Peinture 繪畫

Texte : Frank Vigneron

 
  Peintures de Personnages et Portraits - Lai Kwan Ting
人物與傳神 — 賴筠婷
 
 
• Tong Ng Wun Lun 吳觀麟 (born 1964). Accompagné par les nuages, 200 x 60 x 335 cm. Installation de feuilles de plexiglas. « Forces of Natures », The Rotunda, Exchange Square, Hong Kong 2010.

Bien des étudiants d’arts plastiques qui sont engagés dans la pratique de ce que de nombreuses personnes, spécialistes et non spécialistes, identifient comme des formes d’art créées dans le monde chinois – comme par exemple la peinture de paysage faite avec le pinceau et l’encre – parlent d’une « essence » de l’art chinois et de leur désir de l’encourager et de le poursuivre. Même si je respecte bien évidemment ce désir, il est aussi assez difficile de l’accepter sans réflexion puisque tout discours tenu à propos d’une « essence » est souvent condamné à devenir figé, c’est-à-dire à faire face au danger de produire une pléthore de clichés déjà épuisés. Il n’est peut-être pas nécessaire de rejeter complètement l’idée de « l’essence » d’une tradition culturelle (bien que j’ai toujours trouvé ce genre d’emploi banal), mais un tel discours est toujours limitant et mène souvent à l’encouragement de la répétition en défavorisant l’adaptation de l’artiste et de ses pratiques aux situations présentes, perpétuant ainsi le plus souvent des formules fixes en étouffant toute ouverture vers des possibilités plus ouvertes aux circonstances actuelles (on comprendra d’ailleurs que l’idée d’un art « pour la postérité » – ainsi que cette vieille idée qu’un grand artiste sera toujours incompris de son vivant – me sont totalement étrangères puisqu’elles datent d’une période bien définie, le Romantisme, dont la définition de l’art n’a plus de place dans les pratiques artistiques créées par les circonstances sociales et économiques d’aujourd’hui).

Lai Kwan Ting, qui vient de compléter sa maîtrise d’arts plastiques, essaie aussi de poursuivre une certaine « essence » de la peinture chinoise mais sans tomber dans le piège de l’immobilisme. La peinture de personnages qui a remporté un prix à la dernière exposition Hong Kong Contemporary Art Biennial Award 2009 peut ainsi être rapprochée des peintures de mendiants de Zhou Chen 周臣 (active 1472-1535), une œuvre tout à fait inhabituelle (qui se trouve de nos jours au Musée de Cleveland) même pour ce peintre inhabituel de la dynastie Ming. Les personnages de Lai Kwan Ting ne sont cependant pas aussi pathétiques et représentent quelques ravissants enfants dans un environnement qui, bien qu’absent dans cette peinture, semble être rural. En réalité, la référence faite par l’artiste au tremblement de terre du Sichuan de 2008 ne paraît pas vraiment très évidente même si la simple présence du titre (La Cinquième Lune est bien sûr le mois de mai 2008) réussit à donner à cette image une charge émotionnelle plus forte. La technique employée est celle, traditionnelle, du « pinceau précis » (gongbi 工筆) même si le choix fait de peindre certaines parties au lavis d’encre et en pigments colorés et d’autres faites simplement avec des lignes aurait probablement été rejeté par les peintres du passé. Dans d’autres peintures, comme Dans le MTR, le choix de représenter un caractère hongkongais et contemporain est bien plus évident. Représentant les parents et la sœur de l’artiste, leur position ne rend pas évident tout de suite qu’ils se trouvent en fait dans le métro, ce n’est que le titre qui rend cette situation plus claire. Employant une technique similaire, ces deux peintures sont des représentations si frappantes de la vie de Hong Kong que leur relation avec l’art « traditionnel » chinois ne pourrait être faite que par ceux qui connaissent relativement bien l’histoire et les techniques de la peinture chinoise.


• Sue Lai Kwan Ting 賴筠婷 (née en 1985), Dans le MTR 《在地鐵裡》un group de deux rouleaux à suspendre, 95.5 cm x 175 cm chacun, encre et couleur sur papier, 2010

A cause de cette ambigüité (et l’on sait à quel point des termes comme « hybride », « traditionnel » et « contemporains » peuvent être ambigus), la décision du jury de mettre la peinture intitulée La Cinquième Lune dans la section de peinture chinoise du Hong Kong Contemporary Art Biennial Award 2009 peut bien être critiquée ou même entièrement rejetée. C’est bien évidemment pour éviter ce genre de critique, celui qui ne peut pas être justifié sans avoir recours à des choix entièrement personnels de la part des membres du jury et du personnel du Hong Kong Art Museum, qu’un nouveau concept a récemment été produit dans le domaine du commissariat d’exposition local, celui de « ink art ».

Bien que cette expression ait été employée déjà dans les années soixante-dix à Hong Kong, elle semble avoir pris un nouveau sens et inclure aussi des formes d’art interactifs par exemple (même une sculpture en plexiglas de Tony Ng Kwun Lun 吳觀麟 comme Accompagné par les nuages pourra être considérée comme faisant partie du « ink art ») : le simple fait qu’une référence à l’art fait à l’encre existe dans ces œuvres et l’appellation « ink art » lui sera apposée. Cette nouvelle interprétation du « ink art » a fait l’objet, par exemple, de réflexions très importantes dans le cadre du West Kowloon Cultural District qui ont mené à son inclusion dans les choix du futur M+, le « musée plus » qui en sera l’un des fleurons. On traitera dans d’autres articles de certaines des questions qu’un tel concept doit provoquer.

 

 


• Sue Lai Kwan Ting 賴筠婷 (née en 1985), La Cinquième Lune《五月》un group de deux rouleaux à suspendre, 168,3 x 97 cm chacun, encre et couleur sur papier, 2008 (Collection du Hong Kong Art Museum)

多造型藝術系學生均投身於專業或非專業人士稱之為中國獨有的藝術形式,如以毛筆和墨繪製的山水畫的實踐中。他們談論中國繪畫的這個「本質」,並表達了繼承和發揚它的強烈願望。我雖然對這個意願非常尊重,但很難不加思索便欣然接受,因為所有這些有關「本質」的論述常常流於僵化,亦即將冒產生大量千篇一律、毫無新意的作品的風險。當然,也許不必完全摒棄這個文化傳統的「本質」思想(雖然我始終覺得這稱謂無甚新意),但這種論說將掣肘並鼓勵藝術家墨守陳規、不思進取以適應新形勢,以致因循守舊,窒息了通往現實的更廣闊的藝術創作的可能性(所謂藝術應「留傳後世」以及偉大藝術家生前常不為人理解這些老生常談,我都不甚了然,這些都是浪漫主義時期的說法,那時期對藝術的定義,對在今天的社會和經濟形勢下產生的藝術實踐已毫無意義。)

賴筠婷剛完成其造型藝術碩士課程,她亦嘗試繼承中國繪畫的某種「本質」,但卻不跌入僵化的陷阱。她的《人物與傳神》於2009年香港當代藝術雙年展中獲獎。這個作品可與明代畫家周臣(活躍於公元1472-1535年間)的描繪乞丐的畫(今藏於克利夫蘭美術館)相比較。這幅畫,甚至在其超凡脫俗的作者眼中,亦顯得不同凡響。賴筠婷的人物並不悲愴感人,表現的是幾個彷彿身處農村的極可愛的兒童。畫家對2008年四川汶川大地震的暗示並不明顯,雖然畫的標題《五月》(顯然指的是2008年的5月)增強了畫的感染力。這幅畫的技法為傳統的工筆,局部用了水墨和淡彩或純粹的線條,這技巧也許已為曩日的畫家所棄用。她的其他畫作,如《在地鐵裡》,表現的是當代香港人的形象。畫中人物是藝術家的父母和姐姐,他們的姿勢乍一看來彷彿不在地鐵裡,全靠畫的標題才讓人明白。兩幅畫都用了相同的技巧,鮮明強烈地表現了香港的社會生活,它顯露的中國傳統韻味,非熟諳中國繪畫史和繪畫技巧的人莫能為。

由於這種含糊不清(眾所周知,像「混雜」(hybride)、「傳統」、「當代」這些詞可以如何模糊不清),如果2009年香港當代藝術雙年展的評委會將這些畫歸為中國畫展出,勢必遭人詬病甚至摒棄。顯然為避免這種批評,香港策展人圈中最近便產生了一個新觀念「水墨藝術」。

這個觀念其實早在上世紀七十年代便已在香港出現,它彷彿獲得了新意並包含了互動的藝術形式(吳觀麟的聚脂玻璃雕塑《雲誌》亦可歸為「水墨藝術」的範疇)。一個簡單的事實:藝術作品中存在一種用墨作的畫而它被稱作「水墨藝術」。這個新的藝術館念在西九文化區的建設框架中亦成了重要的思考課題,並將成為未來藝術館的珍藏。在接下來的文章裡,我們將繼續探討由這一觀念引伸出來的其他問題。