Danse 舞蹈

Texte : Gérard Henry

 
  Soledad de Helen Lai et Peter Suart
黎海寧與彼得小話的《孤寂》
 
 


• Soledad - photo © Ringo Chan

Pour tous ses admirateurs ce fut un plaisir de revoir Helen Lai sur la scène après une absence de trois ans, elle avait alors annoncé sa retraite des plateaux de danse. Surtout de la voir revenir avec une pièce très ambitieuse, Soledad, une adaptation de Cent ans de solitude du prix Nobel colombien, Gabriel Garcia Marquez, grand roman qui narre la destinée de la famille Buendia sur 7 générations : Acculés à vivre 100 ans de solitude par la prophétie du gitan Melquiades, les Buendia vont traverser guerres, massacres et conflits de l’histoire colombienne et connaître à la fois grandeur et décadence, un chef d’œuvre à la fois réaliste et magique dans le style de la littérature sud-américaine des années 1960.

Qu’est-ce qui a mené Helen Lai à sortir de sa retraite ? « Le désir de travailler avec Peter Suart » dit-elle, une envie partagée d’ailleurs par le compositeur, illustrateur et écrivain, dont la carrière artistique se partage entre Hong Kong et la Grande Bretagne. Tous les deux grands lecteurs, ils se sont découvert le même amour pour ce roman. Mais en raconter l’histoire entière était impossible, et il n’était pas question de la transposer à Hong Kong ou en Chine. Ils ont donc travaillé certains passages du roman et sur les impressions qu’ils en avaient. Ils ont choisi le simple titre de Soledad, Solitude, « solitude de la vieillesse, de l’impossibilité de l’amour, du colonel qui devient dictateur » dit Peter Suart.

Le résultat un spectacle splendide autant sur le plan de la danse, du décor que des lumières. La chorégraphie de Helen Lai est fluide avec de beaux duos très sensuels et des tableaux très poétiques comme cette danseuse devant un rideau de pluie bleue. Les danseurs qui incarnent les 7 générations y prennent visiblement un grand plaisir, les mouvements de groupes se nouent et dénouent avec aisance. L’association avec Peter Suart, qui a écrit la musique, a réalisé un magnifique décor, celui d’un grand bateau de bois à demi échoué sur la scène et incarne sur scène le personnage du gitan Melquiades lisant sa prophétie donne une grande ampleur à ce spectacle. Sa mystérieuse prestance, sa voix profonde et un peu caverneuse semble nous parler à travers les siècles. Peter Suart avait d’ailleurs avant le spectacle réalisé une série de dessins sur Cent ans de solitude qu’il a exposés à PMQ.

Pour les nouveaux arrivés à Hong Kong, rappelons qu’Helen Lai est l’une des chorégraphes les plus intéressantes de cette région de l’Asie.
Ses spectacles ayant un côté narratif, les puristes de la danse ne l’apprécieront peut-être pas de la même manière, car à la danse pure, elle préfère le théâtre-danse qui se rapproche plus de son inspiration souvent très littéraire...

Ce qui rend Helen Lai unique est son répertoire qui touche souvent à des thèmes universels et dépasse l’anecdotique que l’on voit trop souvent à Hong Kong. En 2002, elle s’inspire de la tragédie grecque de Sophocle, Œdipe, pour créer The tragedy of M. O., une pièce transposée dans un espace restreint, où la relation incestueuse entre Œdipe et sa mère était représentée par un duo sur un lit encombré de meubles. On peut aussi citer à son répertoire Invisible Cities, clin d’œil à Italo Calvino, et en 2004, The comedy of K, une plongée dans le monde de l’absurde de Kafka avec une imagerie surréaliste qui rappelait beaucoup le peintre Magritte. Elle a donné aussi des pastiches des opéras révolutionnaires chinois (Millenium mix) présenté au Festival des Cultures à Munich en 1997, ou des pièces comme Nine Songs, qui célèbre l’intégrité du grand poète chinois Qu Yuan qui, au 2e Siècle av. J. C. se suicida en exil, désespéré de la corruption des princes du royaume de Chu, spectacle dont la musique traditionnelle chinoise se joua sur des instruments crées spécialement par le compositeur Tan Dun, une pièce qui fut invitée à la biennale de danse de Lyon en 2000.
Sans vouloir enfermer Helen Lai dans un genre, on peut dire que ses thèmes de prédilection sont la lutte contre l’enfermement, qu’il soit intérieur, intime, psychologique ou politique, l’autoritarisme, la corruption.; l’autre est son grand amour de la musique et du chant. Elle privilégie des musiciens un peu fous comme Stravinsky, Eric Satie ou Chostakovitch dont elle a conté la vie récemment dans un magnifique spectacle, Testimony, avec l’acteur Lee Chun Chow et la troupe de Hong Kong City Contemporary Danse Company dont elle a été un membre fondateur. Elle a montré avec Solidad qu’elle avait gardé toute sa créativité, et on espère qu’elle continuer à créer de nouvelles pièces.

Soledad a été présenté par la
City Contemporary Dance Company
les 11 et 12 décembre 2015 au
Kwai Tsing Theatre

 

黎海寧三年前宣佈退下舞台。闊別了三年之後,她的擁躉很高興能在一齣改編自諾貝爾文學獎得主馬奎斯 (Gabriel Garcia Marquez) 的名著《百年孤寂》(Cent ans de solitude) 的作品中再次欣賞她舞台上的風姿。《百年孤寂》以虛構市鎮馬康多 (Macondo) 的榮衰作為拉丁美洲百年滄桑的縮影。反映了殖民,獨裁,鬥爭和流血的歷史,以及遺忘和孤獨的主題。內容講述一個光怪陸離的邦迪亞 (Buendía) 家族在一百年間,七代人因權力與情慾的輪迴上演興衰起落,是一部既寫實又奇詭的的文學巨著。

是甚麼促使黎海寧重出江湖的呢?「渴望與彼得小話 (Peter Suart) 合作」她這樣說道,而這亦是這位分別在香港和英國從事創作的作曲家、插圖畫家兼作家所渴望的。他們二人都酷愛閱讀,並發現對方對這本小說有着相同的熱愛。當然是不可能完整地講述整個故事,而且也不想將故事的背景轉移到香港或中國。因此,他們只採用故事中的某些情節以及他們對這些情節的感想作為創作的靈感。他們以簡單的《孤寂》作為名稱,彼得小話說「是寫年老,絕望的愛情,成為獨裁者的上校的寂寞」。他們合作的成果是一齣無論是舞蹈、佈景和燈光設計都精彩絕倫的表演。

黎海寧為這作品編寫了優美性感的雙人舞,尤其是女舞者在雨藍色的簾幕前舞蹈的畫面極度詩意。那些代表七個年代的人的舞者看來樂在其中,一群一群的人動作流暢地聚合或分散。彼得小話負責原創音樂及佈景設計,佈景是一艘半擱淺的木船,由一個表演者扮演正在誦讀預言的吉卜賽人 Melquiades 令整個演出更加震撼。他充滿神秘感的儀容,沉厚又有點兒空洞的嗓音似乎來自之前的世代。事實上,彼得小話在這個節目之前已曾在元創坊展出了一系列有關《百年股寂》的圖畫。

黎海寧是亞洲區其中一位最令人讚嘆的編舞家。她的作品通常都有着敘事的一面,喜歡純舞蹈的人士可能有不同的看法,相對於純舞蹈,她更喜歡戲劇-舞蹈,因為這種舞蹈形式更接近她那些來自純文學的靈感……


Décor de Peter Suart - photo © Ringo Chan

黎海寧的表演節目很多時都會涉及一些世界性的主題,遠勝那些香港常見的陳腔濫調、老套的主題。2002年,她自希臘悲劇作家 Sophocle 的作品《Oedipe》中取得靈感,創作了《O先生家族死亡事件》,她將場景轉換為一個狹小的空間,並以在一張堆滿傢具的床上表演的雙人舞來表達 Œdipe 與他母親的亂倫關係。她的《隱形城市》讓人一窺 Italo Calvino 的風格,而2004年的《畸人說夢》則以超現實主義的圖像帶觀眾進入一個卡夫卡式的荒謬世界中。她為1997年慕尼克文化節創作了《革命京劇-九七封印》,此外還有歌頌中國偉大詩人屈原的《九歌》,屈原遭奸人所害被逐出國境,在流放期間,因為楚國諸侯的腐敗深感痛心而投江自盡,這演出以傳統中樂伴奏,演奏的樂器更是作曲家譚盾為此特別製造的,這舞蹈作品曾獲邀請在2000年的里昂雙年展中演出。
為了不想將黎海寧困在一種類別的框框內,我們可以說她的作品偏愛以抗拒困鎖(無論是有關內在的、個人的、心理的或政治的)作主題;還有她對音樂和歌曲的熱愛。她特別喜歡一些帶點兒神經質的作曲家,如史特拉汶斯基、艾力.薩蒂或蕭斯達高達維契等,而她曾在一個由演員李鎮洲與香港城市當代舞蹈團合作演出的精彩作品《證言》中描述蕭斯達高達維契的一生。她是城市當代舞蹈團其中一位創團成員。