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Texte : Elsa Polycarpe

 
  Picasso en conversation au M+. Justement : discutons de l’artiste
在M+博物館,與畢加索對話——來吧,談談畢加索
 
 

Depuis le 22 avril dernier, le M+ accueille l’exposition tant attendue Picasso for Asia : A Conversation, pour laquelle le Musée national Picasso-Paris a prêté une soixantaine de chefs-d’œuvre du peintre, figure emblématique de l’art moderne. Dans la très belle galerie Ouest du bâtiment conçu par Herzog et de Meuron, les visiteurs évoluent entre les toiles, dessins et sculptures de Pablo Picasso (1881–1973) et plus d’une centaine d’œuvres d'artistes asiatiques issues des collections du M+. Présentée en collaboration avec le festival artistique du French May, l’exposition propose un dialogue entre le peintre catalan et des artistes asiatiques contemporains tels que Madokoro Saori, Isamu Noguchi, Nalini Malani, Luis Chan et Simon Fujiwara.

Loin des rétrospectives classiques et du traditionnel défilé chronologique d'œuvres, l’exposition offre une perspective audacieuse de l'influence de Picasso sur l'art asiatique. Elle explore les dialogues qui se sont noués entre l'œuvre du peintre et les artistes du continent, malgré le fait que Picasso n’ait consacré qu’une seule œuvre à l’Asie : Massacre en Corée (1951). La couverture du catalogue de l’exposition, Self-portrait as Pablo Picasso de l'artiste japonais Yasumasa Morimura donne le ton : l'exposition sonde avec modestie la fascination qu'exerce le peintre espagnol sur les créateurs asiatiques. La direction artistique décortique le mythe Picasso en quatre volets. On y découvre comment l'artiste a cultivé son image de génie, notamment à travers ses œuvres auto-mythologiques. On explore aussi son rôle d'éternel contestataire, perpétuellement en rupture avec les codes et les traditions artistiques. L’exposition éclaire les visiteurs sur le parcours de Picasso et explore son évolution, de ses débuts d’étudiant en art jusqu’à devenir l'artiste moderne du XXe siècle par excellence.

Contrairement aux récentes expositions des œuvres de Picasso en France et aux Etats-Unis, celle-ci n’a pas provoqué d’esclandre, ni fait couler beaucoup d’encre. Les critiques habituellement reçues par les musées exposant l’artiste concernent les comportements de Picasso à l’endroit des femmes ayant partagé sa vie. A Hong Kong, mis à part un article d’Enid Tsui pour le South China Morning Post qui reproche à la direction artistique d’être restée trop polie sur la misogynie du peintre, l’exposition a été globalement louée et le public conquis. Cet état de fait reflète assez justement la position du monde muséal, artistique et politique à l'égard du catalan. Ces aspects de sa vie sont connus de longue date par les historiens de l’art et le grand public - les parutions de Vivre avec Picasso en 1964 par Françoise Gilot puis de Picasso, créateur et destructeur en 1989 par Ariana Huffington ont levé le voile sur la vie de l’artiste, mais force est d’admettre qu’en 2025, Picasso a toujours autant la côte. Si l’exposition de ses œuvres emblématiques attire les foules de visiteurs et enchaîne les records en salle des ventes, les musées laissent encore trop peu de place à la personnalité de l’homme.


Pablo Picasso, Still Life with Bull’s Head, 1958, Musée national Picasso-Paris,
巴勃羅.畢加索, 《帶牛頭的靜物》1958年 巴黎國立畢加索藝術館

Picasso s’associait lui-même à l’image d’un minotaure, monstrueux et sauvage, dominant les femmes qui l’entouraient. Si vous visitez l’exposition, la toile Minotaure aveugle guidé par Marie-Thérèse au pigeon dans une nuit étoilée figure d’ailleurs parmi les œuvres. Selon Emilie Bouvard, ex-conservatrice du musée Picasso, il faut cesser de parler des femmes qui ont traversé sa vie comme des « muses ». Certaines se sont suicidées, d’autres ont sombré dans la folie. Fernande Olivier, sa première compagne, est contrainte d'abandonner son métier de modèle par un Picasso jaloux. Après une brève liaison avec Eva Gouel, il épouse Olga Khokhlova, une danseuse qui sacrifie sa carrière pour lui. Leur mariage est un échec, marqué par l'infidélité et la dépression. L'artiste entame ensuite une relation avec Marie-Thérèse Walter, alors mineure, qu'il soumet à des abus sexuels. Parallèlement, il entretient une liaison avec Dora Maar, une photographe qu'il manipule jusqu'à la détruire psychologiquement. Françoise Gilot est l'une des rares à lui tenir tête, mais elle témoigne d'un quotidien difficile, fait de brimades et de misogynie. Sa dernière épouse, Jacqueline Roque, sombre dans une admiration excessive avant de se suicider.

Ce qui ramène l'incessant débat sur la table : faut-il préserver la différence entre l’œuvre et la vie, faut-il séparer l’homme de l’artiste ? Dans le cas Picasso, dissocier l’art de la vie ne tient pas :
les tableaux parlent d’eux-mêmes, les corps, surtout féminins, pleurent, se tordent, sont disloqués voire démembrés par le peintre. En cela, le curateur de l’exposition Doryun Chong a été audacieux. Plusieurs cartels mentionnent la nature colérique, dominatrice et violente du peintre à l’égard de ses compagnes et abordent ces relations amoureuses déséquilibrées. L’exposition questionne aussi la notion de de l’artiste génial en reconnaissant les souffrances infligées à ses modèles : la domination masculine et l'abus de pouvoir sont destructeurs, même au nom de l'art.

Ensuite, la question qui fâche : faut-il arrêter d’exposer Picasso ? L’avis de chacun et chacune est personnel. Il est de toute manière peu plausible que les musées se décident un jour à cet extrême. Et pour l’instant, personne n’en demande autant. Ce qu’il faut, c’est aborder cette face obscure du tableau. Pour Emilie Bouvard, en sus de son machisme, Picasso s’appropriait les choses, les êtres, les possédait avec des sentiments paroxystiques de souffrance, de douleur. Son œuvre questionne les dimensions archaïques du moi et à la violence afférente avec un certain courage, tout en exténuant son entourage.

Parler du comportement de l’artiste, c’est parler autrement mais avec justesse de Picasso. Dans la foulée de la prise de conscience des violences faites aux femmes, la figure de ce travailleur acharné à l'œuvre pléthorique est inéluctablement ébréchée par les accusations d'emprise et de violence exercées sur les femmes qui ont inspiré son œuvre. Mais ne retenir de Picasso que le génie et l’engagement politique n’est plus suffisant pour rendre hommage à ses œuvres variées et complexes et aux questions qu’elles soulèvent. Ne proposer qu’une seule grille de lecture biaisée et désuète, c’est faire fi des débats sociétaux contemporains, et passer à côté d’une des vocations de l’art : interroger et interpeller le public. Sans jamais tomber dans le piège facile de l’anachronisme, l’exposition du M+, loin de diaboliser le personnage, le réhumanise en le confrontant à une critique plus constructive qu’il n’y paraît.

 


Luis Chan, Joy of Life, 1969 | Courtesy of Luis Trust Acquisition in progress | © Luis Trust Image courtesy of Hanart TZ Gallery
陳福善《榮華富貴》1969 年塑膠彩紙本 | 由陳福善信託借出 | 尚待完成收藏程序 | ©陳福善信託 圖片由漢雅軒提供

本年4月22日起,M+博物館迎來萬眾矚目的「畢加索──與亞洲對話」展覽,國立巴黎畢卡索美術館特別借出約六十件這位現代藝術界代表人物的作品以供展出。參觀者可在由Herzog & de Meuron設計的西展廳之內,一一欣賞畢加索(Pablo Picasso,1881至1973年)的畫作和雕塑,同時細味超過一百件M+珍藏的亞洲藝術家作品。本展覽與法國五月藝術節攜手合作舉辦,將畢加索與當代亞洲藝術家之間的交流展現眼前,同場展出芥川紗織、野口勇、納里尼.馬拉尼(Nalini Malani)、陳福善和 Simon Fujiwara 等的作品。

與傳統的回顧展或按年代陳列展截然不同,是次展覽以嶄新角度探索畢加索對亞洲藝術的影響,以及他的作品為亞洲藝術家帶來的靈感,儘管畢卡索只曾以亞洲為主題創作過一件作品:《朝鮮大屠殺》(Massacre en Corée,1951年)。展覽目錄的封面採用日本藝術家森村泰昌創作的《畢加索扮相的自拍照》,指示出全展覽的基調——以謙卑態度,探索畢加索如何讓亞洲創作者如此著迷。策展團隊從四個層面剖析這位藝術家:首先是他如何塑造自己的天才形象,特別是透過其具有自我神話色彩的作品。之後是他如何永遠處於對抗藝術傳統與陳規的叛逆立場。此外,本展覽為參觀者介紹畢加索的藝術生涯,並探索其從藝術學生成為二十世紀傑出現代藝術家的歷程。

對比起近年在法國和美國舉行的多個畢加索作品展覽,本展覽並未引起爭議,而媒體對展覽亦未有激烈評論。通常當美術館展出畢加索的作品時,便會面臨各方對他如何對待其女性伴侶的諸多批評。不過,這次在香港的展覽,除了《南華早報》的徐曉瑜撰文指出有關藝術管理層對畢加索的厭女傾向處理過於委婉外,在整體上都得到正面評價,而參觀者亦反應熱烈。這正正亦反映了現今美術館、藝術界及政治界對這位加泰隆尼亞藝術家的態度。藝術史學家和公眾對畢加索人格的此一方面早已頗為了解——方斯華絲.吉洛(Françoise Gilot)於1964年出版的《與畢加索的生活》(Vivre avec Picasso),以及阿里安娜.哈芬登(Ariana Huffington)於1989年出版的《畢加索:創造者與毀滅者》(Picasso, créateur et destructeur)便揭示了畢加索的私生活。然而到了2025年,畢加索的人氣依然不減。他的經典作品展覽持續吸引大批參觀者,並讓拍賣行再創新紀錄,縱然美術館對其人格的描繪仍嫌不足。

畢加索將自己比喻為人身牛頭怪,凶猛而野性,支配著身邊的女性。而是次展覽的其中一幅展品便是《盲眼牛頭怪於星夜由瑪麗.泰蕾絲和鴿子引路》(Minotaure aveugle guidé par Marie-Thérèse au pigeon dans une nuit étoilée)。畢加索美術館前策展人Emilie Bouvard表示,我們不應再將他生命中的女性稱為「繆思」靈感女神。事實上,在這些女性中,有些人最終自殺,有些則精神崩潰。畢加索的第一位伴侶Fernande Olivier因為他的嫉妒而被迫放棄模特兒事業。之後,畢加索與Eva Gouel有過短暫的關係,然後他又與Olga Khokhlova結婚,這位舞者亦為了畢加索而犧牲自己的舞蹈事業。不過,他們的婚姻最終在不忠與抑鬱之中失敗告終。隨後,畢加索再與當時尚未成年的Marie-Thérèse Walter交往,並讓她受到性侵犯。與此同時,畢加索亦與攝影師 Dora Maar有了情感關係,畢加索操控著她,最終導致她精神崩潰。方斯華絲.吉洛(Françoise Gilot)是少數敢反抗畢加索的女性,但她亦表示其與畢加索的日常生活充滿了欺凌和對女性的歧視。畢加索的第二任妻子Jacqueline Roque對他有著過度的崇拜,並最後自殺離世。

於是,一條爭論已久的問題再次出現:我們是否應該將藝術家的個人品格與作品分開看待?就畢加索而言,其藝術和生活顯然無法分開,他的畫作本身就是理據——尤其是女性身體在他筆下常常悲鳴、扭曲、脫位甚至被肢解。在這方面,展覽策展人鄭道鍊便顯得比較大膽,他在多個展品的介紹中指出畢加索對其伴侶暴躁、粗暴、且支配慾強,並講述畢加索與伴侶間失衡的戀愛關係。本展覽亦揭示了畢加索對模特兒造成的傷痛,從而質疑他是否真是一位「傑出藝術家」。即使是以藝術為名,以男權支配女性和濫用權力均對他人有著毀滅性的負面影響。


Pablo Picasso, Portrait of Dora Maar, 1937,
Musée national Picasso-Paris ©Succession Picasso 2025.
Image: © GrandPalaisRmn (Musée national Picasso-Paris) / Mathieu Rabeau
巴勃羅.畢加索《多拉.瑪爾肖像》1937年 油彩布本
巴黎國立畢加索藝術館

接下來,我們便得面對一條棘手問題:到底是否要停止展出畢加索的作品?這可真是見仁見智。各大博物館大概也不會採取如此極端的做法。而在目前,也沒有人要求這樣做。然而重要的是我們應該正視其畫作背後的陰暗面。對Emilie Bouvard而言,畢加索除了大男人主義外,亦對事物和他人擁有激烈的佔有欲,並隨附著突發的痛苦情緒。他的作品勇敢地探問自我的原始層面與伴隨的暴力,同時也讓身邊的人感到心力交瘁。

從行為層面探索畢加索,其實是以另一角度,精準深入地認識這位藝術家。隨著人們日益重視女性遭受暴力的問題,畢加索勤奮多產的藝術家形象,難免會因為有人指控他對為其帶來靈感的女性施加操控和暴力,而受到損害。僅是聚焦於畢加索的才華和政治立場,已經不足以說明其作品豐富複雜的意義,以及當中的深層問題。以偏頗而過時的單一視角審視畢加索,便會忽視了當代的社會議題,並背離藝術的其中一個初衷——即質問大眾、引發省思。M+是次的展覽並沒有妖魔化,也沒有錯誤地以現今眼光批評屬於另一時代的人物,而是透過建設性的批判,重新塑造畢加索的人性形象。

 


 
 

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