Conférence 講座


 
  « Le roman selon Aragon » par Daniel Bougnoux

 
 

« Louis Aragon défendit toute sa vie le roman – et d’abord contre Breton et ses amis dadaïstes et surréalistes qui n’y voyaient qu’entreprise « bourgeoise » et « réussite dans l’épicerie » –, au point que la mention « roman » revient quatre fois dans les titres de ses œuvres : Anicet ou le panorama, roman (1921), Le Roman inachevé (recueil de poèmes publié en 1956), Henri Matisse, roman (1971) et Théâtre/roman (1974) comme pour mieux inculquer au lecteur l’importance à ses yeux de ce « genre ».


• Louis Aragon par lui-même

L’époque moderne est au choc des rencontres, à la frénésie des modes et à l’essor des médias. Adieu donc à la philosophie, mais pour donner toute sa place au roman qui promet, mieux que le monologue poétique trop centré sur son auteur, de faire résonner la cacophonie des voix et la carambole des mondes, de nouer autrement les fils qui trament une société dans son épaisseur, et surtout d’accueillir toutes les pensées : « Le roman, c’est le langage organisé pour moi. Une construction où je peux vivre » (Blanche ou l’oubli)

Le roman commence et se déroule in medias res ; il n’admet, au moins selon Aragon, aucune tour de contrôle ni site transcendantal d’énonciation – ni point de vue de Dieu, ni Comité central. Rien ne stimule mieux le roman que le croisement ou le bariolé des mondes propres où évolue chaque personnage ; et si l’on y rencontre la moindre idée, elle ne descend pas de l’auteur mais apparaît située, soutenue par un protagoniste de l’histoire. Cette écriture ne fait pas débat, et s’avère faiblement conductrice d’idéologie ; elle ne produit pas de thèses mais des personnages et des affects, elle explore avec une sensibilité animale la chair frémissante du monde, et nous invite à refaire l’expérience jamais refermée des passions. Qui va le plus loin, du philosophe qui invente par concepts une différente vision du monde, ou du romancier qui crée des personnages ? » Ce sont ces questions dont débattra Daniel Bougnoux lors de sa venue à Hong Kong, le 30 novembre 2010.

Daniel Bougnoux, né en 1943 à Clermont-Ferrand, agrégé de philosophie et ancien élève de l'École Normale Supérieure (Ulm), est actuellement professeur émérite en sciences de la communication à l'Université Stendhal de Grenoble. Il est l'auteur d'une douzaine d'ouvrages, en sciences de la communication et en théorie ou critique littéraire. En 1976, il a fondé à Grenoble la revue trimestrielle pour accompagner notamment les créations théâtrales de Georges Lavaudant, et il collabore régulièrement à de très nombreuses revues. Il a accompagné Régis Debray dans l'édition semestrielle des Cahiers de médiologie (publiés à partir de 1996 chez Gallimard puis Fayard), et aujourd'hui dans celle de la revue trimestrielle Médium. Spécialiste d'Aragon, il dirige l'édition de ses Œuvres romanesques complètes (cinq volumes) dans la bibliothèque de la Pléiade, dont le quatrième tome est paru en septembre 2008.

Conférence de Daniel Bougnoux : « Aragon et l'art du roman »
Accompagnée de la projection d’un film court :
Aragon : La parole et l'énigme
Mardi 30 novembre à 19h00
Médiathèque de L’Alliance française
52, Jordan Road, Kowloon
Entrée gratuite
La conférence sera suivie d’un cocktail
en compagnie de Daniel Bougnoux