LITTÉRATURE 文學

Texte : David Cordina

 
  Avant l’aube, marcher vers la mer
《天亮前往海邊走》
 
 

Pour celles et ceux qui fréquentent régulièrement le centre de Jordan de l’Alliance Française, le prénom d’Évangéline - et maintenant, son nom de plume, Man 文 Hoi 海 Lam 林 - ne vous est peut-être pas inconnu. Vous l’avez croisée lors d’un événement littéraire, ou bien, à l’accueil de la bibliothèque quand elle y travaillait, il y a quelques années. Aujourd’hui, cette autrice hongkongaise publie son premier livre aux éditions Post Script Cultural Collaboration à Hong Kong.《天亮前往海邊走》pour lequel, nous pourrions proposer cette traduction française : Avant l’aube, marcher vers la mer.

L’ouvrage, écrit en chinois traditionnel, n’a pas encore fait l’objet d’une traduction, ni en français ni en anglais. Pourtant, en parcourant les articles critiques, les notes de lecture de la maison d’éditions, les commentaires laudatifs des journalistes, écrivains ou encore universitaires, on devine une richesse littéraire difficile à cerner — mais immédiatement intrigante. C’est précisément cette promesse singulière qui nous a donné envie de la rencontrer, pour comprendre l’origine de ce premier livre, soutenu par un programme du gouvernement de Hong Kong dédié à la jeune création.


天亮前往海邊走, 2024, éditions PSCollabHK

Avec Man Hoi Lam, l’entretien navigue librement entre le français, l’anglais et le cantonais. Elle a séjourné à Lyon dans le cadre d’un échange universitaire, et sa maîtrise des langues reflète son aisance à passer d’un monde à l’autre, d’une culture à l’autre, tout comme son écriture. Dès que l’on tient son livre entre les mains, on perçoit le soin apporté à l’objet : qualité du papier, choix typographiques, mise en page élégante, choix réfléchi de plusieurs sources d’illustrations. Un livre pensé comme une œuvre à part entière.

D’après les premières lectures et les retours des médias, il s’agirait d’un recueil d’essais à dimension écologique. Une étiquette déroutante, tant le mot écologique semble, du moins par le filtre de la littérature française, peu habituel de prime abord dans les genres littéraires. Ce livre, dans sa genèse, prit d’abord la forme d’une chronique hebdomadaire, publiée en feuilleton dans un journal du week-end (Sunday Ming Pao). La rédaction avait offert à Man Hoi Lam une carte blanche : elle en fit une écriture des rivages, une cartographie intime de l’archipel hongkongais avec multiples lieux, promenades ou voyages à travers les zones littorales du territoire. Chaque texte est à la fois observation scientifique, méditation ethnographique, et introspection. Une écologie du regard, pourrait-on dire. Le mot écologique devient ici le fil conducteur d’une attention au vivant, au fragile, au mouvant.

De notre conversation, nous comprenons que marcher, c’est parfois tirer à soi le fil discret du temps, pour en extraire quelques éclats — bribes de lumière arrachées à l’ombre — et les projeter sur les lignes côtières de la ville. Écrire, c’est peut-être cela aussi : dans le jeu des reflets, dans la persistance des ombres, observer comment d’infimes existences se déploient, s’agrippent au flux, s’éloignent ou reviennent. En direction de la mer, des eaux, des zones intertidales, les îles de Hong Kong poursuivent leur chant premier, celui de l’évolution. Là où la lumière ne s’est pas encore posée, il est possible que les plaies douloureuses et récentes de l’Histoire soient encore bercées par la tendresse intacte des vagues...

Plus qu’un inventaire de paysages ou un carnet de promenades, ce recueil apporte un travail de mémoire sensible : l’autrice effleure, avec pudeur, les métamorphoses de sa ville natale, en les filtrant à travers ses souvenirs d’enfance et les tourments historiques qui traversent Hong Kong. Chaque promenade devient une tentative de retisser le lien entre les lieux et les récits, entre la nature et l’intime, entre l’histoire collective et l’expérience personnelle. Relus, réécrits, mûris, ces textes se sont peu à peu détachés du contexte journalistique pour se transformer en une forme littéraire plus dense, plus libre. À chaque mot, un grain de sable, une étoile de mer, un crabe échoué. Chaque fragment de texte devient un point dans une constellation intime avec une précision poétique.

Avant l’aube, marcher vers la mer est ainsi le fruit d’une traversée de territoires géographiques, certes, mais aussi de paysages intérieurs, de souvenirs flottants, de sensations fugitives. Le rivage est une promesse de voyage et l’ancre de l’inspiration. Et l’on se prend à espérer qu’une traduction permettra bientôt aux lecteurs anglophones et francophones de découvrir à leur tour cette écriture du seuil, discrète et puissante.

 


Les photographies sous-marines Waves collection de Martin Cheung - IG @martinpinhole - éditions PSCollabHK

對於經常出入香港法國文化協會佐敦中心的朋友而言,Évangéline這個名字或許並不陌生,其實她也有一個筆名——文海林。您可能曾在文學活動上見過她,又或者在她幾年前於圖書館工作的時候,在接待處與她相遇過。如今,這位香港作家推出了她的第一本書籍,由香港後話文字工作室出版,書名為《天亮前往海邊走》,若翻譯成法文,意思大概是:「Avant l’aube, marcher vers la mer。」

該書以繁體中文寫成,尚未被翻譯成法文或英文。不過,由各大評論、出版社的導讀文章,以及記者、其他作家和學者的好評之中,已可猜想到此作品有著豐富的文學性——雖然難以界定其類別,但卻令人即時被吸引。基於該作品的獨特性,我們決定訪問作者,以深入了解其創作緣起。此外,該書亦獲得香港政府一項青年創作計劃的資助。

我們與文海林的訪談以法、英、粵三語進行,並在三者之間自由轉換。文海林在大學時代曾到里昂交流,其優秀的語言能力反映出她能輕鬆地遊走在不同文化世界之間,就如其寫作一樣。只要拿起她的書,便可以感受到當中的細緻心思,無論是紙質、版面設計、排版和插圖都精挑細選,一絲不苟。就算只是書籍的實體本身,便宛然是一件特別作品。

根據首批讀者和媒體所述,這是一本涉獵到生態環境議題的散文集。這樣的標籤難免讓人感到困惑,因為在法文世界中,「生態環境」(écologique)一詞實在不常見於文學分類之中。本書的內容來自作者在《明報》星期日生活中每週刊出的定期專欄。當時《明報》給予了文海林自由發揮的空間,於是她便以海邊為主題寫作,細緻地描繪她在香港沿海漫游的旅程。每篇文章都結合了科學觀察、對人類文化的沉思與自我反省,可以說是一種「觀看的生態學」。「生態環境」(écologique)一詞的意思大概便是如此,代表著作者對經歷變遷的生物和脆弱環境的關懷。

從與文海林的對話中,我們體會到有一種散步——是隨著時間飄然流逝,巧妙自陰影中摘取片片光芒,並將其散落到香港的海岸線之上。而且有一種寫作——就在光影交錯之間,觀察微小的生命如何存續於潮汐起落,以及其如何離去、如何歸來。隨著作者的步伐,我們迎著大海、在不同水域與潮間帶漫步,細聽香港諸島頌唱的生態之歌。在黎明曙光尚未降臨之際,就讓波浪輕柔撫慰歷史中的新傷舊痕……
這本散文集不但記錄了作者漫步時的風景和旅程,也微妙地書寫出她對香港的細膩回憶和蛻變所感,中間往復交織著她的兒時逸事和香港的動蕩歷史。在每一趟漫步中,文海林都嘗試重新締結地點與故事、大自然與內心,以及集體歷史和個人經驗之間的連繫。這些文章經過反復閱讀和修改,逐漸跳脫報紙上的專欄框,化為更豐富自由的文學作品。當中的一字一句,細沙、海星、螃蟹……都構成內心夜空中的星宿,散發著精準的詩意光芒。

《天亮前往海邊走》描畫出一片地理風景,也繪寫了內心之中滿載回憶和瞬間感受的美妙景致。向著海邊出發,可以期待的是一場精彩旅程,讓我們的心靈得到啟發。 我們不禁期盼未來能有翻譯版本面世,讓英文與法文讀者也能閱讀此書中恰如其分卻觸動人心的精彩文字。

 


 
 

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