Art visuels 造型藝術

Texte : Frank Vigneron

 
  Carol Lee Mei Kuen : Héliographie ? Non, chronographiee
日光攝影?不,時間繪畫
 
 

La première chose qui vienne à l’esprit en regardant les images de Carol Lee Mei Kuen 李美娟 est leur relation avec les origines du procédé photographique, technique appelée « héliographie » par son inventeur, Nicéphore Niepce. Avec cette technique, « écrire avec le soleil » n’était cependant pas possible en dehors des contraintes de la camera obscura et toutes ses images furent le produit des ténèbres de cet outil qui n’avait cessé de fasciner les artistes depuis la Renaissance et son obsession pour la perspective mathématique. L’air de famille que l’œuvre de Carol Lee entretient avec les traces de la lumière produites à la naissance de la photographie est ressenti encore plus fortement quand on connaît les expériences d’Hippolyte Bayard et de ses « dessins photogéniques ». Il créa ainsi des « positifs directs » dont le plus célèbre demeure l’impression d’un gant de dentelles sur du papier imbibé d’un mélange d’une solution de 8% de potassium ferricyanure et de 20% de solution de citrate d’ammonium ferrique…

Bien que Carol Lee n’ait pas employé de gant, elle s’est beaucoup servie de dentelles et jamais de ces produits chimiques aux noms barbares qui étaient partie intégrante de l’invention de la photographie et du désir de ses inventeurs de la revêtir d’un aspect scientifique et, de ce fait, objectif et relié au concept de vérité. En ce sens, la pensée entourant les débuts de la photographie était encore imbue de l’ancienne représentation culturelle du soleil comme étant la vérité même. Dans l’allégorie de la caverne, Platon symbolise l’accession à la vérité comme une montée vers la lumière du soleil. Pour Plotin, cette lumière était le symbole de la vérité même car celle-ci, étant entièrement incorporelle, ressemblait à ce qui était au plus près de l’ineffable Un, source immatérielle du tout. Cette fascination sera aussi un trait de la pensée chrétienne néo-platonicienne pour qui la lumière du soleil était la représentation de la vérité de Dieu. Pendant fort longtemps, qu’il se soit mû sur les sphères célestes ou se soit immobilisé au centre de l’espace, le soleil a représenté l’absolu éternel, chose dangereuse et toujours éthérée.


• Carol Lee Mei Kuen李美娟, Dinner, série Intimacy




Mais nous nous égarerions à suivre trop longtemps cette pensée et le travail de Carol Lee n’est pas tant une « écriture photogénique » qu’une écriture du temps. En complète opposition avec ces images traditionnelles de la pensée « occidentale », le soleil est devenu dans son œuvre la source de tout ce qui est passager et en constant changement : une « chronographie » employant la lumière du soleil en tant que médium bien plus émotionnel qu’aucun autre outil de l’art.

Ce médium permet à Carol Lee de manifester ses relations avec sa famille de façon à révéler à la fois leur précarité et leur constance. Tout comme la mort de sa mère, c’est la future absence de son fils, installé pour ses études en Angleterre, que Carol Lee explore ainsi. Une de ses pièces les plus spectaculaires, par exemple, consiste en une série de trois feuilles imprimées par les silhouettes des plats et bols employés lors de banquets chinois (et ceux qui ne sauraient pas que le nombre habituel de personnes pour de telles occasions est douze manqueraient bien sûr l’indication d’absence que cette image révèle). Cette recherche du passage du temps comme inscrit à même la texture du papier oblige Carol Lee à utiliser une sorte de papier bien spécifique : précisément la sorte qui vieillira le plus vite et comporte une grande quantité de cet acide qui fait l’horreur de nombre d’artistes. Ce sont justement ces marques et cette dégradation par le temps et la lumière qu’elle recherche activement. Pour revenir à la photographie et à son exigence d’arrêter le processus naturel de noircissement du nitrate d’argent, Carol Lee ne s’inquiète guère de voir ses œuvres changer avec le temps et devenir de plus en plus sombres. Si le temps est l’artisan de ses images, ce n’est pas un maître qui se laisse si facilement contrôler et si ses œuvres montrent les niveaux de couleurs qu’elle désire au moment de leur exposition, ces niveaux continuent à changer lentement vers des tons de plus en plus sombres. Il serait facile de comparer ces transformations avec celles qui prennent place en nous au cours des ans, celles qui changent perpétuellement nos sentiments envers amis et familles. Le sens de perte et d’absence, comme celui de l’attachement et de l’amour, ne disparaissent pas avec le temps, ils prennent simplement des tons plus sombres.

 

• Hippolyte Bayard, Gant en dentelle, vers 1840, dessin photogénique, J. Paul Getty Museum, Malibu.

第一次看到李美娟創作的影像時,腦海中首先聯想到的是攝影技術的起源──那在十九世紀首二十年,由其發明者Nicéphore Niepce命名為“日光攝影”的過程。不過,在Niepce研究的技術中,“以日光書寫”必須在“暗室”(camera obscura)中進行。他早年製作那些看似褪色的影像,全是在這件工具的幽暗空間中製成的。由文藝復興至十九世紀,數學上永恆的一點透視深深吸引着藝術家,而他們也一直為“暗室”這件工具著迷。如果我們認識另一位攝影家Hippolyte Bayard的實驗,我們也許能更強烈地感受到李美娟的作品跟攝影發展初期所留下的種種光影的關係。在Niepce後不久,Bayard發明了稱作“光繪成像”或“光影素描”的技術。用Bayard自己的說法,在光影成像的過程中,“物件可自行描繪自己的形像,而不須借助畫家的畫筆。”他以這個方法製作“直接正片”,其中最著名的作品是在浸透8%鐵氰化鉀和20%檸檬酸鐵銨混合液的藍紙上留下的蕾絲手套影像。

李美娟的作品也用了不少蕾絲,不過其中沒有蕾絲手套,也沒有那些與發明攝影不可分割而且名字陌生的化學品,更沒有像攝影般強調科學、客觀和真實。在這層意義上,早期的攝影術仍像遠古的文化一樣把太陽視為真實的本體。柏拉圖在洞穴寓言中,把靠近陽光象徵為獲知真實的途徑。普羅提諾(Plotinus)認為陽光就是真實的象徵,因為陽光完全沒有形體,它最接近至善者,也是萬物的非物質來源。這也是受新柏拉圖主義影響的基督教思想其中一個表徵──他們認為太陽代表的正是神的真理。有一段很長的時間,不論人們認為太陽是在一個天球面上運動,還是位處宇宙中心靜止不動,太陽都代表着永恆的絕對,有時是危險的,卻永遠無法捉摸。不過,如果我們循這個方向去觀賞李美娟的作品,我們就會錯解了她的創作。她所創作的圖像,並非是“以光書寫”,而是以時間來繪畫。與上文提到來自“西方”思想的傳統形像完全相反,太陽在李美娟的作品中,是遊走和不斷改變的根源:這是“時間繪畫”,與傳統的藝術工具相比,太陽在此是一種更富感情的媒介。

布料在李美娟的創作中佔有重要的地位。布是日常生活之物,特別能賦予李美娟的作品那種短暫、過渡的感覺。作為一位將要目送年少的兒子遠赴英倫學習的母親,李美娟以這個身份所感受到的短暫和過渡,要比她以女兒的身份悼念亡母時為深──因為體現在柔弱布料上的死亡已是一個定局。這些布本作品中最令人動容的一件由三個長卷組成,布上的圖像顯示的是一張中國家庭的飯桌,桌上少了一副碗筷,暗示了缺失。不知道中國人的傳統是一桌坐十二人的觀者,便會完全錯過了作品的寓意。從這個角度來看,這件作品跟其他探討本身文化身份的香港藝術家的創作一樣,有着文化上的涵意。

儘管李美娟談自己的藝術創作時很少提到技術上的事,她在創作過程中仍要顧及一個大部分藝術家不常遇到的問題。從事圖像藝術創作的人,大多會努力尋找合適的不含酸性紙張,讓作品可以像畫在畫布上一樣長久保存,能在私人或公共藏品中佔一席位。李美娟尋找的卻是有缺點、不完美的紙張,那些能讓陽光留下印痕和隨着時間過去會變得脆弱的紙張。回到文章開首所言,早期攝影師遇到的最大困難是把硝酸銀曝光後變黑的過程固定下來。執迷於能反映真實並永久流傳的藝術形式──那是屬於學院和博物館的藝術──攝影不能讓光與影成為黑暗。短暫、不確定卻是李美娟作品的一個元素,她故意讓她製作的圖像隨時間而改變。如果時間是她畫作的工匠,那它絕不是一個那麼容易受控制的大師;如果李美娟的作品在展覽時展現着她所想要的色調,這些顏色實際上仍在進化,慢慢轉變成更深的調子。我們也許很容易從這些轉化中看到自身的轉變──我們從與家人和朋友的關係中經歷的感情變化。愛情、友情、疏離與孤獨不會隨時間離去,而是變得更深更強烈……