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La productrice francaise Alice Rensy, résidente de Hong Kong, travaille avec de nombreux danseurs et chorégraphes locaux ou étrangers de passage sur le territoire, elle organise des événements de danse ou des performances dans des espaces culturels indépendants ou participe à des créations pour des festivals comme cette année le « Choreographers showcase » du Hong Kong Ballet ou les « Jockey Club Contemporary Dance Series » du Hong Kong Arts Festival. Familière du milieu hongkongais de la danse, elle réagit sur des fondements de sa discipline et partage son point de vue.
Comment vous est venu la passion de la danse ?
J’ai commencé la danse comme beaucoup de petites filles, puis c’est devenu mon refuge. A l’époque je passais beaucoup de temps à rêvasser en contemplant les photos du Lac des cygnes sur la pochette du disque vinyle de ma mère. A 11 ans j’ai voulu participer à un concours de danse classique à Caen en Normandie. Je n’ai pas eu de prix, mais c’était une expérience très marquante pour une personne introvertie. J’ai toujours gardé un lien particulier à la danse. Plus tard, la danse contemporaine a considérablement ouvert les possibilités d’expression.
Etes-vous parfois sur scène en tant que danseuse ?
Ma première intervention en tant que performeur était en octobre 2015 avec Shunsuke Arimizu du Hong Kong Ballet au centre d’art « Charbon » à Wong Chuk Hang. Lalie Choffel, qui dirige Charbon, m’a proposé de créer une performance intitulée « Soft destruction » à l’occasion du finissage de l’exposition en papier de Winoma Chan. J’ai invité Shunsuke à faire cette performance. Habitué aux scènes de théâtre, c’était la première fois qu’il travaillait dans un centre d’art avec une grande proximité du public. Il m’a demandé de l’accompagner. Nous avons revêtu des masques de lapin trouvés sur place, créé des situations sociales entre les deux créatures, déchiré les installations, mangé le papier. C’était curieux et j’espère juste.
Mais la plupart du temps mon rôle est en arrière-plan : réunir des personnes pour des projets, proposer des idées, travailler avec des chorégraphes sur la dramaturgie de leurs pièces, les aider à écrire sur leur travail, parfois chorégraphier.
Comment définissez-vous votre discipline ?
Je situe ce travail entre danse et art visuel, deux mondes peu connectés à Hong Kong. Ce qui m’intéresse ce sont les vibrations provoquées par la sincérité et la générosité envers le public. Cela, quelle que soit la technique utilisée. Concrètement j’ai souvent recours au ralentissement des gestes et à la simplification des structures. La proximité avec le public est également une piste. Bien que ce travail puisse paraître rudimentaire, il requiert au contraire une sensibilité aiguisée, du charisme au niveau des performeurs, de la précision et du temps, afin de présenter clairement un élément de vérité à travers des sensations, plutôt que par un raisonnement logique.
Le terme de non-danse n’a pas de sens car il s’agit bien de danse, quel que soit le niveau technique et même si on est en dehors des codes des danses reconnues. J’aime l’idée que la danse contemporaine soit une catégorie floue qui ne désigne ni une technique ni une méthode.
Je travaille avec des danseurs charismatiques quelle que soit leur formation, par exemple j’aimerais retravailler avec Wing Kong, une étudiante en danse chinoise à la Hong Kong Academy for Performing Arts, qui a fait preuve d’un charisme rare lors d’un projet passé, ou avec cette femme infirmière de profession qui a travaillé en Afrique dans des contextes de guerres terribles et qui a besoin de danser. La plupart de la beauté d’un spectacle repose sur la présentation de charismes individuels de performeur à un certain moment et dans un certain contexte. J’aime forger la force d’une pièce de danse en me concentrant sur les danseurs, leurs mouvements et sur les possibilités de faire éclore une transcendance.
Le naturel ne suffit pas du tout, ce n’est que le commencement. Il est absolument nécessaire de travailler à partir du charisme du danseur, de sélectionner, de limiter beaucoup, parfois de contraindre même. Dans le but de livrer aux spectateurs une expérience du vrai, un spectacle qui suscite une compréhension instinctive.
Les décors et les costumes sont choisis en dernier, après la lumière, et avec précaution. Des costumes trop présents tendent à gâcher l’essentiel. Par contre le contexte est primordial. Que le public soit restreint et proche, ou qu’il y ait un public nombreux assis dans une salle de théâtre, doit être considéré le plus tôt possible.
Est-ce que le public hongkongais, plus friand de danse classique, suit ces nouveaux mouvements ?
Oui il y a un public. Ceci-dit, régulièrement une partie du public semble découvrir ce genre de travail. Comme pour A work with the Hong Kong Ballet du chorégraphe Yang Hao né à Chongqing. Le Hong Kong Ballet avait commandé une création dans le cadre du « Choreographers’ Showcase » au Studio Theatre du Hong Kong Cultural Centre. La pièce a été créée pour cinq danseurs classiques du Hong Kong Ballet, Liu Miao-miao, Jessica Burrows, Arianne Lafita-Gonzalvez, Shunsuke Arimizu et Wu Di, en mettant en scène leurs charismes individuels au-delà de leurs techniques. Le public qui était venu voir de la danse classique à été assez peu enthousiaste. Plus étonnant, la critique du South China Morning Post a écrit qu’elle n’avait pas compris l’intérêt de notre travail étant donné que justement on ne s’était pas concentré en premier lieu sur la technique classique des danseurs. Pourtant il y a indéniablement de la belle danse classique dans ce spectacle : Shunsuke a un solo avec des pirouettes classiques, Arianne a un solo de pantomime, il y a des références a de grands maitres de la danse comme Nijinski, Trisha Brown et Raimund Hoghe. Pour moi et pour certaines personnes qui l’ont découverte, cette pièce est une petite merveille.
La relation au corps
Je suis plutôt cérébrale, pourtant il est très clair que le corps réagit fortement a beaucoup de choses de la vie : les émotions, les présences, les intentions, la beauté, la violence. Par exemple quand j’ai vu « Pas de Deux » le duo de Raimund Hoghe avec le danseur Takashi Ueno au Théâtre de la Cité internationale, les sensations étaient si intenses que j’ai cru assez tôt que j’allais pleurer, mais comme le spectacle continuait, le choc bloquait mes larmes en provoquant une nausée. J’étais submergée par la beauté de ce qui se passait. |
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• “A work with Hong Kong Ballet” de Yang Hao
Hong Kong Cultural Centre. Courtesy Hong Kong Ballet
photos Maggie Mok
現居於香的的法國製作人愛麗絲.倫斯與許多本地或來港作短暫逗留的外國舞蹈員和編舞家合作,她在一些獨立的文化空間舉辦舞蹈或表演項目,或參與一些藝術節的創作,如今年香港芭蕾舞團的「舞家巡禮」或香港藝術節的「賽馬會現代舞系列」。她非常熟悉香港的舞蹈界,並就相關概念作出回應和分享她對表演藝術的看法。
你對舞蹈的熱愛是從何而來的呢?
我像很多小女孩一樣年幼便開始學跳舞,之後舞蹈成為我的避難所。11歲時,我曾在里昂參加過一場芭蕾舞比賽。雖然結果不盡人意,但我並未因此氣餒。母親有張柴可夫斯基《天鵝湖》的黑膠唱片,我被封面上的俄國芭蕾舞者深深吸引,從此之後就迷上了舞蹈。通過持續不斷的訓練與合作,我始終活躍於這一領域。
你是否有時會以舞者的身份上台表演?
我真正成為一名表演者,卻是始於2015年10月香港 Charbon art space。當時我為香港芭蕾舞團的日本舞蹈員水俊介 (Shunsuke Arimizu) 組織演出。那是他首次在畫廊表演,他邀請我加入。我們碎掉了陳麗雲 (Movana Chen) 的紙本裝置,戴上了兔子面具,還吃下了那些碎紙。其間充滿了歡樂。
但大多數的時候,我的角色都是幕後的:為項目召集工作人員,提供意見,與編舞者一同構思他們的作品的劇情,幫助他們編寫,有時也會編寫舞步。
你如何為自己的藝術下定義呢?
我將自已的作品定位於舞蹈與視覺藝術之間,這些在香港都是相當獨立的。我專注於透過作品展現人性活力,毫無保留地與觀眾分享,獨立於技巧手法之外。具體來說,這些作品通常都包含緩慢與簡單這兩個元素。拉近表演者與觀眾之間的距離也可算作是這項研究的一個元素。雖然這聽起來像是一種非常自然直接的表演方式,但它需要兼具高度的敏感與精確,以及非凡的魅力,才能通過內心感受,將真實表達清楚,與演繹思維截然相反。
人們有時會用「非技術性」舞蹈,甚至用「非舞蹈」來形容我的作品,但我並不喜歡這些標籤,因為不管藝術水平如何,例如不管是否加入文字,或者省掉舞台,它們依然是舞蹈。我喜歡將當代舞看作是一種可以朝任何方向進行研究的表演藝術。
我與各種各樣的人合作,並不關注他們是否接受過專業培訓;例如我曾與 Wing Kong 合作過,她是一名學生,在香港演藝學院修讀中國舞蹈表演藝術,我也曾與 Isabelle Greneron 合作過,她是一名護士,在非洲戰地上工作。表演之美大多源自於在特定的時間與場合之下,揭示出表演者極強的內在魅力。一件作品的力度要由表演者共同創造,並要對其間產生的獨特魔力抱以開放的心態。
表演者的服裝並不重要。道具和服裝應該是最後加入表演中的,在此之前是燈光照明。服裝過於搶眼容易遮蓋表演者的真實表質。處理這些細節時應當格外小心。不過環境勝於一切,演出時的環境如何,是少數觀眾近距離觀看,還是許多觀眾坐在鏡框式舞台前觀看,這些都應當儘早納入創作過程之中。
• “A work with Hong Kong Ballet” de Yang Hao
Hong Kong Cultural Centre. Courtesy Hong Kong Ballet
photos Maggie Mok
與你自己身體之間的關係
至於我與自己身體之間的關係,這是個複雜的問題,我從未真正思考過。我非常善於動腦,同時 又與自己的身體保持着非常緊密的聯繫,就好像我沒有皮膚似的。我的身體會對生活中許多事物產生非常清晰的反應:食物與飲料,寒冷與溫暖,存在與缺失,情感,暴力,美。2010年我在巴黎國際城劇院裡觀看 Raimund Hoghe 與 Takashi Ueno 的雙人舞時,第一次激動得想哭,但是隨着演出的進行,我並沒有落淚,反而覺得想吐。我的身體無法承受這麼多的美。
Prochains projets de Alice Rensy
« Wo Men » de Cai Ying sera créée les 11 et 13 mars 2016 au Hong Kong
Cultural Centre dans le cadre du Hong Kong Arts Festival
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