Danse 舞蹈

Texte: Gérard Henry, Extraits de l’interview de
Bartabas faite par Sophie Nauleau pour France Culture
 

Le centaure et l’animal
人馬的沉思

 

Le centaure et l’animal est un spectacle étonnant et fascinant qui rassemble sept êtres extraordinaires : Bartabas, l’homme qui parle aux chevaux, Ko Murobushi, le grand danseur japonais du Butô, Lautréamont, le poète des ténèbres disparu à 24 ans en 1870, et les chevaux Horizonte, Soutine, Pollock et Le Tintoret.

venus à Hong Kong avec une trentaine de chevaux pour Battuta, un spectacle au grand galop sous un chapiteau présenté par le HK Arts Festival en 2008. Aujourd’hui c’est un tout autre spectacle que propose Bartabas sur la scène du Kwai Tsing theatre. Le spectacle d’une danse lente et douloureuse qui célèbre la fusion entre l’homme et le cheval, une recherche mystique qui plonge au son des mots du poète Lautréamont, l’animal et le centaure dans un monde de clairs obscurs à la lisière des ténèbres. « Le Centaure et l’animal a été directement façonné dans la danse par Bartabas et le danseur Butô Ko Murobushi. Bartabas à cheval, Murobushi à pied, ils ont dialogué, danse de centaure à danse d’homme. C’est un spectacle qui a la pureté obsédante du cauchemar. » écrit Ariane Bavelier dans le Figaro.

Pour Bartabas qui a conçu le spectacle, la rencontre au Japon du danseur Ko a été décisive : « J’ai été impressionné par ce que le travail du Butô impose sur le corps, encore plus parce que Ko Murobushi en fait un exercice violent, douloureux, déroutant, comme s’il voulait à tout prix atteindre ses limites. Tout ce que j’avais était une vague idée, un désir naissant autour du thème de l’animalité. Animalité comme une réalité et comme une terreur profondément enracinée dans l’homme ; animalité comme un lien secret entre le cheval et le cavalier, et par extension, comme l’expression, peut-être sublimée mais en tous les cas étrange, d’un être double, le centaure. J’ai confié mon projet à Ko Murobushi et, immédiatement, il a accepté de se joindre à l’aventure. »

La deuxième rencontre à l’origine de ce spectacle est celle de Bartabas et d’un texte : les Chants de Maldoror de Lautréamont, jeune poète disparu à l’âge de 24 ans en 1870, qui sera redécouvert par les surréalistes. « Ce texte, dit Bartabas, est un travail sur l’animalité qui s’applique parfaitement au Butô, une poésie utilisée comme une musique des mots. C’était exactement ce que je recherchais, le thème de l’animalité était présent et c’était une écriture incroyablement rude et sauvage, c’est une poésie impulsive, une dynamique de la métamorphose. Il a découvert un langage intelligible qui, à travers les mots, peut générer une action. C’était pour moi une importante révélation.

Ces deux grands artistes se sont ainsi trouvés de plus réunis par ces Chants de Maldoror du comte de Lautréamont, un texte d’une grande force qui évoque la vie, la mort, la déchéance de l’homme, car ce texte est cité également dans les inspirateurs du théâtre Butô et Murobushi le connaissait et l’appréciait beaucoup à la grande surprise de Bartabas.

Bartabas a du ensuite insuffler l’esprit de ce textes à ces compagnons de scène : « Ce texte comme le Butô est une énergie intériorisée très contenue. Il a fallu ensuite une préparation spéciale pour les chevaux qui a demandé un an de travail. Le but était de mettre les chevaux dans un état de concentration, un rythme intérieur très lent, un travail sur la respiration qui les mène à des mouvements minimalistes comme par exemple une immobilité totale de 5 à 6 minutes, ce qui paraît simple mais qui n’est pas du tout naturelle pour eux. Il faut apprendre au cheval à se mettre dans un état d’impulsion contenue. Le résultat est qu’on n’a plus besoin de rênes pour guider les chevaux, ils sont libres d’instruments artificiels, et peuvent répondre aux plus infimes instructions. En fait ils prennent part au spectacle non en tant que chevaux mais en tant que danseurs partenaires. Et pour moi, le cavalier n’est plus celui qui prévaut mais une part de l’hybride que je forme avec le cheval, qui commence aussi à danser. »

Le résultat est un spectacle d’une très grande beauté poétique, une fusion entre l’homme et l’animal, une descente en profondeur dans les corps et les ténèbres de l’animalité et une performance extraordinaire de ces deux grands artistes et des chevaux. Un spectacle d’ascèse, tout en lenteur et en profondeur, une expérience unique, jamais réalisée auparavant.

 

 

《人馬的沉思》是一場精彩絕倫、扣人心弦的表演,它聚集了七位傑出的人物:巴他巴斯,一個與馬耳語的人,室伏鴻,日本著名的舞踏舞蹈家,洛特雷亞蒙,一個英年早逝的黑暗詩人以及Horizonte、Soutine、Pollock及Le Tintore四匹馬。

巴他巴斯和他的星躍馬術奇藝坊曾於2008年香港藝術節期間造訪香港,在馬戲團的帳篷下,三十餘匹馬齊奔,做了一場稱為Battuta的精彩表演。這次,他將在葵青劇院獻出另一場全新的節目。這是謳歌人馬融合、緩慢、憂傷的舞蹈,氣氛神秘,伴以洛特雷亞蒙詩歌鏗鏘的節奏。人和馬在黑喑邊緣半明半暗的氛圍中共舞。「《人馬的沉思》是巴他巴斯和日本舞踏舞蹈家室伏鴻合作創作的完美舞蹈。巴他巴斯騎在馬上,室伏鴻雙足起舞,營造了一場人馬相對、翩翩起舞的奇妙景象。這是一場如夢魘般纏人的表演。」Ariane Bavelier在《費加羅報》上這樣評述道。

對巴他巴斯而言,與舞蹈家室伏鴻在日本的邂逅,對他創作這場舞蹈起了決定性的作用:「我對舞踏於人體的苛求感到震驚,尤其是看到室伏鴻將之變成一種強烈、痛苦、令人狼狽不堪的練習。他彷彿不惜一切代價,欲達至極限。開始我感到茫然,隨後卻產生了欲表達動物性的意念。動物性是一個事實,是深藏於人類心中的恐懼,是馬與騎者之間的秘密聯繫。引伸開來,便是一個似乎升華、但畢竟怪異的稱謂,雙面生物,半人半馬的怪物:肯陶洛斯。我把創作這場舞蹈的計劃向室伏鴻說了,他立即答應參加進來。」

引發創作這齣舞蹈的另一個契機是巴他巴斯和洛特雷亞蒙詩歌的邂逅。洛特雷亞蒙是一位年輕的詩人,1870年以24歲英年早早離開人世,他的詩歌後來為超現實主義者們所發現,視為至寶。巴他巴斯這樣說道:「這是探討動物性的詩歌,極適用於舞踏,是字詞鏗鏘如音樂的詩歌,這正是我苦苦尋求的。動物性的主題就在其中,這是難於置信地粗獷、野性、衝動的詩歌,是強而有力的隱喻。詩人以一種含糊的語言,透過字詞,孕育出一個行動。這對我是一個極大的啟示。」

洛特雷亞蒙的《瑪爾陀羅之歌》把這兩位大藝術家更緊密的連在一起了。這是揭示人類生命、死亡、墮落的遒勁有力的詩歌。日本舞踏劇院的藝術家們亦常引用它,室伏鴻更是對它諳熟並欣賞備至,這令巴他巴斯驚詫不已。

巴他巴斯將這詩歌的精神灌輸給他舞台上的同伴們:「這詩歌正如同舞踏,是極其內在化的力量。接着,必須對馬匹作專門的訓練,這需一年的時間。目的是讓馬能處於一種精神集中的狀態,領悟緩慢的內在節奏,訓練牠們呼吸自如,可處於一種幾乎靜止的狀態,譬如五、六分鐘的完全竚立不動。這看來似乎簡單,但對馬匹而言則非自然的事情。必須教會馬匹可一直處於一種蓄勢待發的狀態。結果是無需繩便能駕馭牠們,無需任何工具,只需些微的暗示,牠們便心領神會。在舞台上,牠們不再是馬,而是以舞者的身份參加演出。而我這個騎士也不再高人一等,卻是與馬合為一體的混合物,與馬共舞。」

這是一場極富詩意的優美舞蹈,是人馬的結合,是對人體和動物性所作的深入堂奧的探索,是兩位大藝術家和馬匹的絕妙表演。一場艱苦卓絕、緩慢、深沉,出類拔萃、前所未有的演出。