French may 2021 法國五月藝術節

Texte : Hugo Petit / Photos : Stella Ko

 
  Patrick Lui : Quand le jazz est là
雷柏熹﹕港式爵士樂琴韻
 
 

Le 22 mars dernier, les Marvin Hamlisch International Music Awards récompensaient les nouveaux talents de la composition musicale. À cette occasion, le prix dans la catégorie « Jazz composition, emerging division » a été remis par Quincy Jones en personne (ou plutôt, en distanciel) à un jeune pianiste, compositeur et arrangeur hongkongais. Quelques heures plus tôt, Paroles l’avait rencontré.

À la tête d’un big band ainsi que d’un quartette, Patrick Lui est une figure majeure de la scène jazz hongkongaise. Déjà lauréat de plusieurs prix, il s’est notamment produit au Clockenflap et au HK International Jazz Festival, ainsi qu’à Taiwan et en Europe. Son album Sonder, enregistré à New York, est sorti fin 2020. D’abord formé à la musique classique et diplômé de HKBU, c’est au prestigieux Berklee College of Music de Boston qu’il a parfait son apprentissage du jazz.

Patrick Lui a par ailleurs composé pour le cinéma et la télévision, et évolue également dans le domaine de la musique pop : il a ainsi collaboré avec le groupe de cantopop RubberBand et accompagné Eason Chan au piano lors de la tournée mondiale de celui-ci en 2017. Loin de se cantonner à un seul genre, il nous a dit trouver une grande satisfaction à aller de l’un à l’autre. Dernièrement, c’est aux musiques de films français qu’il s’est intéressé, puisqu’il sera à l’affiche du French May le 17 juin prochain pour un concert intitulé « Jazz in French films feat. Patrick Lui Jazz Orchestra ». Son big band y interprétera une sélection de morceaux, réarrangés pour l’occasion, issus des plus célèbres bandes originales du septième art français, des Parapluies de Cherbourg au Fabuleux destin d’Amélie Poulain, en passant par les improvisations de Miles Davis d’Ascenseur pour l’échafaud ou encore la musique signée par Martial Solal pour À bout de souffle. Il y sera accompagné par la chanteuse sud-africaine Talie Monin.

Patrick Lui nous montre que le jazz, plus de cent ans après sa naissance, loin de s’enfermer dans une approche nostalgique, reste une musique vivante qui continue d’évoluer et de trouver de nouveaux adeptes à travers le monde.

Paroles : Comment en êtes-vous arrivé au jazz ?
Patrick Lui : J’ai commencé à apprendre le piano à 6 ou 7 ans, comme la majorité des enfants à Hong Kong. À l’âge de 15 ans je me suis demandé : « pourquoi suis-je toujours en train de jouer la musique de quelqu’un d’autre ? » C’est l’un de mes professeurs d’anglais (et non pas de musique !) qui m’a conseillé d’apprendre à improviser. J’ai commencé avec des choses simples, dans un style plutôt pop. Et c’est alors seulement que j’ai envisagé de faire carrière dans la musique. En rejoignant l’orchestre de jazz de mon université, j’ai pu goûter à cette musique pour la première fois, et je n’ai plus décroché depuis : j’avais trouvé le son qui me captivait. J’ai eu cette chance incroyable d’être admis à Berklee et d’y apprendre à jouer, composer et arranger. Après quatre ans, je suis revenu à Hong Kong et j’ai commencé à travailler pour les scènes jazz et pop. Certains musiciens de jazz résistent aux autres genres. Je ne veux pas être comme ça. J’essaie de trouver du bon dans chaque style et de m’amuser avec tous.

Quelles ont été alors vos principales sources d’inspiration ?
Neuf pianistes de jazz sur dix vous diront probablement qu’ils ont été influencés par Bill Evans. Ils peuvent facilement s’identifier à lui, car il a également reçu une formation classique avant de s’orienter vers le jazz. Par ailleurs, il a un son véritablement unique, que beaucoup cherchent à imiter. Il a été ma toute première influence. Plus récemment, il y a eu Brad Mehldau, Larry Goldings et Keith Jarrett : je les écoute beaucoup. Pour le big band, je dirais que ma plus grande influence est sans conteste Maria Schneider. C’est en écoutant ses premiers albums à Berklee que j’ai eu envie d’écrire pour un big band. Il y a aussi Bob Brookmeyer et Gil Evans. J’écoute toujours beaucoup de musique classique : Chopin, Rachmaninov. Je ne m’en inspire pas consciemment, mais c’est dans ma mémoire, donc cela a peut-être une influence sur moi. En musique, les inspirations ne transparaissent pas toujours de façon évidente dans le travail de quelqu’un.

En France, le jazz est parfois considéré comme une musique très élitiste.
Vraiment ? C’est intéressant de voir combien les points de vue sur le jazz peuvent être divers. Et c’est un genre tellement large : la définition de ce qu’est le jazz peut être très différente d’une personne à l’autre. Effectivement, le jazz et la musique classique sont souvent rangés dans la même catégorie. Mais je pense plutôt que les musiciens de jazz ne reçoivent pas toujours la reconnaissance qu’ils mériteraient. Ils ne sont pas forcément bien compris par le public, probablement à cause de l’improvisation.

On pourrait croire le big band réservé au versant nostalgique du jazz, là où des formations plus petites comme le trio ou le quartette se prêteraient davantage à l’innovation dans ce domaine.

Il en va de même pour l’orchestre classique : certains pensent immédiatement à Mozart ou Beethoven, alors qu’il en existe aussi une approche très contemporaine, les compositeurs développant de nouveaux sons. Et c’est la même chose pour les big bands, avec, actuellement, Darcy James Argue ou Maria Schneider.

Parlez-nous de votre travail en vue du concert du French May.
Les anciens big bands jouaient des morceaux courts, des chansons. Mais les compositions contemporaines sont plus longues, avec différents « épisodes », comme les symphonies classiques. L’un des défis pour moi a donc été de s’éloigner de la chanson comme forme et comme style : s’en emparer, en prendre la mélodie, en prendre des éléments, et les intégrer dans une structure plus longue et plus sophistiquée. Et bien sûr attribuer les solos aux différents improvisateurs.

Y a-t-il une chanson en particulier qui vous a marquée ?
Je ne parle pas français, donc les titres des chansons ne me disaient rien. Mais lorsque j’ai écouté les mélodies, je me suis rendu compte que j’en avais déjà entendu certaines auparavant. J’ai beaucoup aimé travailler sur la musique de À bout de souffle, ainsi que sur la chanson Je ne pourrai pas vivre sans toi [extraite des Parapluies de Cherbourg].

Connaissez-vous le jazz français contemporain ?
Oui, un peu. Certains de mes amis ont fait leurs études musicales en France et m’ont fait écouter des morceaux. J’ai découvert que le jazz français était très diversifié, et non pas seulement avant-gardiste comme je le pensais : le jazz plus traditionnel, ou « easy-listening » y existe aussi ! Les deux extrémités du spectre sont représentées et c’est très intéressant.

Que pensez-vous de la scène jazz actuelle à Hong Kong ?
Bien sûr, la scène est petite, et les enfants apprennent tous la musique classique et non le jazz. Mais je suis plutôt confiant dans son avenir. Elle a longtemps bénéficié des musiciens étrangers de passage à Hong Kong, qui continuent d’y apporter quelque chose d’unique. Mais récemment, de nombreux Hongkongais ont, comme moi, étudié le jazz à l’étranger puis sont revenus avec leur propre bagage, ce qui est encore plus précieux. Ce sont eux qui influencent la scène jazz désormais. Si vous regardez les festivals, les concerts, il y a de plus en plus de nouveaux venus, et c’est un très bon signe : le guitariste Teriver Cheung par exemple, qui a étudié le jazz au Texas, la pianiste Joyce Cheung ainsi qu’un autre guitariste, Tsui Chin Hung, qui a un style vraiment unique… Je suis un peu biaisé ici, car tous deux ont aussi étudié à Berklee !

Pensez-vous qu’il existe un jazz hongkongais ?
J’ai longuement réfléchi à cette question. Mais est-ce qu’il y a vraiment un style propre à un lieu en particulier ? Un son new-yorkais, par exemple ? Je dirais que je n’ai pas encore trouvé de son vraiment spécifique à Hong Kong. La scène jazz y est encore récente. Cela pourrait se développer, mais avant d’être régional, je pense que le jazz est surtout personnel. Si nous développons par la suite un son hongkongais, tant mieux. Mais sinon, ce ne sera pas grave. Ce sera peut-être même mieux, car chacun conservera son individualité.

Vous enseignez également le jazz, une musique qui requiert une connaissance approfondie du solfège et de l’harmonie. Comment rendre le jazz plus accessible aux jeunes et susciter leur intérêt ?
Il faudrait organiser davantage de concerts, inviter les musiciens à parler de leur travail, de leur processus créatif. Je pense qu’il est très bon, notamment pour les enfants hongkongais, d’apprendre l’improvisation. Tout le monde n’a pas à devenir musicien de jazz, mais apprendre l’improvisation peut vraiment libérer des chaînes de l’apprentissage « académique » de la musique. Nous apprenons tous le piano pour passer des examens, avoir une mention. Or, l’improvisation est ce qui m’a redonné du plaisir à faire de la musique. Donc, promouvoir l’aspect improvisé du jazz pourrait certainement susciter davantage d’intérêt chez les aspirants musiciens. Il y a bien sûr des règles, mais je pense que l’improvisation est un peu comme le sport. Au sein des règles, fais ce que tu veux ! Amuse-toi avec le ballon, avec tes adversaires et les membres de ton équipe ! On peut enfreindre un peu les règles pour s’amuser, mais il faut d’abord bien les connaître.

Un entretien réalisé avec la complicité de Victoria Guan

 

今年3月22日,多位作曲新秀在 Marvin Hamlisch International Music Awards揚名國際。其中,爵士樂作曲新人獎由一位年青香港鋼琴家、作曲家、編曲家——雷柏熹奪得,並由 Quincy Jones 親自「遙距」頒獎。就在頒獎前數小時,《東西譚》與他見了一面。

雷柏熹本身是大樂團以及四重奏的團長,是香港爵士樂壇當紅人物;除了屢獲殊榮之外,又曾在Clockenflap音樂及藝術節、香港國際爵士音樂節演出,更曾遠赴台灣和歐洲。他的專輯《Sonder》在紐約灌錄,於2020年底發表。雷柏熹最初接受的是古典音樂訓練;浸大畢業後,他前往知名的波士頓伯克利音樂學院(Berklee College of Music),完成爵士樂的深造。

他亦有為電影及電視作曲,並活躍於流行音樂界,與香港流行樂隊RubberBand合作,又為陳奕迅的2017年世界巡迴演唱擔任鋼琴演奏。他形容自己不會局限於一種風格,當由某種風格跨越至另一種風格時,會感到特別滿足。近年他對法國電影音樂產生興趣,並將於6月17日為法國五月藝術節演出一場「法影爵士樂feat.雷柏熹爵士大樂團」音樂會。大樂團所演奏的多首樂曲均選自法國電影界最著名的配樂,今次表演會重新編曲後演出,包括《秋水伊人》(Les Parapluies de Cherbourg)、《天使愛美麗》(Fabuleux destin d’Amélie Poulain);還有Miles Davis即興演奏《死刑台與電梯》(Ascenseur pour l'échafaud)配樂,以及Martial Solal為《斷了氣》(À bout de souffle)而作的樂曲。

音樂會邀請到南非歌手塔莉.莫蓮(Talie Monin)作為演唱嘉賓。
雷柏熹將會藉這場音樂會向我們證明,爵士樂雖然誕生至今已一百多年,但並沒有成為我們懷緬過去的媒界,反而仍然充滿生機、孜孜發展,在世界各地均能吸引到新的愛好者。

《東西譚》﹕你當初是怎樣邂逅爵士樂?
雷柏熹:我與香港大多數兒童一樣,六七歲就開始學鋼琴。到十五歲時,我問自己:「為什麼我一定要彈別人的音樂?」我的一位英語老師(對,不是音樂!)於是鼓勵我學習即興演奏。我由簡單的音樂開始彈奏,風格比較偏向流行。在那一刻,我才真正考慮要以音樂為事業。我加入大學的爵士樂團後,第一次體驗到這種音樂,自此無法自拔,因為我終於發現自己所着迷的音樂。後來我非常有幸獲伯克利大學取錄,並在那裡學習演奏、作曲、編曲。四年後,我畢業回港,開始從事爵士樂及流行樂的演出。有些爵士樂手會抗拒其他音樂類型,但我不想如此。我會嘗試找出各種風格的契合點,享受各類音符的交錯相會。

你的音樂靈感主要來自哪裏?
十個爵士鋼琴手可能有九個都會講,他們是受到Bill Evans的啟發。他們可以輕易找到與 Bill Evans 的共鳴,因為 Evans 轉投爵士樂之前亦接受過古典樂訓練。但另一方面,Evans亦有真正屬於自己的琴音,令許多人爭相模仿。我最初就是受他的影響。到較近期,令我醉心的有Brad Mehldau、Larry Goldings、Keith Jarrett。他們的音樂我經常會聽。至於大型樂團,我會說影響我最多的必然是 Maria Schneider。當時我在伯克利聽到他最初幾張專輯,於是就有為大樂團作曲的念頭。另外還有 Bob Brookmeyer 和 Gil Evans。古典音樂我還是會經常聽,特別是蕭邦、拉赫曼尼諾夫。我並沒有刻意從古典樂發掘靈感,但是古典樂已經深植於我的記憶,或許已正在影響我。在音樂這種體裁,你並不一定能在某人的作品裏發現到靈感。

在法國,爵士樂往往被認為是非常高尚的音樂。
真的嗎?有意思的是,爵士樂界亦有各式各樣的分野。爵士樂這種風格實在太廣泛,每個人對爵士樂的定義都不同。雖然實際上,爵士樂與古典樂經常被歸為同一類。但我認為正好相反,爵士樂音樂家往往不能得到應得的認同。可能因為爵士樂重視即興演奏,所以公眾不一定對他們有充分的了解。

或許有人認為,大樂團只是舊派爵士樂才會採用的方式,而像三重奏或四重奏的小型組合,更有利於爵士樂的創新。
古典樂團亦一樣,有人會立即聯想到莫扎特或貝多芬;但古典樂亦有非常現代的新派,而且不乏新作。爵士大樂團的情況亦類似,目前出名的有Darcy James Argue、Maria Schneider。

可以介紹一下你在法國五月藝術節的音樂會嗎?
到時我們的舊派大樂團會演奏短作,或者說是歌曲。至於當代的作品則會更長,有不同的「段落」,類似古典交響曲。因此我要克服的難題之一是擺脫歌曲的形式與風格;要掌握歌曲的本身,抽取歌曲的旋律與精華,再整合成較長、較複雜的結構;工作當然還包括將獨奏環節分配給不同的樂手,作即興發揮。

表演的曲目之中有沒有一些令你印象深刻?
我不會法語,所以對歌名不太認識。但是當我聽旋律時,我有印象以前聽過其中幾首。我相當投入於《斷了氣》配樂的工作;《Je ne pourrai pas vivre sans toi》(《秋水伊人》的配樂歌曲)也很不錯。

你聽過法國爵士樂嗎?
有,聽過一些。我有朋友曾在法國讀音樂,他們彈過一些小節給我聽,令我發現法國爵士樂非常多元化,並非只是我原來想像的前衛音樂;而比較傳統的爵士樂,或者又叫「輕爵士樂」,在法國同樣有!爵士樂頻譜的兩端都不乏樂迷,這點相當有趣。

你覺得香港的爵士樂壇現況如何?
規模自然算是小;小朋友學的都是古典樂,而非爵士樂。但是我對香港爵士樂的未來有信心。香港多年來都有外國的爵士音樂家到訪,他們一直為香港帶來一些獨特的元素,令本地爵士樂壇受益匪淺。然而近年,許多像我這樣的香港人將在外國學到的爵士樂帶回來,這點更加難能可貴。他們現時正在爵士樂壇發熱發亮。如果你有留意音樂節和音樂會,就會發現新晉樂手越來越多,這是非常好的現象:例如曾往德州修習爵士樂的結他手張駿豪(Teriver Cheung)、鋼琴手張貝芝(Joyce Cheung),另一位結他手崔展鴻(風格非常獨特)……我列舉後面二人可能不夠中肯,因為他們都曾在伯克利學習過!

你認為香港有自己的爵士樂嗎?
這個問題我自己都思想過許久。但是,真的有只屬於某個特定地點的風格嗎?例如,紐約的風格?我會說,我還未找到香港真正特有的風格。香港的爵士樂壇年資仍然尚淺,會繼續發展下去,但是在成為象徵地區的風格之前,我認為香港的爵士樂風格主要仍是屬於個人。如果我們往後發展出港式爵士樂,那當然好,但即使沒有,亦不是問題,甚至可能更好,因為這樣每個人都能保留自己的個人音樂特質。

你還有教授爵士樂,這種音樂需要對樂理及和聲學有全面的理解。你覺得怎樣可以令爵士樂更容易為青少年人所接受?怎樣引發他們的興趣?
應該舉辦更多音樂會,邀請音樂家來講述他們的作品以及創作過程。我認為教授即興演奏亦非常好,而且特別適合香港的兒童。並非每個人都一定要成為爵士樂家,但是學會即興演奏可以真正鬆開「學術式」音樂的束縛。我們大部分人學鋼琴都是為了考試,想要取得高分,但即興演奏正是使我重新享受音樂的契機。因此,推廣爵士樂裏的即興演奏部分肯定能引起有音樂潛質的人的興趣。「即興」當然並非全無規則,而我認為即興演奏有點像體育運動。在規則的範圍內,可以隨心所欲!可以與隊員在球場上盡情競技!你可以稍為突破規則來「搞搞新意思」,但是首先必需熟習規則。

 
 

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