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« Ecrire, c'est distraire les hommes, leur plaire en leur montrant ce qu'ils sont. Donc leur faire aimer ce qu'ils sont. L'écrivain qui cherche à faire désespérer l'homme de lui-même est un médiocre et un salaud. Car l'homme naît dans le doute, il naît aveugle à ce qu'il est vraiment. Le confirmer dans ce doute, c'est facile et bête. La vraie tâche, c'est de lui faire sentir les ressources illimitées de l'humain. » Joë Bousquet
Joë Bousquet, poète hors du commun, reste intimement lié à ce destin tragique qui nous fera « sentir, pour reprendre ses propres mots, les ressources illimitées de l'humain. » Sa vie fut très tôt d'ailleurs marquée par la mort. A sa naissance, il fallut le réanimer, c'était le 19 mars 1897, à Narbonne, et son père ne trouvera rien de mieux que de s'écrier : « Quel dommage, c'est un garçon ! » L'année suivante, on le retrouve in-extremis pris au piège des bras de sa nourrice frappée de mort subite, réchappant ensuite à une fièvre typhoïde. Bousquet avouera avoir été un enfant capricieux dont la cruauté lui valut le sobriquet d'homme-chien. L'adolescent sera catalogué de mauvais garçon, de tout-fou, ce qui ne l'empêchera pas de briller au lycée de Carcasonne, ville où son père s'était installé comme médecin. En 1912, il fera un séjour de quelques mois à Southampton et deux ans plus tard obtiendra son titre de bachelier. Cette même année, le père sera mobilisé pour la future boucherie continentale et le fils fera scandale en connaissant ses premières amours avec une femme du monde de Carcassonne. Il s'essaiera dans le même temps à la drogue. 1915 verra la famille suivre le père à Paris. Le fils s'y ennuiera avant qu'en juillet une mutation ne ramène tout le monde dans le sud... Et ce qui devait arriver, arriva : en 1916, Bousquet fut incorporé à Aurillac, choisissant un corps d'attaque où il sera aspirant dans la compagnie d'un père jésuite qui le formera. Bousquet, soldat courageux, sera volontaire de toutes les missions périlleuses, obtenant citations et décorations. En juillet 1917, il subira sa première blessure et sera soigné à Nancy. Lors d'une permission à Béziers où son père est alors médecin chef, il aura une liaison avec « la plus divine, la plus élégante, la plus étincelante » bourgeoise de la ville. « Il était beau, spirituel, impétueux comme un torrent (...), dans l'Aisne, le 27 mai 1918, les Allemands ont percé le front au Chemin des Dames (...), il a perdu la moitié de son effectif (...). Jetée dans la bataille, la section de Joë Bousquet dispute pied à pied le cimetière du petit village de Vailly. C'est là qu'un fantassin allemand le met en joue et l'abat d'une balle dans la poitrine. En tombant, il donne l'ordre de le laisser sur place. Mais ses hommes l'emportent dans une toile de tente jusqu'à un poste de secours » (René Descadeillas, La Dépêche du Midi, 28 sept. 1979)
« Il n'est pas mort mais ne vaut guère mieux »... Ironie du sort, du côté allemand il y avait dans la mitraille Max Ernst... La balle aura traversé ses poumons et la colonne vertébrale et Bousquet restera paralysé du bassin aux membres inférieurs. Fini le fanfaron qui montait à l'assaut en bottes rouges et qui, par dépit amoureux dit-on, s'était exposé au feu de l'ennemi. Il allait commencer à 20 ans sa métamorphose en ce gisant extraordinaire qu'il allait rester jusqu'au 28 septembre 1950, « la guerre à jamais logée au mitan du corps » comme dira la philosophe Simone Weil. « Une balle m'a brisé une vertèbre. Je n'ai à moi que la lumière vivante de mes yeux. J'habite la partie de mon être qui échappera aux fossoyeurs » (D'un regard l'autre). Bousquet gâchera malgré tout deux années dans ce qu'il appellera « le supplice de l'espérance » et renaîtra à lui-même pour ainsi dire lorsqu'il ne croira plus à la guérison.
En 1922, Bousquet rencontre Claude Estève professeur de philosophie et certains de ses élèves tels que René Nelli, Gaston Bonheur ou Ferdinand Alquié. En 1924, il s'installe dans la maison de la rue de Verdun à Carcassonne où il habitera jusqu'à sa mort, découvre Gide, Jean Ballard, Valéry et contacte les surréalistes tout en commençant la rédaction de ses Journaux. A Jean Paulhan, Joë Bousquet écrira « N'oublie pas que je suis rentré à vingt ans dans une solitude... je n'avais pas regardé un tableau, pas entendu une symphonie ». Et la chambre de Bousquet se transformera en une espèce de toile dont il était l'araignée noire attendant au milieu des vapeurs d'opium qui soulageaient ses douleurs et des parfums que de belles visiteuses avaient laissés, les visites. La chambre était invariablement plongée dans une demi-pénombre et une lampe de chevet éclairait le visage, les tableaux et le gisant. Pour accéder à Bousquet, il fallait traverser des couloirs, des paliers, des portes, tous aussi obscurs pour le voir allongé derrière une lourde tenture dont les plis nécessitaient que la main cherche la coupure. Dans ce sanctuaire en désordre, l'extérieur arrivait amorti et le sentiment de claustration était à son comble : « il fallait partir, se délivrer de la touffeur et de l'air raréfié, mais sitôt qu'on était dehors, on avait le désir immédiat de retourner dans ce rayonnement. » (Pierre Cabanne, La Chambre de Joë Bousquet)
« C'est le type qui m'a le plus frappé de ma vie. A sa gauche, il avait sa table de nuit, avec son petit attirail. En général, il ne se sentait pas bien, il était en manque. Il avait une baguette, il se confectionnait une petite boule, il la faisait brûler, il mettait ça dans la pipe. Et puis ce type qui était vraiment une sorte de mort vivant, tout d'un coup se transformait : il irradiait. » Louis Pons.
• Carcassonne : rue de Verdun, dessin Jean Camberoque
Alors du brouillard de la drogue et des mots surgissait du silence la poésie, brodée comme du plus profond de ses draps et le locataire de ce corps gisant faisait descendre sur la ville qui s'endormait « une neige d'un autre âge ». Il traduisait le silence et immobile pour toujours parcourait les étoiles, nous donnant un unique recueil La Connaissance du soir comme de lui-même annonciateur d'un texte à venir qui cependant n'adviendra pas car impossible à clore. Hubert Juin parle de Bousquet comme « d'un homme de la béance », foudroyé, au sortir de l'adolescence qui se fera écriture, entouré de ses carnets qui seront sa seconde vie. Il s'y investira totalement pour pénètrer dans les opérations du langage. Eluard le fascinera par sa tentative du monde sans moi et Ponge de même par son parti pris des choses mais Bousquet nous fera comme don de sa douleur. Ses mots seront une sorte d'eucharistie car sortis de ce corps qu'il semble nous offrir et de la nuit qu'il déchiffrait. On a aussi écrit que Bousquet se prenait pour une pierre échouée qui connaissait le cours des rivières, pierre qui se méfiait des spectres de midi promettant la vérité. « Tout ce qui parle de vérité accuse la poésie » avait-il écrit.
Le corps de Bousquet se dispersera dans ses cahiers, et Hubert Juin dira encore qu'il écrit à la façon de l'orage, sans savoir où il frappe, dans un lieu déchiqueté. Ses phrases lui seront de même des énigmes qui se feront évidences encloses dans le foisonnement chaotique du Journal où elles s'éclairent les unes les autres. Bousquet notera minutieusement de sa chambre les événements auxquels il lui sera donné d'assister : un cercueil qui se trompe d'étage, un cheval qui hennit mystérieusement dans la nuit, la paille d'emballage d'un colis de gravures qui soudain s'enflamme... Evénements qui apparaîtront et se répondront dans ses poèmes et ses livres pour créer un monde étrange et approcher d'un indicible secret. Pour cet homme privé de corps, il n'y a pas de banal et le plus désiroire acquiert aussitôt une dimension extraordinaire surgie du rien. René Nelli verra d'autre part en Bousquet un homme du Sud qui a réinventé à sa manière un Languedoc plongé dans le vieux pays de Montségur fait d'hétérodoxes. Bousquet était, lui, encore plus hétérodoxe... Son œuvre, polymorphe et abondante, se déploie aussi dans des essais, des correspondances, des romans qui sont le reflet de son âme.
Ses phrases sont longues et généreuses pourrait-on dire, et plus complexes même que sa poésie « J'ai voulu ressembler à ces éperdus desquels on peut dire que leur âme ne leur tient pas aux épaules ; qui la sentent les métamorphoser en toutes les choses dont elle s'éprend ; si bien qu'ils retrouvent leur corps du dehors, au poids dont il grève leur perpétuel penchant à le quitter. Tout ce qu'ils savent de leur chair, c'est qu'elle leur retire l'amour de la mort. » (Il ne fait pas assez noir)
La chambre de Bousquet deviendra une halte quasi obligatoire pour les écrivains et les peintres dont les œuvres orneront ses murs et un lieu de résistance intellectuelle pendant l'Occupation. Malheureusement, en 1950, Bousquet connaîtra un déclin physique irrémédiable malgré les soins incessants dont il bénéficait et de nombreux livres qu'il voulait écrire n'iront pas à terme.
« Le surlendemain, le samedi 1er octobre, eurent lieu ses funérailles. Il pleuvait. Une foule dense, composée de petits marchands de quatre-saisons, de boutiquiers, de tout ce qu'une ville comprend par surcroît de curieux, d'oisifs, de braves gens, s'échelonnait sur le passage du cortège, plus massive aux carrefours, stoïque sous l'averse, pour voir passer dans un cercueil que l'on aurait voulu de verre, le poète de sa ville qu'elle n'avait jamais vu ».
Ainsi s'achevait l'étrange aventure terrestre de Joë Bousquet. Certains se sont plu à dire que jamais sans cette balle logée dans son corps il n'aurait écrit, peut-être, mais nous reste cette œuvre étrange et souterraine comme l'araignée qui habitait cette chambre.
Le déshérité
On voit à peine son visage
Les malheureux n'ont l'air de rien
Son père dit qu'il n'a plus d'âge
Sa mère dit je l'aimais bien
Des jours brisés qu'il se rappelle
Il n'est pas sûr qu'il ait souffert
Tant sa douleur est naturelle
Son sourire est mort l'autre hiver
Il pleut des jours le jour en pleure
L'avril périt de ses parfums
Et comme lui les regrets meurent
Sait-on d'un mort s'il fut quelqu'un
Ils iront le voir à l'asile
Il a des frères il a des sœurs
Jouer aux sous dans sa sébile
Nul ne peut rien à son malheur
S'il a vécu comme personne
Souvenez-vous par charité
Qu'un monstre attend qu'on lui pardonne
L'affreux bonheur d'avoir été |
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〝寫作,這是消遣人,是展現人的真實而使人愉悅。因此,也叫人熱愛自己。那試圖令人感到沮喪失望的作家是一個平庸之輩,一個心術不正的人。人在疑惑中誕生,生來便不知自己為何物。令其堅信自己的疑惑,這很容易,也很愚蠢,真正的使命是令他感受到人類取之不盡的潛能。〞──若埃.布斯凱
若埃.布斯凱是一位不同凡響的詩人,他的一生命途多舛,用他自己的話說,令我們〝感受到人類取之不盡的潛能。〞他的生命很早便打上死亡的烙印。剛生下時,便需要用救生法來搶救,這是在1897年3月19日的納博訥 (Narbonne)。而他父親只會疾呼:〝多可惜啊!這是一個男孩!〞第二年,人們發現他在突然死去的奶媽的懷抱裡。後來,他躲過一場傷寒,活了下來。布斯凱承認自己是一個任性的孩子,心地殘忍,博得〝狗崽子〞的稱號。少年時代便被人視為壞男孩,瘋瘋癲癲,但這並不妨礙他在卡爾卡松 (Carcassonne) 的學校裡表現卓越。當時父親則在這座城市行醫。1912年,他在南安普敦 (Southampton) 小住了幾個月,兩年後中學畢業。同年,父親應征入伍,準備投入即將爆發的第一次世界大戰,而兒子則與卡爾卡松一名上流社會的女子鬧緋聞,初嚐戀愛滋味,並同時染上了毒癮。1915年全家隨父前往巴黎。在巴黎期間,布斯凱煩悶異常,直至7月父親工作調動,舉家遷往南方……。該發生的事情終於發生了,1915年,布斯凱在歐里亞克(Aurillac)應征入伍,他選擇了攻擊部隊,在一名耶穌會士神甫領導的連隊當准尉並受培訓。他是一名勇敢的戰士,遇上任何危險的任務,他都自動請纓,並常受到表揚和嘉獎。1917年,他的第一次掛彩並在南錫 (Nancy) 療傷。有一次在父親任主治醫生的貝濟耶 (Béziers) 他和城中〝最美麗、高雅、明艷照人〞的中產階級女人戀上了。〝他一表人材,聰明機智,像激流一樣衝動。1918年5月27日,德國人在埃納(Aisne)突破了夫人路 Chemin des Dames) 上的防線,他的人員死傷了一半。布斯凱的一排人投入了一場戰鬥,與敵人來回爭奪瓦伊小村 (Vailly) 的一個公墓。就在這兒,一個德國步兵瞄準他開了一槍,子彈直入胸膛,他應聲倒下,但他卻命令手下不用理他。戰友們還是用一塊帳篷布將他裹起,抬到急救站。〞(勒內.德卡代亞(René Descadeillas)《南方快信》(La Dépêche du Midi),1979年9月28日)
• Joë Bousquet en uniforme en 1917. Ph. centre Joë Bousquet Carcassonne |
〝他雖然沒死但也好不到哪兒。〞可說造化弄人,在德國人那邊,馬克斯.恩斯特 (Max Ernst) 亦在槍林彈雨中…… 子彈穿過了布斯凱的肺部和脊柱,他從盆骨直到雙腿都癱瘓了。從今之後,腳着紅色軍靴向敵人衝鋒陷陣的壯舉不再,有人說他是因失戀,故意暴露在敵人的槍火下的。從二十歲開始,他便變成一個像刻在墓石上的死者的臥像,這樣一直到1950年9月28日他離開人世。正如女哲學家西蒙娜.魏爾 (Simone Weil) 所說:〝戰爭從此是長住在他的身上了〞。〝一顆子彈擊碎了我的脊椎骨,我身上只剩下兩眼的光芒。我是寄生在逃過掘墓人鐵鍬的身體的一部份。〞(《見仁見智》(D'un regard l'autre) )。布斯凱虛擲了整整兩年的時間,他稱之為〝為希望受折磨〞的兩年。可以說只是在對復元絕望時他才獲得新生。
• La chambre de Joë Bousquet à Carcassonne
1922年他結識了哲學教授克洛德.埃斯泰夫 (Claude Estève) 及他的一些學生如勒內.奈里 (René Neili)、加斯東.博納爾 (Gaston Bonheur) 及費迪南.阿爾基耶 (Ferdinand Alquié) 等人。1924年,他定居在卡爾卡松凡爾登街的一間屋子裡直至去世。他在這間屋裡認識了紀德、讓.巴拉爾 (Jean Ballard) 、瓦萊里,接觸了超現實主義者,並開始了他的報紙編輯工作。他在給讓.波朗 (Jean Paulhan) 的信中這樣寫道:〝別忘了我是在寂寞無助中踏入二十歲的,這之前我沒有看過一幅畫,沒有聽過一首交響曲。〞布斯凱的臥室幻變成一個蜘姝網,他便是那隻黑蜘姝,在舒緩其痛苦的鴉片煙的雲霧裡和美麗女訪客留下的香氣中,等待着人們的造訪。房間總是沉浸在半明不暗之中,一盞床頭燈照亮了一副面孔、牆上的畫及癱瘓的軀體。想接近布斯凱,必須穿過道道走廊,層層樓梯,扇扇大門,一切都沉浸在黑暗中,他就躺在那厚重的帷幔後面,帷幔皺折重重,手指費盡搜索才能找到切口。在這個雜亂無章的聖殿裡,外面的聲音被削弱了,與世隔絕的感覺達到了頂點:〝應該離開這裡,從令人窒息的空氣中解脫出來,一經來到外面,便即刻想沐浴在陽光中。〞(皮埃爾.卡巴納 (Pierre Cabanne):《若埃.布斯凱的臥室》 (La Chambre de Joë Bousquet))
〝這是我一生人中最讓我感到震驚的人。他的左側是一個床頭櫃,擺着一些吸食鴉片的工具。一般而言,他總是感到不適,若有所失。他用一支小棒,把鴉片調成小球,點燃它,放進煙斗裡。剎那間,這個半死不活的人便精神抖擻起來。〞──路易.蓬斯 (Louis Pons)
在毒品和詞語的繚繞煙霧裡,詩歌從寂靜中湧出,彷彿從床單最深處孕育出來,這個肢體癱瘓的人令〝曠古隔世的皚皚白雪〞飄落在一座〝沉睡〞的城裡。他詮釋着寂靜,紋絲不動,仰望星空,奉獻我們一部奇特的詩集:《與夜相交》 (La Connaissance du soir)。詩集和他本人一樣,預許着新的創作,但又始終未能實現,因為他無法結束寫着的東西。于貝爾.朱安 (Hubert Juin) 說他是一個〝把嘴張得大大的人〞,他少年時代便視寫作為生命,現在他躺着,被滿載着寫作素材的筆記本包圍着,他視此為第二生命。他苦苦經營,嘔心瀝血,深入詞語的海洋,探賾索隱。艾呂雅以探索無我世界令他着迷,蓬熱以對事物的執着令他神往,而布斯凱卻彷彿饋贈我們以痛苦的感受。他的文字出自他彷彿奉獻給我們的肉體,出自他探索的夜,因此如同某種聖體。人們還這樣寫道:〝布斯凱視自己為一塊擱淺的石頭,這石頭對河流瞭若指掌,但對照出一切真相的白晝卻狐疑不信。〞他這樣寫道:〝一切道出真相的東西都是與詩背道而馳的〞。
• Joë Bousquet au lit par Dubuffet |
布斯凱的身軀分散融入他的筆記本中,于貝爾.朱安還這樣評說道,他像暴風雨般的寫作,在一個被撕得支離破碎的地方,筆鋒不知投向何處。他的文字是一些謎,在洋洋灑灑'混沌一片的報紙文字中卻明顯突出,前後呼應,意義了然。布斯凱從他的房間裡對他目睹的事物鉅細靡遺的紀錄着:一口抬錯樓的棺材,一匹黑夜裡神秘地嘶鳴的馬,一個稻草裹着的版畫郵包突然着火…… 這些事物在他的詩文裡出現並互相呼應,創造了一個神奇的世界,達到一種不可言喻的神秘境界。對於這個軀體癱瘓的人而言,沒有平庸的事物,最微不足道的東西都可以從虛無中突然湧出,變得巨大無比。勒內.奈里在布斯凱身上看到一個法國南方人以其方式創造了一個沉浸在充滿異端邪說的古老蒙塞居爾 (Montségur) 的朗格多克 (Languedoc)。布斯凱本人更具異端色彩。他的作品內容蕪雜,豐富多采,展現在他的評論、書信、小說中,反映了他的內心世界。
他的散文句子冗長且氣勢磅礡,比他的詩歌更其複雜。如:〝我極願像那些魂不附體的落魄傢伙,他們感到自己的靈魂已將自己變成它心愛的東西;以致他們發現了自己身體的外殼,這身體承受着沉重的負擔,總想離開軀殼而去。他們在自己肉身所得到的,是令他們擺脫了對死亡的眷戀。〞(《夜未夠深沉》Il ne fait pas assez noir)
布斯凱的臥室變成了作家和畫家們幾乎必須的憩息所,畫家們的作品裝飾着四面牆壁,這是佔領時期知識份子抵抗運動的根據地。不幸,1950年,雖然得到從不間斷的無微不至的照顧,布斯凱的健康惡化到無可挽回的地步,他計劃中的許多作品也因此無法完成。
〝第三天,即10月1日星期天,將舉行他的葬禮。這是一個雨天。人 潮洶湧,菜販、小店主,城市中所有的人,好奇者,無所事事者,普通的人們,在送葬行列經過的路邊佇立着,十字路口處更見人頭湧湧,儘管大雨滂沱,他們不為所動,目送這位躺在棺椁裡、他們從未謀面的、住在這城裡的詩人,他們恨不得棺木是玻璃做的,以便一睹詩人的遺容。〞
布斯凱在凡塵的神奇一生就這樣落幕了。一些人喜歡這樣說,如果沒有這顆射入他身體的子彈,他可能不會寫作。不管怎樣,他畢竟為後人留下了那神奇、詭異的作品,正如那隻住在他臥室裡的蜘蛛。 |
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