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Dessins au crayon sur « Guilty » de Georges Bataille |
Charles LaBelle, artiste américain basé à Hong Kong, est engagé dans un projet à long terme, le « projet d’une vie », approfondi où étendu année après année et intitulé simplement Buildings entered. Artiste voyageur, un peu comme le sont les écrivains, Charles LaBelle garde trace des endroits qu’il parcoure, mais d’une façon particulière puisque selon le galeriste et critique Robin Peckham (galerie Saamlung) qui l’expose à Hong Kong, « Charles LaBelle, explorateur de l’espace géographique et psycho géographique de la cité, et célébrant à la façon d’un flâneur, ce que Walter Benjamin appelle la fantasmagorie de la métropole moderne, s’intéresse aux relations entre l’architecture et le corps humain. » LaBelle ne dessine ni paysages, ni personnages ou scènes de rue, mais seulement les bâtiments dans lesquels il pénètre quels qu’ils soient, sans souci de leur beauté esthétique ni de leur statut touristique ou historique, mais choisis par le fait qu’ils ont été conçus afin de satisfaire aux exigences que créent les besoins ou désir du corps humain, un peu comme les coquilles successives d’un Bernard L’hermitte. Ainsi dessine-t-il les salons de massage, de coiffure ou de beauté, les bordels, mais aussi les maisons funéraires, et les cimetières. Il s’intéresse également aux besoins spirituels du corps et dessine églises, synagogues, mosquées ou temples et autres lieux cultuels tant du passé que du présent.
Sur un plan purement visuel, il ne s’agit pas en général de sketchs faits sur le vif. Ses dessins qui ne montrent que l’extérieur des bâtiments en simplifient les lignes avec une perspective qui est souvent celle des instantanés de l’objectif de l’appareil photographique, et non celle de l’œil humain. L’artiste les dessine (sans doute pour la plupart d’entre eux) d’après leur photo, et les isole volontairement de leur environnement. C’est cette neutralité qui attire l’œil, révèle tous leurs détails et leur donne cette consistance et cet aspect de mini maquette ou d’objet, qui fait d’ailleurs tout leur charme.
L’œuvre ne s’arrête pas là, les dessins sont ensuite regroupés et imprimés sur un ouvrage littéraire et philosophique qui a accompagné longtemps la vie de l’artiste, et avec lequel s’établit un dialogue et une fusion visuelle. Ainsi dans l’exposition en décembre de la galerie Saamlung, les dessins d’édifice religieux étaient-ils imprimés sur les pages à demi voilées du célèbre essai de Georges Bataille Je suis coupable (Guilty), fruit d’une crise spirituelle et d’un questionnement sur la nature humaine, qui a fait partie des bagages de l’artiste pendant vingt ans.
Pour Corpus, œuvre publiée en livre aux éditions MCCM, volontairement sous la forme d’un carnet de voyage au papier crème d’apparence ordinaire et facilement froissable, il s’agit de la version anglaise de Corpus, livre du philosophe français Jean-Luc Nancy dont quelques phrases apparaissent en clair autour des dessins et dont voici un extrait: « Qui d’autre au monde connaît quelque chose comme le corps ? C’est le produit le plus tardif, le plus longuement décanté, raffiné, démonté et remonté de notre vieille culture. Si l’Occident est une chute, comme le veut son nom, le corps est le dernier poids qui bascule dans cette chute. Le corps est la pesanteur. (…) il est descendu en lui-même, sous la loi de cette gravité propre qui l’a poussé jusqu’en ce point où il se confond avec sa charge. C’est-à-dire, avec son épaisseur de mur de prison, ou avec sa masse de terre tassée dans le tombeau, ou bien avec sa lourdeur poisseuse de défroque, et pour finir, avec son poids spécifique d’eau et d’os – mais toujours, mais d’abord en charge de sa chute, tombé de quelque éther, cheval noir, mauvais cheval. »
Corpus
193 drawings from the album Corpus executed in 2010-11 as part of the ongoing project, Buildings Entered,
by Charles LaBelle. ISBN 978-988-15217-2-9
Publisher : mccmcreations, www.mccmcreations.com
The Bookshop, G/F HK Artcentre, 2 Harbour Road, Wanchai, HK
Gallery Saamlung, 26/F, Two Chinachem Plaza, 68, Connaught Road, Central, HK |
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2007/11/09 14h52, LIBRAIRE EROTIQUE, rue St. Denis, Paris
查爾斯.拉貝爾(Charles LaBelle)是以香港為基地的美籍藝術家,他正從事一項長遠的項目,「一生的計劃」,年復一年,這項計劃不斷深化、擴大,他簡稱為《Buildings entered》。他有點像某些作家,是位浪遊世界的藝術家,所到之處,均以一種特別的方式留下了足跡。正像其作品的策展人Saamlung 畫廊的主持人兼藝評家Robin Peckham所言:「查爾斯.拉貝爾是一位探險家,他不僅考察城市的地形外貌,亦探索城市人的精神世界,他以優雅閒適的方式讚美瓦爾特.本亞明(Walter Benjamin)所謂的現代大都會的光怪陸離,他對建築與人體的關係亦饒有興趣。」拉貝爾不畫風景、不畫人物或街景,他畫的是他踏足其中的任何建築,不屑於這建築是否賞心悅目、具不具旅遊價值或歷史意義。他選擇的是一些能滿足人體需要與慾望的建築,如按摩院、髮廊、美容院、妓寨,更有殯儀館、墳場等。他亦關注人的精神需求,因此也畫天主教堂、猶太教堂、清真寺、廟宇及其他曩昔或今日富文化色彩的地方。
2008/04/23 15h45, Jewelry Store/Dance Hall, Nanjing Rd, Huangpu Shanghai |
從純視覺角度來看,一般而言,他的畫不是即場的寫生速寫。他的畫僅表現建築外部,通常透過照相機的鏡頭而非肉眼捕捉的景象,並將線條加以簡化。他根據照片來畫建築(可能大部份的畫均用此法),有意將它們和週遭的環境隔離開來。這種客觀中立的表現手法極吸引視覺,展示了建築物的所有細節,並賦它以堅實及微型模型或物體的外表,極具魅力。
他的藝術創作並不停留於此,他還將作品收集起來,印在常伴他身邊、他愛讀的文學或哲學著作的書頁上,就這樣,一場對話,一個視覺世界建立起來了。如去年12月Saamlung畫廊舉辦的一個畫展中,他的教堂建築畫便印在喬治.巴塔耶(Georges Bataille)的著名散文《我是罪人》(Je suis coupable)的模糊書頁上。這篇文章是巴塔耶一次精神危機及探究人性後的成果,亦是二十年來伴隨藝術家拉貝爾的精神食糧之一。
至於由MCCM出版社出版的《Corpus》一書,拉貝爾有意賦它以旅行日記的形式,並用乳白易皺的普通紙張印製,這是法國哲學家讓-呂克.南希(Jean-Luc Nancy)的著作《Corpus》的英文版。哲學家的妙語雋言在畫的週圍出現,這裡謹摘錄幾句以饗讀者:「世上有誰見過和『軀體』一樣的其他東西?這是我們古老文明最晚出現、經過最長時間的潷析、精煉、拆卸、重裝的一個物體。如果西方正如它的名稱所隱喻的那樣已開始沒落,那末軀體是在這場沒落中左右搖擺的最後一個重物。軀體是重力…… 它因自身而墮下,在萬有引力作用下,它竟跌得如此地步,和自身的負載混為一體。這負載物是如監獄厚厚的牆壁一樣的麻木,是如墓穴的大塊泥土一樣的臃腫,又或者是如黏滑沉重的舊衣般的魯鈍,最後是水份和骨頭的比重,然而軀體永遠、並首先應為這墮落負責,它從天外,從一匹黑馬、駑馬的背上墮下,和它的一切載物混為一體。」 |
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