紀、黃啟裕、黃淑琪以及著名文化人小西、楊陽及黎健強諸君共襄盛舉,他們對作品的詳細闡釋及精闢論述,為展覽圖錄增添異彩。
• Dick Chan, Magafauna, 2009 |
展覽名稱裡的Flaneur(漫遊者)系為法文字,令人聯想起城中散步。展覽的第一部份〝街頭攝影〞確也邀我們在曩日及現時的城市中散步漫遊。五、六十年代的香港移民潮洶湧澎湃,人們為生存艱苦奮鬥。翟偉良和陳拍攝海港和街景,各種生計小行當,如鎖匙匠、糕餅師傅、船夫和木排擺渡人等,還有兒童以及在城市上空飄遊的風箏。邱良是當時最富才氣的攝影家之一,他以法國攝影家羅貝爾.多瓦諾(Robert Doisneau)的手法捕捉了嬉戲中兒童的歡躍活潑以及緊裹在旗袍下的女性婀娜搖擺的豐臀。另一時代的見證是鍾文略的作品,他把鏡頭對準香港大產業之一的電影,他拍攝了正在攝影棚工作、或在幕後準備粉墨登場、又或者幕間休息的既生動又感人的明星照片,反映了六十到八十年代的香港影視界。
在這些瀰漫着懷舊情調的攝影作品之後,便是〝社會紀實〞攝影部份。這裡展出的作品更貼近主題,有凸顯聚焦於特異景觀的傾向。如城市建築、寙敗破落的老區、變化中的社會風景,這種傾向在其他國家如美國的攝影界早有先例,這亦說明香港不是孤立的,而是與外間世界息息相連。安杰路.哥密斯長期居住香港,於2009年創辦了人像畫廊,展出他在街上偶然捕捉到的男女形象,意在賦予香港一個面貌。沈嘉豪則拍攝擺姿勢的女性,地點和服飾任由她們挑選,這些女性無意中展現了自己的多方面。吳文正善於將人物如一家人,一些手藝人、小商販安置在他們的店舖裡拍攝,這行將消失的傳統社會的形象。這種社會紀實攝影亦有其鼻祖,這便是法國攝影家歐仁.阿熱特(Eugène Atget),他在上世紀初對各種事物拍下了許多系列紀實照片。同樣,漫遊者這名稱以及這種觀察社會脈搏的態度亦是德國思想家兼批評家瓦爾特.本亞明(Walter Benjamin)於上世紀二、三十年代掀起的潮流,這在謝至德的作品裡有所返響。
• Leung Ka-tai, King George V Memorial Park, 2008
香港的窄街小巷日漸消失,梁家泰更關注的是這個變化中的城市的一些空間所激起的感情。他的鏡頭並不投向建築的堂皇外表,而是建築的背部,那謙卑、隱藏的背部,這裡牆壁業已頹敗,大自然顯出其威力,青苔、樹根慢慢地吞噬着小巷的老舊牆壁,行人路過於此,更應打足精神,地上隨處都有坑坑窪窪的陷阱。
• Almond Chu, Parade 5, 2009
然而縱觀此部份展出的攝影,鮮有真正意義上的社會紀實作品,即反映特定時期某一階段、某一群體的較深刻的作品,這似乎有些離題。
展覽轉向〝新地景主義〞攝影部份,由於發展、極端的城市化及人口過度稠密,擴展了城市空間。但這些作品並非寫實主義的,相反,攝影家各有自己的主題,他們或透過城市極端、超現實主義的一面,或透過展現城市嚴酷的景物突顯其光怪陸離、匪夷所思的面貌。陳廣源在他的系列作品《梅加浮娜》裡,突出了巨幅人物廣告,其尺寸的龐大,可與建築物本身一比高下。余偉建則以全景圖揭示了正在消失的海岸和島嶼,但見沿岸高樓林立,宛如史前巨石般高聳雲霄。正如他所說,〝這是一曲衰敗但燦爛的古典音樂。〞米高.沃爾夫在拍攝了香港的摩天大樓後,在芝加哥亦發現了同樣無止無盡的玻璃牆,他對城市的透明和偷窺癖頗感興趣,將萬千的城市風光盡現觀眾面前。劉清平卻有特殊的感受,他拍攝的城市風景、藍天甚至室內景象,都有一種超然的、顫抖的純潔,彷彿空氣已被稀釋。
攝影亦是一種適於矯飾和表現觀念的媒介,它可以不再是簡單的拍攝鏡頭,而變成一種可開拓創作新天地的藝術手段。被拍攝、矯飾的事物被展現出來;有些照片則是利用濾色鏡、拼貼、底片處理加以變化改造。展覽會展出了一些彼此截然不同的作品。梁志和和黃志恆把街上抬頭即可望見的一角天空幻變成隨時可供你一嚐的和天空一角完全相似的曲奇餅。又一山人拍攝那可稱為建築死屍的爛尾樓,它們矗立在天底下,儼如一種建築墳場,令人震驚。在《遊行》這一攝影作品裡,朱德群在他的城市風景裡安置上千萬個排列整齊、面貌雷同的人物,以此來揭露香港思維的單一化。馮健中創造重疊的、彷彿向四面伸展開來的建築圖像,以此來紓緩城市的過度密集。尹之聰在他的黑白照片裡則展示了亞洲商業城市燈火通明、光影交織的奇景;而王禾璧卻在灰色陰暗的停車場揭示了一片富於詩意的與大地互相輝映的藍天。蘇慶強則透過底片加工、有時將其燒、劃,將建築和草木融為一體,表現了城市的密集、草木的蔓延,以及超現代化城市的詩情畫意。人們彷彿覺得這城市雖發展迅速,亦迅疾消亡,最終將被自然所吞噬。
展覽假位於沙田的文化博物館舉行,展館雖為較新建築,但內部卻不夠吸引且缺乏活力。這場規模盛大的攝影展被一分為二,分別在兩個展廳展出,因此觀眾切勿錯過另一半,以免抱憾。 |
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