Dossier 專題檔案

Texte et photos : Karine Yoakim Pasquier, en partenariat avec Le Petit Journal Hong Kong

 
  Hong Kong, une ville construite sur l’eau
香港——沿水而築的城市
 
 

Les Land Reclamation, ou terre-pleins en français, sont des étendues artificielles de terre construites sur les flots, qui permettent d'agrandir un territoire. La pratique est courante dans de nombreux pays, tels que le Japon, Singapour, le Canada, les États-Unis ou même la France, avec notamment l’aéroport de Nice. À Hong Kong, les premiers projets datent du XIXe siècle et ont contribué à l’expansion économique et démographique de la ville. Mais s’ils répondent à de réels besoins, ils ne sont pas sans danger pour les eaux, la faune et la flore touchées de près. Pour mieux comprendre les enjeux environnementaux liés à ces projets, je suis allée interviewer Cindy Lam, biologiste marine à la Hong Kong University of Science and Technology.

Les terre-pleins à Hong Kong, une histoire centenaire
Souffrant d’un manque de place chronique pour ses logements et infrastructures, Hong Kong a, dès le XIXe siècle, étendu ses terres le long de la côte. L’un des premiers projets de ce genre, le chantier de Praya Central, en 1868, a permis d’ajouter 24 hectares de terre à la zone plus connue aujourd’hui sous le nom de Des Vœux Road.

Dans les années 50, avec l’afflux massif de migrants en provenance de Chine, de nouveaux terrains habitables furent créés pour accueillir cette population grandissante et permirent la construction de villes, telles que Kwun Tong dans les années 50, Tsuen Wan dans les années 60, suivies par Sha Tin et Tai Po, dans les années 70.

Dès 1970, neuf nouvelles villes virent le jour : de Tai Po à Fanling, en passant par Tseung Kwan O ou encore Tin Shui Wai, toutes furent créées grâce à des projets de terre-pleins et permirent d’accueillir une population de 3,5 millions d’habitants (source : cedd.gov.hk). De Central à Kwun Tong, il n’est pas une zone à Hong Kong qui ressemble à celles que les Anglais ont trouvées, à leur arrivée au XIXe siècle.

Hong Kong étant un minuscule territoire, l’idée de grignoter sur la mer pour en élargir les frontières s’est rapidement imposée comme une solution miracle. Ainsi, de 1400 hectares de terre furent construits artificiellement entre 1868 et 2020, la majorité se situant dans les Nouveaux Territoires et sur les îles.

Mais si les avantages économiques et sociaux sont certains, ces projets eurent également un impact non négligeable sur les ressources naturelles et le patrimoine culturel de Hong Kong, mettant à mal flore, faune et vestiges historiques.

Les impacts environnementaux liés aux Land Reclamation
Généralement, les terre-pleins sont réalisés par remblaiement, en utilisant des roches ou du ciment, et renforcés avec de l’argile et de la terre. À la différence des polders, qui sont des terrains asséchés situés en dessous du niveau de la mer et protégés par des digues et que l’on voit beaucoup en Belgique ou aux Pays-Bas, les terre-pleins se trouvent au-dessus de l’eau, et permettent entre autres d’y faire de l’agriculture, de lutter contre les moustiques, de réhabiliter des décharges ou encore de développer des zones urbaines.

À Hong Kong, les terre-pleins impliquent le dragage et le remplissage des espaces marins avec des matériaux. Si par le passé, les préoccupations liées à la remise en état des terres concernaient principalement le prix du matériel utilisé ainsi que le temps nécessaire à l'achèvement des travaux, la situation est différente aujourd’hui. En 2021, la population est plus consciente des dommages subis par l’environnement et de ce fait, la controverse grandit au sujet des impacts marins et écologiques liés aux Land Reclamation.

En effet, comme me l’explique Cindy Lam : « les sédiments marins peuvent servir de “puits” pour les polluants toxiques. Le dragage peut introduire des polluants dans l’eau et entraîner une toxicité pour tous les organismes marins… »

Hong Kong, avec son littoral d'environ 1178 km2, abrite divers types d'habitats côtiers tels que les mangroves et les vasières, les plages de sable, ou les côtes rocheuses, et possède une biodiversité riche et unique. Les terre-pleins pourraient détruire inévitablement ces habitats écologiquement riches et menacer les espèces y vivant.

Les dauphins et les coraux, à l’épreuve des terre-pleins
Lorsque je demande à Cindy Lam quels animaux sont impactés par ces projets, celle-ci me confirme que les terre-pleins ont des conséquences directes sur la faune de Hong Kong, et notamment pour le dauphin blanc de Chine (Sousa chinensis chinensis), appelé également dauphin à bosse de l’Indo-Pacifique.
D’après un programme de surveillance mené à Hong Kong depuis 1995 (rapport annuel de l’AFCD, 2020), entre avril 2019 et mars 2020, 158 groupes de 524 dauphins blancs chinois et 124 groupes de 317 marsouins sans nageoires ont été aperçus dans la région lors des relevés par bateau et par hélicoptère. Malheureusement, cette population tend à décroître, en particulier dans la zone du nord de Lantau. Selon Cindy Lam, cette baisse drastique ne serait pas étrangère aux Land Reclamation. En effet, de tels projets ont de nombreuses conséquences désastreuses sur ces animaux : destruction des ressources marines dont le dauphin se nourrit, altération de leurs aires de reproduction, de nurserie et d’alimentation, risques d’atteintes à leur santé, etc. « L’accumulation de produits chimiques nocifs dans les poissons et les crustacés peut augmenter la toxicité le long de la chaîne alimentaire pour le dauphin. De plus, ces animaux s’appuient sur l’écholocalisation, similaire au sonar, pour la chasse, la communication et la navigation. Les dauphins écoutent le son réfléchi qu’ils produisent et l’utilisent pour localiser leurs pairs, poissons et autres objets. Les travaux de construction sous-marins peuvent interférer avec la capacité d’écholocalisation des dauphins, pouvant aller jusqu’à entraîner leur mort dans des cas extrêmes… »

Mais le dauphin n’est pas la seule espèce touchée : « Un deuxième exemple est la translocation des coraux. En effet, afin de réduire les impacts des Land Reclamation sur les espèces marines, des experts ont suggéré de déménager les espèces affectées dans une zone voisine. » Pour illustrer ses dires, la chercheuse me cite le cas des coraux gorgones, qui — pendant la construction de la troisième piste de l’aéroport — furent transférés. Malgré des études poussées sur le sujet, le déplacement de ces coraux a néanmoins rencontré quelques limites, telles que la présence d’eaux proches de la rivière des Perles plus troubles que celles de la mer, rendant l’identification des espèces difficiles, le manque de recul sur ces coraux gorgones et leur arrivée dans la région, et l’impossibilité de localiser les coraux accrochés à d’autres rochers.

Le projet Lantau Tomorrow Vision
C’est en 2018 que le projet « Lantau Tomorrow Vision » fut annoncé par le gouvernement de Hong Kong. Avec son emplacement stratégique et sa taille unique, l’île de Lantau est en effet un lieu de choix pour tout développement économique ou urbain.

Le projet permettra de gagner plus de 1700 hectares sur la mer. Il aura pour objectif la création d’un nouveau quartier d’affaires, en construisant plusieurs îles artificielles près de la zone inhabitée de Kau Yi Chau et de celle de Hei Ling Chau, abritant aujourd’hui une prison et un centre de désintoxication. Mais d’autres infrastructures seront également mises sur pied, telles que le développement de 260 000 à 400 000 unités d’habitations, qui seront disponibles dès 2032 et dont 70 % seront des logements sociaux, un accroissement du réseau de transports et l’essor de Sunny Bay en tant que Leisure and Entertainement Node.

Avec un accent particulier placé sur l’écologie, le projet se veut dans l’air du temps, désirant entre autres se concentrer sur les énergies vertes, la gestion des déchets et l’écotourisme (source : lantau.gov.hk).

Mais certains craignent que le projet ne porte préjudice à la faune et la flore des environs et n’altère l’écosystème marin de l’île. Pour Cindy Lam, il est primordial qu’une étude soit menée sur la biodiversité locale de Lantau, afin d’éviter que certaines espèces telles que le rapace asiatique, le Pygargue blagre, ou le Dibamus bogadeki, un lézard endémique de Hong Kong, ne soient affectés : « Même si ces deux espèces sont protégées, l’aménagement du littoral pourrait mettre à mal l’habitat et l’espace de reproduction du Pygargue ainsi que du Dibamus... La perturbation de l’écosystème de ce dernier entraînerait des effets néfastes irréversibles sur cette espèce qui pourrait alors disparaître. »

Une étude, menée par HKUST et l’Institut Ocean HK, aurait de plus déjà mis en lumière la présence de zones à faibles taux d’oxygène dans la région de Lantau, avec pour conséquence la potentielle apparition « de zones mortes autour de l’île, au sein desquelles l’oxygène dans les fonds marins avait chuté à deux milligrammes par litre, alertant les résidents au sujet de l’impact sur l’environnement marin de la remise en état prévue de Lantau et les sommant à mener une enquête scientifique sur le sujet. »
Ces zones mortes pourraient en effet étouffer la vie marine et causer des dommages irréparables à tout l’écosystème océanique de Hong Kong, tout en augmentant potentiellement les marées rouges et le phénomène des mauvaises odeurs dues à la stagnation de l’eau.

Si de multiples efforts sont faits afin de protéger Hong Kong et ses paysages, il est crucial que des recherches soient menées pour s’assurer que le développement de la ville ne nuise pas à la nature qui la compose : « Même une remise en état à petite échelle aurait des effets dévastateurs sur l’environnement et les espèces qui y vivent. N’oubliez pas que ces espèces sont fragiles. Une fois leur habitat détruit, il faut plus de temps, de main-d’œuvre et de ressources pour restaurer que préserver l’habitat dans son état d’origine. »

En résumé, si les terre-pleins ont permis et permettent encore de dynamiser la région, il est important que leurs tenants et aboutissants fassent l’objet d’études détaillées, en prêtant une attention toute particulière à leurs éventuelles conséquences écologiques.

 


Hoi Ha Wan à Sai Kung

填海(英語: land reclamation;法語: terre-pleins)即是在海上築地,是人工增加平地的方法。許多國家都普遍以填海來增加土地面積,例如日本、新加坡、加拿大、美國,甚至法國亦有採用(譬如尼斯機場)。至於香港,第一批填海工程可追溯到十九世紀,對香港的經濟及人口發展貢獻良多。然而,如果要以填海滿足香港對土地的殷切需求,區內的水域及動植物群可能會遭受嚴重影響。為深入探討填海項目所衍生的環境問題,《東西譚》訪問了科技大學海洋生物學家
林嘉善博士。

香港過百年的填海史
香港長年飽受住屋及基建短缺的困擾,早於十九世紀就開始沿海填地。最早期的填海工程之一是1868年的中環海傍,所新增24公頃地皮位於今日的德輔道一帶。


Les terre-pleins à Hong Kong : construits (en gris) et en cours de développement (en rouge). (Wikimedia commons)

到1950年代,大量中國大陸移民湧入,政府填出多塊居住用地來收容不斷增長的人口並為開闢新市鎮做準備,例如1950年代的觀塘、1960年代的荃灣、1970年代的沙田和大埔。

至1970年,香港已有九個新市鎮,包括大埔、粉嶺、將軍澳、天水圍,且全部是靠填海造地建立,總共可以容納350萬人。(資料來源:cedd.gov.hk)無論是中環以至觀塘一帶,香港任何一區的外觀都與英國人十九世紀登陸所見的大不相同。

香港的腹地極之有限,因此政府很快就了解到,沿海拓展是解決土地問題的靈丹妙藥。1868年至2020年間,人工造地面積超過1400公頃,大部分位於新界及離島。

然而,儘管填海工程具有相當經濟及社會效益,但亦對香港的天然資源及文化遺跡造成難以忽視的影響,嚴重破壞動植物生態及歷史遺址。

填海對環境的影響
填海工程一般會將碎石或水泥回填至海中,再用黏土及泥加固。比利時及荷蘭常用「圩田」(polder)方式造地。所謂圩田即是位於海平面以下、將海水抽乾而得到的土地,需要用堤防來保護。而填海則是在海面上進行,新土地可以用作耕種、防蚊、處理堆填區垃圾、發展市區等用途。

香港的填海工程包括浚挖以及往海裏填放物料。以往,人們對填海的憂慮主要在於所用物料的價格以及峻工所需時間,然而今日已經不同。時至2021年,人類更加意識到填海對環境的破壞,因此有關填海對海洋及生態影響的爭議越來越多。

事實上,林博士亦解釋:海洋沉澱物可成為有毒污染物的溫床;浚挖會將污染物帶到水中,毒害一切海洋生物……」
香港的海岸線面積總共約為1,178平方公里,是收容紅樹林、泥灘、沙灘、石質海岸等各種沿海生態的區域,有豐富而獨特的生物多樣性。然而填海工程難免會破壞這些多姿多采的生態棲息地,從而危害到在所涉區域生存的物種。

泥石傾下,海豚珊瑚何處逃?
當問到哪些動物會受填海工程的影響,林博士解釋整個香港動物生態圈都會直接遭殃,其中以中華白海豚(又稱為印太洋駝海豚)最為出名。

根據政府由1995年起進行的一項監察計劃(2020年《漁農自然護理署年報》),2019年4月至2020年3月,以船艇及直升機調查期間,在香港海域發現158組共524條中華白海豚以及124組共317條江豚。不幸的是,其數目正在減少,特別是在大嶼山以北。按照林博士所言,海豚驟減與填海不無關係。事實上,填海會令海豚遭受不止一種災難級影響。工程不單會侵害海豚捕食的海洋生物,還會使海豚繁殖、哺育、覓食所在的區域變得面目全非,又會危害海豚的健康,諸如此類。林博士又解釋:「魚類及貝類體內所積累的有害化學物質,會增加海豚所處身的整條食物鏈的毒性。此外,海豚是靠聲波定位(類似聲納)來狩獵、溝通、航游,當牠們聽到自己的聲波被反彈後,就能掌握同伴、魚類、其他物體的位置。而水底的建築工程有可能干擾海豚的聲波定位能力,在極端情況下甚至會導致牠們死亡……」

然而海豚並非唯一受影響的動物,林博士補充:「第二個例子是珊瑚移種。事實上,為了減少填海對海洋生物的影響,專家曾建議將受影響動植物移植至鄰近區域。」林博士以柳珊瑚為例,在建造機場第三跑道時,工作人員便將柳瑚移離原處。儘管移種前曾經進行大量研究,但在實際操作時仍然遇到一些難題,例如,珠江附近水域比海水濃濁,以致難以識別生物品種、事後難以長期觀察柳珊瑚及其在新水域安頓的情況,以及完全無法找到依附在其他岩石上的珊瑚。

「明日大嶼願景」計劃
「明日大嶼願景」是香港政府於2018年宣布的發展計劃。大嶼山憑藉其優越的地理位置及碩大的面積,確實是發展經濟或城鎮項目的黃金地段。

明日大嶼工程能在海上創造出超過1,700公頃的土地。計劃的核心是在無人居住的交椅洲以及喜靈洲(現設有一座監獄及一個戒毒所)地區附近建造幾個人工島,然後在上面開發出一個新的商業區。此外還會建造其他基建設施,例如興建260,000至400,000個住屋單位(預計由2032年起可供使用,其中七成為公屋單位)、擴大交通網絡,以及將欣澳發展成休閒及娛樂樞紐。

明日大嶼計劃特別提倡生態保育,標榜緊貼潮流,會將焦點放在綠色能源、廢物管理及生態旅遊等議題上(資料來源:lantau.gov.hk)。

然而有人擔心發展計劃會損害周圍的動植物生群,以及改變島嶼的海洋生態系統。林博士認為必須展開對大嶼山當地生物多樣性的研究,以防某些物種受到影響,例如亞洲猛禽白腹海鵰、香港特有的蜥蜴香港雙足蜥。她指出:「即使白腹海鵰、香港雙足蜥是受保護動物,但沿海的工程仍有可能危害牠們的棲息地和繁殖空間……尤其是香港雙足蜥,當生態系統被破壞,將導致牠們受到難以彌補的禍害,甚至繼而絕跡。」

香港科技大學及太古海洋科學研究亦曾進行一項研究,當中特別提到大嶼山區域內的低氧地區有可能導致「島周圍出現死亡地帶——
海床氧氣量低至每公升兩毫克,因此市民應注意發展計劃所涉填海工程對海洋環境的影響,並呼籲進行相關科學調查。」

這些死亡地帶能令海洋生物缺氧窒息,對香港整個海洋生態系統造成無法彌補的破壞,另外亦可能增加紅潮形成以及死水引發臭味的現象。

儘管當局已努力令香港的自然生態及景觀不受影響,但為確保發展香港的過程中不會損害其原有特質,進行研究才是當務之急。林博士補充:「即使是小規模的填海工程亦可能對環境及生活在其中的動植物造成致命影響,因為這些物種的生命力甚為脆弱。一旦其棲息地遭到破壞,要恢復原狀就需要更多時間、人力、資源。」

總而言之,雖然填海對香港昔日的發跡功不可沒,而且仍有可能再為香港再加添活力,但我們必須就發展項目進行深入、仔細、詳盡的研究,特別要留意工程對生態造成的影響。

 
 

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